T 0582/97 () of 12.3.2002

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2002:T058297.20020312
Date de la décision : 12 Mars 2002
Numéro de l'affaire : T 0582/97
Numéro de la demande : 90400029.6
Classe de la CIB : B01J 20/04
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Utilisation d'un adsorbant pour la purification de polyoléfines
Nom du demandeur : INSTITUT FRANCAIS DU PETROLE
Nom de l'opposant : (I) ALCAN INTERNATIONAL LIMITED
(II) NOVA CORPORATION OF ALBERTA
Chambre : 3.3.07
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 Art 116
European Patent Convention 1973 Art 123
European Patent Convention 1973 R 57a
European Patent Convention 1973 R 71(2)
Mot-clé : Procédure orale - non-comparution de la requérante - obligation de prévenir l'OEB
Modifications - appropriées et nécessaires pour surmonter les motifs d'opposition (non) - clarté (non) - extension de l'objet de la demande et de la protection conférée (oui) - (requête principale et première requête subsidiaire)
Nouveauté (oui)
Activité inventive (non) - problème et solution (deuxième à quatrième requêtes subsidiaires)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande européenne de brevet n° 90 400 029.6, déposée le 5 janvier 1990 et revendiquant la priorité de la demande FR 8900530 du 18 janvier 1989, a donné lieu le 13. avril 1994 à la délivrance du brevet européen n° 0 379 394 sur la base de 13 revendications. La revendication 1 s'énonçait comme suit :

"1. Utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant au moins un composé d'un élément choisi dans le groupe formé par les alcalins et les alcalino-terreux, ledit élément étant présent dans une teneur comprise entre 15 mmole et 100 mmole pour 100 g d'alumine, pour l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfines."

Les revendications dépendantes 2 à 13 portaient sur des modes préférés de réalisation de l'utilisation selon la revendication 1.

II. Deux oppositions ont été formées contre le brevet délivré, en vue de sa révocation sur les motifs énoncés aux articles 100a) (manque d'activité inventive) et 100b) CBE. Au cours de la procédure d'opposition, le motif d'absence de nouveauté de l'objet tel que revendiqué a été introduit dans la procédure. Les oppositions se sont appuyées, entre autres, sur les documents suivants :

D1: H. Pines & W. O. Haag, "Alumina: Catalyst and Support. I. Alumina, its Intrinsic Acidity and Catalytic Activity", JACS, vol. 82, 1960, pages 2471-2483

D2: CA-A-985 848

D5: W. O. Haag & H. Pines, "Alumina: Catalyst and Support. III. The Kinetics and Mechanisms of Olefin Isomerization", JACS, vol. 82, 1960, pages 2488-2494

D8: H. Pines & W. O. Haag, "Alumina: Catalyst and Support. IX. The alumina Catalyzed Dehydration of Alcohols, JACS, vol. 83, 1961, pages 2847-2852

D15: US-A-3 600 463.

III. La division d'opposition a maintenu le brevet en la forme telle que modifiée durant la procédure orale qui s'est déroulée le 21 février 1997. La revendication 1 telle que maintenue était libellée comme suit :

"1. Utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant au moins un composé d'un élément choisi dans le groupe formé par les alcalins et les alcalino-terreux, ledit élément étant présent dans une teneur comprise entre 15 mmole et 100 mmole pour 100 g d'alumine, pour l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfines et contenant des oléfines susceptibles d'être isomérisées."

D'après la décision de la division d'opposition,

a) les revendications modifiées satisfaisaient aux exigences de l'article 123 CBE, paragraphes 2 et 3 ;

b) le brevet exposait l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ;

c) le motif d'absence de nouveauté de l'objet tel que revendiqué ne s'opposait plus au maintien du brevet modifié, car la revendication 1 déposée durant la procédure orale comportait une nouvelle caractéristique, à savoir la présence d'oléfines susceptibles d'être isomérisées dans le milieu réactionnel obtenu du procédé de polymérisation d'oléfines. L'objet tel que revendiqué était donc nouveau ;

d) quant à l'activité inventive, D2 représentait l'état de la technique le plus proche. Ce document indiquait de choisir la teneur en matériau basique non pas en fonction de l'isomérisation des oléfines, mais en fonction de l'amélioration de l'adsorption des métaux. Le problème à résoudre, à savoir la diminution de l'isomérisation des oléfines lors de l'adsorption avec de l'alumine des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation contenant des oléfines susceptibles d'être isomérisées, avait été résolu par les moyens décrits dans la revendication 1 du brevet attaqué, et ce problème n'était pas connu de D2. Donc, la solution telle que revendiquée ne découlait pas de manière évidente de D2. Les autres documents ne comportaient aucune suggestion utile pour arriver à l'objet tel que revendiqué. Cet objet était donc inventif.

IV. Deux recours ont été formés contre cette décision, reçus respectivement le 22 mai 1997 (opposante I, ci-après requérante I) et le 30 mai 1997 (opposante II, ci-après requérante II). Les taxes de recours prescrites ont été acquittées aux dates respectives. Les mémoires de recours ont été reçus respectivement le 24 juillet 1997 (requérante I) et le 30 juillet 1997 (requérante II).

V. En réponse à une notification de la Chambre en préparation de la procédure orale (notification du 5. décembre 2001), la requérante II a fourni des commentaires et déposé une déclaration ("affidavit") de M. S. J. Brown du 9 février 1996 (lettre du 1 février 2002). Cette déclaration avait déjà été déposée devant la division d'opposition.

VI. Par lettre du 4 mars 2002, l'intimée, en sus des observations à la notification de la Chambre, a déposé deux jeux de revendications à titre de première et deuxième requêtes subsidiaires et de nouveaux essais comparatifs, visant à démontrer la présence d'un effet surprenant dans l'utilisation telle que revendiquée par rapport à l'utilisation connue.

VII. La procédure orale a eu lieu le 12 mars 2002, en l'absence de la requérante I, conformément à la règle 71(2) CBE. Cette absence n'avait pas été annoncée au préalable, mais seulement après que la greffière eût téléphoné au bureau du mandataire agréé en cause, juste avant l'ouverture de la procédure orale. La requérante I avait confirmé par télécopie en date du 12 mars 2002, 10h10, qu'elle ne participerait pas à la procédure orale.

