European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1990:T024287.19901108 | ||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Date de la décision : | 08 Novembre 1990 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0242/87 | ||||||||
Numéro de la demande : | 81401354.6 | ||||||||
Classe de la CIB : | B64G 1/00 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
|
||||||||
Titre de la demande : | Procédé de changement d'orbite d'un satellite, notamment d'injection en orbite géostationnaire et satellite mettant en oeuvre ledit procédé | ||||||||
Nom du demandeur : | Soc. Nat. Industr. Aerospatial | ||||||||
Nom de l'opposant : | Messerschmitt-Bölkow-Blohm | ||||||||
Chambre : | 3.2.01 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
|
||||||||
Mot-clé : | Inventive step no document - late filed no Activité inventive non |
||||||||
Exergue : |
- |
||||||||
Décisions citées : |
|
||||||||
Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
|
Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen 81 401 354.6 déposée le 27 août 1981 a donné lieu le 6 février 1985 à la délivrance du brevet européen 47 211.
II. Une opposition au brevet européen a été formée par la Société Messerschmitt-Bölkow-Blohm GmbH.
L'opposante a requis la révocation complète du brevet au motif que son objet n'est pas brevetable.
A l'appui de ce motif, elle a invoqué le document de brevet DE-A-2 642 061(D1).
III. Par une décision du 25 mars 1987, la Division d'Opposition a révoqué le brevet européen en vertu de l'article 102(1) de la CBE, au motif que l'objet des revendications ne présentait pas l'activité inventive requise (article 56). Par lettre du 21 mai 1987, reçue le 23 mai 1987 et accompagnée du justificatif du paiement de la taxe, le breveté a formé un recours contre cette décision. Le mémoire motivé a été déposé le 25 juillet 1987.
Au cours de la procédure orale en date du 8 novembre 1990, la requérante a présenté une revendication unique modifiée de véhicule spatial et a retiré ses requêtes présentées auparavant.
La requérante sollicite l'annulation de la décision de révocation et le maintien du brevet tel que modifié.
L'intimée (l'opposante) requiert le rejet du recours au motif que l'objet de la revendication 1 modifiée ne présente pas l'activité inventive requise compte tenu du document D1 et compte tenu également des connaissances générales courantes de l'homme du métier, telles qu'illustrées par le document de F. Vilbig "Kommerzielle Satelliten" 1969, pages 99 à 103 (D2).
IV. La revendication unique modifiée se lit comme suit :
Véhicule spatial destiné à passer d'une orbite fortement elliptique (2) à une orbite circulaire (4), éventuellement géosynchrone et d'inclinaison différente, selon un procédé de changement d'orbite consistant à :
- viser avec un lanceur une orbite de transfert (2) dont l'apogée (3A) est voisin de la valeur souhaitée pour l'orbite finale (4),
- amener le véhicule dans cette orbite finale par des manoeuvres d'apogée, ce véhicule spatial, comportant des tuyères (12) de contrôle d'orbite et d'attitude situés sur sa face EST, étant caractérisé en ce qu'il ne comporte, pour les manoeuvres de transfert, que lesdites tuyères (12) de contrôle d'orbite et d'attitude situées sur la face EST du satellite, après mise en configuration quasi-définitive de ce dernier dès la mise en orbite de transfert, l'ensemble desdites tuyères étant placé sous le contrôle d'un système de commande utilisant comme signaux d'entrée les informations de détecteurs de vitesse ou de position angulaire, ceux-ci étant utilisables également pour les autres phases de vol du véhicule, grâce à quoi le procédé de changement d'orbite consiste à :
- faire passer le véhicule de cette orbite de transfert (2) à l'orbite finale (4) par l'entremise d'orbites intermédiaires successives (4A,4B, ... 4N) dont les apogées sont voisins, mais dont les périgées se rapprochent de la valeur finale souhaitée, au moyen d'une succession d'incréments de vitesse, délivrés aux voisinages immédiats des apogées successifs suivant des directions approximativement tangentes aux orbites, résultant d'accélérations compatibles avec la tenue mécanique du véhicule en configuration opérationnelle, et
- à moduler ces accélérations, de façon à garantir à la résultante la direction recherchée, en fonction des informations fournies par des détecteurs de vitesse ou de position angulaire utilisables également pour les autres phases de vol du véhicule.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Le document D1 décrit non seulement un véhicule spatial du type énoncé dans le préambule de la revendication 1, mais aussi le procédé de changement d'orbite énoncé dans la partie caractérisante qui consiste :
- à faire passer le véhicule de l'orbite de transfert à l'orbite finale par l'entremise d'orbites intermédiaires successives dont les apogées sont voisins, mais dont les périgées se rapprochent de la valeur finale souhaitée, au moyen d'une succession d'incréments de vitesse, délivrés aux voisinages immédiats des apogées successifs suivant des directions approximativement tangentes aux orbites, résultant d'accélérations compatibles avec la tenue mécanique du véhicule en configuration opérationnelle, et
- à moduler ces accélérations, de façon à garantir à la résultante la direction recherchée, en fonction des informations fournies par des détecteurs de vitesse ou de position angulaire utilisables également pour les autres phases de vol du véhicule.
