T 0592/92 () of 15.12.1993

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1993:T059292.19931215
Date de la décision : 15 Décembre 1993
Numéro de l'affaire : T 0592/92
Numéro de la demande : 86401168.9
Classe de la CIB : H04N 9/67
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Circuit d'élaboration des signaux analogiques de couleurs primaires d'un signal de télévision à partir de ses composantes numériques de luminance et chrominance
Nom du demandeur : Etat français (Centre National d'Etudes des Télécomm.)
Nom de l'opposant : Deutsche ITT Industries GmbH - Patentabteilung -
Chambre : 3.5.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 R 27(1)(c)
Mot-clé : Activité inventive (oui)
Inventive step (yes)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0510/10

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 209 406, basé sur la demande n 86 401 168.9 déposée le 2 juin 1986 et revendiquant la priorité de la demande n 85 08 406 déposée en France le 4. juin 1985, fut délivré le 4 avril 1990 et opposé le 22. décembre 1990.

II. En date du 30 avril 1992, la Division d'opposition décida le rejet de l'opposition.

La décision était basée sur le brevet, tel que délivré.

La revendication 1, telle que délivrée, se lit : "Circuit d'élaboration des signaux de couleurs primaires (R, V, B) d'un signal de télévision à partir de ses composantes numériques de luminance (Y) et de chrominance (CR, CB), caractérisé en ce qu'il comprend en cascade :

- un filtre numérique interpolateur (2) recevant un signal numérique multiplexé desdites composantes dans lequel le signal de luminance est échantilloné à une fréquence FE quelconque et les signaux de chrominance à une fréquence FE', sous-multiple de FE, ledit filtre délivrant un signal numérique de luminance et des signaux numériques de chrominance échantillonés à la même fréquence 2.FE,

- un dématriceur numérique (4) recevant les signaux numériques délivrés par le filtre et délivrant des signaux numériques de couleur primaire,

- un ensemble de trois convertisseurs numériques-analogiques (6) recevant chacun un signal numérique de couleur primaire et produisant les signaux analogiques de couleurs primaires (R, V, B)".

III. Pendant la procédure d'opposition, furent prises en considération les antériorités suivantes :

D1 = Tagungsband, 8. Jahrestagung der Fernseh- und Kinotechnische Gesellschaft (FKTG) vom 6.-9. Oktober 1980, pages 176 à 187 ;

D2 = Tagungsband, 10. Jahrestagung der Fernseh- und Kinotechnische Gesellschaft (FKTG) vom 13.-17. September 1982, pages 153 à 167 ;

D3 = EP-A-0 098 888 ; et

D4 = S.M.P.T.E. Journal, Vol. 90, n 10, Octobre 1981, pages 956 à 959.

IV. L'appelante (opposante) introduisit un recours en date du 25. juin 1992 et s'acquitta de la taxe de recours à la même date.

Les motifs du recours furent déposés en date du 29. août 1992.

A cette occasion, l'appelante mentionna dans la procédure le document :

D5 = DE-A-3 342 738 (dans la présente décision référence sera faite à la demande de brevet français correspondante : FR-A-2 536 940).

L'appelante demanda que la décision attaquée soit annulée, que le brevet contesté soit révoqué dans sa totalité et, subsidiairement, qu'une notification intermédiaire soit émise par la Chambre ou, alternativement, qu'une procédure orale soit convoquée.

V. Les observations de l'intimée (titulaire du brevet) furent déposées en date du 2 mars 1993.

Elle formula la requête que le recours soit rejeté, que le brevet contesté soit maintenu avec de nouvelles revendications déposées en date du 2 mars 1993 et, subsidiairement, qu'une procédure orale soit convoquée.

L'intimée mentionna dans la procédure les documents :

D6 = L. Paris et al. : "A Digital Alternative to a Video Decoder", IEEE Journal of Solid State Circuits, Vol. SC.21, n 6, décembre 1986, pages 956 à 963 ; et

D7 = A. Abrial et al. : "A 27 MHz Digital-to-Analog Video Processor", IEEE Journal of Solid State Circuits, Vol. 23, n 6, décembre 1988, pages 1358 à 1369.