L'intimée a défendu le brevet tel que maintenu par la division d'opposition, à titre de requête principale, et a déposé quatre nouveaux jeux de revendications, à titre de requêtes subsidiaires 1 à 4, remplaçant les requêtes subsidiaires déposées par la lettre du 4 mars 2002 (point VI supra). Les revendications 1 des requêtes subsidiaires s'énoncent, respectivement, comme suit :

Première requête subsidiaire

"1. Utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant au moins un composé d'un élément choisi dans le groupe formé par les alcalins et les alcalino-terreux, ledit élément étant présent dans une teneur comprise entre 15 mmole et 100 mmole pour 100 g d'alumine,

pour la purification d'oléfines par adsorption des métaux provenant d'un catalyseur de coordination contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfines en présence du dit catalyseur de coordination comprenant des éléments des groupes IVB, VB, VIB et

pour la diminution du pouvoir isomérisant de l'alumine envers les oléfines encore contenues dans ledit mélange réactionnel, lesdites oléfines donc pouvant être recyclées totalement."

Deuxième requête subsidiaire

"1. Utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant au moins un composé d'un élément choisi dans le groupe formé par les alcalins et les alcalino-terreux, ledit élément étant présent dans une teneur comprise entre 15 mmole et 100 mmole pour 100 g d'alumine, pour l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfins et pour purifier les oléfines encore contenues dans le mélange réactionnel sans subir d'isomérisation, qui peuvent donc être recyclées totalement."

Troisième requête subsidiaire

"1. Utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant au moins un composé du sodium, le sodium étant présent dans une teneur comprise entre 25 mmole et 90. mmole pour 100 g d'alumine, pour l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfins et pour purifier les oléfines encore contenues dans le mélange réactionnel sans subir d'isomérisation, qui peuvent donc être recyclées totalement."

Quatrième requête subsidiaire

"1. Utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant du sodium incorporé par une solution d'hydroxide de sodium, le sodium étant présent dans une teneur comprise entre 25 mmole et 90 mmole pour 100 g d'alumine, pour l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfins et pour purifier les oléfines encore contenues dans le mélange réactionnel sans subir d'isomérisation, qui peuvent donc être recyclées totalement."

VIII. Les arguments des requérantes peuvent se résumer ainsi :

a) Les essais comparatifs soumis le 4 mars 2002, une semaine avant la procédure orale, avaient été produits tardivement. A ces essais manquaient des détails essentiels permettant leur reproductibilité. Donc, ils étaient inadmissibles pour des raisons juridiques et techniques. D'ailleurs, si les essais étaient admissibles, ils ne seraient pas pertinents.

b) Pour ce qui était de la suffisance de l'exposé, le brevet attaqué ne divulguait que des exemples d'isomérisation, isolés de tout contexte de polymérisation. Les derniers essais comparatifs visaient à surmonter le motif d'insuffisance par des exemples en présence des métaux. Toutefois, l'insuffisance de l'exposé du brevet ne pouvait être surmontée par le dépôt de pièces ultérieures dans le dossier.

c) Concernant les modifications déposées le jour de la procédure orale, elles étaient tardives, avaient été déposées alors que l'autre requérante était absente et n'étaient pas admissibles pour extension de la divulgation d'origine et de la protection conférée par le brevet délivré, et également pour absence de clarté.

d) Nouveauté

d.1) Si des monomères isomérisables tels que butène-1 ou hexène-1 étaient polymérisés, notamment en présence d'un solvant tel que l'hexane, il ne serait pas possible de séparer et récupérer la totalité des monomères non convertis encore présents dans le milieu réactionnel issu du réacteur de l'installation décrite dans D15. Toute partie restante de ces monomères viendrait donc en contact avec l'adsorbant d'alumine, qui, selon D8, contenait une quantité de sodium dans la gamme telle que revendiquée. Donc, la nouvelle caractéristique de la revendication 1 telle que maintenue, notamment "contenant des oléfines susceptibles d'être isomérisées", n'était pas à même d'apporter une distinction envers l'enseignement implicite de D15.

d.2) La revendication 1 attaquée ne définissait pas un adsorbant nécessairement uniforme. D2 divulguait un lit d'adsorbant à base d'alumine, traité par un composé de métal alcalin ou alcalino-terreux et utilisé dans un contexte de polymérisation d'oléfines, qui avait une durée de vie améliorée. Les taux d'alcalins divulgués par D2 ne tombaient pas dans la gamme telle que définie dans la revendication 1. Toutefois, seulement le traitement d'une partie du lit d'adsorbant avait été exemplifié, et D2 n'excluait pas le traitement du lit en entier avec des taux d'alcalins plus faibles. Par conséquent, si la base totale de lit adsorbant était considérée, notamment la quantité totale en sodium par rapport à la quantité totale d'alumine utilisée, la teneur moyenne en sodium tomberait dans la gamme telle que définie dans la revendication 1 attaquée. Le milieu réactionnel issu de la polymérisation décrite par D2 contenait des oléfines susceptibles d'être isomérisées. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 attaquée manquait de nouveauté.

e) Activité inventive

e.1) D2 représentait l'état de la technique le plus proche. Par rapport à D2, la définition du problème technique dans la décision attaquée n'était pas correcte. De plus, le brevet attaqué ne contenait pas d'éléments prouvant que ce problème avait été effectivement résolu. Les exemples avaient été faits en l'absence de polymère, de résidus de métaux et de solvants.

D2 avait reconnu que l'isomérisation était une réaction secondaire non désirée, produite par l'utilisation de l'adsorbant traité. Donc, l'homme du métier aurait choisi d'autres adsorbants, notamment des alumines, et aurait déterminé des gammes de traitement avec les alcalins plus appropriées pour améliorer la durée de vie de l'adsorbeur tout en freinant l'isomérisation des oléfines encore présentes. De tels adsorbants, à base d'alumine et contenant une teneur en matériau alcalin dans la gamme telle que revendiquée, étaient sur le marché avant la date de priorité du brevet opposé.

e.2) D'ailleurs, d'après D1, D5 et D8, qui divulguaient des connaissances de base des propriétés adsorbantes et catalytiques de l'alumine et enseignaient la nature des sites d'isomérisation et la manière de les empoisonner, des taux particuliers d'un métal alcalin tel que le sodium réduisaient toute isomérisation d'oléfines provoquée par l'alumine. Les taux de métal alcalin divulgués par D1 tombaient dans la gamme telle que revendiquée.

e.3) Les propriétés adsorbantes et catalytiques de l'alumine n'étaient pas contradictoires et coexistaient dans plusieurs situations d'emploi, en particulier dans le contexte de polymérisation des oléfines résultant de D2. La titulaire n'avait pas prouvé que dans ce contexte où l'alumine était utilisée, l'effet d'isomérisation ne se manifestait pas de la manière connue.

e.4) La requérante II avait soutenu que D1 contenait presque toutes les caractéristiques de la revendication 1, sauf l'adsorption des résidus de métaux dans un milieu réactionnel issu de la polymérisation des oléfines. Cependant, l'utilisation de l'alumine comme adsorbant de métaux dans un tel contexte résultait de D2. Par conséquent, l'objet du brevet attaqué était évident.

e.5) En somme, avant la date de priorité du brevet en cause, l'homme du métier possédait la connaissance des effets du traitement de l'alumine avec un métal alcalin sur l'isomérisation des oléfines. Par conséquent, il serait arrivé de manière évidente, sans effort excessif, à déterminer la teneur optimale en matériau alcalin à utiliser pour le traitement de l'alumine, donc à l'objet tel que revendiqué. L'objet tel que revendiqué n'impliquait donc pas d'activité inventive.

f) Durant la procédure orale, les documents D3 tels que mentionnés dans la décision attaquée et dans la notification de la chambre n'ont plus été discutés.

