European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1992:T025791.19921117 | ||||||||
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Date de la décision : | 17 Novembre 1992 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0257/91 | ||||||||
Numéro de la demande : | 81400060.0 | ||||||||
Classe de la CIB : | G21C 3/34 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Grille entretoise pour assemblage combustible de réacteur nucléaire | ||||||||
Nom du demandeur : | COMMISSARIAT A L'ENERGIE ATOMIQUE | ||||||||
Nom de l'opposant : | Siemens Aktiengesellschaft | ||||||||
Chambre : | 3.4.01 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Requête principale : Activité inventive (non) Requête accessoire : Exposé de l'invention (insuffisant) Main request: inventive step (no) Auxiliary request: disclosure - sufficiency - (no) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. L'intimée est titulaire du brevet européen n° 0 033 263.
La revendication 1 de ce brevet s'énonce comme suit :
"1. Grille entretoise pour un assemblage combustible utilisée dans un réacteur nucléaire à eau légère sous pression constituée par des plaquettes entrecroisées (19) suivant un réseau à mailles carrées dans les cellules (7) de laquelle passent les crayons combustibles (8) pour leur maintien transversal, ces crayons constituant un faisceau où certains crayons sont remplacés par des tubes guides (10) assurant d'une part la tenue mécanique de l'assemblage et, d'autre part, le guidage des crayons de contrôle de la réactivité, les plaquettes qui constituent les parois des cellules portant des éléments de maintien des crayons combustibles en saillie vers l'intérieur des cellules et de deux types, à savoir d'une part des butées rigides (13, 14) et d'autre part des ressorts (12) susceptibles d'exercer des forces transversales sur les crayons combustibles, rapportés sur la grille et disposés autour des plaquettes de façon que chacune des faces de chaque cellule renfermant un crayon porte un élément de type différent de celui porté par la face opposée, caractérisée par le fait qu'elle comporte :
- sur la plus grande partie des parois équipées de ressorts, des ressorts doubles (12) comportant deux parties actives de part et d'autre de la paroi sur laquelle est placé le ressort double, permettant l'action symétrique de ce ressort sur deux crayons différents à l'intérieur de deux cellules adjacentes ;
- sur les autres parois équipées de ressorts, des ressorts simples (16) comportant une seule partie active disposée dans l'une des deux cellules séparées par la paroi sur laquelle est placé le ressort dont l'autre partie qui n'est pas susceptible d'entrer en contact avec un crayon combustible possède au moins une zone de déformation (68), les deux parties précédentes ayant par ailleurs leurs extrémités soudées et montées libres en glissement par rapport à la plaquette qui les supporte."
Les revendications 2 à 10 sont dépendantes de la revendication 1.
II. La requérante a fait opposition à ce brevet et en a demandé la révocation au motif que son objet ne serait pas nouveau eu égard aux enseignements du document :
D1 : DE-A-2 137 158
III. La division d'opposition a considéré l'objet du brevet exclusivement sous l'aspect de la nouveauté et a rejeté l'opposition par une première décision. La requérante a formé un premier recours contre cette décision et maintenu sa requête en révocation du brevet au motif que l'objet de la revendication 1 n'impliquait pas d'activité inventive, notamment au vu des documents D1 et
D3 : FR-A-1 536 257.
Dans une première décision portant le numéro T 493/88 et datée du 13 décembre 1989, la Chambre a décidé que l'objet de la revendication 1 est nouveau au sens de l'article 54 de la CBE. De l'avis exprimé par la Chambre à cette occasion, les extrémités des deux parties des ressorts décrits dans le document D1 ne sont pas montées libres en glissement par rapport à la plaquette qui les supporte mais, au contraire, ancrées fermement sur celle-ci comme l'indique explicitement aussi bien la revendication 6 de ce document ("fest verankert") que sa description (page 14, dernière ligne, "sicher befestigt").
