T 0368/96 (Pâtes cellulosiques blanchies et absorbantes/TARTAS) of 16.5.2000

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T036896.20000516
Date de la décision : 16 Mai 2000
Numéro de l'affaire : T 0368/96
Numéro de la demande : 90403462.6
Classe de la CIB : D21C 9/10
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Procédé de blanchiment de pâtes cellulosiques chimiques
Nom du demandeur : TARTAS S.A.
Nom de l'opposant : KVAERNER PULPING TECHNOLOGIES AB
Chambre : 3.3.06
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0010/91
G 0007/95
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n 90 403 462.6 a donné lieu à la délivrance du brevet européen n 0 433 138 sur la base de 10 revendications, dont les revendications indépendantes s'énoncent comme suit :

"1. Procédé de blanchiment de pâtes cellulosiques chimiques suivant une séquence de différents traitements en vue d'obtenir des pâtes blanchies, absorbantes, présentant un degré de blancheur mesurée selon la norme ISO 2470, supérieur à 70, la séquence de traitements comprenant au moins un traitement par un agent de blanchiment ne contenant pas de chlore, au moins deux traitements alcalins et au moins un traitement acide intercalaire entre les deux traitements alcalins, caractérisé en ce que le traitement acide a une durée d'au moins 15 minutes de façon à obtenir une pâte présentant une teneur en résine résiduelle mesurée par extrait DCM selon la norme ISO 624, inférieure à 0.05 %.

10. Pâtes cellulosiques blanchies obtenues par la mise en oeuvre du procédé selon une des revendications 1 à 9 caractérisé en ce qu'elles présentent un degré de blancheur supérieur à 70 et un temps de montée capillaire HV8 inférieur à 5 secondes."

II. La requérante (opposante) a formé une opposition au brevet et requis sa révocation pour manque d'activité inventive au titre des articles 56 et 100(a) CBE.

III. La Division d'opposition a rejeté l'opposition.

Plus particulièrement, la Division d'opposition a constaté qu'il n'y avait rien dans le document

(6) US-A-3 867 246

qui indiquait que la teneur en résine résiduelle de la pâte puisse être réduite dans la mesure prévue dans les revendications 1 et 10. De plus ni le document

(4) R.P. Singh, "The Bleaching of Pulp", 3ème édition, Tappi 1979, Atlanta, Georgia, USA, pages 313 et 342

ni les autres documents cités par l'opposante ne suggéraient la préparation d'une pâte cellulosique blanche et absorbante.

IV. La requérante a formé un recours à l'encontre de cette décision. Dans son mémoire de recours, la requérante a pour la première fois fait valoir que l'objet revendiqué n'était pas nouveau. De plus, afin d'illustrer plus clairement les connaissances de l'homme du métier dans le domaine technique de pâtes cellulosiques, la requérante s'est appuyée sur une déclaration de M. Håkan Dahllöf et sur les nouveaux documents suivants :

(8) E. Sjöström : "Wood Chemistry, Fundamentals and Applications", Academic Press Inc., 1981, pages 83 à 87; et

(9) EP-B-0 321 989.

Par lettre du 23 mars 2000, l'intimée (titulaire) a déposé un nouveau jeu de revendications 1 à 10 à titre subsidiaire afin de clarifier ce qui est entendu par "traitement acide" dans la revendication 1. A cet effet, il a été ajouté dans la revendication 1 du jeu subsidiaire, la précision "à pH inférieur à 5" après "traitement acide".

V. Une procédure orale a eu lieu le 30 mars 2000.

VI. Les arguments présentés par la requérante pendant la procédure de recours peuvent être résumés comme suit :

Selon la décision G 7/95 le motif de manque de nouveauté pouvait être considéré au cours de l'examen de l'activité inventive, car un objet qui n'était pas nouveau par rapport à l'état de la technique le plus proche ne pouvait pas non plus impliquer une activité inventive. Dans le cas d'espèce, l'objet des revendications 1 à 5 et 10 était dépourvu de nouveauté par l'enseignement du document (6) qui divulguait un procédé de blanchiment de pâtes cellulosiques chimiques dont les pâtes produites étaient non seulement blanchies, mais aussi absorbantes et de teneur en résine résiduelle réduite.

