T 0398/98 (Silice/RHODIA) of 13.12.2000

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T039898.20001213
Date de la décision : 13 Décembre 2000
Numéro de l'affaire : T 0398/98
Numéro de la demande : 90401818.1
Classe de la CIB : C01B 33/193
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Silice à porosité contrôlée et son procédé d'obtention
Nom du demandeur : RHODIA CHIMIE
Nom de l'opposant : Degussa-Hüls Aktiengesellschaft Patente und Marken Standort
Marl
Chambre : 3.3.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 111(1)
Mot-clé : Nouveauté (oui) - Pas de preuve que les silices connues possèdent des caractéristiques tombant inévitablement dans les plages revendiquées
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0495/03

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n 90 401 818.1 a donné lieu à la délivrance du brevet n 407 262 sur la base de 19. revendications pour les Etats Contractants suivants: AT, BE, CH, DE, DK, FR, GB, GR, IT, LI, LU, NL, SE et 18 revendications pour l'Espagne. Les revendications 1 et 9 pour les Etats Contractants autres que l'Espagne et la revendication 1 pour l'Espagne ont les libellés suivants :

"1. Silice précipitée présentant les caractéristiques suivantes :

- surface spécifique B.E.T. comprise entre 20 et 300 m2/g,

- surface spécifique C.T.A.B. comprise entre 10 et 200 m2/g

- prise d'huile (DBP) comprise entre 80 et 400 cm3/100g

- volume poreux de 1 à 10 cm3/g,

- diamètre moyen de pores variant entre 10 et 50 nm."

"9. Procédé de préparation de la silice décrite dans l'une des revendications 1 à 8 caractérisé par le fait qu'il consiste à ajouter simultanément un silicate et un acide dans une dispersion colloïdale de silice, ce qui conduit à une suspension de silice; à abaisser le pH de telle sorte qu'il se situe entre 3 et 7 ; à séparer la silice et à la soumettre à un séchage."

"1. Procédé de préparation d'une silice précipitée présentant les caractéristiques suivantes :

- surface spécifique B.E.T. comprise entre 20 et 300 m2/g, - surface spécifique C.T.A.B. comprise entre 10 et 200 m2/g

- prise d'huile (DBP) comprise entre 80 et 400 cm3/100g

- volume poreux de 1 à 10 cm3/g,

- diamètre moyen de pores variant entre 10 et 50 nm,

caractérisé par le fait qu'il consiste à ajouter simultanément un silicate et un acide dans une dispersion colloïdale de silice, ce qui conduit à une suspension de silice; à abaisser le pH de telle sorte qu'il se situe entre 3 et 7 ; à séparer la silice et à la soumettre à un séchage."

II. L'intimée (opposante) a formé opposition au brevet et requis sa révocation pour manque de nouveauté et d'activité inventive. Elle s'est appuyée sur les documents suivants pendant la procédure d'opposition :

D1 : EP-A-0 396 460

D2 : EP-A-0 396 459

D3 : DE-A-2 342 713

D4 : DE-B-1 467 019

D5 : Ullmann's Encyclopedia of Industrial Chemistry, vol. A5, 5ième édition, 1986, pages 353-355.

III. La Division d'opposition a révoqué le brevet. Dans la décision postée le 16 janvier 1998, elle a considéré que la silice et le procédé de préparation selon les revendications 1 et 9 du brevet manquaient de nouveauté par rapport à D1 ou D2. Ces documents ne mentionnaient pas explicitement le diamètre moyen de pores, cependant aucun test n'avait été effectué pour prouver que le diamètre moyen de pores de la silice revendiquée différait de celui des silices de l'exemple 2 de D1 ou des exemples 1 à 3 de D2. D'après la décision, la "stabilisation" du pH à une valeur entre 3 et 7 dans les exemples du brevet était assimilable à un mûrissement. Par conséquent, la différence entre le libellé du brevet et celui de D1/D2 ne reflétait pas une différence évidente entre les procédés. Les deux étapes de mûrissement de l'exemple 2 de D1 ayant été effectuées dans le domaine de pH requis par le brevet et fournissant des valeurs supérieures de surface spécifique et de volume poreux, le produit résultant devait, de façon inhérente, avoir une distribution de pores telle que revendiquée dans le brevet.