VI. Avec une notification aux termes de l'article 11(2) du Règlement de Procédure des Chambres de Recours, datée du 13. octobre 1993, la Chambre convoqua les parties à une procédure orale devant avoir lieu le 15 décembre 1993.

VII. Au cours de la procédure orale, qui eut lieu le 15. décembre 1993, les parties présentèrent les arguments suivants.

L'intimée admit que des filtres numériques et des dématriceurs numériques étaient connus en soi, mais affirma qu'il n'était pas évident, même en combinant les documents D1 et D5, d'arriver à l'objet de la revendication 1.

Tout au plus, un homme du métier aurait considéré un décodeur entièrement numérique comprenant des filtres interpolateurs pour doubler la fréquence des signaux de chrominance.

Un tel appareil serait alors cadencé avec la fréquence FE, qui est la fréquence du signal de luminance échantilloné.

Dans l'art antérieur, il n'y avait, toutefois, aucune suggestion de doubler, au moyen d'un filtre interpolateur, la fréquence des échantillons du signal de luminance (de FE à 2*FE), ce qui est proposé dans le brevet contesté.

Cette caractéristique fournissait une solution au problème d'atténuer le spectre dupliqué autour de la fréquence d'échantillonnage, une tâche normalement accomplie, dans l'art antérieur, par des filtres passe-bas conventionnels, analogiques ou numériques.

**---***---*** L'appelante observa que la revendication 1 ne définissait pas la structure exacte du filtre interpolateur.

La seule caractéristique que la fréquence était doublée ne pouvait pas avoir l'effet d'atténuation du spectre dupliqué que faisait valoir l'intimée ; la fonction de transfert du filtre devait, donc, être expressément énoncée dans la revendication 1.

Par ailleurs, il semblait que le filtre ne fût pas autre chose qu'un filtre écrêteur ("peaking filter") bien connu dans l'art antérieur.

De l'avis de l'appelante, il fallait remettre le dossier à la première instance, afin qu'elle examine en détail les nouveaux arguments présentés par l'intimée pendant la procédure orale.

VIII. Les requêtes finales présentées furent :

- l'appelante demanda l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen ;

- l'intimée demanda le rejet du recours et le maintien du brevet, soit sur la base des revendications du brevet délivré, soit sur la base des revendications déposées le 2 mars 1993.

A titre subsidiaire, au cas où la Chambre envisagerait de révoquer le brevet à cause du document D5, elle demanda que l'affaire soit renvoyée à la première instance, afin qu'elle puisse bénéficier de deux degrés de juridiction.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108, ainsi qu'à la règle 64 de la CBE ; il est donc recevable.

2. Le seul motif d'opposition invoqué est le défaut d'une activité inventive.

De l'avis de la Chambre, l'état de la technique le plus proche est représenté par l'enseignement divulgué par D5.

Ce document divulgue un circuit d'élaboration des signaux de couleurs primaires d'un signal de télévision comprenant un dématriceur numérique et un ensemble de trois convertisseurs numériques-analogiques recevant chacun un signal numérique de couleur primaire et produisant les signaux analogiques de couleurs primaires.

En outre, un filtre numérique interpolateur est prévu pour doubler le nombre d'échantillons des signaux de chrominance CR et CB de manière que la fréquence de ces signaux soit élevée jusqu'à être égale à celle du signal de luminance Y.

Dans la description de D5, il est dit que "l'utilisation d'un courant de données à une allure plus rapide présente l'avantage que finalement, quand le mot numérique est converti en domaine analogique, on peut utiliser des filtres analogiques passe-bas plus simples pour supprimer les composantes à la fréquence d'échantillonnage" (page 11, lignes 22 à 28).

3. Le circuit selon la revendication 1 du brevet contesté se différencie, par rapport à celui décrit dans D5, en ce que la fréquence des échantillons du signal de luminance Y est doublée et la fréquence des échantillons des signaux de chrominance CR et CB est quadruplée.

