T 0593/98 () of 8.2.2000

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T059398.20000208
Date de la décision : 08 Fevrier 2000
Numéro de l'affaire : T 0593/98
Numéro de la demande : 93922320.2
Classe de la CIB : F16D 65/16
F16D 55/14
F16D 55/46
F16H 25/18
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Dispositif perfectionné de serrage à plateau tournant
Nom du demandeur : Bosch Systèmes de Freinage
Nom de l'opposant : Lucas Industries Plc
Chambre : 3.2.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive (non)
Novelty (no)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La requérante est titulaire du brevet européen n 0 633 987 (n de dépôt européen : 93 922 320.2 ; n de dépôt international : PCT/FR 93/00 233).

La revendication 1 du brevet se lit comme suit :

"Dispositif de serrage comprenant deux plateaux (1,2) sensiblement parallèles dont l'un au moins est susceptible d'être entraîné dans un mouvement de rotation autour d'un axe (6) perpendiculaire à sa surface, une pluralité de cavités de guidage (13, 14, 15) creusées dans l'un au moins de ces plateaux à distance de l'axe et une pluralité de billes correspondantes (3, 4, 5) engagées dans les cavités et enserrées entre les deux plateaux, chaque cavité de guidage formant came et offrant une surface d'appui (7) qui s'élève de façon monotone, en parcourant un angle non nul du mouvement de rotation, depuis une partie (7a) de profondeur maximale jusqu'à la surface (1a) du plateau, caractérisé en ce que la partie (7a) de profondeur maximale de cette cavité forme pour la bille correspondante un logement qui la maintient dans une position unique déterminée, et en ce que cette cavité comprend, dans une partie de moindre profondeur, une rampe (7b) qui intercepte le logement en une pluralité de points d'intersection (7c) au voisinage immédiat desquels d'une part la bille forme avec le logement une tangente de première pente et au voisinage desquels d'autre part la rampe présente une seconde pente sensiblement plus faible que la première pente, lesdits points d'intersection se trouvant ainsi sur une discontinuité de pente."

II. L'intimée a fait opposition et requis la révocation complète du brevet européen.

Pour en contester la brevetabilité, elle a notamment opposé le document :

D3 : GB-A-1 343 546.

III. Par décision remise à la poste le 8 mai 1998, la Division d'opposition a révoqué le brevet européen en cause.

Elle a estimé que l'objet de la revendication 1 ne présentait pas la nouveauté requise par rapport au document D3.

IV. Par lettre reçue le 2 juin 1998, la requérante (titulaire du brevet) a formé un recours contre cette décision, réglé la taxe correspondante et déposé un mémoire dûment motivé.

V. En réplique au mémoire de recours, l'intimée (opposante) a cité pour la première fois le document :

D6 : DE-A-2 229 481.

Elle a fait valoir que l'objet de la revendication 1 ne présentait pas la nouveauté exigée vis-à-vis de ce document.

VI. Une audience s'est tenue devant la Chambre le 8 février 2000.

La requérante (titulaire du brevet) a demandé l'annulation de la décision attaquée et,

- à titre principal, le maintien du brevet européen tel que délivré ;

- à titre subsidiaire, le maintien du brevet européen sur la base de la revendication 1 déposée au cours de la procédure orale.

La revendication 1 selon la requête subsidiaire reprend toutes les caractéristiques de la revendication selon la requête principale ; elle précise que le dispositif de serrage revendiqué est un "dispositif de commande de serrage de frein à main de véhicule automobile".

