European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1993:T001092.19930225 | ||||||||
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Date de la décision : | 25 Fevrier 1993 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0010/92 | ||||||||
Numéro de la demande : | 83401223.9 | ||||||||
Classe de la CIB : | C08F 10/00 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé pour la polymérisation et la copolymérisation des alpha-oléfines en lit fluidisé | ||||||||
Nom du demandeur : | BP Chimie Société Anonyme | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.3.03 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Nouveauté (confirmée) - méthode de mesure choisie par la requérante inappropriée aux fins de comparaison Activité inventive (confirmée) - enseignements de l'art antérieur non transposables au contexte de l'invention Remboursement de la taxe de recours (non) - prise en compte par la division d'opposition d'arguments techniques présentés par le propriétaire du brevet non assimilable à un vice substantiel de procédure Novelty (yes) Inventive step (yes) Reimbursement of appeal fees (no) - substantial procedural violation (no) - |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 83 401 223.9 déposée le 14 juin 1983, pour laquelle a été revendiquée la priorité du 24 juin 1982 fondée sur quatre dépôts antérieurs en France, a donné lieu le 1er octobre 1986 à la délivrance du brevet européen n° 99 774 sur la base de 26 revendications. Ce jeu de revendications comprenait, faisant suite à un groupe de 22 revendications portant sur un procédé de fabrication de polyoléfines et certaines modalités particulières de mise en oeuvre de ce procédé, les quatre revendications de produit suivantes :
23. "Particules de polyoléfine comprenant un catalyseur actif de type Ziegler-Natta et ayant une teneur en métal de transition comprise entre 2 X 10-3 et 10-1 milliatome- gramme de métal de transition par gramme, ces particules de polyoléfine ayant un diamètre moyen en masse compris entre 80 et 300 microns et une distribution granulométrique telle que le rapport Dm/Dn est inférieur ou égal à 3."
24. "Particules de polyoléfine ayant un diamètre moyen en masse compris entre 300 et 1 500 microns et une distribution granulométrique telle que le rapport Dm/Dn est inférieur ou égal à 3,5."
25. "Poudres d'homopolymères de l'éthylène ou de copolymères de l'éthylène et d'alpha-oléfines contenant plus de 50 % de motifs dérivés de l'éthylène, caractérisées en ce que leur teneur en résidus inorganiques est inférieure à 350 ppm, de préférence inférieure à 150 ppm, et en ce que leur masse volumique apparente est au moins égale à 0,45 g/cm3."
26. "Particules ou poudres de polyoléfine selon la revendication 24 ou 25, caractérisées en ce qu'elles contiennent, par gramme, moins de 5 X 10-4 milliatome- gramme et, de préférence, moins de 2 X 10-4 milliatome- gramme de métal de transition."
II. Le 27 janvier 1987 et le 1er juillet 1987 deux oppositions ont été formées à l'encontre du brevet délivré aux motifs que l'objet des revendications 23 à 26 n'était pas nouveau et n'impliquait pas d'activité inventive (article 100 a) CBE).
Ces objections s'appuyaient pour l'essentiel sur les trois documents suivants :
(1) DE-A-2 700 566,
(3) P. Galli, L. Luciani et G. Cecchin, Advances in the Polymerization of Polyolefins with Coordination Catalysts, Die Angewandte Makromolekulare Chemie 94 (1981), 63 à 89 (N° 1441),
(8) DE-A-3 032 318.
III. Par décision intermédiaire du 20 juin 1991 prise au sens de l'article 106(3) CBE et signifiée le 24 octobre 1991, la division d'opposition a estimé que les motifs d'opposition ne s'opposaient pas au maintien du brevet sous une forme modifiée, les modifications principales portant sur le nombre de revendications de produit qui passait de 4 à 6 et sur le libellé des deux dernières revendications de produit désormais numérotées 27 et 28, qui s'énonçaient comme suit :
27. "Poudre d'homopolymère de l'éthylène ou de copolymère de plus de 50 % en mol d'éthylène avec au moins une alpha- oléfine comportant de trois à huit atomes de carbone, contenant par gramme moins de 5 X 10-4 mmol de titane, ayant une teneur en résidus inorganiques inférieure à 350 ppm et une masse volumique apparente comprise entre 0,45 et 0,52 g/cm3, et étant constituée de particules de diamètre moyen en masse compris entre 600 et 1200 µm et d'une distribution granulométrique telle que le rapport Dm/Dn est inférieur ou égal à 3,5."
