T 0061/86 () of 2.12.1988

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1988:T006186.19881202
Date de la décision : 02 Décembre 1988
Numéro de l'affaire : T 0061/86
Numéro de la demande : 78400059.8
Classe de la CIB : -
Langue de la procédure : FR
Distribution :
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 821 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Nouvel intermédiaire de synthèse: l'anthranilate de glycéryle et son procédé de préparation
Nom du demandeur : Pierre Fabre
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Nouveauté (oui)
Composé non accessible au public dans l'art antérieur
Activité inventive (oui)
Procédé par étapes anvantageux
Produit intermédiaire
Novelty (yes)
Inventive step (yes)
intermediate product; compound not being available
to the public in the prior art;
process in favourable steps
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0623/89

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 78 400 059.8 déposée le 18 juillet 1978, pour laquelle a été revendiquée la priorité du 26 juillet 1977 fondée sur un dépôt antérieur en France, a donné lieu le 5 août 1981 à la délivrance du brevet européen n° 678 sur la base de 8 revendications. La revendication 1 s'énonce comme suit :

"Un composé de formule :

(FORMULA)

et ses sels".

La revendication 3 concerne un procédé de préparation de ce composé et la revendication 8 l'application de ce composé à la synthèse de la glafénine par réaction avec la 4,7-dichloroquinoléine.

II. Le 3 mai 1982, la requérante a fait opposition à ce brevet et a requis sa révocation pour défaut de nouveauté et d'activité inventive des revendications 1, 2 et 8. Les motifs d'opposition s'appuyaient principalement sur les documents suivants :

(1) US-A-3 123 631

(2) FR-A-1 421 229

(3) FR-A-1 584 746

(4) FR-A-2 132 545

(5) FR-A-2 198 736

et sur une annexe chimique relative à la cinétique de la réaction d'hydrolyse de l'anthranilate de solkétal.

III. Par décision du 17 décembre 1985, la Division d'opposition a rejeté l'opposition en invoquant pour l'essentiel les arguments suivants :

L'anthranilate de glycéryle n'est ni décrit, ni mentionné dans le document (2) ; il ne dérive pas non plus "directement et sans aucune équivoque de ce document" (Directives, C-IV, 7.2), car l'homme du métier, mis en présence dudit document, n'est pas conduit à imaginer la formation de ce composé en tant que produit intermédiaire. Malgré l'enseignement relatif à l'hydrolyse acide des acétonides donné dans les documents (3) à (5), il est raisonnable d'admettre que le rôle protecteur du groupe acétonide s'étend au stade C de la réaction de synthèse et que l'hydrolyse se fait ultérieurement à la condensation.

Il n'était pas évident pour l'homme du métier connaissant par le document (1) la synthèse du monoanthranilate de 2-butyne-1,4-diol à partir de l'anhydride d'acide isatoïque et de ce diol de concevoir la même réaction pour le glycérol. Le rendement élevé de la réaction de synthèse de la glafénine à partir de la 4,7-dichloroquinoléine et du monoanthranilate de glycéryle confirme le caractère inventif de ce produit intermédiaire.

IV. Le 17 février 1986 la requérante (opposante) a formé un recours à l'encontre de cette décision, en acquittant simultanément la taxe prévue et en exposant les motifs de recours dans un mémoire déposé le 16 avril 1986. Les arguments développés qui s'appuient en outre sur deux nouveaux documents, DE-C-2 251 646 (document (8)) et sur une déclaration du Professeur Sinay (document (9)), laquelle fait elle-même référence à diverses publications, peuvent se résumer comme suit :

Lors de la synthèse de la glafénine décrite dans le document (2), le groupe acétonide ne joue un rôle actif que lors de la première réaction ; lors des deux étapes suivantes, il n'assure plus qu'un rôle passif, étant amené à disparaître très rapidement lors de la réaction finale en milieu acide. Cette interprétation est confirmée dans le document (8) dont le procédé de synthèse de la glafénine à partir de l'ortho-chlorobenzoate de glycéryle et de la 4-amino-7-chloroquinoléine ne requiert pas le blocage de la chaîne glycéryle par un groupe protecteur acétonide. Enfin, les résultats expérimentaux mentionnés dans les documents (3) à (5) relatifs à l'hydrolyse du groupe acétonide dans les dérivés de la quinoléine montrent bien que cette réaction est relativement rapide, donc que l'intermédiaire de synthèse revendiqué par l'intimée est implicitement présent au stade C du procédé divulgué dans le document (2).

