T 0617/97 () of 25.6.1999

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1999:T061797.19990625
Date de la décision : 25 Juin 1999
Numéro de l'affaire : T 0617/97
Numéro de la demande : 92400387.4
Classe de la CIB : F25C 1/00
F25D 25/04
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Procédé et dispositif de congélation
Nom du demandeur : L'AIR LIQUIDE, SOCIETE ANONYME / GEORGES CLAUDE
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.2.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 69
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 Art 113(2)
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 R 29(1)
European Patent Convention 1973 R 67
Mot-clé : Requête principale rejetée pour absence soit de clarté, soit de support par les documents d'origine
Activité inventive (reconnue pour la requête auxiliaire)
Remboursement de la taxe de recours (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0162/88
T 0228/89
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours est dirigé contre la décision du 17. février 1997 d'une Division d'examen de l'Office européen des brevets, qui a rejeté la demande de brevet européen n° 92 400 387.4 pour défaut de nouveauté ou d'activité inventive de l'objet des revendications indépendantes de procédé et d'appareil en vigueur à cette date.

Les documents les plus pertinents de l'art antérieur parmi ceux cités durant la procédure d'examen sont les suivants :

D1 : FR-A-2 212 521

D2 : US-A-4 655 047

D3 : US-A-3 228 838

D4 : WO-A-90 06 693

D5 : US-A-4 843 840

D6 : GB-A-2 117 222

D7 : US-A-3 498 070

II. La demanderesse (requérante) a formé recours et payé la taxe correspondante le 8 avril 1997. Dans le mémoire de recours reçu le 29 mai 1997, elle a contesté les motifs de la décision ci-dessus et a requis l'annulation de cette décision ainsi que la délivrance d'un brevet sur la base d'un jeu de revendications joint au mémoire. En outre, elle a demandé le remboursement de la taxe de recours en raison des deux actes de procédure suivants, inhabituels à ses yeux :

- La prise en compte par la Division d'examen des deux documents D4 et D5 au dernier stade de la procédure d'examen, en l'occurrence durant la procédure orale, alors que ces documents n'avaient jamais été évoqués auparavant ;

- Le rejet des revendications dépendantes sur le seul motif que la revendication 1 n'est pas brevetable.

III. Suite à un échange de courriers et d'appels téléphoniques entre la chambre et la requérante, cette dernière a déposé le 30 novembre 1998 une note d'observations, accompagnée de deux jeux de revendications et de pages de description, soumis à titre de requêtes principale et auxiliaire. Un nouveau jeu de dix revendications a été déposé le 20 avril 1999, destiné à remplacer le jeu précédent de la requête auxiliaire. Il était accompagné d'une nouvelle page 3 de la description.

IV. La revendication 1 selon la requête principale déposé le 30. novembre 1998 est rédigée comme suit :

"Procédé de congélation d'un produit, notamment d'un produit alimentaire, selon lequel on met en contact le produit par au moins une de ses surfaces avec une surface réfrigérante, qui résulte de l'utilisation d'un support soit vibrant horizontal soit présentant une pente descendante, et d'un gaz liquéfié dont le point d'ébullition est inférieur à -30°C, de manière à obtenir une congélation partielle du produit au niveau d'au moins une de ses surfaces, le produit étant ensuite séparé de la surface réfrigérante, caractérisé en ce que :

a) la surface réfrigérante est constituée d'un film de gaz liquéfié disposé sur ledit support,

b) en ce que l'épaisseur du film de gaz liquéfié est inférieure à celle du produit à congeler,

c) et en ce que l'opération de congélation partielle est immédiatement suivie d'une opération de traitement du produit qui n'est pas une opération de congélation totale de ce produit."