28. "Poudre de polyoléfine selon la revendication 27, caractérisée en ce qu'elle contient par gramme moins de 2 X 10-4 mmol de titane et qu'elle a une teneur en résidus organiques inférieure à 150 ppm."
Dans cette décision, il était d'abord rappelé que la brevetabilité des revendications de procédé n'avait pas été mise en cause. L'objet des revendications 27 et 28 était nouveau, car, d'une part, les calculs de distribution granulométrique des poudres décrites dans le document (1) ne pouvaient être effectués à partir des seules données figurant dans ce document, et, d'autre part, les documents (3) et (8) avaient trait à des poudres de polypropylène qui ne présentaient pas toutes les caractéristiques requises dans le brevet attaqué. Ces deux documents suggéraient tout au plus une liste de propriétés avantageuses que devrait présenter une poudre de polypropylène et que l'homme du métier aurait été plutôt dissuadé de vouloir transposer au polyéthylène en raison des difficultés évidentes de préparation d'une telle poudre ; pour cette raison, l'objet revendiqué impliquait également une activité inventive.
IV. Le 16 décembre 1991, la requérante (opposante 1) a formé un recours à l'encontre de cette décision, en acquittant simultanément la taxe prescrite et en exposant les motifs du recours dans un mémoire de recours déposé le 24 février 1992. Ces motifs, qui avaient été maintenus dans la réponse parvenue à l'Office le 22 janvier 1993, dans laquelle la requérante faisait référence à un nouveau document, DE-A-2 259 516, concernaient uniquement le maintien des deux dernières revendications de produit 27 et 28.
La reproduction des exemples 7 et 8 du document (1) avait permis d'établir que les valeurs de Dm et du rapport Dm/dn satisfaisaient aux conditions imposées à ces deux paramètres dans les revendications 27 et 28 ; il en résultait un défaut de nouveauté implicite de l'objet revendiqué. Par ailleurs, il fallait considérer les caractéristiques mentionnées dans le document (3) non comme simplement souhaitables, mais comme effectivement obtenues ; il existait donc une incitation pour l'homme du métier à vouloir préparer une poudre de polyoléfine possédant de telles caractéristiques. De plus, le document (1), manifestement plus pertinent que le document (8) pour la question de l'activité inventive, soulignait les inconvénients liés à une masse volumique apparente trop faible. Les caractéristiques des poudres revendiquées n'étaient donc pas inventives.
En marge de ces objections quant au fond, la requérante a estimé que les arguments avancés par la division d'opposition contre la transposition au polyéthylène de données techniques propres au polypropylène n'étaient pas fondées ; elle y voyait un vice substantiel de procédure. De même, compte tenu du fait que la revendication 27 était une revendication indépendante, les produits revendiqués ne résultaient pas nécessairement du procédé revendiqué, contrairement à la description du brevet attaqué ; cette divergence n'avait pas été prise en compte dans la décision, ce qui représentait également un vice substantiel de procédure justifiant le remboursement de la taxe de recours.
V. Dans son mémoire de réponse déposé le 14 septembre 1992, l'intimée (titulaire du brevet) a d'abord contesté la validité des résultats de mesures granulométriques avancés par la requérante ; selon l'intimée, ces résultats reposaient à la fois sur une interprétation erronée du document (1) et sur la mise en oeuvre d'une méthode de mesure inappropriée. Les documents (1) et (3) n'étaient pas susceptibles de suggérer à l'homme du métier des poudres selon le brevet attaqué ; en effet, le document (1) ne faisait pas état de paramètres comme la teneur en titane du polymère ou un diamètre moyen en masse aussi élevé que dans le brevet attaqué, et le document (3) avait spécifiquement trait au polypropylène, donc à un polymère différent du polyéthylène.
