T 0225/99 () of 13.9.2000

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T022599.20000913
Date de la décision : 13 Septembre 2000
Numéro de l'affaire : T 0225/99
Numéro de la demande : 88400252.8
Classe de la CIB : B02C 21/00
B02C 23/12
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Procédé de broyage de matières minérales quelconques et installation pour la mise en oeuvre de ce procédé
Nom du demandeur : TECHNIP
Nom de l'opposant : F C B
KLÖCKNER-HUMBOLDT-DEUTZ AG
KRUPP POLYSIUS AG
Chambre : 3.2.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours a pour but de faire infirmer la décision intermédiaire datée du 29 janvier 1999 d'une division d'opposition de l'OEB, qui a rejeté les trois oppositions qui avaient été formées contre le brevet européen EP-B1-0 278 858.

Dans cette décision, la Division d'opposition avait établi que l'usage antérieur invoqué par les opposantes sur la base de documents référencés D4 faisait bien partie de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE, mais que, contrairement à l'opinion des opposantes, le contenu de cet usage antérieur ainsi que celui des autres documents de l'art antérieur cités par les opposantes et référencés D1 à D3 et D5 à D10 dans la liste suivante ne suffisait pas à dénier la nouveauté de l'objet des revendications, telles que modifiées durant la procédure, ni l'activité inventive impliquée par cet objet.

II. Liste des documents :

D1 : DE-A-1 757 093

D2 : DE-A-3 518 543

D3 : DE-B-1 016 542

D4 (usage antérieur): "Slag Grinding Plant-Flow-Sheet" du KHD Humboldt Wedag AG

D5 : EP-A-0 084 383

D6 : US-A-4 401 276

D7 : DE-A-2 708 053

D8 : DE-C-31 805

D9 : TAGGART "Handbook of mineral dressing", New York, John Wiley & Sons, 1953, pages 6-50.

D10 : K. HÖFFL "Zerkleinerungs- und Klassiermaschinen", pages 383 et 384, VEB Deutscher Verlag für Grundstoffindustrie, Leipzig, 1985.

III. L'opposante 03 - ci-après la requérante - a formé recours, payé la taxe afférente et déposé le mémoire de recours le 24 février 1999. Dans ce mémoire, elle a réitéré les objections d'absence de nouveauté au regard du contenu de D4 et d'activité inventive vis-à-vis des enseignements fournis par D1, D2, D3 et D5.

Par lettre datée du 25 juin 1999, la société titulaire du brevet - ci-après l'intimée - a argumenté que les objections soulevées n'étaient pas fondées.

IV. Suite à une notification de la Chambre de recours accompagnant l'invitation à une procédure orale, l'intimée a déposé le 13 juillet 2000 une revendication 1 légèrement modifiée.

Cette revendication 1 a le libellé suivant :

"1. Procédé de broyage de matières minérales quelconques, telles que par exemple du clinker de ciment et du type consistant d'une part à broyer de la matière en au moins deux étapes, à savoir une étape de broyage initiale par écrasement lent de la matière dans un premier broyeur (1) et une étape de broyage finale procédant d'une manière différente dans un broyeur final (11), d'autre part à séparer le produit issu de l'étape de broyage finale en une fraction de produit fini qui est extraite (via 15) et une fraction de produit grossier qui est recyclée (via 16) pour subir à nouveau au moins l'étape de broyage finale (en 11), caractérisé en ce qu'entre l'étape de broyage initiale et l'étape de broyage finale, on effectue au moins une étape de broyage intermédiaire par écrasement lent de la matière dans au moins un broyeur intermédiaire (6) sans extraction intermédiaire de produit fini entre les étapes initiale et finale de broyage et sans extraction de matière entre les étapes de broyage par écrasement lent de la matière, ladite fraction recyclée de produit grossier étant au moins en partie recyclée (via 16b) pour subir à nouveau l'étape de broyage intermédiaire (en 6)."