IV. La requérante a formé un recours contre cette décision. Elle a déposé trois jeux de revendications modifiées le 13. novembre 2000 en tant que requêtes subsidiaires S1 à S3. Une procédure orale a eu lieu le 13 décembre 2000. Dès le commencement de la procédure orale, la requérante a indiqué qu'elle abandonnait les revendications selon la requête principale et que les revendications selon la requête subsidiaire S1 du 13 novembre 2000 devenaient les revendications de la requête principale. La revendication 1 de la requête principale S1 pour les Etats Contractants AT, BE, CH, DE, DK, FR, GB, GR, IT, LI, LU, NL, SE et la revendication 1 pour l'Espagne diffèrent des revendications telles que délivrées uniquement par la limite supérieure du diamètre moyen de pores qui est de "40 nm" au lieu de 50 nm.

V. La requérante a présenté notamment les arguments suivants :

La modification dans la revendication 1 de la requête principale satisfaisait aux conditions de l'article 123(2) et (3) CBE. La valeur de 40 nm était mentionnée dans l'exemple 3 de la demande telle que déposée. Il s'agissait de la réduction d'une plage de valeurs à une valeur indiquée dans la demande telle que déposée et non d'une sélection. La plage modifiée 10-40 nm n'était pas nouvelle par rapport au contenu de la demande telle que déposée et ne fixait pas automatiquement tous les autres paramètres de l'invention.

La Division d'opposition avait ignoré le principe essentiel selon lequel la charge de la preuve incombait à l'opposant. Ce dernier n'avait fourni aucun résultat de tests contrairement à la requérante qui avait montré que le diamètre moyen des pores de la silice selon l'exemple 1 de D1 était en dehors de la plage revendiquée. Le procédé de préparation des silices selon l'invention différait du procédé selon D1 ou D2 par l'absence d'un double mûrissement. La stabilisation du pH du mélange réactionnel à la valeur 5 par addition d'acide dans les exemples du brevet n'était pas un mûrissement. Même si elle était considérée comme un mûrissement, le procédé du brevet litigieux différerait encore de celui de D1 et D2 par la deuxième étape de mûrissement. Le fait que le volume poreux dans l'exemple 3 du brevet était semblable à celui indiqué dans l'exemple 2 de D1 ne signifiait pas que ces deux silices avaient un diamètre moyen de pores également semblable. Deux silices ayant des volumes poreux identiques pouvaient présenter des diamètres moyens de pores très différents par exemple si l'une des silices contenait plus de pores. La mise en oeuvre de procédés de préparation différents et le résultat du test montraient qu'il n'y avait aucune certitude quant au fait que les produits de D1 et D2 présenteraient un diamètre moyen de pores compris dans l'intervalle revendiqué.

La silice revendiquée était aussi nouvelle par rapport aux silices de D3. Ce document ne divulguait que la surface BET de la silice obtenue et les procédés de préparation décrits dans l'exemple 2 de D3 et dans les exemples 1-3 du brevet présentaient des différences fondamentales. En particulier le silicate de sodium du pied de cuve initial avait une concentration beaucoup plus élevée dans l'exemple 2 de D3 que dans les exemples 1-3 du brevet et il était porté à une température différente de celle desdits exemples. De plus, D3 ne précisait pas le type de séchage utilisé alors que dans le brevet la silice était séchée par atomisation.

VI. L'intimée a présenté les arguments suivants pendant la procédure de recours :

Les modifications dans la revendication selon la requête principale ne remplissaient pas les conditions de l'article 123(2) CBE. L'intervalle 10 à 40 nm n'était pas divulgué dans la demande initiale et l'exemple 3 n'indiquait qu'une seule valeur.