VII. Au soutien de son action, la requérante développe pour l'essentiel l'argumentation suivante :

i) il ressort du contenu du brevet européen en cause que les cavités de guidage revendiquées assurent un guidage axial et radial des billes. C'est ainsi que la partie de profondeur maximale de la cavité de guidage revendiquée forme pour la bille correspondante un logement qui la maintient dans une position unique déterminée. Ce n'est nullement le cas du dispositif de serrage faisant l'objet des figures 20 à 31 du document D6. En effet, l'un des deux plateaux comporte des surfaces inclinées ou rampes reliées par une arête à des évidements semi-cylindriques. De tels évidements semi-cylindriques n'assurent pas le guidage radial de la bille et, par conséquent, son maintien dans une position unique déterminée. De la même façon, les rampes associées aux évidements semi-cylindriques n'assurent qu'un guidage axial, le guidage radial étant assuré par les calottes sphériques ménagées sur l'autre plateau. Il est vrai que les dessins et le texte correspondant du document D6 sont contradictoires puisque les évidements semi-cylindriques représentés sont décrits comme étant semi-circulaires. Mais il s'agit là d'une indication erronnée. De toute façon, en cas de contradiction, il convient de tenir compte soit uniquement des figures, soit uniquement du texte de la description. Si la description est la seule à être prise en consideration, alors l'objet de la revendication 1 est nouveau puisque la ligne de discontinuité ou arête dessinée notamment à la figure 29 n'est pas décrite dans la texte. En revanche, si les figures sont les seules à être prises en considération, alors la bille a pour logement une cavité semi-cylindrique qui ne peut pas la maintenir dans une seule position. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 ne se retrouve pas tout entier, ni dans les dessins, ni dans la description du document de brevet D6. Il satisfait par conséquent à l'exigence de nouveauté.

ii) En partant de l'état de la technique le plus proche illustré par le document D3, le problème posé et résolu dans le brevet européen en cause est celui à la fois de simplifier la fabrication des cavités de guidage, en supprimant une étape d'usinage pour arrondir la ligne de discontinuité ou arête et, pour une cavité de longueur déterminée, d'augmenter la longueur de la seconde rampe utilisée pour le serrage proprement dit et, par suite, d'accroître le couple de serrage. L'homme du métier désirant apporter des perfectionnements au frein de véhicule automobile faisant l'objet du document D3 ne saurait s'inspirer du document D6 qui a pour objet des freins pour bicyclette peu performants. Au surplus, le document D6 comporte trois modes de réalisation. Seul le second mode de réalisation des figures 20 à 31 montre une ligne de discontinuité de pente ou arête entre la rampe et la cavité semi-cylindrique. Cette ligne de discontinuité de pente n'est nullement décrite dans le texte correspondant de la description. L'homme du métier ne pouvait pas en déduire que cet élément dessiné mais non décrit permettait de résoudre le problème posé dans le brevet européen en cause.

Il s'ensuit que la solution revendiquée ne saurait résulter à l'évidence de la combinaison de l'état de la technique le plus proche illustré par le document D3 et de l'enseignement du document D6.

VIII. L'intimée sollicite le rejet du recours formé.

Elle a contesté l'argumentation de la requérante et exposé de façon détaillée que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale ne présentait pas la nouveauté requise par rapport au document D6 et que, même si la nouveauté était reconnue, l'objet de la revendication 1 selon les requêtes principale ou subsidiaire résultait à l'évidence de la combinaison des documents D3 et D6.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Nouveauté

2.1. Le document D3 décrit un dispositif de serrage de frein à main de véhicule automobile comprenant deux plateaux sensiblement parallèles dont l'un est susceptible d'être entraîné en rotation.

Il est prévu une pluralité de cavités de guidage creusées dans l'un au moins de ces plateaux et une pluralité de billes correspondantes engagées dans les cavités et enserrées entre les deux plateaux. Chaque cavité de guidage forme dans sa partie de plus grande profondeur une rampe de forte pente qui se prolonge par une rampe de plus faible pente. Il est dit que la première rampe de forte pente est destinée à rattraper les jeux mécaniques alors que la seconde rampe de plus faible pente sert au serrage du frein.

Le dispositif de serrage revendiqué comprend une rampe qui intercepte le logement de bille par une ligne de discontinuité ou arête. Une telle caractéristique ne se retrouve nullement dans le dispositif de serrage connu faisant l'objet du document D3 : entre la rampe de forte pente formée par le logement de la bille et la rampe de faible pente est prévue une zone de transition arrondie.

Il s'ensuit que le dispositif de serrage revendiqué ne se retrouve pas tout entier dans le document D3 et présente, par conséquent, la nouveauté requise par rapport à cette antériorité.

2.2. Le document D6 a été cité pour la première fois en recours. Bien que produit tardivement, la Chambre a décidé de le prendre en considération en vertu de l'article 114(1) CBE en raison de sa pertinence.