La revendication 1 selon la requête auxiliaire déposée le 20 avril 1999 est rédigée comme suit :

"Procédé de congélation partielle d'un produit solide ou pâteux, notamment d'un produit alimentaire, selon lequel on met en contact le produit, afin d'effectuer une congélation partielle du produit au niveau d'au moins une de ses surfaces, avec une surface réfrigérante, qui résulte de l'utilisation d'un support soit vibrant horizontal soit présentant une pente descendante, et d'un gaz liquéfié dont le point d'ébullition est inférieur à -30°C, le produit étant ensuite séparé de la surface réfrigérante, caractérisé par la mise en oeuvre des mesures suivantes :

a) la surface réfrigérante est constituée d'un film de gaz liquéfié disposé sur ledit support ;

b) la diagonale la plus longue du produit a une longueur supérieure à 1 cm, et le plus souvent supérieure à 3. cm, et l'épaisseur du produit est comprise entre 1 et 20 cm ;

c) l'épaisseur du film de gaz liquéfié est inférieure à celle du produit à congeler.

V. La requérante a défendu l'invention revendiquée en faisant valoir ce qui suit :

Il ne peut être contesté que la demande de brevet en cause enseigne de réaliser une opération de congélation partielle. En page 4 de la description, premières lignes, il est en outre indiqué qu'à l'issue d'une telle opération, on récupère les produits qui sont congelés en surface, puis éventuellement on les congèle en totalité. Cela signifie qu'après la congélation partielle et la récupération des produits partiellement congelés, il peut être prévu soit une étape de congélation totale, soit une autre opération de traitement ou de manipulation des articles, comme cela est soutenu par les termes "manipulation" et "traitement" utilisés plusieurs fois dans la page 1 de la description. L'article 123(2) CBE est par suite respecté.

Quelques soient les produits traités, toute la littérature citée, y compris l'art antérieur D4 le plus proche de l'invention, enseigne une congélation totale, certes quelquefois précédée d'une congélation partielle, comme dans D4, mais immédiatement suivie de l'opération de congélation totale. La présente invention innove sur deux aspects : d'une part, elle met en évidence qu'il est possible, au moyen d'une congélation préalable et simplement partielle du produit, d'effectuer des étapes ultérieures de traitement du produit qui ne soient pas une congélation totale, et d'autre part, elle effectue la congélation partielle de façon cryogénique, et non pas mécanique comme dans D4, et ceci grâce à une mise en contact du produit avec un film cryogénique dont l'épaisseur est inférieure à celle du produit à traiter.

Même si les documents D5 et D6 décrivent une première étape de congélation partielle, ils enseignent un procédé de congélation totale, si bien qu'il n'est guère suggéré à l'homme du métier qu'il est possible d'assurer uniquement une congélation partielle des produits et de s'en tenir à cette seule étape. Au contraire, ces deux documents, comme tous les autres, imposent l'étape finale de congélation totale pour asseoir la stabilité du produit. Avant la présente invention, il existait donc un préjugé contre une congélation partielle en tant qu'étape finale, car le produit obtenu était estimé comme trop instable.

De plus, ces deux documents ne suggèrent pas d'utiliser un film cryogénique d'épaisseur inférieure à celle des produits à traiter. Le document D6 met certes l'accent sur le paramètre épaisseur du film, mais en tant que paramètre important pour influencer la taille et la forme des particules congelées obtenues, et non pour la congélation elle-même. Dans le passage de la page 3, lignes 3 à 51, un rapport de 0,5 à 1,5 de l'épaisseur du film cryogénique est certes évoqué, mais c'est par rapport au plus grand diamètre des particules traitées. Il n'est pas expressément indiqué de prévoir un film ayant une épaisseur inférieure à celle des produits et à plusieurs reprises dans ce document D6, c'est une épaisseur de 1 cm du film qui est citée, alors que les particules n'ont qu'une épaisseur de 2 à 3 mm. Si donc une étape de congélation partielle est décrite dans ce document, cette étape est principalement effectuée par immersion totale du produit dans le liquide cryogénique. La solution telle que revendiquée dans la présente demande de brevet n'est donc pas suggérée.

VI. La requérante demande l'annulation de la décision de la Division d'examen et la délivrance d'un brevet sur la base des pièces suivantes :

- soit les revendications 1 à 11 et les pages 1, 1a, 2, 4. à 7 de la description déposées à titre principal le 30. novembre 1998, accompagnées de la page 3 de la description et des figures telles que publiées ;

- soit les revendications 1 à 10 et la page 3 de la description déposées le 20 avril 1999, accompagnées des pages 1, 1a, 2, 4 à 7 de la description déposées à titre auxiliaire le 30 novembre 1998 et des figures telles que publiées.