L'anthranilate de glycéryle n'implique pas non plus d'activité inventive ; en effet, son utilisation dans la synthèse de la glafénine n'offre pas d'avantage objectivement démontré, tel un rendement élevé ou l'absence de réaction parasite. La doctrine de l'OEB relative à la brevetabilité des produits intermédiaires telle qu'établie dans la décision T 65/82 ne permet pas non plus de reconnaître une activité inventive.

V. Le 2 septembre 1986 l'intimée (titulaire du brevet) a présenté un mémoire en réponse dans lequel elle déclare se rallier pour l'essentiel à l'argumentation de la Division d'opposition.

En ce qui concerne le document (9), loin de mettre en évidence l'instabilité des cétals à l'hydrolyse en milieu acide et à chaud, il démontre plutôt que ces produits sont assez stables ; l'homme du métier n'était donc nullement enclin à postuler l'existence de l'anthranilate de glycéryle lors du stade C de la préparation de la glafénine selon le document (2). Quant à l'exploitation du document (8), le fait d'établir un parallèle entre le procédé de synthèse de la glafénine qui y est décrit et l'utilisation de l'anthranilate de glycéryle pour la préparation de la glafénine selon la revendication 8 du brevet opposé est une approche très contestable.

Il convient enfin d'apprécier l'activité inventive de l'anthranilate de glycéryle en tant que produit intermédiaire dans le cadre du procédé auquel il s'incorpore ; le caractère inventif de ce composé découle à la fois de sa facilité de préparation et de son aptitude à être utilisé directement, c'est-à-dire sans isolation et dans son solvant de préparation, pour la synthèse directe de la glafénine.

VI. La requérante requiert que la décision attaquée soit annulée et que les revendications 1, 2 et 8 soient déclarées nulles. L'intimée conclut au contraire au rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.

2. Le brevet attaqué concerne l'anthranilate de glycéryle en tant qu'intermédiaire de synthèse, son procédé de préparation et son application à la synthèse de la glafénine.

Tout comme le présent recours, l'opposition portait uniquement sur l'objet des revendications 1, 2 et 8. La Chambre n'est donc habilitée à examiner la validité juridique du brevet que dans les limites de ces revendications (cf. décision T 9/87 du 18 août 1988 qui sera publiée). Plus spécifiquement, les revendications 1, 2 et 8 portent respectivement sur l'anthranilate de glycéryle, le chlorhydrate d'anthranilate de glycéryle et l'application de l'anthranilate à la synthèse de la glafénine par condensation avec la 4,7- dichloroquinoléine.

Un procédé de préparation de la glafénine faisant appel à un intermédiaire de synthèse structurellement très voisin de l'anthranilate de glycéryle pour la réaction de condensation avec la 4,7-dichloroquinoléine est décrit dans le document (2). Le procédé comprend trois étapes. Le stade A est la préparation de l'ortho-nitrobenzoate de (2,3-isopropylidène dioxy) propyle à partir de 2,2- diméthyl-4-hydroxyméthyl-1,3-dioxolane et de chlorure d'acide ortho-nitrobenzoique. Le stade B est l'hydrogénation de ce produit intermédiaire en anthranilate de (2,3-isopropylidène dioxy) propyle. Lors du stade C ce composé est chauffé au reflux avec la 4,7- dichloroquinoléine en présence d'acide chlorhydrique, ce qui conduit par condensation et hydrolyse du groupe acétonide à la formation de glafénine. Le rendement global en glafénine obtenu à partir du rendement des trois stades A, B et C (respectivement 92, 98,5 et 56%) est de l'ordre de 50,7%.

