European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1995:T073191.19950503 | ||||||||
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Date de la décision : | 03 Mai 1995 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0731/91 | ||||||||
Numéro de la demande : | 86402243.9 | ||||||||
Classe de la CIB : | E04C 5/08 E04G 21/12 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Perfectionnements aux dispositifs de précontrainte du béton comportant des câbles tendus sinueux et à leurs procédés de mise en oeuvre | ||||||||
Nom du demandeur : | Freyssinet International (STUP) | ||||||||
Nom de l'opposant : | Dyckerhoff & Hidmann AG | ||||||||
Chambre : | 3.2.03 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive (oui) Formulation du problème objectif à résoudre Inventive step (yes) Formulation of the objective problem to be solved |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le présent recours est dirigé à l'encontre de la décision datée du 23 juillet 1991 de la division d'opposition, qui a révoqué le brevet européen n 0 220 113, issu de la demande de brevet européen n 86 402 243.9, au motif que les objets des revendications 1 à 3 de ce brevet, sous sa forme délivrée, n'impliquaient pas d'activité inventive.
II. Les revendications 1 et 2, respectivement de dispositif et de procédé, de ce brevet s'énoncent comme suit :
1. Dispositif de précontrainte d'un ouvrage en béton (4) mettant en oeuvre au moins un câble tendu sinueux relativement long (1) constitué par un faisceau de plusieurs brins métalliques (2), faisceau qui est logé dans une gaine (5) continue ou discontinue elle-même noyée sur au moins une partie de sa longueur dans l'ouvrage en béton, chaque brin de câble étant lui-même contenu dans un tube en matière plastique (3) et la répartition transversale de ces tubes étant irrégulière le long du câble, caractérisé en ce que les différents tubes (3) sont bloqués en leurs positions relatives désordonnées à l'aide exclusivement d'un coulis de ciment solidifié (6) remplissant les vides compris entre ces tubes à l'intérieur de la gaine (5).
2. Procédé pour mettre en oeuvre le dispositif de précontrainte selon la revendication 1, caractérisé en ce que, après avoir mis en place sans précaution spéciale dans la gaine (5) les différents tubes (3) garnis de brins (2) composant le câble (1), on injecte dans la gaine, entre les tubes, un coulis de ciment (6) suffisamment onctueux et fin pour assurer un remplissage complet, ledit coulis étant solidifiable seulement à la fin de l'injection, puis on met individuellement les brins sous tension après solidification du coulis injecté.
III. Durant l'opposition, les antériorités suivants avaient été citées :
(1) EP-A-0 073 170
(2) Leonhardt "Spannbeton für die Praxis", 3. Auflage, 1973, Verlag Wilhelm Ernst & Sohn
(3) US-A-3 646 748.
Dans sa décision, qui est contestée par le présent recours, la division d'opposition a estimé que, partant du dispositif de précontrainte connu du document (2), la seule caractéristique nouvelle de la revendication 1, à savoir la disposition de chaque brin du câble dans un tube en matière plastique, est connue de chacun des documents (1) et (3). Cette disposition évite un contact direct des brins avec le ciment. L'objet de la revendication 1 résulte, donc, simplement d'une transposition de la solution d'un des documents (1) ou (3) au dispositif connu du document (2). Aucun avantage particulier, diffèrent de ceux déjà connus, n'est obtenu. Comme le document (1) enseigne aussi une mise sous tension individuelle des brins après la solidification du ciment injecté entre les tubes, le procédé selon la revendication (2) est aussi évident.
IV. La requérante (titulaire du brevet) a formé recours le 23. septembre 1991, et payé simultanément la taxe correspondante. Le mémoire de recours et un complément à ce mémoire sont parvenus à l'OEB respectivement les 6 et 13. décembre 1991, soit au-delà du délai prescrit par l'article 108 CBE.
Avisé par l'Office de ce défaut, qui rendait le recours irrecevable (Règle 65 CBE), la requérante a requis la "restitutio in integrum" prévue par l'article 122 CBE.
La Chambre de recours, par sa décision T 731/91 du 10. novembre 1993, a rétabli la requérante dans ses droits quant à la production du mémoire de recours dans le délai prescrit par l'article 108 CBE.
V. Dans sa notification datée du 12 octobre 1994, la Chambre de recours a émis une opinion provisoire, selon laquelle un maintien du brevet était envisagé. Des observations de la requérante sont parvenues le 5 décembre 1994.