En cas de rejet de ces requêtes, la tenue d'une procédure orale est requise. En outre, le remboursement de la taxe de recours est sollicité.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Requête principale

Cette requête doit être rejetée, car la revendication 1 n'est pas admissible. En effet, sa dernière caractéristique c) ne satisfait pas aux exigences des articles 84 et 123(2) CBE pour les raisons suivantes :

2.1. Le préambule de la revendication 1 indique qu'après que le produit ait été congelé de façon partielle, il est séparé de la surface réfrigérante. Cette séparation constitue une opération de manipulation et, donc, de traitement du produit. Dans toute la partie introductive de la demande de brevet en cause, le terme utilisé "traitement" n'est pas précisé, et seule une manutention difficile de certains produits durant la congélation est signalée. La description, telle que déposée à l'origine, indique en page 4 qu'à la fin de l'opération de congélation partielle, "on récupère les produits par un moyen quelconque,..., puis éventuellement on les congèle dans leur totalité, par exemple ..dans un tunnel de congélation". Les deux exemples de réalisation selon les figures 1 et 2, éclairées par les passages correspondants de la description, montrent à la sortie du dispositif de congélation partielle une plaque débouchant soit sur un tapis roulant permettant de conduire les produits directement vers le tunnel de congélation totale, soit sur une grille inclinée placée au-dessus d'un entonnoir pour séparer le produit du gaz liquéfié sans, dans ce dernier cas, montrer d'autre dispositif de traitement en aval. Dans l'exemple 2, les épinards, une fois congelés partiellement et récupérés, sont dirigés vers le tunnel de congélation, tandis que dans l'exemple 1 seules les conditions d'exécution de l'opération de congélation partielle sont exposées. Autrement dit, la seule opération de traitement, qui est clairement divulguée dans la demande de brevet immédiatement après la congélation partielle, est uniquement une opération de récupération ou une opération de transfert des produits vers un dispositif de congélation totale.

Il s'ensuit que la caractéristique c) de la revendication 1 soit est redondante avec la dernière caractéristique du préambule et est par suite ambiguë car superflue (art. 84 CBE), soit n'est pas supportée par la description d'origine, dans la mesure où celle-ci ne divulgue aucun traitement ultérieur du produit partiellement congelé, autre que sa récupération (article 123(2) CBE).

2.2. La requérante s'est appuyée sur les termes "puis éventuellement" de la page 4, ainsi que sur les termes "manutention" et "traitement" présents dans la page 1 de la description d'origine. Dans cette page 1, ces deux derniers termes sont employés sans relation claire avec quelqu'autre traitement immédiatement postérieur à l'opération de congélation partielle, à l'exception de la manipulation du produit pour son transfert vers le tunnel de congélation totale. Une mention d'autres traitements du produit apparaît certes dans la page 1, mais elle concerne le traitement de produits en amont de la ligne de production (Selon la requérante, ce terme résulterait d'une erreur, seul le terme "en aval" convenant. Pour la Chambre, cette erreur n'est guère évidente dans le passage concerné, car un blocage sur une ligne de production peut affecter aussi bien la partie amont qu'aval de la ligne). De plus, selon toute la description de la demande de brevet en cause, l'inconvénient à la base du problème de la présente invention réside dans l'adhérence ou la tendance à coller des produits à congeler, par exemple des boulettes de purée, lorsqu'ils sont déposés (donc, manipulés) sur le tapis roulant menant au tunnel de congélation, et la solution de l'invention consiste à effectuer une congélation partielle du produit avant son dépôt sur cette plaque. Aucun autre traitement du produit n'est clairement suggéré. Il n'est par ailleurs pas possible de baser une caractéristique positive, telle que la caractéristique c), sur des silences de la description, tels que ceux impliqués par les termes "et éventuellement", ou encore sur une absence d'indication de tout traitement du produit après sa congélation partielle (cf. l'exemple 1 dans la description).