Contrairement aux assertions de l'intimée, le dispositif de serrage selon la revendication 1 de la requête principale ne se retrouve pas intégralement dans le mode de réalisation des figures 20 à 31 du document D6. Si l'on se réfère en particulier à la figure 29, on observe que l'un des deux plateaux de serrage comprend une rampe qui intercepte le logement de la bille par une ligne de discontinuité de pente ou arête. Cependant, le logement de bille représenté a la forme d'un demi-cylindre ; il ne peut donc pas assurer à lui seul le guidage radial de la bille et par suite son maintien dans une seule position.

L'intimée a fait valoir à cet égard que le logement semi-cylindrique était décrit dans le texte de la description comme étant semi-circulaire. Le document D6 décrirait selon elle deux alternatives ; dans l'une le logement de bille serait semi-cylindrique et dans l'autre le logement de bille serait semi-circulaire c'est à dire comme celui décrit dans le document D3.

Un tel raisonnement ne saurait être suivi. En effet, c'est le même logement de bille qui est dessiné sous forme de demi-cylindre et qui est décrit dans le texte comme étant semi-circulaire. Il n'y a donc pas divulgation de deux alternatives mais simplement contradiction entre les dessins et la partie correspondante de la description du document D6.

Dans le cas d'espèce, il apparait raisonnable de retenir soit la description, soit les dessins du document D6. Si seule la description est prise en considération, l'objet de la revendication 1 selon la requête principale est nouveau puisque la ligne de discontinuité de pente ou arête est dessinée mais non décrite. En revanche, si seuls les dessins sont pris en considération, alors l'objet de la revendication 1 selon la requête principale est aussi nouveau puisque le logement de bille est representé par un demi-cylindre qui n'est pas apte à maintenir la bille dans une seule position.

Force est donc de constater que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale est nouveau par rapport au document D6.

Cette conclusion s'étend également à l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire qui contient toutes les caractéristiques de la revendication 1 de la requête principale et qui précise en outre que le dispositif de serrage est celui d'un frein à main de véhicule automobile.

3. Activité inventive (requête principale)

3.1. Les deux parties ont été d'accord pour considérer que c'était le document D3 qui constituait l'état de la technique le plus proche. Ainsi qu'il a été exposé au point 2 ci-dessus, chaque cavité de guidage forme dans sa partie de profondeur maximale une rampe de forte pente se raccordant à une rampe de plus faible pente, la zone de raccordement entre ces deux rampes étant de forme arrondie. Il est précisé dans la description du document D3 que la rampe de forte pente est utilisée pour rattraper les jeux mécaniques tandis que la rampe de plus faible pente sert au serrage du frein. La titulaire du brevet a considéré comme un inconvénient la présence d'une zone de raccordement arrondie entre ces deux rampes. A l'audience, elle a estimé que les cavités de guidage du document D3 nécessitaient une étape supplémentaire d'usinage pour arrondir l'arête entre les deux rampes. Au surplus, il était souhaitable d'améliorer un tel système de façon que pour une même force d'entrée et une même course, on puisse obtenir une force de serrage sensiblement supérieure.

Par conséquent, en partant de cet état de la technique le plus proche, le problème posé est celui de simplifier l'usinage des cavités de guidage et celui aussi de permettre l'application d'une force de serrage qui soit sensiblement supérieure à celle qu'autorise le dispositif connu.

Ce problème est pour l'essentiel résolu en ce que les deux rampes de la cavité de guidage se raccordent par une ligne de discontinuité de pente ou arête.

3.2. Le document D6 se rapporte à des freins à disque pour véhicule et concerne notamment des freins à disque pour bicyclette (voir paragraphe 1 de la page 1 du document D6). Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, l'homme du métier est naturellement amené à consulter le document D6 puisque d'une part, ce dernier concerne, en général, des freins à disque pour véhicule, et que, d'autre part, le dispositif de serrage qui y est décrit est du même genre que celui qu'il cherche à perfectionner : il comporte en effet deux plateaux sensiblement parallèles dont l'un au moins est susceptible d'être entraîné dans un mouvement de rotation autour d'un axe ; une pluralité de cavités de guidage creusées dans l'un des deux plateaux et une pluralité de billes engagées dans des cavités et enserrées entre les deux plateaux. Il est vrai que, dans le mode de réalisation des figures 20 à 31, la cavité semi-cylindrique et sa rampe associée n'assurent que le guidage axial de la bille ; toutefois, le guidage radial est assuré non pas par ces cavités et rampes associées mais par des calottes sphériques ménagées sur la paroi correspondante de l'autre plateau. Force est donc de constater que le mode de fonctionnement du dispositif de serrage faisant l'objet des figures 20 à 31 du document D6 est en tout point comparable à celui du dispositif de serrage connu décrit dans le document D3.