Comme il ne ressortait pas du dossier que la Division d'opposition ait considéré la question de l'activité inventive impliquée par l'objet de la revendication 1, la Chambre a, pour ne pas priver les parties de leur droit à un examen complet de l'opposition par deux instances, décidé d'exercer le pouvoir que lui est confère l'article 111 de la CBE et renvoyé l'affaire à la Division d'opposition pour suite à donner.
IV. Ultérieurement, la Division d'opposition a de nouveau rejeté l'opposition par une deuxième décision. Tenant compte de l'état de la technique illustré en particulier par les documents D1 et D3, elle a émis l'avis que la revendication 1 implique une activité inventive au sens des articles 52(1) et 56 de la CBE. Selon la Division d'opposition, les ressorts doubles et simples du document D1 n'ont pas les mêmes caractéristiques et propriétés que ceux mentionnés dans la revendication 1 du brevet en cause, la raison en étant que les extrémités des deux parties des ressorts décrits dans le document D1 sont ancrées fermement ("sicher .... befestigt") sur la plaquette et, de ce fait, ne sont pas "montées libres en glissement par rapport à la plaquette".
V. Contre cette deuxième décision de la Division d'opposition, la requérante a formé un second recours qui a été soumis à la Chambre et fait l'objet de la présente décision. Dans le mémoire exposant les motifs de ce deuxième recours, la requérante a encore cité le document additionnel :
D7 : GB-A-1 362 546,
lequel appartient à la même famille que le document D1, ceci dans le but de démontrer que le texte anglais du document D7, page 4, ligne 90 ("locked firmly" au lieu de "sicher befestigt") et page 6, ligne 38 ("lockingly engages" au lieu de "fest verankert") étaye son point de vue, à savoir que des ressorts doubles et simples pouvant glisser par rapport à la plaquette d'une grille entretoise font partie de l'état de la technique relatif aux assemblages combustibles pour réacteurs nucléaires.
VI. Une procédure orale s'est tenue le 17 novembre 1992, au début de laquelle la Chambre a accepté l'introduction du document D7 dans la procédure, estimant que les faits techniques divulgués dans le document D1, mais interprétés sur la base du texte anglais original pouvaient s'arérer pertinents pour apprécier l'activité inventive.
Pendant la procédure orale, l'intimée a déposé une requête auxiliaire. La revendication 1 de cette requête auxiliaire se déduit de la revendication 1 selon requête principale (voir paragraphe I) par insertion des compléments "dans le plan de la plaquette de façon que les efforts transversaux soient équilibrés en majeure partie par ceux de l'autre partie et ne soient pratiquement pas transmis à la plaquette, après "les deux parties précédentes ayant par ailleurs leurs extrémités soudées".
Les revendications 2 à 9 de la requête accessoire dépendent de la revendication 1.
A la fin de l'audition des parties, la requérante (opposante) a demandé l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet européen n° 0 033 263.
Pour sa part, l'intimée (titulaire du brevet) a sollicité le rejet du recours et le maintien du brevet, à titre principal, tel que délivré, et à titre subsidiaire, sur la base des revendications 1 à 9 déposées pendant la procédure orale.
VII. A l'appui de sa requête, la requérante a pour l'essentiel fait valoir ce qui suit :
a) Partant de l'état de la technique illustré par le document D3, il ne reste objectivement que le problème d'éviter que les efforts transversaux exercés sur les crayons combustibles et sur les ressorts soient transmis aux plaquettes de la grille. Seuls des ressorts doubles comportant deux parties actives résolvent ce problème car les efforts exercés sur une partie sont équilibrés par ceux exercés sur l'autre partie. Un tel effet compensateur est inhérent aux ressorts doubles et peut facilement être constaté par l'homme du métier analysant la figure 5 du document D7. De ce fait, il est évident pour l'homme du métier d'utiliser, dans une grille entretoise pour réacteur à eau légère sous pression du type connu de D3, un ressort double tel que celui connu du document D7 dans le domaine voisin concernant les grilles entretoises pour réacteurs à eau bouillante.