IX. Les arguments de l'intimée peuvent se résumer ainsi :

a) Les essais comparatifs visaient à surmonter les objections soulevées par les opposantes, en particulier à montrer que le problème technique avait été résolu par l'utilisation telle que revendiquée tout en achevant un avantage technique surprenant vis-à-vis l'état de la technique D2, notamment un faible pouvoir isomérisant et un fort pouvoir adsorbant.

Ces essais montraient que la gamme de la teneur en sodium telle que revendiquée n'avait pas été choisie de manière arbitraire, car au dehors de cette gamme l'isomérisation était plus forte.

b) Concernant l'exposé de l'invention, le motif invoqué n'était pas fondé. De plus, les essais comparatifs ne visaient pas à suppléer des lacunes de la description. Néanmoins, le fait que l'isomérisation était plus forte au dehors de la gamme revendiquée, en présence et en l'absence de métaux de catalyseurs, relativisait toute allégation d'insuffisance de l'exposé.

c) Les modifications apportées aux revendications et le nombre de modifications proposées résultaient, en premier lieu, de la notification de la chambre en préparation de la procédure orale et, en deuxième lieu, du fait que la représentation de la nouvelle titulaire était assurée par des mandataires récemment constitués.

Toutefois, ces modifications se basaient sur la demande d'origine et visaient à surmonter les motifs d'opposition. Les modifications comportaient de nouvelles définitions fonctionnelles qui constituaient une restriction de la protection conférée par la brevet délivré.

Concernant les nouvelles gammes de la teneur en sodium dans les requêtes subsidiaires, elles résultaient d'une généralisation permise de valeurs exemplifiées dans la demande d'origine. Elles visaient à restreindre les objets des revendications aux traitements qui permettaient d'achever à la fois une réduction du pouvoir isomérisant et une amélioration du pouvoir adsorbant.

d) Nouveauté

d.1) Dans D15, rien ne laissait penser que les monomères susceptibles d'être isomérisés seraient mal éliminés du mélange réactionnel. Si effectivement de tels monomères étaient encore présents, la quantité restante pouvant entrer en contact avec l'alumine serait très faible, il n'en resterait que des traces et l'isomérisation subie serait négligeable. Donc, D15 ne détruisait pas la nouveauté.

d.2) En ce qui concerne D2, le traitement de l'adsorbant pouvait se faire :

- en remplaçant une partie du lit par un matériau purement alcalin tel que l'oxyde de zinc et les (hydr)oxydes et sels d'acides faibles de métaux alcalins et alcalino-terreux ; ou,

- en imprégnant une partie d'adsorbant désirée avec une solution d'un métal alcalin.

Le calcul selon lequel l'adsorbeur de D2 contiendrait de manière globale une teneur en métal alcalin dans la gamme telle que définie dans la revendication 1 attaquée ne pouvait anticiper l'objet tel que revendiqué, qui portait non pas sur un adsorbeur à base d'alumines présentant globalement de telles caractéristiques, mais sur l'utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant le métal alcalin dans la teneur revendiquée.

De plus, l'argument selon lequel les traitements partiels de l'adsorbant étaient transposables au traitement complet du lit adsorbant, par une quantité de matériau alcalin dans la gamme telle que définie dans la revendication 1 attaquée, ne résultait pas de D2, mais d'une combinaison et d'une interprétation d'enseignements tirés a posteriori de D2.

Donc, le document D2 n'anticipait pas l'objet tel que revendiqué.

e) Activité inventive

e.1) Quant à l'activité inventive, un adsorbeur tel que divulgué par D2 ne remplirait pas le but fixé dans le brevet attaqué, puisque l'alumine en tête de l'adsorbeur, traitée avec des taux totalement différents de matériau alcalin par rapport à ceux utilisés dans le brevet attaqué isomériserait les monomères autant sinon plus que l'alumine non traitée.

D2 ne visait pas le but de freiner systématiquement l'isomérisation des oléfines restantes dans le milieu réactionnel. Le but de D2 était d'améliorer la durée de vie de l'adsorbeur et cela demandait des quantités importantes d'alcalins, quantités qui n'étaient pas efficaces contre l'isomérisation.

D2 mettait en garde l'utilisateur quant à l'effet que pouvait avoir l'adsorbant traité sur l'isomérisation des monomères restants. Mais il ne suggérait pas de puiser dans la gamme des alumines existantes pour les essayer afin de trouver la plus apte, pas plus que de tester une alumine avec un taux d'alcalin différent.

D'ailleurs, les alumines existantes se différenciaient également par d'autres caractéristiques.

Par conséquent, D2 ne suggérait pas l'utilisation d'alumines à faibles taux d'alcalins comme dans le brevet en litige.

e.2) Les documents D1 à D8 n'ayant aucun lien avec la polymérisation des oléfines, l'homme du métier n'avait aucune incitation à les combiner avec l'enseignement de D2.

Ces documents portaient sur l'étude des conséquences chimiques de l'acidité intrinsèque de l'alumine. Ils divulguaient la manière de bloquer les réactions modèles d'isomérisation étudiées, notamment par imprégnation des sites acides par des alcalins. Néanmoins, ils incitaient à bloquer la plus grande partie possible de ces sites, ce qui demandait une quantité importante d'alcalins. En revanche, d'après le brevet attaqué, l'isomérisation des oléfines restantes dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfines, en présence de résidus de métaux du catalyseur, ne pouvait être freinée de manière systématique que par une alumine traitée avec une teneur critique en alcalin. Au dehors de cette teneur critique l'isomérisation était plus forte.

e.3) Par conséquent, même en cas de combinaison des enseignements de D2 et D1, ou D2 et D8, l'homme du métier ne serait pas arrivé à la teneur critique en alcalin telle que définie dans la revendication 1 en litige.