La modification apportée dans les nouvelles pages de la description avec l'expression "pour être le cas échéant conduits dans un tunnel de congélation" ne fait que confirmer le caractère ambigu de la caractéristique c).

3. Requête auxiliaire

3.1. La revendication 1 selon cette requête est limitée à une congélation partielle d'au moins une surface de produits solides et pâteux, notamment de produits alimentaires, ayant des critères de dimensions selon la caractéristique b) de cette revendication et pouvant éventuellement comporter plusieurs surfaces. Dans la description de la demande de brevet, les exemples décrits concernent des boulettes de purée, des blocs d'épinards ou cubes de volailles. Les dimensions présentes dans la revendication 1 impliquent des produits plus volumineux que des gouttelettes liquides ou des particules de crèmes. L'objet de la revendication 1 doit être compris dans ce contexte.

Toutes les autres caractéristiques de la revendication 1 sont supportées par la description d'origine. La caractéristique c), selon laquelle l'épaisseur du film de gaz liquéfié est inférieure à celle du produit à congeler, est supportée par les premières lignes de la page 3 de la description originale, qui indiquent que l'épaisseur du film de gaz liquéfiée est, en moyenne, inférieure à 10 mm, et de préférence comprise entre 2 et 5. mm. Ainsi, dans l'exemple 1 de la demande, un produit d'épaisseur 20 mm est en contact avec un film d'azote liquide d'épaisseur de 5 mm. Enfin, la description insiste sur le fait que c'est la surface du produit en contact avec le film, qui est congelée, et que l'épaisseur du film peut être très faible (description originale, page 2, ligne 16).

Les revendications dépendantes correspondent à des revendications dépendantes d'origine. La description a été adaptée aux nouvelles revendications et comporte en plus une brève analyse de l'état de la technique antérieur le plus pertinent. L'expression "le cas échéant" introduite aux nouvelles pages 5 et 7 est un synonyme du terme " éventuellement" de la page 4 de la description d'origine.

Les revendications et les pages de la description selon la requête auxiliaire satisfont donc aux exigences des articles 84 et 123(2) CBE.

3.2. Le document D4 concerne la congélation totale de produits, tels que des hamburgers, des pièces glacées, des filets de poissons ou de volailles. Il s'agit donc d'une gamme de produits alimentaires semblable à celle de la présente invention. De plus, ce document aborde le même problème que la présente invention, à savoir éviter un collage du produit - surtout lorsque ce dernier est à l'état pâteux - sur le tapis du convoyeur menant au tunnel de congélation totale, et ce problème est résolu de façon similaire, puisqu'une opération préliminaire de congélation partielle du produit est proposée comme solution. L'avantage qui en résulte, à savoir une manipulation plus facile du produit en aval, est aussi enseigné. La Chambre, par suite, considère que ce document D4 représente l'art antérieur le plus proche de la présente invention, de préférence au document D5 (ou D6), même si ce dernier divulgue un plus grand nombre de caractéristiques de la revendication 1, toutefois dans un contexte différent comme il sera vu plus loin. La division en deux parties de la revendication 1 est basée sur cet art antérieur D4, qui en particulier ne cite aucune dimension des produits à traiter et par suite ne divulgue pas la caractéristique b) de la revendication 1 (règle 29(1) CBE).

3.3. Dans l'étape de congélation partielle selon cet art antérieur D4, le produit est posé sur une plaque métallique vibrante, qui est réfrigérée par un liquide cryogénique circulant dans des conduits en dessous de la plaque. L'inconvénient de ce procédé connu est que le collage du produit, qui, dans l'art antérieur selon D4, devait être évité lors de sa pose sur le tapis du convoyeur de congélation totale, peut en fait se produire en amont, sur la plaque métallique destinée à la congélation partielle, malgré la température très froide de celle-ci.

3.4. Partant du procédé connu de D4, le problème à la base de l'invention selon la présente requête auxiliaire est d'éviter l'inconvénient ci-dessus de ce procédé pour des produits alimentaires relativement volumineux correspondant aux termes de la caractéristique b) de la revendication 1.