b) Les ressorts représentés sur les figures 5 et 6 du document D7, sont exclusivement assemblés par soudage des extrémités planes 30a de leurs deux parties, sans aucune jonction matérielle des surfaces de butée 35 aux bords de la plaquette 31. Le texte du document D7, page 4, lignes 49-55, établit que les agrafes de support 30 sont jointes "pour maintenir entre elles une partie 31 de la nervure interne séparant deux cellules adjacentes 14 (members 30 are joined together at their flat terminal ends 30a to capture therebetween a portion 31 of the inner rib matrix separating adjacent fuel rod cells 14)". De ce fait, ces ressorts connus sont verrouillés de la même façon que suivant le brevet en cause (voir figure 4) et peuvent glisser sur la surface de la plaquette comme spécifié dans la revendication 1 dudit brevet. De plus, un tel montage des ressorts "libres en glissement par rapport à la plaquette qui les supporte" est indispensable pour produire les forces de maintien exercées sur les crayons combustibles, c'est-à-dire pour permettre l'allongement axial des ressorts faisant suite à leur compression transversale. Pour qu'une rupture de la soudure soit évitée, ceci exige toutefois que la partie inactive du ressort simple connu soit susceptible d'extension longitudinale. Ces conclusions ne sont pas infirmées par le texte du document D7, page 4, lignes 88 à 91, et page 6, lignes 36 à 39, lequel précise que "les agrafes de support 30 sont bloquées fermement sur les nervures internes de plaquette (the engagement members 30 are locked firmly in place on the inner rib matrix") et qu'un ressort "accroche la plaquette en l'enclenchant (lockingly engages said matrix portion)". Les butées 33 au bord des ressorts connus n'évitent pas le glissement mais seulement une déformation permanente de la surface élastiquement compressible ; voir document D7, page 4, lignes 77 à 91.
c) Un ressort simple ne peut pas équilibrer les efforts transversaux exercés sur sa partie active. En effet, sa partie inactive n'entre pas en contact avec un crayon combustible pour engendrer la force antagoniste nécessaire. Donc, les ressorts simples ne contribuent pas à la solution du problème. De plus, le ressort simple de la grille entretoise revendiquée doit obligatoirement exercer sur la partie adjacente de la plaquette la pression nécessaire à la déformation élastique de sa partie active. Cette force n'est pas négligeable puisqu'elle doit maintenir en place un crayon combustible et éviter son usure sous l'effet des vibrations. Ceci interdit à l'homme du métier de réaliser le soudage des deux parties d'un ressort simple "dans le plan de la plaquette", ce qui est pourtant la condition pour que "les efforts transversaux soient équilibrés en majeure partie par ceux de l'autre partie et ne soient pratiquement pas transmis à la plaquette".
VIII. L'intimée a contesté la validité de cette argumentation, faisant notamment valoir que :
a) Il est explicitement spécifié dans le document D3, en particulier à la page 3, lignes 35 à 39 de la deuxième colonne, que, suivant l'état de la technique le plus proche, seuls des ressorts simples formant partie intégrante des plaquettes, sont utilisés, de sorte que les efforts transversaux sont transmis à la plaquette. Bien que le document D7 appartienne à un domaine technique voisin, l'homme du métier n'y trouve pas les moyens techniques de la solution conforme à l'invention, ceci du fait qu'il n'y est pas question d'éléments de contrôle de la réactivité. L'auteur de ce document a dû choisir des ressorts de forme convenable pour qu'ils répondent essentiellement à la condition de ne pas transmettre d'efforts à la plaquette, celle-ci n'ayant ainsi pour fonction que de maintenir les ressorts.
b) Le problème résolu par l'invention est très complexe. Il comprend, outre la compensation des efforts transversaux, le maintien efficace des crayons malgré la présence d'éléments de contrôle, la prévention de l'usure de leurs gaines sous l'effet des vibrations provoquées par les bulles, la réduction de l'absorption neutronique par les éléments de maintien et, enfin, l'atténuation des vibrations mécaniques.