De plus, le procédé selon la revendication 1 n'était pas inventif car il était connu des documents (4), (8) et (9) qu'un traitement des pâtes cellulosiques au peroxyde d'hydrogène tel que décrit dans le document (6) diminuait la teneur des pâtes en résine résiduelle. En outre, selon le document (6) le traitement acide pouvait être conduit de telle manière, notamment à un pH inférieur à 5, qu'il en résulte une élimination des résines. Quant à la caractéristique selon laquelle les pâtes obtenues devraient être absorbantes, la requérante a mis en doute que cela ait un rapport quelconque avec le procédé de blanchiment. Ceci ressortait de la déclaration de M. Håkan Dahllöf.

VII. En se référant à la décision G 10/91, l'intimée a fait valoir que le motif d'absence de nouveauté était un nouveau motif d'opposition et a demandé que ce motif ne soit pas pris en considération par la Chambre de recours.

Quant à l'activité inventive, l'intimée a invoqué que le procédé selon le brevet délivré permettait, à la fois, le blanchiment des pâtes et l'élimination des résines jusqu'à une teneur inférieure à 0.05 %. Cependant, l'élimination des résines n'était pas mentionnée dans le document (6) et le document (9) était totalement silencieux sur l'utilisation d'un traitement acide. Donc, l'invention brevetée ne découlait pas d'une manière évidente de l'art antérieur. Au contraire, la déclaration déposée par la requérante prouvait plutôt qu'il n'était pas évident pour l'homme du métier de s'attendre à ce qu'un procédé de blanchiment puisse produire des pâtes absorbantes.

VIII. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet en litige. L'intimée demande le rejet du recours ou subsidiairement le maintien du brevet conformément au jeu de revendications déposé le 23 mars 2000.

Motifs de la décision

1. La requérante a pour la première fois fait valoir le grief de manque de nouveauté dans la procédure de recours.

Dans les décisions G 9/91 et G 10/91 (JO OEB 1993, 408 et 420) la Grande Chambre de recours a exposé le principe qu'un nouveau motif d'opposition ne peut pas être invoqué dans la procédure de recours sans le consentement de la titulaire du brevet (voir G 9/91 , point 18).

La décision G 7/95 (JO OEB 1996, 626), citée par la requérante, fait seulement allusion à la possibilité de tenir compte ("...may be considered..." dans le texte original anglais - dernière phrase du dispositif) de la nouveauté dans le contexte de l'évaluation de l'activité inventive, mais cette décision confirme le principe susmentionné (voir le dispositif ; voir aussi G 1/95, JO OEB 1996, 615, point 7.1 des motifs).

La titulaire du brevet n'ayant pas donné son consentement sur ce point, la Chambre ne statue pas sur le grief de manque de nouveauté.

2. Requête Principale

2.1. Il est certain que de tous les documents cités, le document (6) représente l'état de la technique le plus proche. Ce document décrit un procédé de blanchiment des pâtes cellulosiques chimiques sans utilisation d'agents contenant du chlore. Le procédé comprend au moins deux traitements alcalins à un pH de 8 à 13, et au moins un traitement intercalaire entre deux traitements alcalins avec un peracide (notamment acide peracétique) à un pH de 4.5 à 6.5 (voir revendication 1). En particulier, l'exemple 1 décrit un traitement acide commençant à pH 6, durant 4 heures et délivrant une pâte dont la blancheur était de 88.9 % MgO. Il n'a pas été mis en doute par l'intimée que ce degré de blancheur correspond à un degré de blancheur mesurée selon la norme ISO 2470, supérieur à 70.

2.2. Vis-à-vis de cet art antérieur, le brevet attaqué entend résoudre le problème technique de proposer un procédé de blanchiment de pâtes cellulosique chimiques qui non seulement permet de blanchir les pâtes, mais en outre rend ces pâtes hydrophiles et absorbantes par une réduction suffisante en résines résiduelles (page 2, lignes 52 à 57).