V. Les opposantes 01 et 02 ont fait savoir par courriers respectivement reçus le 21 avril 1999 et le 29. janvier 2000 qu'elles ne désiraient pas participer soit à la procédure en général, soit à la procédure orale.

La procédure orale devant la Chambre de recours et avec la participation de la requérante et de l'intimée a eu lieu le 13 septembre 2000.

VI. Durant cette procédure orale, la requérante n'a plus contesté la nouveauté de l'objet de la revendication 1, mais a présenté les arguments suivants à l'encontre de la présence d'une activité inventive impliquée par cet objet.

L'antériorité D2, tout comme le brevet attaqué, vise à améliorer le rendement de l'installation, et en particulier le rendement du broyeur final. Pour résoudre ce problème, cet art antérieur prévoit entre les étapes initiale et finale une étape de broyage intermédiaire, qui consiste à recycler la matière vers le broyeur initial à écrasement lent. La présente invention reprend le même principe pour sa solution, et seule la réalisation pratique diffère de celle selon D2, puisqu'un broyeur intermédiaire à écrasement lent est prévu, au lieu du recyclage enseigné par D2. Cette différence uniquement pratique ne peut impliquer une activité inventive, car ce sont là deux moyens équivalents comme cela ressort du brevet attaqué lui-même qui envisageait à l'origine ces deux possibilités de solution. En outre, l'effet technique obtenu est identique. L'homme du métier sait qu'à la sortie d'un broyeur à écrasement lent un ruban de plaquettes agglomérés est obtenu, composé d'une partie importante de fines et d'un reste de produit encore grossier. Il est évident de chercher à désagglomérer d'un côté les plaquettes agglomérées de fines et de l'autre côté les produits grossiers.

En plus, l'interposition de broyeurs intermédiaires est connue, comme cela ressort de D1. L'homme du métier qui part de D2, dont la figure 1 montre un broyeur initial à écrasement lent suivi d'un broyeur final à boulets, a toutes les raisons de considérer l'enseignement de D1, dont la figure 2 montre le principe de l'écrasement lent. Or, ce document enseigne aussi de prévoir plusieurs broyeurs à écrasement lent qui se suivent du fait qu'il est rare d'obtenir les fines voulues avec un seul passage dans un broyeur.

En conclusion, D2 enseigne déjà la solution de principe au problème posé et D1 en montre une réalisation pratique, qui correspond à celle revendiquée.

VII. L'intimée a défendu son brevet en faisant valoir ce qui suit :

L'équivalence entre la présente invention et le contenu de D2, mise en avant par la requérante, n'est pas fondée. En effet, dans le procédé selon D2, comme cela ressort de sa figure 4, le recyclage de la matière ne s'effectue qu'après une autre étape, qui est une étape de désagglomération des plaquettes. Dans le cas de la figure 1 de D2, le produit recyclé ne va pas directement au broyeur ; il est auparavant mélangé à de la matière fraîche, brute. Dire aussi qu'il y a équivalence entre une étape de recyclage et une étape de broyage intermédiaire n'est pas non plus correcte, car dans le deuxième cas, les deux broyeurs successifs à écrasement lent n'ont pas les mêmes réglages, ce qui n'est pas possible avec un recyclage. Enfin, les deux procédés ne sont pas équivalents, car les investissements ne sont pas les mêmes.

La combinaison de D2 avec D1 n'est pas non plus logique, car D1 exige des vitesses élevées des broyeurs de l'ordre de 10m/sec, alors qu'un écrasement lent ne dépassera pas 2m/sec. D1 donc ne concerne pas le broyage à écrasement lent. De plus, D1 dans le dernier paragraphe de sa description, conseille de remplacer le broyeur final à boulets par un autre type de broyeur, ce qui ne correspond pas à l'installation de D2.

VIII. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen n 0 278 858. L'intimée demande le rejet du recours et le maintien du brevet sur la base de sa requête déposée le 13 juillet 2000.