X. Les parties ont présenté les requêtes suivantes :

Les requérantes ont demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet.

L'intimée a demandé le rejet du recours et le maintien du brevet, à titre principal sur la base des revendications maintenues par la division d'opposition ou, à titre subsidiaire, sur la base d'une quelconque des requêtes subsidiaires 1 à 4 présentées pendant la procédure orale devant la chambre de recours.

Motifs de la décision

1. Les recours sont recevables.

2. Questions de procédure

Toute partie citée à une procédure orale qui ne souhaite plus y prendre part devrait prévenir la chambre de recours (notamment le greffe) et le signaler à toute autre partie par écrit, dès qu'elle sait qu'elle n'assistera pas à l'audience à laquelle elle a été convoquée.

Ce genre d'information ne peut ni être donné par voie orale par une des autres parties, ni être traité par téléphone le jour de la procédure orale, surtout lorsqu'il s'agit d'une procédure intéressant plusieurs parties.

La télécopie envoyée par la requérante I le jour de la procédure orale, sur requête de la greffière, montre que l'absence n'était pas due à des circonstances imprévisibles. Le mandataire avait été instruit de ne pas prendre part à l'audience et il aurait pu en informer la chambre et les autres parties préalablement.

Cette attitude de la requérante I, outre qu'elle a donné lieu à un report injustifiable de l'ouverture de la procédure orale, manifeste un manque de courtoisie et de respect envers les parties et la chambre.

Malgré cette conduite répréhensible, la chambre n'a pas procédé à une répartition des frais occasionnés par la procédure orale en faveur des parties ayant comparues (voir les instructions à l'usage des parties aux procédures de recours et de leurs mandataires, OJ OEB 1996, 342, point 3.5.2, troisième paragraphe).

3. Requête principale

3.1. Modifications

Par rapport à la revendication 1 telle que délivrée, la revendication 1 faisant l'objet de la décision intermédiaire comporte la nouvelle caractéristique "et contenant des oléfines susceptibles d'être isomérisées".

La première base dans la demande d'origine, telle que donnée par la titulaire durant la procédure orale devant la chambre, notamment page 2, lignes 1 à 4, ne correspond pas à la nouvelle caractéristique et, en fait, porte sur l'état de la technique antérieure. La modification ne peut se fonder sur cette partie.

La deuxième base indiquée par la titulaire, notamment page 4, lignes 27 à 28, précise que "les oléfines encore contenues dans le mélange réactionnel sont purifiées sans subir d'isomérisation et donc peuvent être recyclées totalement". En d'autres termes, les oléfines telles que définies dans ce passage, bien qu'elles soient susceptibles d'être isomérisées, en effet ne sont pas isomérisées en contact avec l'adsorbant et peuvent donc être recyclées totalement.

En revanche, la nouvelle caractéristique de la présente revendication 1 implique simplement la présence d'oléfines susceptibles d'être isomérisées dans le milieu réactionnel, où le terme "susceptibles d'être" implique la possibilité qu'elle soient en fait isomérisées en contact avec l'adsorbant, avec tout degré d'isomérisation.

En d'autres termes, l'absence d'isomérisation des oléfines susceptibles d'être isomérisées en contact avec l'adsorbant et la possibilité de les recycler totalement après le passage sur l'adsorbant, ne sont pas des conditions requises par l'utilisation selon la présente revendication 1, contrairement aux conditions requises à l'utilisation d'origine.

Cette nouvelle caractéristique n'étant pas divulguée en tant que telle dans la demande d'origine, il s'ensuit que la modification constitue une extension de l'objet de la demande telle que déposée qui, par conséquent, ne peut satisfaire aux exigences de l'article 123(2) CBE.

La requête principale n'est donc pas recevable.

4. Première requête subsidiaire

4.1. Modifications

4.1.1. Par rapport à la revendication 1 telle que délivrée, la revendication 1 comporte de nouvelles caractéristiques, qui s'énoncent comme suit :

- pour la purification d'oléfines par adsorption des métaux provenant d'un catalyseur de coordination contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfines en présence du dit catalyseur de coordination comprenant des éléments des groupes IVB, VB, VIB; et

- pour la diminution du pouvoir isomérisant de l'alumine envers les oléfines encore contenues dans ledit mélange réactionnel, lesdites oléfines donc pouvant être recyclées totalement.

4.1.2. La revendication 1 requiert maintenant que la purification des oléfines soit atteinte par adsorption de tous les métaux contenus dans le milieu réactionnel, qui résultent du catalyseur de coordination. Cependant, les catalyseurs utilisés dans les procédés de polymérisation des oléfines comportent, en sus des métaux des groupes IVB, VB et VIB, également d'autres métaux, ce qui est reconnu dans la demande d'origine, page 1, lignes 12 à 17.

La revendication 1 telle que délivrée portant simplement sur l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB et VIB contenus dans le milieu réactionnel, il s'ensuit qu'elle a été modifiée de façon à étendre la protection conférée par le brevet tel que délivré. Par conséquent, la première modification contrevient aux exigences de l'article 123(3) CBE.

4.1.3. La revendication 1 comporte également des termes qui ne se trouvaient pas dans la revendication 1 telle que délivrée, notamment : "catalyseur de coordination", "métaux provenant d'un catalyseur de coordination", "pouvoir isomérisant" et "diminution du pouvoir isomérisant".

En outre, la revendication 1 porte sur l'utilisation d'un adsorbant pour obtenir un effet sur l'adsorbant lui-même, notamment la diminution de son pouvoir isomérisant envers des oléfines.

Le lien entre la "diminution du pouvoir isomérisant" et le "recyclage total des oléfines", qui résulte de la nouvelle revendication 1, ne semble pas se fonder de manière directe et non équivoque sur la description d'origine.

De plus, ces modifications visent à parfaire le brevet, sans être appropriées et nécessaires pour surmonter les motifs d'opposition, et ne résultent pas d'une position de repli contenue dans la demande d'origine.

Par conséquent, ces modifications contreviennent aux exigences des articles 84 (clarté) et 123(2) CBE et de la règle 57bis CBE.

4.1.4. En conséquence, la première requête subsidiaire n'est pas recevable.

5. Deuxième requête subsidiaire

5.1. Modifications

5.1.1. Par rapport à la revendication 1 telle que délivrée, la revendication 1 comporte la nouvelle caractéristique "et pour purifier les oléfines encore contenues dans le mélange réactionnel sans subir d'isomérisation, qui peuvent donc être recycler totalement".