Etant donné que ces trois signaux sont combinés dans le dématriceur, un procédé qui exige normalement que leurs fréquences soient égales, la différence essentielle est réduite au doublage de la fréquence du signal de luminance Y au moyen d'un filtre interpolateur.

4. Selon la description du brevet contesté, la fonction du filtre interpolateur est de "compenser l'atténuation en (sin x)/x sur la composante de luminance produite par les convertisseurs numériques-analogiques et pour atténuer fortement le spectre dupliqué, dû à la numérisation de chacune des composantes, autour de leurs fréquences d'échantillonnage" (page 3, lignes 12 à 19).

Pendant la procédure orale, l'intimée expliqua cet effet par un déplacement du premier spectre dupliqué à une fréquence très élevée ; ce qui entraîne la suppression du premier spectre dupliqué par les circuits qui suivent le dématriceur, sans l'intermédiaire d'un filtre passe-bas.

Le bien-fondé de cette explication ne fut pas contesté par l'appelante et la Chambre ne voit aucune raison de le faire non plus.

Il est bien vrai que la description du brevet contesté ne mentionne que très brièvement les conséquences ultérieures, découlant de l'action du filtre interpolateur, mais un homme du métier - un expert dans le domaine de filtrage numérique - est certainement capable d'analyser les effets d'une interpolation sur le spectre du signal de luminance.

Le problème technique, aux termes de la règle 27(1)(c) de la CBE, est donc celui indiqué dans le brevet contesté, et c'est ce problème qu'il faut considérer pour l'appréciation de l'activité inventive.

5. Dans D5 (et également dans D4) il était déjà connu de traiter les signaux de chrominance dans un filtre interpolateur.

Le but principal, dans ce cas, était de rendre le nombre d'échantillons des signaux de chrominance égal à celui du signal de luminance, mais il était en plus reconnu que l'opération d'interpolation est semblable à un filtrage passe-bas (voir D5 : page 11, lignes 22 à 28 ; et D4 : "an interpolator can be viewed as a low-pass filter", page 956). Il apparait donc que, généralement, un homme du métier était familier avec l'emploi d'un filtre interpolateur pour atténuer un signal numérique autour de la fréquence d'échantillonnage.

Il est, toutefois, noté que, selon l'art antérieur dans le domaine technique du décodage d'un signal de télévision disponible à la Chambre, les filtres interpolateurs ont été utilisés exclusivement quand, en plus de tout effet de limitation de la bande passante, un doublage de la fréquence du signal filtré était également désiré.

Dans le document D5 ce sont donc les signaux de chrominance (à une fréquence 2*fsc) qui sont appliqués aux filtres interpolateurs, afin que leur fréquence devienne 4*fsc, et non pas le signal de luminance, dont la fréquence est et reste égale à 4*fsc.

Dans ce cas d'espèce, une augmentation - multiplication par deux - de la fréquence du signal de luminance n'est aucunement nécessitée par le circuit (dématriceur) suivant le filtre.

Il apparait, par conséquent, que les auteurs du brevet contesté, en regardant exclusivement les effets du filtre interpolateur sur le spectre, se sont libérés d'une idée préconçue, dans ce domaine technique, sur la fonction des filtres interpolateurs.

La Chambre estime donc que l'activité inventive réside dans l'emploi d'un filtre interpolateur, dans une situation qui n'est pas entièrement analogue à celles décrites dans l'art antérieur, et pour un but - multiplication par deux de la fréquence du signal de luminance - qui n'était aucunement nécessité par les dématriceurs selon l'art antérieur.

6. L'appelante a affirmé que les caractéristiques mentionnées dans la revendication 1 ne suffisaient pas à définir un filtre résolvant le problème envisagé dans la description.

La Chambre ne peut suivre l'appelante sur ce point, parce que les effets spectraux désirés découlent du principe même de l'interpolation. Il apparait, par conséquent, approprié que la revendication ne soit pas limitée à un filtre ayant une fonction de transfert particulière.

7. Etant donné que le seul motif d'opposition invoqué - défaut d'une activité inventive - ne s'oppose pas au maintien du brevet tel que délivré, la prise en considération des revendications déposées en date du 2. mars 1993 n'est pas nécessaire.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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