Ce problème est résolu par les deux caractéristiques a) et c) de la revendication 1. D'après la description de la demande de brevet, il a été constaté qu'avec cette solution les produits même très collants n'adhèrent pas au support, et ceci même avec une épaisseur du film très faible, car il s'est avéré que les produits flottent à la surface du film de gaz liquéfié par un phénomène de caléfaction dû aux gaz du liquide cryogénique.

3.5. Ce phénomène n'est pas inconnu. Il est en effet mentionné dans la description de D6, déjà cité plus haut, à la page 1, dernier paragraphe, et en page 7, premières lignes et lignes 31 à 37. Toutefois, dans l'enseignement de ce document, ce phénomène n'est pas décrit en liaison avec des produits alimentaires relativement volumineux du type de la présente invention.

En effet, cette antériorité D6, qui - à titre de rappel - concerne un procédé de congélation totale en deux étapes, vise la congélation de produits, notamment alimentaires tels que des oeufs ou de la purée, qui sont sous forme liquide ou crémeuse et non solide, et de plus doivent pouvoir être déversés en gouttelettes ou en un ruban continu par un orifice de distribution de 1 à 3 mm de diamètre sur une surface réfrigérante. Cette surface est destinée - tout comme dans la présente invention - à effectuer une congélation préliminaire et partielle du produit au niveau d'au moins une de ses surfaces, et, à l'instar de la présente invention, elle est constituée d'un film de gaz liquéfié à point d'ébullition inférieur à moins 30°C, disposé sur un support présentant une pente descendante. En aval de ce support, le produit, une fois congelé en surface, est transféré sur un autre support en vue de sa congélation totale.

Selon l'enseignement de ce document, les gouttelettes ou particules ("spheroids"), qui sont formées soit à la sortie de l'orifice de distribution soit par fragmentation du ruban continu flottant sur le film cryogénique, ont des diamètres variables allant jusqu'à environ 9 mm, la formation et le diamètre de ces gouttelettes dépendant de la viscosité du produit à traiter et de la vitesse d'avancée du film cryogénique. Pendant leur trajet le long de la surface réfrigérante, les plus petites particules continuent à flotter sur le film cryogénique, soutenues par le phénomène de caléfaction, tandis que les autres, plus grosses, s'enfoncent dans le film et roulent sur le support. Le diamètre le plus grand de celles qui flottent tout le long de la surface réfrigérante serait de l'ordre de 1. mm (col. 7, lignes 96 à 102).

3.6. Le contenu de ce document met l'accent sur l'importance de l'épaisseur du film cryogénique, notamment en relation avec le diamètre des produits à congeler. Il est ainsi conseillé à la page 3 de ce document d'avoir une épaisseur du film comprise entre 0,5 et 1,5 le diamètre le plus grand des plus grandes particules ou gouttelettes traitées. Plusieurs fois, une épaisseur de 10. mm du film, donc supérieure au diamètre maximum des gouttelettes, est mentionnée, mais en même temps le seul exemple détaillé décrit indique que 85 % des particules formées ont une plus grande dimension variant de 7 à 9. mm et que l'épaisseur du film est de 7 mm. Dans ce document D6, toutefois, la notion d'épaisseur du film cryogénique est mise en relation non seulement avec le diamètre des particules, mais aussi avec l'aptitude des plus grosses particules à rouler sur le support, ce qui permet une congélation de toute leur surface périphérique.

3.7. L'homme du métier, qui, partant du procédé connu de D4, aurait cherché à résoudre le problème à la base de la présente invention, pouvait être amené à considérer l'enseignement de D6, dans la mesure où une méthode de congélation partielle différente de celle selon D4 y est enseignée. Toutefois, le problème qu'il avait à résoudre concernait des produits, qui ne sont pas identiques à ceux de D6, éventuellement par leurs consistances, mais surtout par leurs volumes ou dimensions. Or le document D6 enseigne que seules les plus petites particules, à savoir celles inférieures à 1 mm, flottent sur le film cryogénique, tandis que les autres s'y enfoncent et roulent sur le support. L'homme du métier pouvait donc seulement en déduire que les produits visés par la présente invention, s'enfonceraient eux aussi, en raison de leur dimensions, dans un film cryogénique, quelque soit l'épaisseur de ce dernier, et ceci dès leur mise en contact avec ce film. De ce fait, tout comme sur la plaque froide selon D4, ils auraient eu tendance à coller de suite au moyen de support du film cryogénique, n'étant pas aptes à rouler comme les particules selon D6. Dans un tel cas, l'épaisseur du film cryogénique n'a aucune importance.