L'intimée (opposante) n'a pas pris position sur cet avis et n'a pas requis de procédure orale.
VI. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet n 0 220 113, tel que délivré.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. La nouveauté du dispositif selon la revendication 1 et du procédé selon la revendication 2 n'a pas été contestée. Il convient, donc, seulement d'examiner si les deux objets revendiqués impliquent une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
3. La forme en deux parties de chacune des revendications 1 et 2 est basée sur l'art antérieur connu du document (1). Or, ce document concerne un dispositif de raccordement de deux portions rectilignes de câble de précontrainte. Ce raccord est incurvé et est destiné a être placé au sommet d'un pylône ; il est, donc, court. De plus, son rôle principal est de transmettre la tension de la portion rectiligne la plus tendue, et non d'effectuer la précontrainte d'un ouvrage. De ce fait, la Chambre de recours, partageant l'opinion de la division d'opposition, estime que, contrairement à l'intimée, ce n'est pas ce document (1), mais le document (2), qui constitue l'art antérieur le plus proche de la présente invention. En effet, ce dernier document décrit un dispositif de précontrainte d'un ouvrage en béton mettant en oeuvre un câble tendu sinueux relativement long, tel que montré par sa figure 7.50.
4. Selon la troisième forme de réalisation décrite dans cet ouvrage technique (2) aux pages 235 et 240, un dispositif connu de précontrainte comporte un câble constitué par un faisceau de plusieurs brins métalliques logés selon une répartition transversale désordonnée à l'intérieur d'une gaine continue ; celle-ci est noyée sur au moins une partie de sa longueur dans l'ouvrage en béton. Les brins sont bloqués en position à l'aide exclusivement d'un coulis de ciment solidifié qui est destiné à remplir les vides entre les brins. Bien que ce document (2), ou tout au moins les pages qui en sont fournies n'en fassent pas mention, il est clair que la mise sous tension ne peut s'effectuer que sur le câble tout entier après la solidification du ciment.
5. Le dispositif selon la revendication 1 du brevet en cause se distingue de cet art antérieur en ce que chaque brin est contenu dans un tube en matière plastique. Le procédé d'utilisation selon la revendication 2 innove en ce que les brins sont mis sous tension individuellement après solidification du coulis de ciment injecté.
6. Formulation du problème objectif à résoudre
6.1. Selon la décision contestée par le présent recours, le problème objectif résolu par l'invention en cause aurait consisté à éviter une adhérence directe des brins contre le ciment. Or, ce problème, en soi, n'a aucun sens avec le dispositif connu du document (2) et, d'ailleurs, la décision contestée n'explique pas pour quelle raison un contact des brins avec le ciment doit être empêché. En général, au contraire, un tel contact est souhaité pour éviter la corrosion des brins. Ce problème ne pourrait être compris que si un mouvement relatif entre les brins et le ciment se produit. Or, comme il a déjà été vu, le câble est mis sous tension d'un seul tenant, ce qui exclut un tel mouvement relatif. Il s'avère, donc, que le problème énoncé dans la décision contestée a été artificiellement créé, ou tout au moins déformé. Certes, avec une telle formulation du problème, la solution peut paraître évident, mais l'image donnée ainsi de l'invention occulte certains aspects de celle-ci, comme il sera expliqué ci-après. Plusieurs décisions des chambres de recours ont déjà mis en garde contre la formulation de problèmes artificiels, voir à ce sujet la décision T 334/92 du 23 mai 1994, qui cite aussi T 495/91 et T 741/91.
6.2. S'il est vrai qu'un contact des brins avec le ciment est évité avec la présente invention, il s'agit d'un résultat secondaire. Comme l'indique la partie introductive de la description du brevet en cause, le but premier de l'invention est de pouvoir réaliser une mise sous tension du câble brin par brin, permettant ainsi d'utiliser des vérins bien plus légers et moins encombrants que lors d'une mise en tension du câble en une seule fois. En partant plus particulièrement du dispositif connu du document (2), la présente invention vise à pouvoir mettre sous tension, de façon individuelle, les brins d'un câble long et sinueux, qui est destiné à assurer la précontrainte d'un ouvrage en béton et dont les brins ont une disposition désorganisée.
Cette formulation du problème concerne en premier lieu le procédé selon la revendication 2, dont une caractéristique explicite ce but, mais elle s'applique aussi au dispositif selon la revendication 1, car le procédé selon la revendication 2 est destiné à la mise en oeuvre du dispositif. En d'autres mots, le but recherché est de rendre le dispositif apte à être utilisé dans le procédé.
