T 0641/92 () of 1.3.1994

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1994:T064192.19940301
Date de la décision : 01 Mars 1994
Numéro de l'affaire : T 0641/92
Numéro de la demande : 86440037.9
Classe de la CIB : A01D 78/10
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Perfectionnement aux machines de fenaison munies de plusieurs roues râteleuses
Nom du demandeur : KUHN S.A.
Nom de l'opposant : HEISSENBERGER & PRETZLER GmbH
Chambre : 3.2.04
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 R 58(4)
Mot-clé : Activité inventive - contribution du problème à résoudre
Inventive step
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0185/84
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 203 023 comprenant vingt-trois revendications a été délivré à l'intimée sur la base de la demande de brevet européen n° 86440037.9 déposée sous priorité du 21 mai 1985.

II. La requérante a formé opposition au brevet délivré et requis sa révocation pour absence d'activité inventive principalement au vu des enseignements combinés des documents suivants :

D1 : FR-A-1 346 993

D2 : GB-A-2 107 564

D3 : DE-C-1 582 167

D4 : FR-A-1 176 046

D5 : DE-B-1 807 136

D6 : DE-C-465 846

III. Après que la Division d'opposition ait rejeté l'opposition et maintenu le brevet tel que délivré, la requérante a formé un recours et payé la taxe par anticipation.

IV. Dans son mémoire exposant les motifs du recours la requérante a cité deux nouveaux documents :

D7 : AT-B-311 106 et

D8 : DE-C-1 158 304 (cf. le rapport de recherche) et pour démontrer l'absence d'activité inventive, elle a principalement fait valoir :

- que le relevage combiné à un pivotement des fourches d'une machine agricole en vue de réduire son encombrement et accroître la sécurité pendant le transport serait déjà connu en soi de D4 ;

- que grâce à l'utilisation des liaisons articulées connues de D5, la présence d'arbres d'entraînement dans les parties latérales du châssis de la machine selon D1 ne constituerait pas un obstacle à l'adoption par l'homme du métier de la solution préconisée dans D4, et

- que le fait de réunir sur une machine de fenaison selon D1 tous les éléments de solution connus en soi de Dl, D3 et D4 en tenant compte de l'enseignement de D7 et D8 ne constituerait qu'une simple juxtaposition de moyens connus ne nécessitant de la part de l'homme du métier que des essais systématiques.

Dans ses réponses l'intimée a réfuté l'argumentation de la requérante et a présenté notamment le nouveau document suivant :

D9 : Prospectus publicitaire "Lely Gemini 600" de la société LELY INDUSTRIES NV distribué en 1980.

V. Dans une notification établie conformément à l'article 11(2) du règlement de procédure des Chambres de recours, la Chambre a attiré l'attention des parties sur la pertinence particulière de D5 qui semblerait apporter un début de solution au double problème d'encombrement transversal et de sécurité des machines de fenaison pendant leur transport sur route.

En réponse, l'intimée a présenté le 22 février 1994 une revendication 1 subsidiaire.

VI. Au cours de la procédure orale du 1er mars 1994, l'intimée a déposé à titre de requête principale un nouveau jeu de 20 revendications dont la revendication 1 s'énonce comme suit :

"Machine de fenaison comportant notamment un châssis support (1) de forme allongée, se composant d'une partie centrale (2) et de deux parties latérales (3, 4) articulées aux extrémités de ladite partie centrale au moyen de pivots (5, 6) autour desquels elles peuvent être déplacées en hauteur d'un angle d'environ 90° en vue du transport ou du remisage, lequel châssis (1) porte plusieurs roues râteleuses (12, 13, 14, 15) se situant sous la partie centrale (2) et les parties latérales (3, 4) et pouvant être entraînées en rotation durant le travail autour d'axes (19) dirigés vers le haut, au moyen d'arbres d'entraînement (21) qui sont logés dans les parties (2, 3 et 4) du châssis (1), l'une au moins de ces roues râteleuses étant fixée à chacune desdites parties latérales (3 et 4) du châssis (1), machine caractérisée par le fait que chacune de ces parties latérales (3, 4) du châssis (1) comporte un segment (29) auquel est reliée au moins une roue râteleuse (14, 15) et qui peut tourner avec cette roue râteleuse (14, 15) par rapport à un second segment (30) de chaque partie latérale (3, 4) autour d'un axe de pivotement (27) qui coïncide avec l'axe longitudinal (28) de la partie latérale (3 ou 4), pour amener ladite roue râteleuse (14, 15) sensiblement au-dessus de la partie centrale (2) avec les fourches de travail orientées vers le milieu de la machine, lorsque lesdites parties latérales (3, 4) sont déplacées en hauteur autour des pivots (5, 6) les reliant à la partie centrale (2)."