3.8. Donc, même si de nombreuses similitudes apparaissent entre le procédé de congélation partielle selon cette antériorité D6 et la solution telle qu'elle est revendiquée par la présente revendication 1, l'enseignement même de D6 n'était pas à même de suggérer la solution de la présente invention. Le mérite de l'inventeur de cette dernière est d'avoir découvert que le phénomène de caléfaction, décrit dans D6 uniquement en relation avec de toutes petites particules, agit aussi sur des produits relativement volumineux présentant une certaine surface de contact avec le film cryogénique (cf. la diagonale selon la caractéristique (b) de la revendication 1), évitant ainsi leur collage immédiat sur le support.

3.9. Parmi les autres documents cités, aucun ne fournit un enseignement plus pertinent, qui aurait pu conduire l'homme du métier au procédé, tel que revendiqué :

Les documents D1 et D7, qui concernent le même type d'aliments que la présente invention, notamment au point de vue dimensions, n'enseignent qu'une congélation totale des produits, et ce au moyen d'une immersion complète de ces derniers dans un bain de gaz liquéfié. Le document D7 enseigne bien une étape préliminaire de congélation partielle afin d'éviter un refroidissement trop brutal du produit qui aurait conduit à des lézardes superficielles, mais cette congélation partielle est effectuée - là aussi - par une immersion totale, limitée dans le temps, du produit dans le bain cryogénique et elle est immédiatement suivie d'une congélation totale effectuée par les gaz du liquide cryogénique en aval du bain liquide.

Les autres documents D2, D3 et D5, tout comme D6, concernent des produits, notamment alimentaires, qui doivent nécessairement pouvoir être alimentés sous forme de particules ou gouttelettes, la distribution s'effectuant au moyen d'un orifice de conduit de petit diamètre. Les deux premiers, D2 et D3, n'enseignent qu'un procédé de congélation totale, en général par immersion totale dans un film de gaz cryogénique circulant sur un support vibrant ou en pente. Dans le cas particulier de la variante selon la figure 2 de D2, un film cryogénique de faible épaisseur (2 ou 3 cm) et supporté par un support ou une auge en pente est décrit, mais l'épaisseur du film reste néanmoins supérieure à celle des gouttelettes, puisque, dans cet art antérieur, il est toujours recherché que celles-ci soient à l'intérieur du liquide cryogénique. Il y est aussi enseigné qu'en raison du phénomène de caléfaction déjà mentionné ci-dessus, les petites boulettes ou particules, qui sont formées lors de la mise en contact du liquide ou de la crème avec le film cryogénique, peuvent flotter sur le film, mais ce dernier effet est montré comme aléatoire et, de plus, uniquement applicable à un produit apte à se diviser en fines gouttelettes (col. 5, lignes 61 à 65) ; Il est recommandé de contrarier cet effet pour que les gouttes pénètrent dans le liquide. Une congélation partielle, de même que l'utilisation d'un film de faible épaisseur par rapport aux dimensions du produit à traiter, ne sont donc pas suggérées par cette variante, ni par le reste du document, qui encore une fois ne concerne qu'une congélation totale du produit. L'antériorité D3 enseigne, à l'opposé de la présente solution, qu'il convient d'avoir une épaisseur du bain ou du film cryogénique assez importante dans le cas de substances, telles que du sang, afin d'éviter que les gouttelettes n'entrent en contact avec les parois du support et n'y adhèrent. Quant au document D5, qui décrit une variante de réalisation du procédé et de l'appareil selon D6, il n'apporte aucune information sur l'étape de congélation partielle allant au-delà de l'enseignement de D6.