c) La grille illustrée dans le document D7 ne comprend pas d'éléments de contrôle et les ressorts doubles y sont en minorité. De ce fait, il n'est pas évident pour l'homme du métier d'utiliser "sur la plus grande partie des parois équipées de ressorts, des ressorts doubles". Selon l'invention, il n'y a de ressorts simples que sur les portions de plaquettes limitant les cellules où se trouvent des éléments de contrôle. L'utilisation d'une majorité de ressorts doubles produit l'effet combinatoire d'atténuer les forces de déformation et les vibrations des crayons en les transmettant aux compartiments voisins, la transmission des vibrations ne s'arrêtant qu'au niveau des ressorts simples. Cet effet combinatoire est l'indice d'une activité inventive.
d) En choisissant l'inconel pour fabriquer les ressorts alors que le document D3 propose l'acier inoxydable ou un alliage à base de zirconium, les auteurs de la présente invention ont dû vaincre un préjugé technique.
e) Les grilles entretoises selon l'invention ont été installées dans toutes les centrales françaises. Un tel succès commercial est indice d'activité inventive.
f) Il est abusif de qualifier de "simple" au sens de l'invention le ressort 15b du document D7. Ce ressort connu n'a pas de partie inactive, c'est-à-dire de partie ne venant pas au contact d'un crayon combustible ; voir le document D7, figure 5, butées rigides 33. L'effort essentiel des inventeurs était donc de prévoir une deuxième partie, non active et servant à équilibrer les sollicitations de la partie active par ses propres déformations ; voir les figures 7, 8 et 10 du brevet en cause, zones de déformation 68 du ressort simple et percements 28 dans la plaquette. L'équilibrage des efforts transversaux exercés sur la partie active du ressort simple est techniquement assuré par la localisation dans le plan de la plaquette de la soudure entre parties active et inactive. Cette position de la soudure réalise une symétrie par rapport à la plaquette et permet que l'allongement axial de la partie active soit le même que celui de la partie inactive. Une compensation de l'effort transversal est ainsi réalisée, ce qui n'est pas le cas avec les ressorts représentés sur la figure 5 du document D7 et dont les deux parties sont réunies par une soudure située hors du plan de la plaquette. Le transfert de la soudure dans le plan de la plaquette n'est cependant pas évident pour l'homme du métier.
IX. A l'issue de la procédure orale, le Président de la Chambre a prononcé l'annulation de la décision sous appel et la révocation du brevet en cause.
Motifs de la décision
1. Activité inventive - Revendication 1 - Requête principale
1.1. L'état de la technique le plus proche est illustré par la grille entretoise du document D3. La terminologie de la revendication 1 étant ici reprise, cette grille se définit comme suit :
"Grille entretoise (voir document D3, figures 1 et 20) pour assemblage combustible (voir figure 4 et page 2, dernier paragraphe de la colonne du droite), utilisée dans un réacteur à eau légère sous pression (voir, dans la colonne de gauche de la page 1, lignes 29 à 34, la référence aux propriétés de refroidissement et, si cela est souhaité, de modération des neutrons que possède ce fluide, ainsi que l'allusion faite à la même page, troisième ligne de la colonne de droite, à la chute de pression qui se produit dans le coeur) constituée par des plaquettes (62) entrecroisées suivant un réseau à mailles carrées (voir figure 4), dans les cellules de laquelle passent les crayons combustibles (22) pour leur maintien transversal, ces crayons (22) constituant un faisceau où certains crayons sont remplacés par des tubes guides (16) assurant d'une part la tenue mécanique de l'assemblage (voir page 2, colonne droite, lignes 15 à 17) et, d'autre part, le guidage des crayons de contrôle de la réactivité (page 2, colonne de gauche, lignes 14 à 17), les plaquettes (62) qui constituent les parois des cellules portant des éléments de maintien des crayons combustibles en saillie vers l'intérieur des cellules et de deux types, à savoir d'une part des butées rigides (68) et d'autre part des ressorts (70) susceptibles d'exercer des forces transversales sur les crayons combustibles (voir figure 5 et page 2, lignes 55 à 59 de la colonne de gauche), disposés autour des plaquettes de façon que chacune des faces de chaque cellule renfermant un crayon porte un élément de type différent de celui porté par la face opposée (voir figure 4 et page 3, lignes 44 à 51 de la colonne de droite) caractérisée par le fait qu'elle comporte : .... des ressorts simples (troisième paroi de gauche dans la figure 5) comportant une seule partie active disposée dans l'une des deux cellules séparées par la paroi sur laquelle est placée le ressort."