La requérante n'a pas contesté la nouveauté de l'objet de la revendication 1 amendée et à propos de l'activité inventive, elle a réitéré l'argumentation qu'elle avait déjà exposée à l'encontre de la revendication 1 délivrée.

VII. En fin de procédure orale, les parties ont maintenu les requêtes suivantes :

Requérante : A titre principal, annulation de la décision contestée et révocation du brevet européen n° 203 023 et, à titre subsidiaire, révocation des revendications 1 à 13 du brevet.

Intimée : Annulation de la décision attaquée et maintien du brevet : soit, à titre principal, avec les revendications 1 à 20 présentées au cours de l'audience, une description adaptée en conséquence et les figures 1 à 12. du brevet délivré,

soit, à titre subsidiaire, avec la revendication 1 déposée avec la lettre du 22 février, les revendications 2. à 23 telles que délivrées, une description adaptée en conséquence et les figures 1 à 12 du brevet délivré.

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours

Le recours répond aux conditions de la CBE. Il est donc recevable.

2. Requête principale (de l'intimée)

2.1. Admissibilité des modifications (article 123 CBE)

2.1.1. Par rapport à la revendication 1 telle que délivrée les modifications suivantes ont été effectuées :

- Colonne 8, ligne 64 du fascicule de brevet : Après les mots "en hauteur" l'expression "d'un angle d'environ 90°" a été ajoutée. Un support existe à la page 5, ligne 2 de la demande telle que déposée.

- Colonne 9, ligne 4 du fascicule : Après l'expression "dirigés vers le haut" le membre de phrase " au moyen d'arbres d'entraînement (21) qui sont logés dans les parties (2, 3 et 4) du châssis (1)" a été inséré. Cette caractéristique est décrite à la page 4, lignes 26 à 29 de la demande telle que déposée et apparait clairement sur les figures 4 et 5.

- Colonne 9,ligne 13 : Entre les expressions "axes de pivotement (27)" et "pour amener" a été introduit le membre de phrase "qui coïncide avec l'axe longitudinal (28) de la partie latérale (3 ou 4)". Ce membre de phrase est supporté par la phrase de la page 6, lignes 12 à 15 de la demande telle que déposée.

2.1.2. La description a été adaptée de manière correspondante.

2.1.3. Ces modifications n'introduisent aucune matière nouvelle par rapport à la demande telle que déposée et réduisent la protection des revendications. Elles satisfont donc aux conditions de l'article 123(2) et (3) de la CBE.

2.2. Nouveauté.

L'examen approfondi de tous les documents cités dans le rapport de recherche ou présentés au cours de la procédure d'opposition n'a pas permis de découvrir dans une seule et même antériorité l'ensemble des caractéristiques décrites dans la revendication 1 prises en combinaison.

La nouveauté de l'objet de ladite revendication au sens de l'article 54 de la CBE doit donc être reconnue. Celle-ci n'étant pas contestée par la requérante, la Chambre ne considère pas nécessaire d'entrer plus avant dans les détails.

2.3. Etat de la technique le plus proche

Le mode d'entraînement en rotation des roues râteleuses au moyen d'arbres logés dans les parties du châssis ayant été précisé dans la revendication 1 modifiée, l'état de la technique le plus proche est en fait divulgué par D1 ce que les deux parties avaient initialement admis. L'objet de la revendication 1 en diffère par les caractéristiques de la partie caractérisante.