6.3. Ce problème n'est pas résolu par la seule présence des tubes, et ceci confirme qu'une absence de contact des brins avec le ciment ne constitue pas le vrai problème. En effet, si les tubes seuls, garnis chacun d'un brin, suffiraient à empêcher ledit contact, ils ne peuvent résoudre, à eux seuls, le problème de la tension brin par brin. C'est la combinaison des deux moyens - tubes garnis chacun d'un brin et coulis de ciment solidifié -, qui permet de résoudre ce problème ; le coulis de ciment solidifié maintient les tubes en place, les empêche de s'écraser lors des tensions individuelles des brins et joue, donc, le rôle d'écarteur de ces tubes: La solution de la présente invention repose donc sur une combinaison nouvelle de moyens.
7. Il reste à examiner si cette solution était suggérée par l'art antérieur ou même évidente en soi pour l'homme du métier.
7.1. Le dispositif de raccordement selon le document (1) permet une tension individuelle des brins dans une de ses formes de réalisation. Selon celle-ci, chaque brin est disposé dans un tube en matière plastique, et un coulis de ciment est injecté entre les tubes. Ce n'est qu'après la solidification du ciment que la tension est effectuée, tout comme dans la présente invention. Cet art antérieur, toutefois, enseigne que dans un tel cas, les tubes doivent être disposés selon une disposition ordonnée, qui peut être obtenue au moyen de séparateurs ou de systèmes à ligatures.
Il résulte, donc, de cet enseignement qu'une tension brin par brin n'est considérée comme possible qu'avec une disposition organisée, prédéterminée des tubes, et ceci même dans le cas d'un dispositif de raccordement qui est pourtant court et a une forme courbe simple.
Considérer l'enseignement de cet art pour l'appliquer à un câble long et sinueux n'apparaît pas évident en l'absence de toute suggestion correspondante. De plus, l'homme du métier, s'il avait voulu transposer cet enseignement au dispositif selon le document (2), aurait dû commencer par passer d'une disposition désordonnée des brins à une disposition ordonnée de ceux-ci, avant de placer les tubes garnis de leurs brins. Il ne serait donc pas parvenu à l'objet de la revendication 1 contestée.
7.2. Le document (3) est encore plus éloigné de la solution revendiquée, dans la mesure où il concerne la fabrication d'un seul brin, éventuellement composé de plusieurs torons. Ce brin est disposé dans un tube en matière plastique, dans lequel est injecté un inhibiteur de corrosion, tel que de la graisse, qui remplit les espaces laissés vides du tube. Il n'est question dans ce document ni de mise sous tension du câble brin par brin, ni de disposition désordonnée et encore moins de coulis de ciment. Par conséquent, ce document ne peut, en aucune façon, suggérer la présente solution, telle que revendiquée.
7.3. De surcroît, le document (2), bien que représentant l'art antérieur le plus proche, tend lui-même à éloigner l'homme du métier de la solution revendiquée. En effet, lorsque son auteur mentionne une disposition désordonnée de brins lisses, il émet en même temps des réserves sur la possibilité d'introduire du coulis de ciment "partout entre les brins", notamment dans les zones de courbure. Pour l'homme du métier, à la lecture de ce document, des tubes placés en lieu et place des brins entraîneraient le même inconvénient et cet homme du métier n'est donc pas enclin à utiliser des tubes avec un coulis de ciment, dont la pénétration est incertaine le long du trajet sinueux de l'ensemble désorganisé. D'autre part, l'antériorité (2) n'attribue pas au coulis de ciment une fonction d'écartement des brins. Celle-ci est réalisée par d'autres moyens, tel que des cannelures sur la surface extérieure des brins. Le mérite de la présente invention est, donc, d'avoir combiné la présence des tubes avec celle du coulis de ciment malgré le préjugé ci-dessus mentionné et d'avoir réalisé que le coulis de ciment pouvait jouer le rôle d'un écarteur mécanique, permettant ainsi une tension individuelle des brins malgré leur trajet sinueux et leur disposition quelconque.
8. Par conséquent, les objets des revendications 1 et 2 impliquent une activité inventive. La revendication dépendante 3, qui spécifie les moyens permettant la tension des brins selon la revendication 2 de procédé, est donc acceptable.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet tel que délivré.