Les autres parties à la procédure - les opposantes 01 et 02. - n'ont pas formulé de requêtes.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. L'art antérieur le plus proche est représenté par le procédé selon l'antériorité D2, sur lequel est basé le préambule de la revendication 1. De la matière cassante, tel que du clinker de ciment, subit en premier une étape de broyage par écrasement lent de la matière dans un broyeur, dit "presse à rouleaux", travaillant à hautes pressions. Le produit sortant de ce broyeur initial se présente principalement sous la forme de plaquettes, dites aussi galettes, de fines agglomérées entre elles par la pression. Une deuxième étape est donc nécessaire pour désagglomérer ces galettes. Comme le montre D2, cette étape finale est réalisée dans un broyeur à boulets.

3. Le document D2 enseigne que c'est à la sortie de ce dernier broyeur que la finesse désirée du produit fini est obtenue, et qu'en conséquence il convient que ce broyeur ne soit pas soumis à des variations brutales provenant soit de la quantité de matière qui lui est fournie, soit de la composition de cette matière. La solution à ce problème éviterait que le rendement du broyeur final soit négativement affecté. Le but poursuivi par D2 consiste donc à améliorer le rendement du procédé comportant les deux étapes sus-indiquées.

Ce but correspond à celui du brevet en cause, que ce soit dans sa version originale ou dans celle délivrée.

4. La solution selon D2 consiste à renvoyer à l'alimentation de la première presse, c'est-à-dire celle qui broie par compression lente, une partie des matières déjà pré-broyés par cette presse. En page 7 de D2, deuxième moitié, il est expliqué que, grâce à ce recyclage de la matière, le broyage est amélioré et l'énergie totale consommée est réduite.

Partant de cette solution générale (fig. 1 et 3), D2 décrit ensuite plusieurs modes de réalisation, interposant par exemple directement à la sortie du broyeur initial soit un tamis (fig. 2), de manière à ce que les matières recyclées soient surtout composées de particules grossières, soit un pré-désagglomérateur (fig. 4). Aucune extraction intermédiaire de produit fini n'a lieu entre la première et la deuxième étape (cas des fig. 1, 2 et 3). Dans le mode de réalisation de la figure 4, le produit issu de la dernière étape de broyage est séparé en deux fractions, respectivement de particules fines et grossières, la fraction grossière étant renvoyée à l'alimentation du deuxième broyeur.

5. Le procédé selon la revendication 1 du brevet incriminé diffère principalement de cet art antérieur en ce que l'étape de broyage intermédiaire, au lieu d'être réalisée par un recyclage de la matière, est effectuée dans un broyeur intermédiaire à compression lente, et en ce qu'aucune extraction de matière n'a lieu entre les étapes de broyage par écrasement lent.

6. Un autre document, l'antériorité D1, enseigne cependant dans sa page 7 qu'il est rare que le degré de finesse recherchée soit obtenu par une seule étape de broyage par écrasement lent et qu'il est avantageux de prévoir plusieurs broyeurs fonctionnant de la même façon les uns après les autres.

La Chambre ne peut suivre l'opinion de l'intimée, qui a fait valoir qu'il ne s'agissait pas de broyage par écrasement lent, notamment à cause des vitesses élevées données des broyeurs. En effet, ce passage de la page 7 est immédiatement précédé de plusieurs pages qui se rapportent au procédé de broyage par écrasement lent, caractérisé notamment par la formation de lit de matière à la sortie du broyeur ("Gutbett" en allemand) obtenu par un écrasement de la matière à broyer sous des pressions élevées lors de son passage dans la fente entre les deux rouleaux du broyeur, cette fente ayant une largeur supérieure à celle des plus gros grains introduits.