Afin de surmonter l'objection de forme soulevée par la requérante, l'intimée a proposé une version modifiée de la revendication 27, dans laquelle l'expression "contenant par gramme moins de 5 X 10-4 mmol de titane" avait été remplacée par "poudre contenant du titane, ayant une teneur inférieure à 5 X 10-4 mmol de titane".
A titre de requête auxiliaire, l'intimée a envisagé la suppression des revendications 27 et 28.
VI. L'autre partie à la procédure, l'opposante 2, n'a déposé aucun mémoire, ni présenté aucune requête au cours de la procédure de recours.
VII. La requérante conclut à la révocation du brevet dans la mesure où les revendications 27 et 28 seraient maintenues et au remboursement de la taxe de recours.
L'intimée conclut au rejet du recours, les revendications 27 et 28 étant toutefois modifiées sur la base de la version déposée le 14 septembre 1992, ou, à titre de requête subsidiaire, au maintien du brevet sur la base des revendications 1 à 26 telles qu'accordées par la division d'opposition.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 et 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est recevable.
2. La chambre a examiné le document DE-A-2 259 516 cité pour la première fois dans le mémoire déposé le 22 janvier 1993, donc largement en dehors du délai de neuf mois normalement imparti en procédure d'opposition pour invoquer des faits ou produire des preuves à l'encontre d'un brevet délivré (article 99(1) CBE). La composition des complexes catalytiques à base de titane et l'efficacité de ces complexes dans la polymérisation de l'éthylène n'étant pas des éléments à considérer pour l'appréciation de l'activité inventive dans le cas d'espèce, la chambre estime en application des dispositions de l'article 114(2) CBE ne pas devoir tenir compte de ce document produit tardivement.
3. Le libellé des revendications selon la requête principale satisfait aux dispositions de l'article 123 CBE.
La chambre confirme d'abord la conclusion positive de la division d'opposition quant à l'admissibilité des revendications 1 à 26. Leur brevetabilité n'étant pas en cause, il n'y a pas lieu de procéder à une analyse détaillée de ces revendications.
La revendication 27 résulte de la combinaison i) de la définition du polymère d'éthylène mentionnée dans la revendication 25 en combinaison avec la page 6, lignes 49/50 du brevet délivré, qui correspondent respectivement à la revendication 26 et à la page 14, lignes 6 à 8 de la demande d'origine, ii) de la teneur en titane précisée dans la revendication 26 du brevet délivré qui correspond à la revendication 27 de la demande d'origine, en combinaison avec le choix de systèmes catalytiques contenant du titane comme métal de transition tels qu'illustrés dans les exemples 2 à 8, iii) de la teneur en résidus organiques indiquée dans la revendication 25 du brevet délivré qui correspond à la revendication 26 de la demande d'origine, iv) de la masse volumique apparente, dont la limite inférieure du domaine est divulguée dans la revendication 25 du brevet délivré qui correspond à la revendication 26 de la demande d'origine, et la limite supérieure à la page 10, ligne 53 du brevet délivré qui correspond à la page 22, ligne 29 de la demande d'origine, v) du diamètre moyen en masse qui est défini dans la revendication 11 du brevet délivré et de la demande d'origine, et vi) de la distribution granulométrique décrite dans la revendication 24 du brevet délivré qui correspond à la revendication 25 de la demande d'origine.
Quant à la revendication dépendante 28, elle vise une poudre de polyoléfine possédant la teneur préférée en titane et la teneur préférée en résidus inorganiques selon les revendications 26 et 25 du brevet délivré qui correspondent respectivement aux revendications 27 et 26 de la demande d'origine.