Cette nouvelle caractéristique est divulguée en tant que telle dans la demande d'origine, notamment à la page 4, lignes 27 à 29. Cette modification est donc admissible.

Les revendications dépendantes 2 à 13 n'ont subi aucune modification.

5.2. Nouveauté

5.2.1. D15 concerne un procédé pour éliminer les résidus de catalyseur de polymérisation des polyalphaoléfines obtenues de la polymérisation d'alpha-oléfines contenant 2. à 20 atomes de carbone, la polymérisation étant conduite en présence de catalyseurs de polymérisation stéréo-spécifiques solides, le procédé consistant à filtrer une solution de ces polyalphaoléfines dans un solvant des polyalphaoléfines au-dessus de 100°C pour enlever la majeure partie des résidus de catalyseur et, ensuite, à contacter la solution filtrée du polymère avec de l'alumine, pour éliminer pratiquement toute portion restante de ces résidus de catalyseur (revendication 1).

Les polymères sont préparés à partir de monomères tels que l'éthylène, le propylène, le butène-1, l'héxène, le décène-1 (colonne 3, lignes 7 à 13).

Les catalyseurs stéréo-spécifiques employés contiennent, par exemple, un premier constituant à base de lithium, un deuxième constituant qui est un halogénure d'un élément de transition des groupes IVB à VIB, par exemple de titane, zirconium, chrome, tungstène, molybdène et vanadium, et, facultativement, un troisième constituant tel que le fluorure de sodium ou l'oxyde de magnésium (colonne 3, lignes 25 à 46).

La polymérisation des alpha-oléfines est mise en oeuvre en présence d'un liquide organique inerte qui est, à la température de polymérisation, un solvant du polymère qu'on veut préparer (colonne 3, ligne 74 à colonne 4, ligne 2).

D'après le schéma de l'installation de polymérisation d'Alpha-oléfines (figure unique de D15), le mélange brut de réaction sortant du réacteur 14 parvient à un séparateur 16 d'où le monomère sort par la tubulure 17 et est recyclé dans le réacteur. Afin de diminuer la viscosité de la solution contenant le polymère, le solvant est également alimenté au séparateur 16. La solution diluée de polymère sortant du séparateur 16, qui peut contenir un adjuvant de filtrage, passe ensuite sur un filtre 21, qui sépare la solution de polymère de la majeure partie des résidus de catalyseur. La solution filtrée quitte le filtre 21 par la tubulure 22 pour parvenir dans l'adsorbeur 24, où sont éliminés les résidus de catalyseur et les impuretés ayant échappés au filtrage. L'adsorbeur contient de l'alumine (colonne 4, ligne 32 à colonne 5, ligne 27).

Les exemples concernent, respectivement, la préparation du polypropylène (exemples 1, 3, 4 et 7) et la préparation d'un polyallomère de propylène et d'éthylène (exemples 2, 5 et 6).

La composition de l'alumine utilisée n'est pas donnée de manière directe et non équivoque par D15. L'exemple 1 mentionne l'alumine Alcoa F-3 et l'exemple 2 mentionne l'alumine Harshaw AL-0104, sans toutefois préciser la composition de telles alumines.

D'après la requérante I, la séparation des monomères tels que les alpha-oléfines supérieures du milieu réactionnel sortant du réacteur, et contenant le polymère, un solvant tel que l'hexane et les résidus métalliques, ne saurait être complète. Donc, après la séparation, le milieu réactionnel contiendrait encore des oléfines supérieures qui arriveraient en contact avec un adsorbant à base d'alumine qui contenait une teneur en métal alcalin dans la gamme telle que revendiquée dans le brevet opposé. Cette teneur résultait de D8 (page 2848, colonne de droite, "experimental", "catalyst C").

Néanmoins, aucun exemple de D15 ne porte sur des monomères susceptibles d'être isomérisées dans un solvant tel que l'hexane et sur une alumine ayant une teneur en métal alcalin dans la gamme telle que revendiquée. Par conséquent, même si des oléfines supérieures étaient séparées de manière incomplète, toute partie restante de monomère, notamment des traces, entrerait en contact avec un adsorbant à base d'alumine ayant une composition non définie de manière directe et non équivoque par D15.

De plus, D15 ne comporte aucune référence à D8. Mais, même si la composition de l'alumine utilisée dans l'exemple 2 de D15 (Harshaw AL-104) avait une teneur en métal alcalin dans la gamme telle que définie dans la revendication 1 en litige, cette alumine serait toutefois utilisée pour la polymérisation du propylène avec de l'éthylène, des oléfines qui ne sont pas susceptibles d'être isomérisées.

Cela revient à dire que la combinaison de conditions opérationnelles tirée de D15 par la requérante I - notamment une oléfine supérieure à polymériser susceptible de subir l'isomérisation, un solvant tel que l'hexane, une séparation incomplète des monomères après la réaction de polymérisation d'une telle oléfine et une alumine ayant une teneur en métal alcalin dans la gamme telle que revendiquée dans le brevet en litige - ne résulte pas de manière directe et non équivoque de D15.

Donc, même si la combinaison des documents D15 et D8 était admissible dans le présent cas pour attaquer la nouveauté et même si la composition de l'alumine "Harshaw AL-104" de l'exemple 2 de D15 était restée constante dans le temps, il y aurait encore des caractéristiques de l'utilisation revendiquée qui manquent.

Par conséquent, l'utilisation revendiquée est nouvelle par rapport à D15.

5.2.2. D2 porte sur un procédé pour l'élimination des résidus de catalyseur présents dans les polyoléfines obtenues par polymérisation d'Alpha-oléfines dans un hydrocarbure liquide inerte en présence d'un système de catalyseurs de coordination, l'élimination des résidus étant mise en oeuvre par contact d'un mélange contenant la polyoléfine, les résidus du catalyseur et l'hydrocarbure liquide inerte avec un adsorbant choisi dans le groupe constitué par l'alumine et la bauxite activée, ainsi que par leurs mélanges, ledit adsorbant étant amélioré par traitement avec un matériau alcalin choisi dans le groupe constitué par l'oxyde de zinc et par les hydroxydes et les sels d'acides faibles de métaux alcalins et alcalino-terreux, ainsi que par leurs mélanges (revendication 1).

Les catalyseurs mentionnés par D2 comprennent les éléments des groupes IVB, VB et VIB du classement périodique des éléments, en particulier le vanadium, le titane et le zirconium. Ils comprennent également des agents réducteurs, tels que les composés alkyl métalliques, les hydrures métalliques ou les hydroxydes de métaux (page 1, lignes 8 à 13). Ces catalyseurs peuvent être utilisés pour la polymérisation d'Alpha-oléfines contenant de 2 à 20 atomes de carbone (page 1, lignes 15 à 20), en particulier pour la polymérisation d'un mélange d'alpha-oléfines constitué par l'éthylène et le butène (revendication 6).