3. A la lumière de cet art antérieur, le problème technique peut être vu dans la proposition d'un intermédiaire de synthèse permettant une préparation plus simple de la glafénine et conduisant à un rendement global plus élevé. L'intimée résout ce problème par la mise en oeuvre de l'anthranilate de glycéryle comme intermédiaire de cette synthèse.

Selon la Chambre ce problème a été résolu de façon crédible, car il ressort du brevet parallèle n° 679 consacré à la préparation de la glafénine via l'intermédiaire revendiqué selon le brevet attaqué que la glafénine peut être obtenue en deux étapes à partir de l'anhydride de l'acide isatoïque avec un rendement global compris entre 65 et 75 % (valeurs tirées du brevet n° 679, page 5, lignes 46 à 48 en combinaison avec page 3, ligne 7 dans le brevet attaqué).

4. La requérante, tout en reconnaissant que l'anthranilate de glycéryle n'est pas explicitement mentionné dans le document (2), a contesté la nouveauté de ce composé pour divulgation implicite dans cet art antérieur. Cette objection de défaut de nouveauté repose sur l'hypothèse que la réaction d'hydrolyse est plus rapide que la réaction de condensation et qu'il se forme intermédiairement l'anthranilate de glycéryle.

4.1. Les documents (3) à (5), qui décrivent la préparation de divers dérivés de la quinoléine de structure voisine de celle de la glafénine impliquant une étape d'hydrolyse du groupe acétonide en présence d'acide chlorhydrique, enseignent que cette réaction est en fait assez rapide.

Selon les exemples 2 et 4 du document (3), l'hydrolyse de l'acétonide est complète en 15 minutes ; selon les exemples 4 et 8 du document (4), la durée de cette réaction est respectivement 15 et 10 minutes ; selon l'exemple 3 du document (5), la réaction d'hydrolyse est achevée au bout de 7 minutes.

La similitude de structure des acétonides mis en oeuvre dans ces divers exemples des documents (3) à (5) et de l'acétonide présent au stade C du procédé décrit dans le document (2) rend les résultats ci-dessus beaucoup plus significatifs que les informations fragmentaires qui pourraient être tirées des références citées dans le document (9). En effet, non seulement les acétonides qui y sont mentionnés n'ont qu'un lointain rapport avec le composé hydrolysé au stade C du procédé selon le document (2), mais leur hydrolyse est réalisée en présence d'acide sulfurique, acétique ou borique de concentrations différentes.

4.2. L'annexe chimique jointe par la requérante au mémoire d'opposition reçu le 3 mai 1982 ne reproduit pas les conditions opératoires présentes au stade C de l'exemple dans le document (2). Selon cet art antérieur, on chauffe au reflux un mélange ternaire d'anthranilate de (2,3-isopropylidène dioxy) propyle, de 4.7-dichloroquinoléine et d'acide chlorhydrique ; selon l'annexe chimique au contraire, on ajoute d'abord l'acide chlorhydrique concentré au mélange d'anthranilate et d'eau déminéralisée à 70°C, puis la dichloroquinoléine, ce qui ne peut que favoriser la mise en évidence d'un éventuel produit d'hydrolyse intermédiaire et n'autorise pas, au moins pour le temps To, une comparaison objective avec l'art antérieur. Les prélèvements opérés aux temps T1 et T2 illustrent par contre que la condensation de l'anthranilate de glycéryle avec la dichloroquinoléine est une réaction relativement lente. Le tableau des concentrations des divers produits à la page 2 de l'annexe montre également que l'acétonide de glafénine n'est présent à aucun moment en quantités pondérables. Ce résultat est significatif, car il éclaire sur le rôle protecteur du groupe acétonide lors des diverses réactions ; la présence d'un tel composé aurait en effet confirmé la thèse défendue par l'intimée (réponse du 22 octobre 1982 en procédure d'opposition, page 2, paragraphe 2 ; page 3, paragraphe 7 ; page 4, paragraphe 2 et réponse du 2 septembre 1986 en procédure de recours, page 4, paragraphe "Conclusion"), selon laquelle le rôle protecteur joué par le groupe acétonide s'étendrait aux trois étapes du procédé décrit dans le document (2). L'absence du groupe acétonide démontre au contraire que ce groupe ne joue un rôle actif que lors du stade A et que son rôle devient passif ultérieurement.