4. Le brevet attaqué concerne un procédé de polymérisation et de copolymérisation d'alpha-oléfines en phase gazeuse au moyen d'un lit fluidisé, ainsi que des poudres de prépolymère d'alpha-oléfines et de polymère d'éthylène ainsi obtenues. De tels polymères sont décrits dans le document (1) que la chambre, comme la division d'opposition, considère comme l'état de la technique le plus proche. Ce document décrit un procédé de fabrication de poudres de polymère et de copolymère d'éthylène par polymérisation de l'éthylène, éventuellement en présence d'autre(s) oléfine(s), en suspension dans un hydrocarbure inerte et en présence d'un système catalytique obtenu par (1) réaction du chlorure de vanadyle(V) et d'un alcoolate de vanadyle(V) dans un rapport molaire compris entre 1 : 2 et 2 : 1, (2) réduction du produit de réaction à l'aide d'un composé organoaluminique choisi parmi le chlorure de diéthylaluminium et/ou le dichlorure d'éthylaluminium, le rapport molaire composé d'aluminium : composé de vanadyle étant compris entre 1 : 1 et 3 : 1, et (3) activation par un composé organoaluminique, de préférence un composé trialcoylaluminium (revendication ; exemples 1 et 2). La masse volumique apparente des poudres de polyéthylène, qui sont pratiquement exemples de particules très fines, est comprise entre 0,42 et 0,55 g/ml, leur diamètre moyen est compris entre 430 et 960 µm, et la teneur en oxyde de vanadium est compris entre 9 et 17 ppm correspondant à une quantité de 0,88 à 1,87 X 10-4 milliatome-gramme de vanadium par gramme (page 5, paragraphe 2, lignes 7 à 10 ; exemples). Bien que ces caractéristiques soient satisfaisantes et que les poudres de polyéthylène possèdent, en particulier, une bonne fluidité, la distribution granulométrique de ces poudres est trop étalée pour pouvoir envisager la production de tels polymères dans un réacteur à lit fluidisé.
A la lumière de cet art antérieur le problème technique à résoudre peut être vu dans la définition de poudres de polymères d'éthylène compatibles avec un procédé de préparation du polymère en phase gazeuse au moyen d'un lit fluidisé.
Selon la revendication 27 du brevet attaqué ce problème est résolu par des polymères d'éthylène ayant une distribution granulométrique telle que le rapport du diamètre moyen en masse au diamètre moyen en nombre des particules est inférieur ou égal à 3,5.
Les exemples du brevet attaqué montrent que cette caractéristique supplémentaire permet effectivement de résoudre le problème technique ci-dessus, en évitant à la fois que soient entraînées hors du réacteur les particules trop petites et que se déposent sur la grille de fluidisation en la bouchant les particules trop grosses. Cet avantage n'a pas été mis en doute par la requérante. 5. La requérante a fait valoir que les poudres de polyéthylène décrites dans les exemples 7 et 8 du document (1) possèdent implicitement toutes les caractéristiques des produits revendiqués dans la revendication 27 et que ceux-ci n'étaient donc pas nouveaux. La chambre ne peut souscrire à cette objection pour les raisons suivantes.
5.1. La première est que les résultats expérimentaux avancés par la requérante pour suppléer à l'insuffisance de données relatives à la distribution granulométrique des poudres obtenues dans les exemples 7 et 8 du document (1), ne permettent pas une comparaison objective avec les valeurs indiquées dans le brevet attaqué.
En effet, la méthode d'analyse préconisée dans le brevet attaqué repose sur des observations microscopiques réalisées au moyen d'un analyseur d'images OPTOMAX (Micro- Measurements Ltd - Grande Bretagne) (page 6, ligne 65 à page 7, ligne 25). Par contre, la méthode de mesure mise en oeuvre par la requérante implique le tamisage des poudres (mémoire de recours, annexe). Selon l'intimée, cette méthode est imprécise et présente une mauvaise fiabilité en raison des forces électrostatiques créées sur les particules de polymère par les vibrations des tamis, qui tendent à donner des valeurs de taille par excès (mémoire de réponse, page 4, point (b)). De son côté, la requérante estime que, selon son expérience, cette méthode est au contraire suffisamment précise et que, en tout état de cause, elle ne devrait pas conduire à des résultats fondamentalement différents de la microscopie optique (mémoire déposé le 22 janvier 1993, point 2). Pour sa part, la chambre n'est pas en mesure d'apprécier l'influence exacte des forces électrostatiques créées sur les particules de polymère par les vibrations des tamis sur les valeurs du diamètre moyen en masse avancées par la requérante, respectivement 708 et 716 µm pour les exemples 7 et 8.