3.10. Pour ces raisons, le procédé selon la revendication de la requête auxiliaire n'est pas divulgué ou suggéré par l'art antérieur cité et, par suite, implique une activité inventive (article 56 CBE). Les revendications dépendantes 2 à 11, qui concernent des modes de réalisation du procédé selon la revendication 1, sont donc aussi brevetables.

4. La requête auxiliaire de la requérante étant satisfaite, la tenue d'une procédure orale est inutile.

5. Remboursement de la taxe de recours

Selon la règle 67 CBE le remboursement de la taxe de recours est ordonné lorsqu'il est fait droit au recours par la chambre de recours, si le remboursement est équitable en raison d'un vice substantiel de procédure.

Il est de jurisprudence constante des chambres de recours que, lorsqu'une seule revendication d'un jeu de revendications n'est pas admissible, la requête correspondante de la demanderesse ou titulaire du brevet doit être rejetée dans son ensemble. Cette jurisprudence est fondée sur les termes de l'article 113(2) CBE qui prévoit qu'une décision ne peut être fondée que sur le texte proposé ou accepté par le demandeur ou par le titulaire du brevet (cf. les décisions T 162/88 et T 228/89, toutes deux non publiées). Dans le cas présent, le premier motif invoqué par la demanderesse pour le remboursement de la taxe de recours ne peut donc être retenu.

Quant à l'autre motif avancé par la requérante, à savoir la prise en considération des documents D4 et D5 pendant la procédure orale devant la Division d'examen, ce motif n'est pas pertinent, puisque, dans la présente affaire, c'est la demanderesse qui trois semaines seulement, avant la procédure orale avait proposé une nouvelle revendication 1, dans laquelle pour la première fois une caractéristique relative à une congélation partielle du produit apparaissait. Or, une Division d'examen fonde son examen et ne cite des antériorités pertinentes qu'en fonction des caractéristiques des revendications. Un argument de la demanderesse n'est pris en compte que s'il a un rapport avec les caractéristiques de la revendication examinée. Dans les circonstances ci-dessus, le délai était trop court pour permettre une réaction de la Division d'examen et la première partie de la procédure orale montre qu'en outre des questions préliminaires de clarté de la nouvelle caractéristique ci-dessus se posaient. Par suite, la Division d'examen n'a été amené à citer les documents D4 et D5 qu'en raison de nouvelles autres revendications présentées au cours de la procédure orale par la demanderesse elle-même, et qui faisaient mieux ressortir la caractéristique "congélation partielle". Toutes ces nouvelles revendications faisaient suite à des objections antérieures de la Division d'examen qui portaient sur des revendications qui visaient un aspect différent de l'invention. On ne peut considérer comme un vice de procédure la fait de citer de nouvelles antériorités, lorsqu'il s'avère que la demanderesse modifie la substance de l'invention durant la procédure.

Enfin, au cours de la procédure orale, la Division d'examen a accordé à la demanderesse une interruption de séance pour étudier les documents nouvellement cités. Selon le protocole de la procédure orale, la durée de l'interruption a été fixée par la demanderesse elle-même, qui n'a sollicité aucune prolongation de cette interruption. Les documents concernés étaient par ailleurs déjà mentionnés dans le rapport de recherche et avaient donc été portés à la connaissance de la demanderesse.

La Chambre ne voit dans tous ces faits aucune trace de vice de procédure.

De plus, au vu des circonstances ci-dessus qui apparaissent surtout imputables à la demanderesse, un remboursement de la taxe de recours ne serait pas équitable en soi, si bien que la condition de la règle 67 CBE dans son ensemble n'est pas remplie.

Pour ces raisons, la requête de remboursement de la taxe de recours est rejetée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré avec mission de délivrer un brevet européen sur la base des documents suivants :

- revendications 1 à 10, déposées le 20 avril 1999 à titre de requête auxiliaire ;

- description,

- pages 1 (avec inclusion de la page 1a), 2, 4 à 7 de la requête auxiliaire déposée le 30 novembre 1998, et

- page 3 déposée le 20 avril 1999 ;

- Dessins d'origine (publiés).

3. La demande de remboursement de la taxe de recours est rejetée.

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