Comme l'a souligné la requérante, la vitesse des rouleaux peut varier de façon sensible en fonction du type de matière à broyer. En outre, aucune définition de l'expression "par écrasement lent", et plus particulièrement aucune valeur concernant la vitesse des broyeurs, n'ont été fournies dans le brevet incriminé. Il n'y a donc pas lieu de restreindre l'interprétation de cette expression selon des critères non divulgués dans le brevet en cause, et dès lors que D1 décrit le principe de base de ce procédé, son enseignement s'applique au broyage par écrasement lent en général de la revendication 1 du brevet incriminé.

7. Sur la base du contenu de D2, l'homme du métier savait déjà que la solution du recyclage de la matière, qui permettait d'améliorer le rendement du procédé de broyage, obtenait ce résultat en ayant pour effet premier, celui d'améliorer le degré de finesse de la matière broyée par des cycles successifs de broyage. Il a par ailleurs tout intérêt à considérer le document D1, qui non seulement vise aussi à améliorer le rendement d'un procédé de broyage à deux étapes, mais aussi se rapporte au procédé de broyage par écrasement lent. Il ne peut alors qu'être frappé par le passage mentionné ci-dessus de la page 7 de D1, qui lui révèle un moyen équivalent au recyclage dans le cadre général d'un procédé de broyage par écrasement lent. Comme par ailleurs D1 précise bien que les broyeurs se suivent, il s'ensuit qu'aucune extraction de produit n'a lieu entre ces broyeurs. De ce fait, la combinaison des enseignements de D2 et D1 conduit l'homme du métier à la solution selon la revendication 1 du brevet incriminé.

8. Comme il a été vu ci-dessus au point 4, le document D2, selon les modes de réalisation qu'il décrit, prévoit dans un cas aucune extraction intermédiaire de produit fini entre la première et deuxième étape et dans un autre cas le retour de la fraction grossière restante à l'alimentation du broyeur final, après séparation à la sortie de ce dernier. Ces deux mesures sont donc connues en soi et sont indépendantes l'une de l'autre dans leurs effets. Il n'y a donc aucune activité inventive à les appliquer toutes deux au même procédé, comme c'est le cas du procédé selon la revendication 1 du brevet incriminé, d'autant que ce brevet ne révèle aucun effet particulier et surprenant qui résulterait de ces mesures.

9. L'intimée a attiré l'attention de la Chambre sur le fait que D1, en fin de sa description, souligne que le procédé, objet de ce document, pouvait avantageusement remplacer divers procédés de broyage connus, y compris ceux comprenant des broyeurs à boulets ou à marteaux, et qu'en outre la page 6 de D1 enseignait que la vitesse élevée des broyeurs conduisait à un éclatement spontané des plaquettes par échappement de l'air comprimé qu'elles contiennent. L'intimée a aussi fait valoir que la figure 4 du document D2 montre un flux de matières comprimées issues du broyeur à écrasement lent, qui traverse ensuite un tambour de désagglomération avant d'être recyclé. L'intimée a déduit de ces données que l'homme du métier était incité à éviter la formation de plaquettes, si bien qu'il était détourné de rechercher des solutions qui risquaient au contraire d'amplifier ce phénomène.

Ces objections ne sont pas pertinentes, dans le cas présent où l'homme du métier part du procédé connu de D2, dans lequel - avec ou sans pré-désagglomérateur (cf. le tambour de désagglomération mentionné par l'intimée) - un tambour à boulets est toujours utilisé dans la phase finale et un recyclage de la matière est enseigné. Avec D1, l'homme du métier est simplement incité à remplacer ce recyclage par un broyeur intermédiaire. Les documents originaux du brevet incriminé eux aussi montraient qu'il y avait équivalence entre un recyclage et l'emploi d'un broyeur additionnel, dans le cas d'un broyage à écrasement lent.

10. Pour toutes ces raisons, le procédé selon la revendication 1 du brevet attaqué n'implique pas d'activité inventive (articles 52 et 56 CBE). De ce fait, le brevet ne peut être maintenu sous cette forme, puisqu'un de ces éléments ne satisfait pas aux exigences de la CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. Le brevet est révoqué.

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