Dans la décision T 219/83 publiée au JO OEB 1986, 211, qui correspond à la situation évoquée ci-dessus, il avait été estimé que si l'Office européen des brevets n'est pas en mesure d'établir les faits en procédant à un examen d'office, c'est la partie qui a fondé son argumentation sur la version non prouvée des faits qui doit subir les désavantages de cette situation (Motifs de la décision, point 12, paragraphe 4). Dans le cas présent, la chambre ne peut donc que constater que la méthode d'analyse des poudres retenue par la requérante est inappropriée aux fins de comparaison et que les résultats expérimentaux fournis sur cette base ne permettent pas de supporter l'objection de défaut de nouveauté.
5.2. La deuxième raison résulte de la définition même des poudres dans le brevet attaqué, qui sont caractérisées par les paramètres suivants : 1) teneur en titane, 2) teneur en résidus inorganiques, 3) masse volumique apparente, 4) diamètre moyen en masse, et 5) distribution granulométrique. Le libellé de la revendication 27, c'est- à-dire la version qui prend en compte la modification introduite le 14 septembre 1992 par l'intimée, impose à la fois une certaine teneur en titane en tant que résidu catalytique et une limite supérieure à cette teneur ; il s'ensuit que ce paramètre ne peut pas être égal à zéro.
Par contre, le procédé mis en oeuvre dans le document (1) exclut a priori que cette condition puisse être satisfaite pour les polymères obtenus, puisque le système catalytique est à base de vanadium. Ainsi, l'analyse des poudres décrites dans les exemples 7 et 8 ne révèle que la présence d'aluminium, de vanadium et de chlore, éventuellement sous forme combinée, dans les résidus inorganiques. La teneur en titane des poudres de polyéthylène est donc toujours nulle dans l'art antérieur, donc à l'extérieur du domaine défini dans la revendication 27 du brevet attaqué.
5.3. Pour ces deux raisons la chambre conclut que l'exigence de nouveauté est satisfaite.
6. Il reste à examiner si l'objet du brevet attaqué implique une activité inventive, en particulier si la solution revendiquée découle de manière évidente des documents considérés.
6.1. L'enseignement du document (1) n'est pas susceptible de suggérer à l'homme du métier une modification des poudres dans le sens préconisé dans la revendication 27.
En effet, l'enseignement majeur de ce document porte sur la préparation et la mise en oeuvre d'un système catalytique particulier, dans lequel le constituant catalytique à réduire est lui-même un produit de réaction du chlorure de vanadyle(V) et d'un alcoolate de vanadyle (V) dans des proportions critiques, c'est-à-dire un composé très spécifique. Le choix de ce système catalytique est destiné à pallier aux divers inconvénients inhérents aux complexes conventionnels à base de vanadium et d'aluminium ; ainsi, outre le fait que de tels complexes ont une durée de vie courte et une productivité faible, ils conduisent à la formation de dépôts sur les parois du réacteur et la qualité intrinsèque des poudres de polymère est insuffisante pour permettre la production d'objets moulés sans granulation préalable (page 2, paragraphe 1, lignes 1 à 24; page 4, paragraphe 3, lignes 1 à 9). Un facteur essentiel dans la préparation du système catalytique est l'agitation du milieu réactionnel lors de la réduction du produit de réaction ci-dessus par le composé organoaluminique ; une agitation élevée favorise la formation de catalyseurs de faible granulométrie, donc de particules de polymères de faible diamètre, et inversement (page 4, paragraphe 3, ligne 11 à page 5, ligne 7).