D'après un mode de réalisation préféré, l'adsorbant est traité avec un mélange aqueux d'un hydroxyde d'un métal choisi dans le groupe constitué par le lithium, le sodium, le potassium, le magnésium, le calcium et le baryum et, ensuite, par séchage (revendications 2 et 3). L'adsorbant est traité avec une quantité de matériau alcalin allant jusqu'à 20% en poids (revendication 7; page 5, lignes 31 à 32). Enfin, il est placé dans une enceinte pour former un lit adsorbant pour éliminer les résidus de catalyseurs (page 4, lignes 26 à 28).

L'adsorbant ainsi traité est utilisé pour remplacer l'adsorbant du lit, en entier ou en partie, la quantité d'adsorbant requise étant fonction du degré de traitement et du niveau d'impuretés contenues dans le milieu à purifier. La limite inférieure du traitement est déterminée par la quantité requise pour obtenir l'amélioration désirée de l'élimination des résidus, la limite supérieure par la capacité d'absorption du matériau alcalin sans influer sur les propriétés adsorbantes des résidus (page 5, lignes 5 à 31).

D'après D2, un adsorbant traité avec 10% en poids de sodium hydroxyde peut constituer de 15 à 35% du lit d'adsorbant, préférablement de la partie initiale, où le mélange réactionnel contacte l'adsorbant (page 6, lignes 1 à 4).

L'objection de manque de nouveauté telle que soulevée par la requérante II se base sur l'argument suivant :

Si la partie initiale du lit, notamment 15 à 35%, préférablement 25%, était traitée avec une solution d'hydroxyde de sodium pour obtenir un taux dans l'adsorbant sec de 10% en poids, la proportion de sodium hydroxyde sur la quantité totale d'alumine contenue dans le lit en entier correspondrait à une teneur moyenne en hydroxyde de sodium de 2,5% en poids, à savoir une teneur en sodium dans la gamme telle que revendiquée. En outre, comme D2 divulguait la possibilité de traiter le lit adsorbant en entier, cela impliquait un traitement pour obtenir un taux d'hydroxyde de sodium d'environ 2,5% en poids, donc un taux de sodium dans la gamme revendiquée.

Néanmoins, en cas de traitement d'une partie du lit, l'adsorbeur serait constitué de deux différents adsorbants, un adsorbant traité avec 10% de sodium hydroxyde et un adsorbant non traité. Chacune de ces parties aurait une teneur en alcalin au dehors de la gamme telle que revendiquée. Par contre, la revendication 1 en litige requiert un adsorbant contenant la proportion de métal alcalin ou alcalino terreux telle que définie et non pas un lit contenant différents adsorbants ayant en moyenne une concentration d'alcalin telle que revendiquée.

Enfin, même si D2 mentionne plusieurs possibilités de traitement, une divulgation spécifique de la gamme d'alcalin telle que revendiquée manque dans cet enseignement.

En conséquence, D2 ne divulgue pas de manière directe et non équivoque un traitement de l'adsorbant à base d'alumine avec une quantité de matériau alcalin dans la gamme telle que revendiquée dans la présente requête subsidiaire. L'objet de la revendication 1 selon la présente requête est donc nouveau par rapport à D2.

5.2.3. En somme, ni D15 ni D2 ne préjugent de la nouveauté de l'utilisation faisant l'objet de la revendication 1 selon la présente requête. D'autres documents n'ont pas été utilisés pour attaquer la nouveauté et la chambre n'a aucune raison à modifier ce point de vue.

5.2.4. Par conséquent, l'utilisation faisant l'objet de la revendication 1 est nouvelle.

5.3. Activité inventive

5.3.1. Le brevet en litige porte sur l'utilisation d'un adsorbant pour la purification de polyoléfines.

Une telle utilisation est décrite dans D2, qui a été considéré comme le document qui représente l'état de la technique le plus proche par les parties et par la division d'opposition.

D2 concerne l'utilisation d'un adsorbant, en particulier une alumine ou une bauxite activée, traité avec un métal alcalin ou alcalino-terreux pour l'adsorption des résidus de catalyseurs de coordination contenus dans un milieu réactionnel provenant d'un procédé de polymérisation d'Alpha-oléfines, le milieu contenant du polymère, des monomères non convertis et de l'hydrocarbure inerte. D'après l'enseignement général de D2, le traitement avec le métal alcalin ou alcalino-terreux résulte en une plus longue durée de vie de l'adsorbant (page 5, lignes 6 à 9).

Pour ce but, le niveau d'hydroxyde de sodium peut arriver jusqu'à 20% en poids. Un niveau de 10% en poids utilisé pour traiter de 15 à 35% de la partie initiale du lit adsorbant est particulièrement préféré (page 6, lignes 1 à 4). La possibilité de traiter le lit en entier avec des taux plus faibles n'est pas exclue.

D'après D2, les monomères non convertis, séparés du milieu réactionnel après le contact avec l'adsorbant, peuvent être recyclés dans le procédé de polymérisation (page 6, lignes 27 à 30).

Une isomérisation des oléfines ayant plus que 3 atomes de carbone peut avoir lieu dans certaines conditions en contact avec un adsorbant traité selon D2, qui peut se comporter donc comme catalyseur d'isomérisation de telles oléfines et comme adsorbant. A titre d'exemples de telles conditions, D2 mentionne le bon rendement de la réaction d'isomérisation du butène-1 à butène-2 en contact avec le "magnesol" (page 6, ligne 30 à page 7, ligne 2). Cet enseignement de D2 implique donc qu'il faut éviter le "magnesol" si l'isomérisation est indésirable. A cet égard, D2 suggère en particulier de tester l'adsorbant au préalable (page 6, lignes 30 à 35).

Néanmoins, une telle méthode n'est pas satisfaisante au vu du recyclage des monomères non convertis encore contenus dans le milieu réactionnel dans le procédé de polymérisation. Cette isomérisation a pour conséquence que le solvant et les monomères récupérés ne peuvent être totalement recyclés et doivent être soumis à une épuration supplémentaire pour éliminer les produits isomérisés, comme mentionné dans le brevet en litige (page 2, lignes 24 à 32).

