T 0726/93 (Machines textiles) of 1.7.1994

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1994:T072693.19940701
Date de la décision : 01 Juillet 1994
Numéro de l'affaire : T 0726/93
Numéro de la demande : 89115305.8
Classe de la CIB : D02G 1/12
Langue de la procédure : DE
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Versions : OJ
Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Rieter
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.2.05
Sommaire : Se fondant sur le pouvoir d'appréciation que lui confère la règle 88 CBE, l'OEB peut autoriser une rectification consistant à remplacer par les pièces correctes des pièces de la demande concernant la divulgation de l'invention (à savoir le jeu de revendications, la description ou le jeu de dessins) qui ont été déposées par erreur, s'il apparaît immédiatement, dès la date de dépôt, d'une part que les pièces déposées ne sont pas les bonnes, car elles ne correspondent manifestement pas à la requête en délivrance du brevet, et d'autre part en quoi l'erreur consiste, et si le demandeur peut pleinement prouver quelles sont les pièces qu'il envisageait en réalité de déposer. Le demandeur peut se servir de toutes les pièces produites à la date de dépôt (ainsi que, le cas échéant, des documents de priorité et de la désignation de l'inventeur) pour prouver ce qu'il envisageait en réalité de déposer.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 R 88
Mot-clé : Dépôt erroné de pièces de la demande
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0003/89
J 0004/80
J 0008/80
J 0012/80
J 0003/81
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0002/95
J 0021/94
J 0005/06
J 0016/13

Exposé des faits et conclusions

I. Le 19 août 1989, le requérant a présenté une requête en délivrance d'un brevet européen pour un "procédé de chauffage dans des machines textiles", en revendiquant la priorité de la demande de brevet suisse n CH-03 204/88-4, en date du 29 août 1988.

II. La liste des pièces jointes à cette requête (OEB Form 1001.1 à 1001.5) comprenait :

Description : trois exemplaires ; neuf pages ;

Revendications : trois exemplaires ; trois pages ;

Dessins : trois exemplaires ; deux pages ; Nombre total de figures : trois ;

Abrégé : trois exemplaires ; une page ;

Document de priorité : un exemplaire.

III. Sur le formulaire de désignation de l'inventeur joint à la requête, l'invention avait pour titre : "procédé de chauffage dans des machines textiles". Le "rapport de recherche standard" établi pour la demande de brevet suisse n 03 204/88-4 en date du 20 décembre 1988, qui était également joint, cite deux documents concernant cette invention.

IV. Le document de priorité joint en annexe était la demande de brevet suisse n 03 204/88-4 susmentionnée, concernant un "procédé de chauffage dans des machines textiles".

V. La description, les revendications et l'abrégé portaient toutefois sur un "système d'étirage pour un procédé de filature dépourvu de banc à broches". La description comptait huit pages et les revendications deux pages. Les dessins (deux pages; trois figures) ne correspondaient pas à la description, mais aux dessins du document de priorité.

VI. Par lettre en date du 7 décembre 1989, le requérant a présenté une requête en rectification en vertu de la règle 88 CBE, tendant à remplacer la description, les revendications et l'abrégé qui avaient été déposés par un texte concordant exactement avec la demande fondant la priorité.

VII. La section de dépôt a signalé au requérant qu'il ne serait statué sur sa requête en rectification que lors de la procédure d'examen par la division d'examen. Aux fins de la publication de la demande, ainsi que de la recherche, la section de dépôt a utilisé les pièces déposées à l'origine. Mention a été faite de la requête en vertu de la règle 88 CBE sur la page de titre de la publication.

VIII. La requête en rectification présentée par le requérant et la demande de brevet ont été rejetées par décision en date du 11 décembre 1992, remise à la poste le 12 mars 1993. Le motif de la décision a été essentiellement qu'"une omission, telle que l'absence de toute une pièce, ne constitue pas une erreur au sens de la règle 88 CBE susceptible d'être rectifiée". Cette interprétation répond également aux intérêts des tiers. En outre, une rectification en vertu de la règle 88 CBE ne doit pas donner lieu au remplacement de toute une invention par une autre.