2.4. Problème et solution

Partant de la machine connue de D1 et compte tenu des différences entre l'invention et celle-ci, le problème objectif que l'homme du métier doit résoudre apparait donc bien consister, comme décrit dans la description du brevet colonne 2, lignes 4 à 7 en une : "réduction de l'encombrement de la machine pour le transport et le remisage et une diminution du risque encouru par le voisinage".

La Chambre est convaincue que la solution proposée dans la partie caractérisante de la revendication 1 permet effectivement de résoudre le double problème précité.

2.5. Activité inventive

2.5.1. Le caractère inventif d'une invention peut notamment résulter de l'originalité du problème posé ou de la solution préconisée ou encore de l'effet synergétique résultant de la réunion des caractéristiques de l'objet revendiqué.

Dans le cas présent, il y a lieu de constater qu'à la date de priorité du brevet objet du recours, le problème partiel de la réduction de l'encombrement transversal des faneuses en vue de leur transport a maintes fois été posé et résolu notamment par le relevage ou le repliement vers l'arrière des roues râteleuses latérales mais que le problème du risque que les fourches de ces roues relevées pouvaient présenter pour le voisinage n'a, semble-t-il, jamais été envisagé.

2.5.2. En effet, dans aucun des documents concernant des faneuses cités au cours de la procédure à savoir D1, D2, D3, D5, D7, D8 et D9 il n'est question du problème de la sécurité au cours du transport et du remisage.

En relation avec le relevage latéral des roues râteleuses, D1 (cf page 1, colonne de gauche, 3ème paragraphe) et D5 (colonne 4, lignes 54 à 59) ne se préoccupent que de l'encombrement de l'appareil et même si, sur la faneuse selon D5, le risque se trouve réduit du fait du repliement des roues au dessus du châssis, les fourches n'en demeurent pas moins dangereuses par leur orientation vers l'extérieur qui subsiste.

Dans D2, la sécurité recherchée ne concerne en rien les risques résultant du relevage des fourches mais a pour but d'éviter des détériorations en cas de mise en route accidentelle des arbres d'entraînement lorsque les roues râteleuses sont relevées.

Dans D3 également, en relation avec la position de transport de la machine, seul le problème de la réduction de l'encombrement est évoqué et résolu en resserrant les roues râteleuses les unes contre les autres derrière la poutre principale du châssis et en orientant les fourches des roues d'extrémité vers l'axe médian de la machine (cf.figures 9 et 10; colonne 6, lignes 9 à 14). En effet, étant donné que la poutre principale (3) a une longueur fixe, les seuls éléments qui pouvaient encore influencer la largeur de la machine pendant le transport étaient les fourches des roues râteleuses d'extrémité. Mais comme ces fourches ne sont pas relevées vers l'extérieur de la machine, elles ne présentent jamais aucun danger et le problème de la sécurité évoqué dans le brevet européen ne se pose pas.

Dans D7 le relevage de la roue râteleuse n'est pas réalisé en vue de réduire l'encombrement de l'appareil mais dans le but de le transformer rapidement de faneuse en endaineuse. S'il est effectivement montré dans ce document qu'il est connu de faire pivoter axialement le bras support d'une roue râteleuse en vue de modifier son orientation de 180°, aucune relation entre ce pivotement et une quelconque mesure de sécurité ou de réduction d'encombrement n'est seulement suggérée et, en position relevée, les fourches de fenaison demeurent orientées vers le haut et peuvent encore constituer un danger.

D8 décrit une machine de fenaison sur laquelle le problème de réduction de l'encombrement transversal a été résolu au détriment de l'encombrement longitudinal par un repliement des parties latérales vers l'arrière, derrière le châssis (cf. colonne 4, lignes 6 à 8 et figure 6), au lieu de les relever comme selon l'invention. Du fait que, sur cette machine, les fourches des roues râteleuses restent constamment dirigées vers le sol, même pendant le transport, elles ne présentent jamais aucun danger pour le voisinage et il ne viendrait jamais à l'esprit de l'homme du métier d'envisager un quelconque problème de sécurité en relation avec lesdites fourches.

En montrant une machine de fenaison en déplacement "toutes fourches dehors", le prospectus D9 illustre de manière convaincante le fait que dans les années 80, le problème de la sécurité lié au transport sur route des faneuses à bras repliables ne semblait pas préoccuper l'homme du métier et ne faisait l'objet d'aucune réglementation routière particulière.