La seule différence entre la revendication 1 et l'enseignement de D1 ou D2 était le diamètre de pores. Cependant seulement des diamètres de pores de 1 à 25 nm étaient mesurables avec le porosimètre à mercure. Dans D5 le domaine de 1-25 nm était indiqué comme domaine de mesure préféré. Les différences dans les procédés de préparation de l'exemple 2 de D1 et de l'exemple 3 du brevet étaient insignifiantes. Les paramètres concernant la surface spécifique étaient identiques ou similaires, de même que les volumes poreux. Pour un volume poreux de 3,3 à 3,6 cm3/g le diamètre moyen de pores variait de 35 et 40 nm dans le brevet et, par conséquent, la silice de l'exemple 2 de D1 dont le volume de pores était de 3,2 cm3/g devait avoir un diamètre de pores tombant dans la plage revendiquée. Les mêmes remarques s'appliquaient à l'exemple 2 de D2 comparé à l'exemple 3 du brevet. Dans l'étape de mûrissement selon D1 et D2 des mesures étaient prises pour maintenir le pH à une certaine valeur. Etant donné que dans le brevet la stabilisation du pH à une certaine valeur ne pouvait être obtenue instantanément dans le cas de volumes importants, il n'existait aucune différence importante dans les procédés de préparation et il en était de même des produits résultant de ces procédés.

Le procédé de préparation de la silice selon D3, en particulier selon l'exemple 2 de D3 était identique au procédé du brevet litigieux, en particulier au procédé selon la revendication 9. La précipitation avait lieu à un pH de 9 et l'addition d'acide était effectuée jusqu'à l'obtention d'un pH de 6. Les procédés étant identiques, il en était de même des produits obtenus par ces procédés.

VII. La requérante a sollicité l'annulation de la décision de la Division d'opposition et le maintien du brevet sur la base de l'un quelconque des jeux de revendications déposés le 13 novembre 2000 à titre de requêtes subsidiaires 1 à 3, dans leur ordre numérique. L'intimée a requis le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Requête principale (jeu de revendications S1)

Les revendications modifiées satisfont aux dispositions de l'article 123(2)(3) CBE. La valeur limite supérieure de 50 nm pour le diamètre moyen de pores a été remplacée par 40 nm, restreignant ainsi la plage de variation à 10-40 nm dans la revendication 1 pour les Etats Contractants autres que l'Espagne et dans la revendication 1 pour l'Espagne. La demande initiale divulgue un intervalle de 10 à 50 nm pour la variation du diamètre moyen de pores en combinaison avec les intervalles indiqués dans la revendication 1 pour les autres paramètres (voir page 15, revendication 1 initiale). Cet intervalle englobe la plage 10-40 nm dont la valeur supérieure est indiquée dans l'exemple 3 de la demande telle que déposée et dans l'exemple 3 du brevet. De plus, selon la description initiale et le brevet contesté la taille moyenne des pores est relativement constante dans une large gamme de surface spécifique, et ceci est mis en évidence par les exemples du brevet (voir demande initiale : page 7, lignes 18-21 ; exemples ; brevet : page 5, lignes 51-55). Il ressort aussi directement et de façon univoque des exemples de la demande initiale et du brevet que le diamètre moyen de pores ne fixe pas automatiquement la prise d'huile DBP à une valeur spécifique puisque les silices des exemples 1 et 2 dont le diamètre moyen de pores est de 35. nm, présentent une prise d'huile DBP de 320 m2/100g et 200 m2/100g respectivement. Les exemples de la demande initiale et du brevet montrent aussi que deux silices ayant le même diamètre moyen de pores peuvent avoir des valeurs différentes de volume poreux total. Dans ces circonstances, la Chambre considère que la valeur de 40. nm divulguée dans l'exemple 3 de la demande initiale et du brevet n'implique pas automatiquement pour les autres paramètres (surface BET, surface CTAB, prise d'huile DBP et volume poreux total) les valeurs indiquées dans ledit exemple, comme souligné par la requérante. Par conséquent, la modification apportée à la revendication 1 pour l'Espagne et à la revendication 1 pour les autres Etats Contractants est considérée comme dérivant directement et sans équivoque du contenu de la demande initiale. En outre ladite modification limite manifestement l'étendue de protection du brevet délivré.