Ainsi qu'il est bien visible sur les figures 27 à 29 et en particulier sur la figure 29, chaque cavité forme dans sa partie de plus grande profondeur une rampe de forte pente qui se raccorde à une rampe de plus faible pente par une ligne de discontinuité de pente ou arête. Cette ligne de discontinuité représentée sur les figures 27 à 29 n'est certes pas décrite dans le texte, mais l'homme du métier cherchant à simplifier la réalisation des cavités de guidage du document D3 peut immédiatement comprendre que la présence d'une arête vive permet d'éviter une opération d'usinage consistant justement à arrondir une telle arête. L'homme du métier qui est également un spécialiste des freins à disque et qui connaît le rôle de chacune des deux rampes peut aussi en déduire immédiatement que la suppression de l'arrondi et le maintien d'une arête vive permet, toutes proportions gardées, d'allonger la seconde rampe qui assure le serrage du frein et, par suite, d'accroître l'effort de serrage produit par rapport au dispositif connu.

Selon la jurisprudence bien établie des chambres de recours, il convient certes, dans l'appréciation de l'activité inventive, de rechercher si l'état de la technique donne une indication à l'homme du métier pouvant l'amener à appliquer une mesure connue au cas analysé en vue de résoudre le problème posé. Mais, cette indication n'a pas à être donnée expressément ; il suffit, comme c'est le cas en l'espèce, que l'homme du métier, en examinant les dessins d'un document puisse en déduire que la caractéristique de forme représentée permet de résoudre tout ou partie du problème posé.

La requérante a tenté de faire valoir l'existence d'un préjugé de l'homme du métier à l'égard de cette arête de raccordement entre deux pentes et a exposé que l'opposante elle-même avait soutenu au cours de la procédure d'opposition que l'invention revendiquée n'était pas réalisable par l'homme du métier et, par suite, ne satisfaisait pas à l'article 83 CBE. Un motif d'opposition fondé sur l'article 83 n'est pas suffisant pour démontrer l'existence d'un prétendu préjugé, c'est-à-dire d'un avis largement répandu parmi les experts dans le domaine technique considéré.

Par ces motifs, l'objet de la revendication 1 selon la requête principale ne présente pas l'activité inventive requise par l'article 56 CBE. Il y a donc lieu de rejeter la requête principale.

4. Activité inventive (requête subsidiaire)

La revendication 1 selon la requête subsidiaire contient toutes les caractéristiques de la revendication 1 selon la requête principale et précise en outre dans son intitulé que le dispositif revendiqué est un "dispositif de commande de serrage de frein à main de véhicule automobile".

Le document le plus proche D3 concerne également un dispositif de commande de serrage de frein à main de véhicule automobile. Au surplus, ainsi qu'il a été montré plus haut, le document D6 concerne en général des freins à disque pour véhicules et plus particuliérement des freins pour bicyclettes qui sont certes moins efficaces que les freins de véhicules automobiles ; mais les freins à main pour véhicules automobiles, qui sont actionnés une fois que le véhicule est arrêté, sont aussi prévus pour exercer un couple de freinage bien moins élevé que celui des freins classiques conçus pour ralentir ou arrêter des véhicules automobiles roulant à vitesse élevée. Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, le fait que le document D6 reléve plus particuliérement du domaine des freins pour bicyclette ne pouvait nullement amener l'homme du métier à renoncer à l'enseignement de cet état de la technique, et ce d'autant plus que l'invention ne porte pas sur les freins proprement dits mais sur la commande de serrage des freins.

Compte tenu de ce qui précédé et compte tenu aussi des motifs exposées du point 3 ci-dessus, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire résulte à l'évidence de la combinaison des documents D3 et D6. Il ne présente donc pas l'activité inventive requise (article 56 CBE).

Il y a lieu par conséquent de rejeter également la requête subsidiaire.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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