1.2. L'invention a pour objet d'éviter, dans la mesure du possible , que les efforts transversaux produits par les déformations et les vibrations des crayons combustibles soient transmis aux plaquettes de la grille entretoise. Néanmoins, la Chambre est d'avis que, lors d'inspections de routine, l'homme du métier peut aisément constater les détériorations desdites plaquettes imputables aux efforts transversaux qu'elles subissent. Par ailleurs, pour les raisons exposées ci-après, la Chambre ne saurait se rallier au point de vue de l'intimée concernant le problème technique à résoudre, à savoir que celui-ci serait plus complexe ; voir le paragraphe VIII-b.
Un maintien efficace des crayons combustibles malgré la présence d'éléments de contrôle est déjà réalisé dans la grille connue du document D3, figure 4. Une amélioration de ce maintien par ressort et butée rigide ne pourrait être obtenue que par un changement d'orientation et/ou d'intensité des forces exercées sur les crayons. Cependant, la revendication 1 ne mentionne pas de moyens propres à produire un tel effet. La revendication 1 ne précise pas davantage la nature des matériaux et, de ce fait, n'enseigne pas comment réduire l'absorption des neutrons ; voir paragraphe VIII.d de la présente décision. Enfin, la recherche d'une atténuation des vibrations des crayons combustibles n'est nulle part évoquée dans le brevet en cause et, de ce fait, ne peut être incluse dans la formulation du problème objectif sans contrevenir aux exigences de l'article 123(2) CBE.
Dans ces conditions, la formulation du problème technique abordé dans le brevet en cause ne saurait impliquer d'activité inventive.
1.3. Le problème technique est résolu par les caractéristiques restantes de la revendication 1, à savoir :
a) des ressorts doubles comportant deux parties actives de part et d'autre de la paroi sur laquelle est placée le ressort double, permettant l'action symétrique de ce ressort sur deux crayons différents à l'intérieur de deux cellules adjacentes ;
b) le fait qu'en plus de leur partie active, les ressorts simples ont "une autre partie qui n'est pas susceptible d'entrer en contact avec un crayon combustible (et) possède au moins une zone de déformation" ;
c) le fait que les susdites parties des ressorts simples "ont leurs extrémités soudées et montées libres en glissement par rapport à la plaquette" ;
d) le fait que les ressorts sont "rapportés sur la grille", et
e) le fait que la grille comporte "sur la plus grande partie des parois équipées de ressorts, des ressorts doubles" et, "sur les autres parois équipées de ressorts, des ressorts simples".
1.4. L'utilisation des moyens mentionnés ci-dessus aux paragraphes 1.3a) et 1.3c) est connue du document D7 ; voir, sur la figure 5, les ressorts doubles 15a. Sur ce point, la Chambre approuve l'interprétation technique du document D7 que fait la la requérante, interprétation rapportée au paragraphe VII-b de la présente décision et contre laquelle l'intimée n'a pas soulevé d'objections.