Le brevet en litige, afin de remédier à ces inconvénients, vise donc une méthode pour l'adsorption des éléments des groupes IVB, VB, VIB contenus dans un milieu réactionnel obtenu dans un procédé de polymérisation d'oléfines par l'utilisation d'un adsorbant à base d'alumine présentant un faible pouvoir isomérisant, afin de pouvoir purifier les oléfines encore contenues dans le milieu sans qu'une isomérisation ait lieu qui empêcherait de pouvoir les recycler totalement (page 2, lignes 2 à 6 et 33 à 34; page 3, lignes 41 à 42).

5.3.2. A ces fins, le brevet attaqué propose l'utilisation d'un adsorbant à base d'alumine comprenant au moins un composé d'un élément choisi dans le groupe formé par les alcalins et les alcalino-terreux, ledit élément étant présent dans une teneur comprise entre 15 mmole et 100 mmole pour 100 g d'alumine, comme défini dans la revendication 1.

5.3.3. Les exemples présentés dans le tableau de la page 4 du brevet en litige montrent le pouvoir isomérisant des alumines imprégnées par les différentes solutions utilisées, en comparaison avec des alumines qui ne sont pas imprégnées ou qui sont imprégnées avec une teneur en alcalin insuffisante ou excessive, à savoir au dehors de la gamme telle que revendiquée.

Néanmoins, ces tests du pouvoir isomérisant ont été faits en présence d'alumine et de butène-1, mais en l'absence de polyoléfines, de solvant et de résidus de catalyseurs, donc au dehors d'un contexte d'un milieu réactionnel provenant d'une polymérisation d'oléfines.

Par les tests comparatifs soumis par télécopie le 4. mars 2002, l'intimée a essayé de démontrer un faible pouvoir isomérisant dans un contexte de polymérisation et a aussi cherché d'étayer un pouvoir adsorbant amélioré, bien que cet aspect ne soit pas mentionné dans le brevet en litige.

Toutefois, les exemples additionnels résumés dans le tableau I de la page 2 du rapport du 4 mars 2002 ne peuvent ni prouver un faible pouvoir isomérisant, ni étayer un pouvoir adsorbant amélioré, dans le contexte d'un milieu réactionnel provenant d'un procédé de polymérisation d'oléfines. Ces propriétés ont été déterminées de manière séparée, notamment le pouvoir isomérisant selon le mode opératoire décrit dans le brevet en litige, donc au dehors d'un contexte de polymérisation, et le pouvoir adsorbant en présence des résidus de métal, mais en l'absence de polyoléfines et d'oléfines contaminées par lesdits résidus métalliques.

En tout cas, un niveau élevé du pouvoir adsorbant invoqué pour la première fois par la titulaire dans sa lettre du 4 mars 2002 est tardif, n'a aucune base dans la demande d'origine et impliquerait une nouvelle formulation d'un problème technique qui n'est ni mentionné ni déductible de la demande d'origine et qui ne serait pas acceptable. Par conséquent, cet avantage allégué ne peut être pris en considération pour établir la présence d'une activité inventive.

Concernant les expériences complémentaires conduites selon le mode décrit à la page 2 du rapport du 4. mars 2002 (les nouveaux exemples décrits dans les trois derniers paragraphes de la page 2), elles ont été conduites par exposition d'un adsorbant à un milieu constitué de toluène, d'un complexe de vanadium et de butène-1, mais en l'absence de polyoléfines. Les résultats de ces exemples montrent qu'un adsorbant selon la revendication 1 en litige, contenant 48 mmole de Na/100g Al2O3, a effectivement adsorbé les résidus de catalyseur et a formé 9% de butène-2.

Donc, d'après les exemples du brevet et les expériences complémentaires du rapport du 4 mars 2002, l'existence d'une purification des oléfines encore contenues dans le milieu réactionnel "sans subir d'isomérisation", telle que définie dans la revendication 1 en litige, n'a pas été prouvée. Ces exemples démontrent seulement que l'adsorbant à base d'alumine défini dans la revendication 1 en litige possède un faible pouvoir isomérisant et est à même de capter les résidus de catalyseur. Toutefois, la chambre a aussi de grandes réserves que le problème technique ainsi formulé ait été résolu dans un contexte de polymérisation d'oléfines dans toute la gamme telle que revendiquée. Néanmoins, pour la présente décision, elle présume la solution effective du problème technique posé ci-dessus (point 5.3.1, dernier paragraphe).

5.3.4. Il reste à décider si la solution revendiquée implique une activité inventive.

5.3.5. D'après D2, l'adsorbant traité par des alcalins peut se comporter comme un catalyseur d'isomérisation des oléfines. Cet adsorbant traité manifeste donc des propriétés adsorbantes et catalytiques, ce qui incite à se reporter aux connaissances des propriétés catalytiques d'isomérisation de l'adsorbant traité, en particulier à celles de l'alumine traitée par des alcalins, afin de chercher une manière de réduire l'isomérisation, si elle est indésirable pour le recyclage des monomères et du solvant dans le procédé de polymérisation.

Les documents D1, D5 et D8 portent sur ces propriétés catalytiques d'isomérisation des oléfines, notamment sur la présence et la nature des sites actifs présents sur l'alumine et sur les conséquences chimiques résultantes.

5.3.6. D1 porte sur l'étude de l'acidité intrinsèque de l'alumine et sur l'activité catalytique qui en résulte. Pour mesurer cette activité catalytique, D1 utilise une série de réactions modèles, notamment l'isomérisation du cyclohexène et du 3,3-diméthyl-1-butène (3,3-DMB) et la déshydratation du 1-butanol (page 2472, colonne de gauche, troisième et quatrième paragraphes).

Une série d'alumines contenant des teneurs croissantes en sodium a été préparée, sous les mêmes conditions opérationnelles, par imprégnation d'une alumine par une solution aqueuse de sodium hydroxyde. Après séchage et calcination, les catalyseurs ont été testés par lesdites réactions modèles. Les résultats obtenus sont résumés, en particulier, dans les tableaux I à III et à la page 2476, colonne de droite "Alkali Metal Ions", et représentés sous forme visible par la figure 2.

La figure 2 à la page 2477 de D1 montre que l'activité de l'alumine envers toutes les réactions modèles est empoisonnée par imprégnation avec du sodium hydroxyde (page 2476, colonne de droite, dernier paragraphe). En particulier, une teneur de sodium d'environ 1,5% en poids est à même de bloquer l'extension des dites réactions modèles. Conformément à la déclaration de M. Brown (tableau de la page 4), un taux de sodium de 1,5% en poids correspond à une teneur d'environ 62 mmole pour 100 g d'alumine, donc une teneur dans la gamme telle que revendiquée dans le brevet en litige.