Selon la revendication 1, la solution de ce problème consiste en ce que le traitement acide a une durée d'au moins 15 minutes de façon à obtenir une pâte présentant une teneur en résine résiduelle mesurée par extrait DCM selon la norme ISO 624, inférieure à 0.05 %. Selon la revendication 10, ce procédé permet d'obtenir des pâtes cellulosiques blanchies présentant un temps de montée capillaire HV8 inférieur à 5 secondes.

En considérant que le paramètre HV8 utilisé comme mesure de la propriété absorbante était un paramètre inhabituel, la requérante a mis en doute que le procédé revendiqué délivre en fait une pâte absorbante. La Chambre ne partage pas ces doutes car le paramètre HV8 est défini dans le brevet litigieux, d'une part par la méthode pour déterminer le paramètre (page 5, lignes 16 à 22), et d'autre part par la relation entre ce paramètre et le contenu en résines (page 5, lignes 12 à 14 et 47 à 48) selon laquelle la pâte est d'autant plus absorbante, qu'elle est dépourvue de résines. En outre, le brevet litigieux définit qu'une valeur HV8 de 5 secondes correspond approximativement à une teneur de la pâte en résine de 0.05 %. Donc, selon le brevet litigieux on entend par une pâte absorbante une pâte ayant une valeur HV8 inférieure à 5 secondes ou, respectivement une teneur en résine inférieure à 0.05 %. Les exemples illustrant l'invention et les exemples comparatifs donnés dans le brevet litigieux montrent que ces valeurs sont obtenues par les caractéristiques du procédé de la revendication 1. La Chambre est donc convaincue que le problème mentionné ci-dessus est effectivement résolu par le procédé revendiqué.

2.3. La requérante a fait valoir qu'il était connu dans l'art antérieur décrit dans les documents (4), (8) et (9) que la teneur des pâtes en résine résiduelle était diminué par un traitement au peroxydes d'hydrogènes, et donc également par le procédé selon le document (6). De plus, le traitement par une acide peracétique décrit dans le document (6) pouvait être conduit à un pH inférieur à 5, c'est-à-dire aux mêmes conditions que celles proposées dans le brevet litigieux (page 3, lignes 21 à 22). Par conséquence, le procédé connu enlevait aussi les résines résiduelles et rendait donc absorbantes les pâtes ainsi obtenues.

En fait, le document (9) indique que les peroxydes sont des agents appropriés pour enlever des résines d'une pâte chimique (page 2, lignes 39 à 41). La même chose ressort du document (4), lu en combinaison avec le document (8) : d'après la table 13.2 à la page 342 du document (4), les matières extractives contenues dans une pâte, qui selon le document (8) (page 83, premier paragraphe) comprennent les résines, sont blanchies et/ou enlevées par les peroxydes. La Chambre accepte donc qu'une certaine réduction des résines est obtenue par le traitement au peroxyde d'hydrogène au cours du procédé connu du document (6). Cependant, aucun des documents (4), (8) ou (9) ne donne une valeur quelconque indiquant le degré de la réduction.

De même, le document (6) ne suggère pas que le procédé soit conduit de façon à réduire particulièrement la teneur en résine résiduelle. Au contraire, une réduction de la teneur en résines n'est pas du tout mentionnée et l'acide peracétique n'est mentionné qu'en sa qualité d'agent de blanchiment (colonne 2, lignes 3 à 7 et 18 à 28). Ces faits n'ont pas été contestés par la requérante.

On ne peut non plus conclure que le procédé connu conduit nécessairement et inévitablement à un produit ayant respectivement une teneur en résine inférieure à 0.05. % et un temps de montée capillaire inférieur à 5. secondes.