3. D1 décrit dans les exemples 1 et 2 deux silices précipitées ayant des valeurs de surface BET, surface CTAB, prise d'huile DBP, et volume poreux qui tombent dans les plages définies dans la revendication 1. Toutefois, D1 ne divulgue pas le diamètre moyen de pores de ces silices. D'après le test présenté par la requérante, la reproduction de l'exemple 1 de D1 conduit à une silice dont le diamètre moyen de pores est de 64. nm, c'est-à-dire une valeur plus élevée que la limite supérieure indiquée dans la revendication 1. L'intimée n'a pas contesté ce résultat et n'a pas maintenu son objection de manque de nouveauté par rapport à l'exemple 1 de D1 lors de la procédure orale. Dans ces circonstances, la Chambre accepte aussi le résultat du test malgré l'absence de données pour les autres caractéristiques.

3.1. En ce qui concerne l'exemple 2 de D1, l'intimée a affirmé que le diamètre moyen de pores tombait dans l'intervalle revendiqué (10-40 nm). Bien que la charge de la preuve incombe à l'intimée, celle-ci n'a fourni aucune preuve pour montrer que la reproduction de l'exemple 2 de D1 conduisait effectivement à un diamètre moyen de pores compris dans l'intervalle 10-40 nm.

3.2. Les arguments de l'intimée selon lesquels seulement, ou préférentiellement, des diamètres de pores de 1 à 25 nm étaient mesurés par la méthode de porosimétrie au mercure ne peuvent être acceptés par la Chambre car ils sont en contradiction avec l'enseignement de D5. En effet, il ressort de D5 que la répartition des dimensions de pores pour des matériaux contenant des mésopores et des macropores, c'est-à-dire des pores ayant des rayons de 1-25 nm et > 25 nm (voir page 354, 2ième paragraphe) est déterminée à l'aide d'un porosimètre à mercure. La méthode au porosimètre à mercure n'est donc pas limitée à la mesure de la répartition dimensionnelle des pores ayant des diamètres allant de 1-25 nm ou 2-50 nm. Bien que cette méthode permette de mesurer des diamètres de pores allant de 10 à 40 nm, des pores de diamètre plus faibles et beaucoup plus élevés sont aussi mesurés et inclus sur la courbe de distribution correspondante s'ils sont présents dans le matériau. Ces pores de diamètre supérieur à 40 nm ou inférieur à 10 nm ont bien sûr une influence sur le diamètre moyen de pores. Celui-ci peut donc avoir une valeur en dehors de la plage revendiquée même si la silice contient une certaine proportion de pores dont le diamètre est de 10 à 40 nm.

3.3. Au cours de la procédure orale, l'intimée a comparé les caractéristiques des silices obtenues dans l'exemple 2 de D1 avec celles des silices de l'exemple 3 du brevet ainsi que les méthodes de préparation de ces silices. Elle a fait valoir que compte tenu des différences insignifiantes dans les procédés de préparation de ces silices et de l'identité ou la similarité des caractéristiques, notamment de la surface spécifique et du volume poreux, le diamètre moyen de pores de la silice selon l'exemple 2 devait tomber dans le domaine revendiqué. La Chambre n'est pas convaincue par ces arguments pour les raisons suivantes :