Pour l'homme du métier, l'enseignement du document (1) se limite donc au contrôle de la caractéristique 4) par le biais de l'agitation mécanique lors de la préparation du composé de vanadium. En vue de limiter la quantité de fines et, par là-même, de se rapprocher des conditions expérimentales compatibles avec la polymérisation au moyen d'un lit fluidisé, l'homme du métier pourrait par conséquent tout au plus avoir recours à une agitation modérée. Il va de soi qu'une telle mesure n'aurait rien à voir avec la mise en oeuvre de systèmes catalytiques à base de titane selon la caractéristique 1) ci-dessus.
6.2. Bien que le document (3) mentionne des caractéristiques satisfaisant aux conditions imposées aux paramètres 1) et 4), cet article a trait spécifiquement au polypropylène et ne saurait par conséquent être applicable à la résolution du problème à résoudre qui concerne le polyéthylène.
Cette différence apparaît clairement à la lecture du résumé d'introduction et des premières pages de l'étude consacrées à l'historique du développement des catalyseurs utilisés pour la polymérisation du propylène. Faisant suite à l'utilisation de catalyseurs dérivés du trichlorure de titane (catalyseurs dits de première génération) et de tels catalyseurs modifiés (catalyseurs dits de deuxième génération) pour la polymérisation du propylène, des catalyseurs plus complexes dits de troisième génération se sont définitivement imposés, car ils assurent un rendement élevé ainsi qu'un contrôle aisé de la distribution du poids moléculaire, de la stéréospécificité et des propriétés morphologiques des particules de polypropylène (page 66, Catalyst Development ; page 69, Third Generation Catalysts : Approach to High Yield Catalysts à page 70, paragraphe 1). Il va de soi que la maîtrise de la stéréospécificité est un problème propre à la production de polypropylène et que c'est dans ce contexte qu'il convient de considérer l'ensemble de l'article. Ceci montre que la caractéristique 1) des poudres revendiquées ne peut être simplement considérée comme le remplacement d'un catalyseur à base de vanadium dans une polymérisation de l'éthylène sans caractère stéréospécifique par un catalyseur à base de titane connu pour sa stéréospécificité dans la polymérisation du propylène. De plus, les propriétés du polypropylène mentionnées dans le tableau 2, page 74, ainsi que dans les figures 6 à 8, pages 77 et 78, qu'elles soient interprétées comme simplement souhaitables selon la thèse de l'intimée ou, au contraire, comme effectivement atteintes selon l'argumentation de la requérante, ne se réfèrent pas à un produit compatible avec la production dans un réacteur à lit fluidisé. Pour ces deux raisons, aux yeux de la chambre, l'homme du métier n'aurait pas même considéré le document (3) dans la perspective du problème à résoudre.
Il en résulte que la mise en oeuvre d'un système catalytique à base de titane pour la polymérisation d'éthylène est un choix positif et, par conséquent, que la caractéristique 1) est inventive.
6.3. Les mêmes réserves s'imposent à l'encontre du document (8) qui vise des systèmes catalytiques à base de titane convenant à la polymérisation d'oléfines ayant 3 à 6 atomes de carbone, éventuellement en mélange avec jusqu'à 30 % en poids d'éthylène (revendications 12 et 14 ; page 24, paragraphe 2).
6.4. En outre, les caractéristiques des poudres revendiquées permettent d'envisager des applications qui ne sont pas suggérées dans l'art antérieur (voir en particulier, document (1), page 6, paragraphe 3). Comme l'a fait valoir l'intimée dans son mémoire de réponse déposé le 15 juillet 1988 (point 2.1, paragraphe 3 et point 2.4, paragraphe 2), ces poudres possèdent une résistance remarquable au vieillissement et peuvent être utilisées sans traitement préalable dans des applications électriques, telles que le câblage ou les films de condensateur. Ces propriétés avantageuses plaident en faveur de l'activité inventive des poudres selon la revendication 27.