La requérante, au cours de la procédure orale a fait ressortir que le véhicule spatial décrit dans le document 1 est uniquement conçu pour effectuer un changement d'orbite selon la méthode bien connue de Hohmann permettant de passer directement sans orbites intermédiaires successives de l'orbite elliptique de départ à l'orbite géostationnaire désirée au moyen d'un moteur d'apogée spécifique prévu pour fonctionner en une seule fois en exerçant une forte poussée. C'est seulement à la fin du document D1 qu'il est prévu un bref passage décrivant une procédure exceptionnelle de secours, en cas de fonctionnement défectueux du moteur d'apogée. Selon cette procédure de secours, les tuyères de tangage qui sont placées selon la direction au moteur d'apogée assurent "par combustion, serait-ce en plusieurs révolutions" la fonction du moteur d'apogée défaillant, pour lui permettre d'atteindre l'orbite géosynchrone recherchée.
La requérante a prétendu que ce passage du document D1 était trop vague et incertain pour pouvoir antérioriser la méthode d'injection en orbite géostationnaire énoncée dans la revendication. Cependant, comme l'a fait ressortir l'intimée, l'homme du métier, en lisant ce passage, en déduit que la mise à feu des tuyères de tangage ne peut être effectuée que de façon discontinue, au moment où le véhicule spatial se trouve à l'apogée de l'orbite de transfert. En effet, un fonctionnement autre desdites tuyères notamment continu aurait pour effet d'accroître l'apogée et par conséquent de ne pas pouvoir maintenir la valeur déjà atteinte de l'apogée.
Pour appuyer son interprétation, l'intimée a introduit pendant la procédure de recours le document D2 en se référant notamment à la figure 9.2 de la page 101. Ce document qui a donc été cité après le délai d'opposition ne doit pas cependant être considéré comme fourni tardivement car il a été utilisé par l'intimée comme moyen de preuve pour réfuter l'interprétation que faisait la requérante du document D1 (voir décision T156/84, J0 88, 373, point 3.11).
La Chambre partage le point de vue de l'intimée. Certes, le passage du document D1 décrivant la procédure de secours est bref mais ce passage tel qu'il doit être lu par l'homme du métier divulgue sans aucune ambiguïté le principe du procédé d'injection en orbite géostationnaire énoncé dans la partie caractérisante de la revendication.
Le document D1 divulgue également les caractéristiques énoncées dans la partie caractérisante de la revendication concernant la modulation des accélérations en fonction des informations fournies par des détecteurs de vitesse ou de position angulaire et le contrôle des tuyères au moyen d'un système de commande utilisant comme signaux d'entrée les informations des détecteurs de vitesse ou de position angulaire.
L'intimée a montré au cours de la procédure orale que de telles caractéristiques étaient connues car décrites dans le document D1. La requérante ne l'a pas contesté mais a fait ressortir que la différence essentielle existant entre le véhicule spatial revendiqué et le véhicule spatial faisant l'objet du document D1 réside dans la suppression dans le véhicule spatial revendiqué, du moteur d'apogée spécifique.
Comme indiqué dans le brevet européen en cause, la présence d'un moteur spécifique à la mise en orbite selon la méthode de transfert de Hohmann a pour inconvénient de créer une accélération importante pouvant être incompatible avec la tenue mécanique de certains éléments structuraux, en particulier des appendices tels qu'antennes de grandes dimensions, panneaux solaires, mâts. Il est donc nécessaire de prévoir des éléments de structure plus rigides et par conséquent d'accroître la masse du satellite.