1.5. En considérant la figure 5 du document D7, l'homme du métier peut facilement conclure à l'effet qu'a le ressort double 15a, disposé entre les crayons 10 occupant deux cellules adjacentes, de prévenir la transmission d'efforts transversaux à la plaquette 31. Toutefois, en reconnaissant que les efforts transversaux exercés sur une partie du ressort double 15a équilibrent ceux exercés sur l'autre partie en raison de l'opposition de leurs directions, il ne va pas au-delà de ce qu'on est en droit d'attendre de sa part. L'argument que l'absence des éléments de contrôle dans la grille du document D7 empêche l'homme du métier de reconnaître que les ressorts doubles connus résolvent le problème à l'origine de l'invention (voir paragraphe VIII-a) ne peut être admis pour les raisons qui suivent. L'intimée a déclaré que, dans les parois des cellules contenant des éléments de contrôle, des ressorts simples et non des ressorts doubles sont installés ; voir paragraphe VIII-c. De plus, dans le mode de réalisation selon la figure 1 du brevet en cause, les portions des plaquettes adjacentes aux éléments de contrôle portent exclusivement des butées rigides. Donc, suivant le brevet en cause comme dans l'état de la technique divulgué par D7, l'espacement nécessaire à l'interaction entre deux crayons et un ressort double, lequel provoque l'équilibrage des efforts opposés, n'est pas affecté par la présence d'un élément de contrôle. Selon l'opinion de la Chambre, il va de soi pour l'homme du métier que les ressorts doubles 15a, connus dans le domaine voisin des grilles pour réacteur à eau bouillante auquel a trait le document (D7), ne peuvent être installés dans une grille pour réacteur à eau légère sous pression (D3) que dans les régions qui ne sont pas voisines d'un élément de contrôle. Il en résulte que l'emploi du ressort double 15a du document D7 dans la grille du document D3 se fonde exclusivement sur les propriétés connues dudit ressort double. Une telle utilisation d'un enseignement technique connu dans un domaine voisin et une situation analogue est regardé comme évident pour l'homme du métier.
1.6. Selon l'état de la technique le plus proche, illustré par le document D3, les ressorts simples servent, comme dans la grille entretoise du brevet en cause, à compenser les irrégularités locales créées par les éléments de contrôle ; voir aussi paragraphe VIII-c. Les ressorts simples ne contribuent donc pas à résoudre le problème objectif défini au paragraphe 1.2. Eu égard à l'analogie avec le montage du ressort double 15a du document D7, c'est-à-dire autorisant le glissement par rapport à la plaquette, la modification du montage d'un ressort simple définie au paragraphe 1.3b s'impose logiquement à l'homme du métier. De plus, le choix du même système de montage pour les ressorts doubles et pour les ressorts simples s'impose à l'homme du métier par la nécessité d'uniformiser, dans chaque cellule de la grille, la flexibilité des ressorts exerçant des efforts transversaux sur les crayons combustibles pour les maintenir en position. Pour ces raisons, la Chambre considère la caractéristique définie au paragraphe 1.3b comme une mesure d'adaptation évidente imposée par l'utilisation, elle-même évidente, de ressorts doubles (voir paragraphe 1.5).
Selon l'opinion de la Chambre, les boutons 33 du ressort simple 15b représenté sur la figure 5 du document D7 constituent également, dans la partie inactive du ressort simple, "au moins une zone de déformation" servant à compenser l'allongement axial de la partie active. Cette fonction des déformations 33 n'est nullement dissimulée par leur second objet, à savoir former des butées pour les crayons combustibles. Il faut en outre souligner que, dans le mode de réalisation selon figure 1 du brevet en cause, les ressorts simples sont disposés seulement aux parois de la plaquette qui, du côté de la partie inactive desdits ressorts simples, portent des butées rigides séparées et faisant partie intégrante de la plaquette. Dans le cadre du brevet en cause, la partie inactive du ressort simple n'a donc pas la fonction de butée et il n'y a pas de raison pour que les déformations viennent au contact des crayons. De ce fait, les arguments de l'intimée résumés au paragraphe VIII-f ne peuvent être admis.