IX. Le requérant a formé un recours contre cette décision et a acquitté les taxes correspondantes. Dans son mémoire exposant les motifs du recours, il a essentiellement développé les arguments suivants.

La règle 88 CBE dispose que les erreurs contenues dans toute pièce soumise à l'Office peuvent être rectifiées. Comme en l'espèce, une telle erreur peut tenir au dépôt d'une description ou de revendications qui ne sauraient manifestement avoir été envisagées par le demandeur. Or, une description et des revendications conformes à l'intention du demandeur sont bien disponibles, à savoir dans le document de priorité.

X. Le requérant a demandé :

1. que la décision attaquée soit annulée et qu'il soit fait droit à la rectification en vertu de la règle 88 CBE, tendant à ce que la description et les revendications à prendre en considération pour la présente demande soient celles contenues dans le document de priorité ;

2. à titre subsidiaire, que le document de priorité joint à la demande tienne lieu de demande européenne.

Motifs de la décision

1. La règle 88 CBE dispose : "Les fautes d'expression ou de transcription et les erreurs contenues dans toute pièce soumise à l'Office européen des brevets peuvent être rectifiées sur requête. Toutefois, si la requête en rectification porte sur la description, les revendications ou les dessins, la rectification doit s'imposer à l'évidence, en ce sens qu'il apparaît immédiatement qu'aucun texte autre que celui résultant de la rectification n'a pu être envisagé par le demandeur."

2. Dans la présente espèce, il n'est pas contesté qu'une erreur a été commise dans les pièces qui ont été soumises. L'interprétation de la division d'examen, selon laquelle la règle 88 CBE autorise uniquement la correction d'erreurs contenues dans une pièce et non le remplacement de toute la pièce, est dépourvue de fondement dans la CBE. La règle 88 CBE pose comme principe général que les erreurs contenues dans toute pièce soumise à l'Office peuvent être rectifiées. La question de savoir si les erreurs portent sur une partie seulement du document ou sur son intégralité est sans importance.

3. L'erreur apparaissant immédiatement, il ne reste plus qu'à établir s'il apparaissait aussi immédiatement que le requérant ne pouvait qu'avoir envisagé de déposer une description et des revendications correspondant à la description et aux revendications contenues dans le document de priorité.

4. Dans son avis G 3/89 (JO OEB 1993, 117), la Grande Chambre de recours a interprété la règle 88 CBE comme suit:

"Les parties d'une demande de brevet européen ou d'un brevet européen concernant la divulgation (la description, les revendications et les dessins) ne peuvent faire l'objet d'une correction en vertu de la règle 88, deuxième phrase CBE que dans les limites de ce que l'homme du métier est objectivement en mesure, à la date de dépôt, de déduire directement et sans équivoque de l'ensemble de ces documents tels qu'ils ont été déposés, en se fondant sur les connaissances générales dans le domaine considéré. Une telle correction revêt uniquement le caractère d'une constatation et ne transgresse donc pas l'interdiction d'étendre l'objet d'une demande de brevet ou d'un brevet visée à l'article 123(2) CBE."

5. Au point 7 des motifs de cet avis, il est dit : "en raison de l'interdiction d'étendre l'objet d'une demande de brevet ou d'un brevet visée à l'article 123(2) CBE, il n'est possible de recourir à d'autres documents que la description, les revendications et les dessins que s'ils sont de nature à confirmer les connaissances générales existant à la date de dépôt. Un document qui ne satisfait pas à cette exigence ne saurait entrer en ligne de compte pour une correction selon la règle 88, deuxième phrase CBE, même s'il a été produit lors du dépôt de la demande de brevet européen. Il peut s'agir notamment d'un document de priorité, de l'abrégé, etc."

