European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1993:T037690.19930908 | ||||||||
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Date de la décision : | 08 Septembre 1993 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0376/90 | ||||||||
Numéro de la demande : | 82300927.9 | ||||||||
Classe de la CIB : | C08F 6/06 | ||||||||
Langue de la procédure : | EN | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | - | ||||||||
Nom du demandeur : | Sumitomo | ||||||||
Nom de l'opposant : | Hüls | ||||||||
Chambre : | 3.3.03 | ||||||||
Sommaire : | Lorsqu'il y a lieu de douter sérieusement de la mesure dans laquelle un brevet est mis en cause par l'opposition, l'opposition peut être rejetée pour irrecevabilité (cf. point 2.2.1 des motifs de la décision). | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Recevabilité de l'opposition (oui) - recours indépendant non autorisé par la division d'opposition (oui) Mesure dans laquelle le brevet est mis en cause par l'opposition - interprétation tenant compte des circonstances Nouveauté (oui) Examen de l'activité inventive - renvoi à la première instance |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n 82 300 927.9, déposée le 23 février 1982 et revendiquant la priorité de trois demandes japonaises (JP 25 753/81 en date du 23 février 1981, JP 79 872/81 en date du 25 mai 1981 et JP 85 111/81 en date du 2 juin 1981), a abouti à la délivrance du brevet européen n 0 059 106 sur la base de 15 revendications, dont la première s'énonce comme suit :
II. Une opposition a été formée à l'encontre du brevet le 25 février 1988, au motif notamment que la revendication 1 n'impliquait pas d'activité inventive (cf. par ex. page 3, lignes 19 à 28 de l'acte d'opposition).
III. Dans sa décision intermédiaire en date du 28 décembre 1988, la division d'opposition a déclaré que l'opposition était recevable et que cette décision intermédiaire ne pouvait faire l'objet d'un recours qu'avec la décision finale (art. 106(3) CBE). A l'issue de la procédure orale du 8 décembre 1989 (au cours de laquelle la revendication 1 avait été modifiée), la division d'opposition a rendu une décision finale par laquelle elle révoquait le brevet. Cette décision a été notifiée par écrit le 5 mars 1990.
Dans cette décision, la division d'opposition avait estimé que la requête en révocation précisait clairement la mesure dans laquelle le brevet européen était mis en cause par l'opposition, que les motifs d'opposition étaient suffisamment exposés (art. 100a) et b) CBE) et que les faits et justifications invoqués à l'appui de ces motifs ressortaient suffisamment des documents cités ainsi que des diverses déclarations faites par l'opposant à propos de certains passages particuliers de ces documents.
IV. Un recours a été formé le 2 mai 1990 contre ladite décision et la taxe prescrite a été acquittée le même jour. Un mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le lundi 16 juillet 1990.
Dans l'exposé de ces motifs, ainsi que tout au long de la procédure qui a suivi, en particulier durant la procédure orale qui s'est tenue le 8 septembre 1993, le requérant a persisté à contester la recevabilité de l'opposition, en faisant notamment valoir la décision T 222/85 (JO OEB 1988, 128).
Selon le requérant, les faits et justifications invoqués dans l'acte d'opposition auraient dû être exposés de manière à ce que le titulaire du brevet et la division d'opposition puissent examiner le motif de révocation invoqué sans avoir à effectuer eux-mêmes d'autres recherches. Il ne suffisait pas d'avancer des arguments non fondés ni de se borner à faire référence à des documents de brevet, comme l'avait fait l'opposant en l'occurrence.
V. L'intimé a contesté que son opposition soit irrecevable, comme l'avait prétendu le requérant (règle 56(1) CBE), étant donné qu'il ressortait clairement de la procédure d'opposition que le requérant et la division d'opposition avaient compris les motifs de l'opposition.
VI. Le requérant a demandé que la décision qu'il attaquait soit annulée, que le brevet soit maintenu sur la base de la revendication présentée à titre de requête principale au cours de la procédure orale, les autres revendications et la description devant être adaptées en conséquence.
L'intimé a demandé le rejet du recours.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. La première question à trancher est de savoir si l'opposition était recevable, et s'il était correct de prévoir que la décision intermédiaire rendue à ce sujet ne pourrait faire l'objet d'un recours qu'avec la décision finale.
2.1 S'agissant de savoir s'il était possible de former un recours contre la décision intermédiaire, l'on notera que la division d'opposition a tranché la question de la recevabilité dans une décision intermédiaire au sens de l'article 106(3) CBE, c'est-à- dire une décision ne mettant pas fin à une procédure à l'égard d'une des parties. Il ressort clairement de l'article 106(3) qu'une telle décision intermédiaire ne peut faire l'objet d'un recours qu'avec la décision finale, à moins que ladite décision ne permette un recours indépendant, la division d'opposition appréciant librement s'il y a lieu ou non de permettre un tel recours. De l'avis de la Chambre, la division d'opposition a exercé correctement ce pouvoir d'appréciation qui lui était conféré par l'article 106(3) CBE, afin que la décision quant au fond puisse intervenir le plus rapidement possible.