Bien que selon l'exemple 1 du document (6) le traitement acide à pH 6 soit conduit pendant 4 heures, il n'est pas certain que de ce fait les résines soient éliminées jusqu'au degré nécessaire pour obtenir la propriété absorbante désirée, c'est-à-dire jusqu'à moins de 0.05. %. Après tout, les exemples selon le brevet litigieux fonctionnent à un pH inférieur à 4, ce qui est un pH considérablement plus bas. De plus, comme il ressort de la description du brevet litigieux, la durée du traitement peut varier typiquement entre 15 minutes et trois heures, tandis que le pH est choisi entre 1.5 et 5 (page 4, lignes 8 à 9, 20 à 26 et page 4, ligne 50 à page 5, ligne 2). Même si les revendications ne définissent pas une valeur pH particulière, le pH en tant que variable est compris dans la revendication 1 par la caractéristique "... le traitement acide a une durée d'au moins ... de façon à obtenir ... une teneur en résine ... inférieur à 0.05 %". Selon cette caractéristique la durée du traitement acide doit être d'au moins 15 minutes, mais doit aussi être appropriée pour obtenir la teneur en résines réduite désirée. En d'autres termes, la durée du traitement acide doit être adaptée selon le cas d'espèce ce qui, d'après la Chambre, signifie que la durée dépend de l'acidité de l'acide et, donc, du pH appliqué. Par conséquence, seule la mention d'une valeur pH de 4.5 à 6.5 (document (6), revendication 1 et colonne 4, lignes 10 à 16) sans indication de la durée de traitement, ne suffit pas pour qu'on puisse conclure que le procédé selon le document (6) résulte en une teneur en résine suffisamment réduite. Par conséquent, la requérante n'a pas prouvé son affirmation que l'enseignement du document (6) détruit la nouveauté de l'objet revendiqué. En conséquence, la décision G 7/95 ne peut pas être appliqué au présent cas.

2.4. Selon la requérante, quoique cela soit préférable, il n'était pas nécessaire de réduire la teneur en résine pour obtenir des pâtes absorbantes. Dans la déclaration déposée par la requérante avec son mémoire de recours il est suggéré que la production de pâtes absorbantes n'avait aucun rapport avec le blanchiment des pâtes car, normalement, les pâtes étaient d'abord blanchies et ensuite traitées de manière connue pour rendre les pâtes absorbantes.

Dès lors, la Chambre conclut que l'homme du métier ne connaissait d'autres méthodes de rendre les pâtes absorbantes que celles utilisant des mesures additionnelles consécutives au procédé de blanchiment. De toute façon, il ne pouvait concevoir un procédé de blanchiment tel que la pâte soit, en même temps, rendue absorbante.

2.5. La Chambre est donc d'avis que ni le document (6) ni l'un des documents (4), (8) ou (9) ne pouvait inciter l'homme du métier à chercher la solution du problème posé dans les mesures techniques indiquées dans la présente revendication 1, puisqu'il n'avait aucun raison de s'attendre à ce que le procédé selon le document (6) puisse être conduit de manière à obtenir une pâte blanchie et, en même temps, diminuée en résine résiduelle à une teneur inférieure à 0.05 %, mesurée par extrait DCM selon la norme ISO 624.

Les autres documents cités au cours de la procédure d'opposition et qui n'ont pas été pris en considération par la requérante en procédure de recours ne contiennent aucune information susceptible d'orienter l'homme du métier, en combinaison avec les documents précédents, vers la solution revendiquée.

2.6. Il résulte des considérations précédentes que le procédé selon la revendication 1 est considéré comme satisfaisant à la condition d'activité inventive requise par les articles 52(1) et 56 CBE.

Les mêmes considérations s'appliquent à la revendication 10 portant sur des pâtes obtenues par le procédé selon la revendication 1, qui présentent une valeur HV8 inférieure à 5 secondes.

Les revendications dépendantes 2 à 9, qui concernent des modes de réalisation particuliers du procédé selon la revendication 1 bénéficient de la brevetabilité de cette dernière et sont donc également acceptables.

3. Requête subsidiaire

Le procédé et le produit selon la requête principale étant brevetables, il n'y a pas lieu de prendre en considération le jeu de revendications selon la requête subsidiaire.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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