6. Cet avis doit donc être compris en ce sens que la rectification d'une erreur contenue dans la description, les dessins ou les revendications d'une demande de brevet doit apparaître immédiatement à l'homme du métier, à la lumière du contenu de ces pièces dans leur ensemble, et éventuellement des connaissances qu'il possède dans le domaine considéré. Ce n'est qu'en pareil cas qu'une telle rectification pourrait être autorisée, sans qu'elle aille à l'encontre de l'article 123(2) CBE. Il n'est pas possible de recourir à d'autres pièces ne faisant pas partie de la demande de brevet, telles que le document de priorité, pour justifier la rectification proposée.

7. En l'espèce toutefois, il ne s'agit pas de rectifier une caractéristique technique dans la description, les dessins ou les revendications, mais de remplacer, dans leur intégralité, la description et les revendications qui ont été déposées. En pareil cas, il est évident qu'il n'est pas nécessaire d'interpréter le contenu de la demande de brevet et qu'il ne servirait à rien de faire appel à l'homme du métier de compétence moyenne. La présente affaire concerne donc une situation qui diffère de celle qui a fait l'objet de l'avis rendu par la Grande Chambre de recours. Par conséquent, l'interprétation de la Convention donnée dans cet avis n'est pas applicable en l'espèce.

8. La présente situation est en fait comparable au cas où la désignation d'un Etat contractant a été omise par erreur et où, conformément à la jurisprudence constante de la Chambre de recours juridique (J 4/80, JO OEB 1980, 351 ; J 8/80, JO OEB 1980, 293 ; J 12/80, JO OEB 1981, 143 ; J 3/81, JO OEB 1982, 100, etc.), il peut être remédié à une telle omission, alors même que l'erreur ne s'impose pas à l'évidence, les exigences les plus grandes étant toutefois posées en ce qui concerne la charge de la preuve. Une telle rectification ne saurait aller à l'encontre de l'article 123(2) CBE, puisqu'elle ne constitue pas une modification du contenu technique de la demande, mais qu'elle remet toute la demande dans son état initial, comme le souhaitait le demandeur dès l'origine.

9. A fortiori, une erreur contenue dans les pièces de la demande, qui tient au dépôt par erreur de pièces concernant la divulgation (à savoir la description, le jeu de revendications ou le jeu de dessins) et ne correspondant manifestement pas à la requête en délivrance du brevet, peut donc être rectifiée sans aller à l'encontre de l'article 123(2) CBE en remplaçant les pièces déposées par erreur par les pièces qui devaient effectivement être soumises avec la requête en délivrance du brevet, s'il apparaît immédiatement à la date de dépôt qu'il y a bien une erreur et en quoi celle-ci consiste et si le demandeur a pleinement prouvé ce qu'il envisageait en réalité de déposer.

10. En l'espèce, la Chambre est convaincue qu'il apparaît immédiatement, au vu de l'ensemble des pièces de la demande, qu'aucun texte autre que celui résultant de la rectification n'a pu être envisagé par le demandeur. En d'autres termes, la Chambre a acquis la conviction que le requérant entendait à l'évidence déposer une demande de brevet correspondant à la demande de brevet suisse n 03 204/88-4, dont la priorité était revendiquée. Cela découle incontestablement de la requête en délivrance du brevet européen. Comme mentionné aux points II à IV supra, toutes les indications données dans la requête (telles que le titre, la revendication de priorité, le nombre de pages, etc.) ainsi que la désignation de l'inventeur, la recherche standard et le document de priorité déposé simultanément concernent le même objet, à savoir l'invention selon la demande de brevet suisse n 03 204/88-4. En l'espèce, le fait que le document de priorité joint à la demande concordait avec les autres indications données dans la requête était décisif pour prouver quelle était l'intention du requérant.

11. Il y a donc lieu de faire droit à la requête en rectification du requérant.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'examen afin de poursuivre la procédure relative à la demande de brevet sur la base de la description ainsi que des revendications déposées le 18 décembre 1989 et correspondant à la description et aux revendications contenues dans le document de priorité.

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