2.2 La demande de rejet de l'opposition pour irrecevabilité présentée par le requérant était fondée sur la règle 56(1) ensemble la règle 55c) CBE, laquelle dispose que l'acte d'opposition doit comporter une déclaration précisant :
i. la mesure dans laquelle le brevet européen est mis en cause par l'opposition
ii. les motifs sur lesquels l'opposition se fonde ainsi que
iii. les faits et justifications invoqués à l'appui de ces motifs.
2.2.1 En ce qui concerne le point i), la Chambre part du principe que les déclarations doivent être interprétées de la façon dont la personne à qui elles sont destinées les comprendrait compte tenu des circonstances (principe de l'"objektiver Erklärungswert" : teneur objective de la déclaration ; cf. décision T 1/88 en date du 26 janvier 1989, non publiée).
Par le passé, lorsque l'acte d'opposition à un brevet n'était pas assorti d'une déclaration explicite précisant la mesure dans laquelle le brevet était mis en cause, les chambres ont, d'une manière générale, interprété systématiquement cette absence de déclaration comme signifiant que l'opposant avait l'intention de faire opposition à la totalité du brevet. Depuis la décision G 9/91 (JO OEB 1993, 408), dans laquelle la Grande Chambre de recours a estimé que la compétence d'une division d'opposition ou d'une chambre de recours pour examiner et trancher la question du maintien d'un brevet européen dépend de la mesure dans laquelle celui-ci est mis en cause dans l'acte d'opposition, conformément à la règle 55c) CBE, il pourra désormais s'avérer nécessaire d'examiner avec plus de soin que par le passé la mesure dans laquelle le brevet est mis en cause, afin de garantir que l'OEB ne dépasse pas le cadre des compétences que lui confère la CBE. On peut donc se demander si la pratique "libérale" évoquée ci- dessus peut être poursuivie. A la limite, lorsqu'il y a lieu de douter sérieusement de la mesure dans laquelle un brevet est mis en cause par l'opposition, l'opposition peut être rejetée pour irrecevabilité.
Toutefois, dans la présente affaire, il n'est pas nécessaire de trancher cette question de droit, car il n'y a pas lieu de douter sérieusement de la mesure dans laquelle le brevet est mis en cause par l'opposition.
Le brevet ne comportait en effet qu'une seule revendication indépendante, la revendication 1, laquelle était expressément mise en cause dans l'acte d'opposition, de même que l'objet des revendications dépendantes 4, 5, 6 et 7. Il était également affirmé de manière générale dans cet acte d'opposition que les solutions revendiquées en ce qui concerne le problème de l'adhésion du polymère aux parois pouvaient être déduites de l'état de la technique. L'opposant n'avait pas fait savoir s'il accepterait que le brevet soit maintenu sur la base d'une revendication principale de portée plus limitée. Dans ces conditions, la Chambre estime qu'il découle implicitement de ce silence que l'opposant voulait obtenir la révocation du brevet dans sa totalité.
2.2.2 La Chambre est également convaincue que les conditions susmentionnées ii) et iii) sont remplies. Etant donné qu'il suffit que l'acte d'opposition mentionne un des motifs d'opposition visés à l'article 100 CBE et en prouve le bien- fondé, la Chambre peut se borner à renvoyer à l'objection soulevée dans l'acte d'opposition en ce qui concerne le défaut d'activité inventive (article 56 ensemble l'article 100a) CBE). Ce motif a été mentionné à la page 3, ligne 24 de l'acte d'opposition. Les faits et justifications ont été produits sous la forme de divers documents appartenant à l'état de la technique, qui ont été cités, résumés et commentés dans l'acte d'opposition. Lorsqu'il a attaqué la revendication 1, l'opposant est parti du problème posé dans la description du brevet : il a fait valoir que c'était la viscosité qui était à l'origine des problèmes évoqués et qu'un homme du métier saurait comment la traiter et pourrait parvenir ainsi à la solution revendiquée.
L'argumentation développée dans les sept pages de l'acte d'opposition aurait certes pu être formulée plus clairement, mais les dispositions de la règle 55 CBE ont néanmoins été respectées. Les faits étaient totalement différents dans l'affaire T 255/85.
3. ...
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition, à charge pour celle-ci de poursuivre la procédure sur la base de la revendication 1 présentée au cours de la procédure orale.