4.3. Malgré la convergence entre les enseignements des documents (3) à (5) et les informations techniques fournies par l'intimée qui suggèrent tous que la réaction d'hydrolyse de l'acétonide obtenu au stade B est en fait assez rapide, l'anthranilate de glycéryle ne peut être considéré comme implicitement divulgué dans le document (2).

En effet, la Chambre estime, suivant en celà la décision T 12/81 "Diastéréoisomères" publiée dans JO OEB, 1982, 296, que pour que l'enseignement d'un document antérieur détruise la nouveauté d'un produit, il faut que l'homme du métier puisse y puiser toutes les informations nécessaires en ce qui concerne le produit de départ et les conditions réactionnelles pour préparer le produit (point 8). Il est sans importance, pour ce qui a trait à la nouveauté, que le produit final à obtenir ne soit pas décrit dans tous ses détails, dès lors qu'il est décrit de manière déterminante par le paramètre du procédé (point 10).

Ces conditions ne sont pas remplies en l'occurrence, puisque la troisième étape du procédé connu vise à l'obtention directe de la glafénine, non de l'anthranilate de glycéryle qui n'est jamais isolé. La lecture normale du document (2), c'est-à-dire une lecture sans analyse a postériori, comme l'a fait la requérante, conduisant à interpréter le mécanisme réactionnel du stade C et par la-même à considérer la cinétique relative des deux réactions, n'est pas susceptible de suggérer à l'homme du métier la formation et l'existence d'un produit intermédiaire. Aussi le document (2) ne peut-il en aucun cas être considéré comme la divulgation d'un procédé de préparation de l'anthranilate de glycéryle rendant ce composé accessible au public.

En conclusion, le document (2) ne saurait constituer une divulgation même implicite de l'anthranilate de glycéryle, de sorte que l'exigence de nouveauté est satisfaite.

5. Il reste donc à examiner si cet intermédiaire de synthèse implique une activité inventive par rapport à l'art antérieur cité.

5.1. Dans la décision antérieure T 22/82 "Bis-époxyéthers" publiée dans JO OEB,1982, 341, la Chambre a précisé que pour l'appréciation de l'activité inventive, une différence structurale caractérisant un composé reste neutre et sans valeur tant qu'elle ne se manifeste pas par une propriété précieuse, au sens le plus large, une activité déterminée ou la potentialisation d'une telle activité (point 6). Dans le cas spécifique d'un nouveau procédé chimique, avantageux du point de vue économique pour la préparation d'un produit final connu et recherché, la solution préconisée peut être inventive lorsque le résultat avantageux effectivement atteint est quantitativement surprenant. Si l'on parvient à ce résultat par un produit intermédiaire nouveau obtenu au cours du procédé, l'effet dérivant du procédé supporte aussi l'activité inventive pour le produit intermédiaire lui-même, sans lequel le procédé global avantageux n'est pas concevable (point 7).

5.2. La similitude entre cette affaire et le cas présent conduit la Chambre à adopter la même approche. La seule différence par rapport au cas T 22/82 réside dans le fait que le produit intermédiaire conduisant à la glafénine selon le brevet attaqué ne provient pas du même précurseur que l'état de la technique le plus proche dans l'affaire mentionnée, mais d'un composé qui n'avait jamais été proposé à cette fin. La position de l'intimée ne s'en trouve cependant pas affaiblie, d'autant plus que l'art antérieur ne suggère aucun modèle pour le procédé envisagé. En effet, comme exposé ci-dessus au point 2, la synthèse selon le document (2) requiert trois étapes à partir du chlorure d'acide ortho-nitrobenzoïque, dont la structure présente peu d'affinité avec celle de l'anthranilate de glycéryle ; d'autre part, comme on le verra plus loin, le procédé divulgué dans le document (8) implique la préparation d'un dérivé de substitution quinoléique de l'acide benzoïque de structure encore plus lointaine.