3.3.1. Concernant les procédés de préparation des silices en question, la Chambre observe que dans l'exemple 2 de D1 la concentration du silicate de sodium en pied de cuve initial est différente de celle indiqué dans l'exemple 3 du brevet (35 g/l au lieu de 65 g/l). Après l'étape d'addition simultanée de silicate de sodium et d'acide sulfurique, qui, dans les deux cas, est effectuée de sorte à maintenir le PH du milieu à une valeur constante de 9,5, l'ajout d'acide sulfurique est continué dans l'exemple 2 de D1 jusqu'à stabilisation du pH du milieu réactionnel à 7,0, et pendant cette phase la température est portée à 95 C, alors que dans l'exemple 3 du brevet l'ajout d'acide est poursuivi jusqu'à stabilisation du pH du milieu réactionnel à 5,0, et un chauffage supplémentaire n'est pas mentionné. Dans le cas du brevet, cette étape est directement suivie d'une filtration et d'un lavage du gâteau humide, tandis que dans l'exemple 2 de D1 on réalise, après l'étape de stabilisation du pH à 7,0, un premier mûrissement de 30. mn à la température de 95 C tout en maintenant le pH à 7. Le pH est ensuite amené à la valeur de 4,0 par ajout d'acide sulfurique et un deuxième mûrissement de 30. mn est effectué en maintenant le pH à cette valeur (voir D1, page 5, lignes 55-56 ; page 11, lignes 25-40 ; page 14, revendication 25). Par conséquent, dans l'exemple 2 de D1, l'étape de stabilisation du pH est suivie d'un double mûrissement. Ce double mûrissement à deux valeurs de pH différentes est une caractéristique indispensable du procédé selon D1. Il n'est pas question dans le brevet d'effectuer un double mûrissement à deux pH différents après la stabilisation du pH. Une comparaison des libellés de l'exemple 2 de D1 et de l'exemple 3 du brevet (les deux documents proviennent de la requérante) montre que l'étape de stabilisation est effectuée dans les deux cas et qu'elle est considérée par l'auteur comme différente d'une étape de mûrissement puisque qu'elle est suivie dans D1 d'un premier mûrissement à pH 7 et d'un deuxième mûrissement à pH 4. Même si, comme indiqué dans la décision de la Division d'opposition, la stabilisation du pH du milieu réactionnel à la valeur de 5,0 pouvait être assimilée à une étape de mûrissement dans le cas de volumes très importants, le procédé selon l'exemple 3 du brevet différerait encore du procédé de l'exemple 2 de D1 par les autres conditions opératoires indiquées ci-dessus, par le pH du mûrissement et par l'absence d'un second mûrissement à pH 4.

L'affirmation de l'intimée que les différences indiquées précédemment étaient insignifiantes a été contestée par la requérante. Bien que la charge de la preuve incombe à l'intimée en ce qui concerne cette affirmation contestée, elle n'a fourni aucune preuve montrant que ces différences avaient effectivement une influence insignifiante sur la porosité et donc sur le diamètre moyen de pores des silices obtenues. Dans ces circonstances et compte tenu du fait qu'il est bien connu de l'homme du métier qu'il est possible d'obtenir des silices précipitées ayant des caractéristiques structurelles différentes par variation des conditions de préparation, la Chambre ne peut accepter l'affirmation de l'intimée.

3.3.2. Concernant les caractéristiques des silices obtenues dans l'exemple 2 de D1 et dans l'exemple 3 du brevet, la Chambre constate qu'elles ne sont pas identiques et doute que les valeurs de surface CTAB et de prise d'huile DBP des deux silices en question puissent être considérées comme similaires. Comme souligné justement par l'intimée, le volume poreux de la silice de l'exemple 2 de D1 (3,2 cm3/g) est très semblable à celui de la silice de l'exemple 3 du brevet (3,3 cm3/g). Les silices ayant un volume poreux de 3,3 et 3,6 cm3/g dans les exemples 1 à 3 ont un diamètre moyen de pores de 35. nm et 40 nm. Cependant, il ne peut être déduit de cette comparaison que le diamètre moyen de pores de la silice de l'exemple 2 de D1 tombe inévitablement dans le domaine revendiqué car deux silices ayant le même volume poreux peuvent avoir des valeurs de diamètre moyen de pores différentes si les répartitions des diamètres de pores sont différentes. Or cette répartition dépend du procédé de préparation des silices et le procédé de préparation de la silice selon l'exemple 2 de D1 n'est ni identique ni similaire au procédé de préparation de la silice selon l'exemple 3 du brevet comme il ressort des considérations précédentes dans le paragraphe 3.3.1.