1.7. Selon l'opinion de la Chambre, il est tout à fait normal pour l'homme du métier de protéger, dans la mesure du possible, le plus grand nombre de plaquettes contre les forces transversales et, à cet effet, de prévoir plus de ressorts doubles que de ressorts simples. De ce fait, la caractéristique de la revendication 1 définie dans le paragraphe 1.3e ne représente qu'une mesure d'adaptation évidente accompagnant l'utilisation de ressorts doubles, dont l'évidence a été soulignée dans le paragraphe 1.5. En outre, même si la répartition et l'égalisation des forces de déformation des crayons sur plusieurs cellules devait représenter un effet combinatoire (voir paragraphe VIII- c), celui-ci demeurerait prévisible pour l'homme du métier et ne saurait donc être considéré comme indice d'activité inventive. Enfin, une atténuation des forces de déformation et des vibrations des crayons n'est pas divulguée dans le brevet en cause, et pour cette raison, ne peut pas contribuer à une activité inventive à la base de la revendication 1.
1.8. L'intimée n'a pas établi que le succès commercial dont il est fait état au paragraphe VIII.e soit dû aux caractéristiques techniques énumérées dans la revendication 1 du brevet en cause. De ce fait, ce succès ne peut pas être porté au crédit d'une activité inventive que pourrait impliquer l'objet de la revendication 1.
1.9. Pour les raisons indiquées aux points 1.1 à 1.8, l'objet de la revendication 1 selon requête principale de l'intimée n'implique pas d'activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
2. Les revendications 2 à 10 de la requête principale ne peuvent pas être maintenues, puisqu'elles sont rattachées à la revendication 1.
3. Exposé de l'invention - Revendication 1 selon requête auxiliaire de l'intimée.
3.1. La revendication 1 selon requête auxiliaire de l'intimée complète la définition du montage d'un ressort simple sur la plaquette par la caractéristique fonctionnelle suivante : "de façon que les efforts transversaux soient équilibrés en majeure partie par ceux de l'autre partie et ne soient pratiquement pas transmis à la plaquette".
3.2. Ainsi qu'il est rapporté au paragraphe VIII-f, l'intimée a exposé que l'équilibrage des efforts exercés sur la partie active du ressort simple est le résultat de la localisation dans le plan de la plaquette de la soudure unissant les deux parties du ressort. Une telle explication est toutefois contraire à la loi de composition vectorielle des forces, laquelle forme l'une des bases de la dynamique. En effet, sous l'action d'un effort transversal, la partie active du ressort simple est déformée et allongée dans une direction normale à cet effort, à savoir la direction axiale du ressort. L'allongement axial de la partie active provoque un allongement axial de la partie inactive, lequel développe à son tour une réaction opposée, donc elle aussi orientée suivant la direction axiale du ressort. Comme la partie inactive du ressort simple n'entre pas en contact avec une surface d'appui, elle n'est pas en mesure de produire une force antagoniste dans la direction transversale. Le transfert de la soudure d'une position extérieure au plan de la plaquette (voir D7, figure 5) à une position intérieure à ce plan (voir revendication 1 de la requête auxiliaire) modifie à la rigueur la répartition locale de la pression exercée par la partie active sur la plaquette mais non l'intensité de l'effort transversal globalement exercé sur elle. Donc, la composante transversale des efforts exercés sur la partie active, laquelle équivaut à la force de maintien d'un crayon combustible, reste intégralement transmise à la plaquette. Enfin, le brevet en cause ne divulgue pas d'autres moyens techniques pour équilibrer les efforts transversaux exercés sur les ressorts simples. La Chambre en conclut que, partant des enseignements du brevet en cause, l'homme du métier n'est pas en mesure de réaliser un ressort simple de façon telle "que les efforts transversaux ne soit pas transmis à la plaquette."
3.3. Pour les raisons indiquées au point 3.2, l'invention selon revendication 1 de la requête auxiliaire n'est pas exposée dans le brevet en cause de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter. Il en découle que l'invention définie par la revendication 1 de la requête auxiliaire ne satisfait pas aux exigences de l'article 83 CBE.
4. Les revendications 2 à 9 de la requête auxiliaire ne peuvent être acceptées puisqu'elles sont dépendantes de la revendication 1.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision sous appel est annulée.
2. Le brevet européen n° 0 033 263 est révoqué.