Les résultats du tableau III, page 2475, en particulier, montrent l'effet que l'imprégnation d'une alumine par le sodium hydroxyde a sur la réaction de déshydratation du 1-butanol et sur la successive isomérisation du butène-1, résultant in situ de la dite déshydratation, en présence de l'alumine traitée.

D'après ces résultats, l'isomérisation du butène-1 obtenu in situ est également freinée par l'imprégnation de l'alumine avec du sodium hydroxyde.

Par conséquent, d'après D1, même si les réactions modèles d'isomérisation se déroulent selon des mécanismes différents, les sites responsables de la catalyse acide d'isomérisation semblent être les mêmes et leur imprégnation par un métal alcalin tel que le sodium a la capacité de réduire l'isomérisation par rapport à celle provoquée par l'alumine non dopée.

5.3.7. D5 est axé sur l'étude de la cinétique et des mécanismes de l'isomérisation des oléfines, en particulier de l'isomérisation du 3,3-diméthylbutène et du butène.

D5 cite D1 (note (3) de la page 2488, colonne de gauche) comme preuve de l'activité catalytique des sites acides de l'alumine et mentionne que le dopage avec les ions sodium et potassium désactive l'alumine envers l'isomérisation des oléfines (page 2488, colonne de droite, premier paragraphe, en particulier dernière phrase).

Toutefois, D5 n'adresse pas le dopage de l'alumine et les effets sur son activité catalytique. Par conséquent, contrairement à l'opinion de la titulaire, qui l'avait introduit dans la procédure d'opposition, D5 ne saurait contredire l'enseignement de D1 quant aux effets de l'utilisation d'alumines dopées avec du sodium sur l'isomérisation des oléfines.

5.3.8. D8 porte sur la déshydratation des alcools, tels que le butanol-1, sur des alumines ayant une large gamme d'activité sur l'isomérisation des produits résultants (page 2847, introduction).

D'après D8, une alumine à haute pureté (0.001% Na) a une activité très élevée envers l'isomérisation (catalyseur P, page 2848, colonne de droite ; page 2849, colonne de droite, avant dernier paragraphe, dernière phrase ; tableau II, page 2850, exp. 16 à 18) et la déshydratation des alcools (page 2852, colonne de droite, dernier paragraphe, cinquième à huitième phrases). Par contre, le dopage de l'alumine avec un alcalin tel que le sodium ou le potassium désactive l'isomérisation des oléfines.

En particulier, l'alumine contenant 1.0% de potassium a une bonne activité de déshydratation et une faible activité d'isomérisation des oléfines (Catalyseur A, page 2848, colonne de droite, "experimental"). Pareillement se comportent les alumines commerciales (catalyseurs C et D) contenant respectivement 0.36% et 0.38% de sodium (page 2849, colonne de droite, "experimental", dernier paragraphe, et page 2850, tableau II). Concernant le catalyseur "D", même en présence d'une charge de 1-butène, il a un pouvoir isomérisant très faible (exemples comparatifs 14 et 15 du tableau II à la page 2850).

Les conclusions du dernier paragraphe de la colonne de droite à la page 2852 de D8 (voir également la figure 4) confirment que les mêmes sites acides de l'alumine semblent être responsables de toutes les isomérisations étudiées et que leur dopage par le sodium hydroxyde, en particulier avec une teneur en sodium de 1.5%, est à même de les freiner de manière systématique.

5.3.9. Par conséquent, l'homme du métier, mettant en oeuvre le procédé de D2 en présence d'oléfines supérieures susceptibles d'être isomérisées et cherchant à réduire leur isomérisation afin de pouvoir les recycler, aurait, au vu des connaissances mentionnées ci-dessus, traité l'alumine avec des alcalins pour obtenir une teneur apte à freiner l'isomérisation, par exemple une teneur d'environ 1,5% en sodium divulguée par D1 et D8.

Ce faisant, l'homme du métier s'attendait à une réduction du pouvoir isomérisant. De plus, au vu de l'enseignement général de D2, selon lequel tout niveau de traitement par les alcalins tels que le sodium produit une amélioration de la durée de vie de l'adsorbant, l'homme du métier ne se trouvait pas en présence d'exigences conflictuelles insurmontables. Il serait donc arrivé de manière évidente à une utilisation telle que revendiquée, tout en s'attendant aux effets correspondants. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 selon la présente requête n'implique pas d'activité inventive (Article 56 CBE).

6. Troisième et quatrième requêtes subsidiaires

6.1. Modifications

Bien que la Chambre ait de fortes réserves que les modifications apportées à la revendication 1 satisfassent aux exigences de la CBE, en particulier à celles de l'article 123(2) CBE, à cause de la généralisation de caractéristiques isolées d'un contexte spécifique, au vu des conclusions tirées par la suite sur la question de l'activité inventive, elle considère qu'il n'est pas opportun de traiter cette question en détail, car cela ne saurait changer le sort du brevet attaqué, pour les raisons énoncées ci-après.

6.2. Les revendications 1 de ces requêtes subsidiaires comportent des définitions plus spécifiques quant à l'utilisation du métal alcalin pour l'imprégnation de l'alumine et à la gamme de teneur en alcalin. Les requêtes portent en particulier sur l'utilisation d'un composé du sodium, plus particulièrement sur l'hydroxyde de sodium, pour imprégner l'alumine avec une teneur en sodium allant de 25 à 90 mmole pour 100 g d'alumine.

Ces nouvelles définitions, cependant, ne demandent pas la formulation d'un nouveau problème technique. De plus, elles ne sont pas aptes à faire disparaître l'importance des connaissances divulguées par D1. En fait, l'utilisation de l'hydroxyde de sodium pour obtenir une alumine avec une teneur en sodium dans la nouvelle gamme telle que revendiquée résulte encore de D1.

Par conséquent, les arguments développés et les conclusions tirées pour l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 de la deuxième requête subsidiaire s'appliquent mutatis mutandis à l'objet de la revendication 1 de la troisième et de la quatrième requêtes subsidiaires.

L'objet des revendications 1 de ces requêtes étant évident pour l'homme du métier et n'impliquant pas l'activité inventive requise par l'article 56 CBE, les présentes requêtes ne sont pas acceptables.

7. Conclusions

Aucune requête ne remplissant les exigences de la CBE, le brevet doit être révoqué, conformément à l'article 102(1) CBE.

8. Au vu de cette conclusion, il n'est pas nécessaire de traiter les autres questions soulevées durant la procédure, en particulier si les essais comparatifs sont admissibles et si le fascicule du brevet divulgue l'utilisation telle que revendiquée de manière suffisante pour que l'homme du métier puisse l'exécuter.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. Le brevet est révoqué.

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