Dans ces circonstances et en l'absence de preuves montrant que le procédé de préparation de l'exemple 2 de D1 conduit inévitablement à une silice dont le diamètre moyen de pores tombe dans l'intervalle revendiqué, la Chambre considère que la silice ayant les caractéristiques définies dans la revendication 1 diffère de la silice selon l'exemple 2 de D1 par le diamètre moyen de pores.

4. En ce qui concerne D2, ce document divulgue dans les exemples 1 à 3 trois silices précipitées dont les valeurs de surface BET, surface CTAB, prise d'huile DBP et volume poreux tombent dans les plages indiquées dans la revendication 1. Le diamètre moyen de pores de ces silices n'est cependant pas divulgué. L'intimée, bien qu'ayant la charge de la preuve, n'a cependant fourni aucun test en vue d'étayer son affirmation que la silice de l'exemple 2 de D2 présente un diamètre moyen de pores tombant dans la plage revendiquée.

L'intimée a comparé l'exemple 2 de D2 avec l'exemple 3 du brevet, qui conduisent à des silices ayant des volumes poreux très semblables (3,35 et 3,3 cm3/g) et a argué que les arguments présentés en relation avec D1 s'appliquaient également à l'exemple 2 de D2. La Chambre observe cependant que les considérations précédentes aux points 3.2 et 3.3.1 s'appliquent de façon analogue à l'exemple 2 de D2. En effet la même différence existe dans les concentrations du silicate de sodium du pied de cuve initial, le mélange réactionnel est aussi chauffé à 95. C pendant l'étape de stabilisation du pH dans l'exemple 2 de D2, et de plus les autres différences entre le procédé de l'exemple 2 de D2 et le procédé de l'exemple 3 du brevet sont encore plus importantes que dans le cas de la comparaison précédente : voir la différence dans les valeurs de pH auxquelles le milieu réactionnel est stabilisé (8,0 dans l'exemple 2 de D2 ; 5,0 dans l'exemple 3 du brevet) et les trois étapes de mûrissement à 95 C et à des pH de 8,0, 5,0, et 3,7 respectivement après l'étape de "stabilisation" du pH. De plus, le fait que la silice selon l'exemple 2 de D2 présente un volume poreux de 3,35 cm3/g, c'est-à-dire une valeur très similaire à celle de l'exemple 3 du brevet et tombant dans l'intervalle 3,3-3,6 cm3/g ne permet pas non plus de conclure que le diamètre moyen de pores de cette silice tombe inévitablement dans le domaine revendiqué: voir les raisons indiquées au point 3.3.2. qui s'appliquent de façon analogue à l'exemple 2 de D2.

Lors de la procédure orale l'intimée ne s'est pas appuyée sur les autres exemples de D2 pour contester la nouveauté des silices revendiquées. La Chambre a vérifié qu'en l'absence de preuves montrant que les procédés de préparation utilisés dans les exemples 1 et 3 de D2 conduisent inévitablement à des silices dont le diamètre moyen de pores tombe aussi dans la plage revendiquée, il ne pouvait être conclu qu'elles détruisaient la nouveauté des silices selon la revendication 1. Il est à noter dans ce contexte que les procédés de préparation utilisés dans ces exemples comportent aussi une stabilisation du pH du milieu réactionnel à 8,0 et le chauffage du milieu à 95 C, cette étape étant suivie de trois étapes de mûrissement à des pH différents. Les silices selon la revendication 1 sont donc nouvelles par rapport à l'enseignement de D2.

5. D3 divulgue des silices ayant une surface spécifique de 50-200 m2/g (voir revendication 9), en particulier 53. m2/g dans le cas de la silice selon l'exemple 2. La surface CTAB, la prise d'huile DBP, le volume poreux et le diamètre moyen de pores de ces silices ne sont pas indiqués dans ce document. L'intimée a fait valoir que le procédé de préparation de la silice selon l'exemple 2 de D3 était identique au procédé selon le brevet litigieux, en particulier selon le procédé de la revendication 9, et que la silice obtenue possédait donc les mêmes caractéristiques que les silices revendiquées. La Chambre ne peut accepter ces arguments pour les raisons suivantes :