En outre, étant donné que le moteur d'apogée spécifique est destiné à engendrer pendant un temps très bref, une quantité de mouvement importante permettant au satellite de passer directement de l'orbite fortement elliptique de départ à l'orbite géostationnaire, il se produit des échauffements locaux, d'où la nécessité de prévoir également une protection thermique qui entraîne une augmentation sensible de la masse du satellite.
3. En partant du document D1 constituant l'état de la technique le plus proche, le problème technique à résoudre est par conséquent, celui de remédier aux inconvénients précités résultant de la présence d'un moteur d'apogée spécifique et, par suite, de proposer un nouveau véhicule spatial utilisant une méthode d'injection en orbite géostationnaire permettant de pallier ces inconvénients.
La solution de ce problème est énoncée dans la revendication unique et consiste pour l'essentiel à supprimer le moteur spécifique d'apogée, cette suppression étant rendue possible par la méthode d'injection en orbite géostationnaire revendiquée mettant en oeuvre plusieurs orbites intermédiaires successives.
4. Le véhicule spatial ne comportant, pour les manoeuvres de transfert, que les tuyères de contrôle n'ayant pas déjà été décrit dans aucun des documents soumis à la Chambre, il est donc nouveau.
5. En conséquence, il convient d'examiner s'il implique une activité inventive. Pour cet examen, la Chambre se fonde sur le document D1, comme l'a fait la première instance.
Comme exposé plus haut, le document D1 décrit une procédure de secours mise en oeuvre en cas de fonctionnement défectueux du moteur spécifique d'apogée. Cette procédure de secours consiste à utiliser des moteurs non spécifiques, à savoir des propulseurs de tangage situés dans la direction du moteur d'apogée pour amener le véhicule de l'orbite fortement elliptique de départ à l'orbite géostationnaire selon la méthode d'injection revendiquée, c'est-à-dire mettant en oeuvre plusieurs orbites intermédiaires successives avec mise à feu des propulseurs de tangage au voisinage immédiat des apogées successifs.
Ainsi qu'on l'a vu plus haut, le passage du document D1 décrivant la procédure de secours est très succinct mais sans ambiguïté. L'homme du métier qui lit ce passage ne peut qu'aboutir à la conclusion que la méthode d'injection qui y est décrite dans ce cas-là, est bien celle qui fait l'objet de la revendication incriminée.
Par conséquent, le document D1 enseigne que le passage de l'orbite fortement elliptique de départ à l'orbite géostationnaire désirée peut être effectué sans moteur spécifique d'apogée en mettant en oeuvre des propulseurs non spécifiques servant au contrôle d'orbite et d'attitude pendant la durée de vie opérationnelle du satellite. Il est, par suite, à la portée de l'homme du métier, qui désire supprimer les inconvénients dûs à la présence du moteur d'apogée spécifique, de renoncer à ce dernier et de mettre en oeuvre la méthode de transfert prévue dans le document D1 en cas de non-fonctionnement du moteur d'apogée.
6. La requérante a fait valoir qu'il n'était pas du tout évident d'utiliser sur le véhicule spatial revendiqué comme procédure nominale la procédure exceptionnelle de secours prévue dans le document D1 en cas de défaillance du moteur spécifique d'apogée.
La Chambre ne partage pas ce point de vue, étant donné que le document D1 enseigne qu'il était possible de passer de l'orbite elliptique de départ à l'orbite géostationnaire désirée, sans moteur d'apogée spécifique au cours d'une procédure certes exceptionnelle mais qui est clairement divulguée par le document D1.
En outre, la requérante a fait valoir l'existence d'un préjugé à l'égard de la suppression du moteur d'apogée spécifique. Cependant, elle n'a pas apporté de moyens de preuve permettant de rendre plausible l'existence d'un tel préjugé au sein de la profession.
7. En conséquence, la Chambre estime que le véhicule spatial faisant l'objet de la revendication unique ne présente pas l'activité inventive requise, et que, par suite, le motif d'opposition s'oppose au maintien du brevet européen.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit:
Le recours est rejeté.