6.5. Pour ces diverses raisons, la chambre conclut que l'objet de la revendication 27 implique une activité inventive.
7. La revendication 27 étant acceptable, il en est de même de la revendication 28, qui concerne une poudre de polyoléfine préférée selon la revendication 27 et qui bénéficie de la brevetabilité de cette dernière.
8. Comme il a été fait droit à la requête principale de l'intimée, il n'y a pas lieu de considérer sa requête subsidiaire.
9. En marge de ses objections soulevées au titre de l'article 100a) CBE, la requérante a estimé que le maintien de la revendication 27 en tant que revendication de produit indépendante, c'est-à-dire sans référence au procédé de préparation, n'était pas légitime au vu de la description du brevet attaqué et que la non-prise en compte de cette divergence équivalait à un vice substantiel de procédure justifiant le remboursement de la taxe de recours (mémoire de recours, page 2, point 1)).
Outre le fait qu'il ne peut être fait droit à cette requête au vu de la conclusion ci-dessus relative à la requête principale de l'intimée (règle 67 CBE), la chambre ne peut suivre l'argumentation de la requérante.
S'il est exact que le libellé de la revendication 27 ne fait pas référence au procédé de polymérisation proprement dit, la mention de résidus catalytiques à base de titane ne laisse aucun doute quant à la nature du catalyseur mis en oeuvre dans le procédé. Cette corrélation était déjà évidente dans la revendication 27 telle que maintenue par la division d'opposition et la version actuelle la souligne encore davantage. Par ailleurs, le fait que le produit est défini dans une revendication indépendante de manière plus large que le produit directement obtenu à partir du procédé revendiqué dans une autre revendication indépendante n'est pas contraire à la CBE ; il s'agit là, au contraire, d'une pratique courante. Une analyse minutieuse dans la décision attaquée de la définition des produits issus du procédé selon la revendication 1 et de la définition des produits selon la revendication 27 était par conséquent superflue, d'autant plus que les oppositions ne portaient pas sur les revendications de procédé. Quant au fond, la chambre estime qu'il appartenait à la requérante en tant qu'opposante de produire des documents mettant en cause la brevetabilité de l'objet de la revendication la plus large, en l'occurrence la revendication 27, et que, en l'absence de documents suffisamment pertinents, la division d'opposition ne pouvait que confirmer la nouveauté et l'activité inventive des produits. Enfin, la chambre note que la requérante n'a invoqué aucun article, ni aucune règle de la CBE au support de son objection pour justifier sa requête en remboursement de la taxe de recours.
Pour ces diverses raisons, la chambre conclut que la division d'opposition n'était pas tenue dans sa décision de mettre l'accent sur cet aspect du libellé de la revendication 27 et que, par conséquent, l'objection de vice substantiel de procédure n'est pas fondée. La requête en remboursement de la taxe de recours au titre de la règle 67 CBE est donc rejetée.
10. Les arguments invoqués par la division d'opposition concernant les préventions de l'homme du métier contre la transposition au polyéthylène des enseignements de l'art antérieur ne constituent pas davantage un vice substantiel de procédure (mémoire de recours, page 6, paragraphes 4 et 5).
En effet, ces arguments avaient déjà été avancés par l'intimée antérieurement et n'ont pas été contestés par la requérante. Ainsi, dans ses mémoires de réponse l'intimée avait évoqué les risques d'éclatement des particules dans les réacteurs à lit fluidisé et avait expliqué que le passage d'un procédé de polymérisation en suspension à un procédé de polymérisation en phase gazeuse modifie le comportement du catalyseur et affecte par là-même la morphologie des particules. Le fait que la division d'opposition ait repris à son compte ces éléments techniques dans sa décision ne saurait donc constituer un vice substantiel de procédure.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la division d'opposition avec mission de maintenir le brevet sur la base des revendications 1 à 28 déposées le 14 septembre 1992 et d'une description encore à adopter.
3. La requête en remboursement de la taxe de recours est rejetée.