Selon la revendication 9 du brevet, un silicate et un acide sont ajoutés simultanément dans une dispersion colloïdale de silice, ce qui conduit à une suspension de silice et le pH est ensuite abaissé de sorte qu'il se situe entre 3 et 7. Cependant, étant donné que la revendication 9 fait référence aux silices décrites dans la revendication 1, il est implicite que les conditions opératoires telles que concentrations des solutions, températures, vitesses d'addition des composants, pH, etc. doivent être choisies de sorte que les silices finales aient les caractéristiques indiquées dans la revendication 1. Par conséquent, même si l'exemple 2 de D3 décrivait les étapes générales de procédé indiquées dans la revendication 9, il ne pourrait en être déduit que la silice obtenue présente inévitablement les caractéristiques revendiquées. Les conditions opératoires utilisées dans l'exemple 2 de D3 doivent donc aussi être comparées à celles des exemples du brevet pour pouvoir tirer une conclusion quant à l'éventuelle absence de nouveauté, d'autant plus que dans l'exemple 2 de D3 il n'est pas mentionné que l'addition simultanée du silicate et de l'acide est effectuée dans une "dispersion colloïdale" de silice.

Dans l'exemple 2 de D3, le silicate de sodium utilisé dans le pied de cuve initial a une concentration de 130 g/l. Cette concentration est beaucoup plus élevée que celle du silicate utilisé dans les exemples 1 à 3 du brevet relatifs à des silices ayant un diamètre moyen de pores 40 nm (22 g/l, 35 g/l et 65 g/l). De plus, la solution de silicate de sodium est chauffée à 79 C dans l'exemple 2 de D3 alors qu'elle est portée à une température de 85 C, 92 C ou 90 C dans les exemples 1 à 3. du brevet. Les pH après addition de l'acide sulfurique ne sont également pas identiques (10,1 dans l'exemple 2 de D3 et 9,5 dans les exemples 1-3 du brevet). Compte tenu de ces différences, il apparaît que l'addition simultanée d'acide et de silicate est effectuée, dans les exemples 1-3 du brevet, dans une dispersion colloïdale ayant des caractéristiques différentes de celles du milieu préparé dans la première étape du procédé selon l'exemple 2 de D3. L'intimée n'a pas prouvé que ces différences n'avaient pas ou peu d'influence sur les caractéristiques de la silice finale. Dans ces circonstances, la Chambre n'est pas convaincue, en l'absence de preuve à l'appui, que la silice de l'exemple 2 de D3 présente inévitablement une surface CTAB, une prise d'huile DBP, un volume poreux et un diamètre moyen de pores tous compris dans les plages revendiquées. Par conséquent, les silices selon la revendication 1 sont considérées comme nouvelles par rapport à celle de l'exemple 2 de D3. Des considérations du même type s'appliquent également aux autres exemples de préparation de silice décrits dans D3.

6. En procédure de recours l'intimée a basé son objection de manque de nouveauté sur les documents D1, D2, et D3 et ne s'est plus appuyée sur D4. La Chambre a examiné le contenu de D4 et a également constaté qu'il ne détruisait pas la nouveauté du produit revendiqué.

7. Il résulte des considérations précédentes que la silice et le procédé de préparation de cette silice selon les revendications 1 et 9 du jeu de revendications pour les Etats Contractants AT, BE, CH, DE, DK, FR, GB, GR, IT, LI, LU, SE satisfont à la condition de nouveauté requise par les articles 52(1) et 54 CBE. Etant donné que la revendication 1 du jeu de revendications pour l'Espagne contient toutes les caractéristiques desdites revendications 1 et 9 pour les autres Etats Contractants, les considérations précédentes quant à la nouveauté s'appliquent également à cette revendication.

8. La question de savoir si les produits revendiqués impliquent ou non une activité inventive n'a pas été examinée par la Division d'opposition. La Chambre fait usage du pouvoir qui lui est conféré par l'article 111(1) CBE de renvoyer l'affaire à la Division d'opposition pour poursuite de la procédure.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la première instance pour poursuite de la procédure.

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