2.5.3. Enfin, en ce qui concerne les enseignements de D4 et D6, ces deux documents concernent des appareils de préparation du sol n'ayant pas d'autre point commun avec une machine de fenaison que le fait d'être aussi des machines agricoles. En effet, ces herses ont une fonction et une structure entièrement différentes de celles des machines de fenaison. Leurs dents sont rigides et fixes et ne comportent aucun moyen d'entraînement logé dans les bras support du châssis, ce qui pourrait constituer un obstacle à la multiplication des articulations qui doivent rester simples et rustiques pour des raisons de robustesse. Techniquement, les herses à dents rigides et les roues de fenaison entraînées avec leurs râteaux élastiques sont de conceptions tellement éloignées qu'il est peu vraisemblable qu'un homme du métier ait spontanément l'idée de les comparer et d'utiliser indifféremment pour les unes et les autres les mêmes mesures de protection.

2.5.4. Par conséquent, l'homme du métier soucieux de réduire encore l'encombrement de la machine de fenaison selon D1 (ou D2) et d'améliorer la sécurité au voisinage de celle-ci lors de son transport ou de son remisage ne trouverait dans l'état de la technique aucune incitation allant dans le sens de la solution revendiquée dans la revendication l et, compte tenu de la complication qu'elle entraîne dans la réalisation des parties latérales du châssis, il n'aurait pas tendance a priori à adopter spontanément cette solution relativement complexe et coûteuse même si elle reste du domaine de ses compétences.

Au contraire, par ce souci d'économie, de robustesse et de simplicité d'emploi que l'on retrouve habituellement à la base de la conception des machines agricoles, l'homme du métier serait plutôt tenté d'adopter des mesures simples, rustiques et bon marché tel que, par exemple, l'emploi de capots ou tôles de protection capables d'envelopper les roues râteleuses de la machine selon D1 lorsqu'elles sont relevées.

2.5.5. Et dans l'hypothèse peu vraisemblable où, malgré tout, sans aucune incitation ni indication particulière, l'homme du métier :

a) prendrait d'abord conscience du danger potentiel que les fourches de la machine selon D1 peuvent présenter en position de relevage,

b) déciderait ensuite de tenter de réduire ce risque malgré les complications et le coût supplémentaire que cela représente, puis

c) irait s'inspirer de mesures et de moyens techniques utilisés sur du matériel agricole statique n'ayant qu'un rapport lointain avec une machine de fenaison, devrait-il encore pour arriver à l'invention adapter ces moyens connus à la structure articulée et dynamique d'une faneuse.

Une telle démarche en quatre étapes, dont la première qui est la plus importante n'est déjà pas évidente en soi, apparait comme l'antithèse de ce qu'il est convenu d'entendre par : "découler manifestement et logiquement de l'état de la technique" (cf. les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB, C IV, 9.3).

2.5.6. Pour toutes les raisons exposées ci-dessus, la Chambre considère donc que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale implique une activité inventive au sens de l'article 56 de la CBE et forme la base du maintien du brevet. Le recours du requérant ne peut donc avoir pour résultat ni la révocation intégrale du brevet ni celle des seules revendications 1 à 13.

3. Requête subsidiaire (de l'intimée)

L'objet de la revendication 1 selon la requête principale ayant été reconnu brevetable, la requête subsidiaire devient superflue et n'a pas à être examinée par la Chambre de recours.

4. Notification selon la règle 58(4) de la CBE

Comme cela ressort du point VI ci-dessus, la requérante a eu la possibilité de prendre position de manière définitive au sujet de la modification du texte des revendications. Il n'est donc pas nécessaire de recourir à la notification visée par la règle 58(4) de la CBE (cf. décision T 185/84, J.O. OEB 1986, p. 373).

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet dans la version suivante :

- Revendications l à 20 présentées au cours de l'audience du 1er mars 1994,

- Description : Colonnes 1 à 6 présentées au cours de l'audience, Colonnes 7 et 8 telles que délivrées,

- Dessins : Figures 1 à 12 telles que délivrées.

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