De plus, l'argument selon lequel l'augmentation sensible de rendement observé par la mise en oeuvre de l'intermédiaire de synthèse selon le brevet attaqué par rapport au rendement obtenu en utilisant le produit intermédiaire de structure très voisine selon le document (2) était prévisible pour l'homme du métier, n'a jamais été avancé ; la Chambre ne voit d'ailleurs pas comment un tel résultat pouvait être attendu.

A la différence du cas T 22/82, le procédé n'est pas dans le cas présent revendiqué dans sa totalité. Cette différence importe peu au regard de l'avantage surprenant découlant de la mise en oeuvre de l'intermédiaire de synthèse revendiqué dans la préparation du produit final connu.

5.3. Le document (1) enseigne certes un procédé de préparation d'anthranilates à partir d'anhydride isatoïque et de divers composés hydroxylés (revendication 1), en particulier des diols aliphatiques (tableau I, exemples 8, 29 et 34). Bien que les anthranilates soient décrits comme des intermédiaires de synthèse (colonne 3, lignes 55 à 58), rien ne suggère l'extension de ce procédé à la synthèse de l'anthranilate de glycéryle en particulier, encore moins l'utilisation de ce composé pour la préparation de la glafénine.

Comme le précise la décision T 22/82, pour l'appréciation de l'activité inventive afférente au procédé à plusieurs étapes, il faut considérer celui-ci dans son ensemble, du point de vue problème posé, en l'espèce la préparation de la glafénine avec un rendement plus élevé. L'important n'est pas de savoir si, connaissant les produits de départ, il était évident de juxtaposer les étapes individuelles du procédé pour atteindre le produit final, mais si ce procédé envisagé dans le sens régressif, en partant du résultat pour remonter aux produits de départ, s'offrait à l'évidence (point 14).

5.4. La requérante a repris à son compte la représentation schématique de la réaction de synthèse de la glafénine censée être décrite dans le document (8) et figurant dans l'introduction du brevet n° 679. La Chambre n'a pu identifier la synthèse de la glafénine à partir de la 4-amino-7-chloroquinoléine. Ce que le document (8) divulgue, c'est un procédé de préparation d'a-monoglycérides de l'acide ortho-chlorobenzoïque substitué ou non (revendication 1), ledit procédé pouvant être avantageusement étendu à l'obtention de la glafénine (colonne 3, lignes 24 à 28). Dans ce cas, le procédé requiert une étape préalable de synthèse d'un dérivé de substitution quinoléique de l'acide benzoïque, dans lequel le noyau quinoléique est relié au noyau aromatique par un groupe amino en position ortho par rapport à l'atome de chlore (revendication 3, formule II ; exemple 1). Pour cette raison déjà, les alpha-monoglycérides de l'acide orthochlorobenzoïque de formule I ne peuvent en aucun cas suggérer l'anthranilate de glycéryle, encore moins l'utilisation de ce composé pour la synthèse de la glafénine. Le fait que cette méthode de préparation de la glafénine présente effectivement tous les avantages invoqués par l'intimée pour justifier l'activité inventive du brevet opposé, c'est-à-dire absence de bloquage de la chaîne glycéryle par un groupe protecteur acétonide, nombre d'étapes réduit (colonne 2, lignes 10 à 22), produits de départ peu coûteux et appareillage simple (colonne 2, lignes 39 à 46) et rendement élevé grâce à l'utilisation de carbonate de barium comme accepteur d'acide chlorhydrique (colonne 3, lignes 19 à 23), est en l'occurrence sans importance, car ces divers avantages relèvent du progrès technique qui n'est pas pris en considération dans la CBE. Le fait que l'objet du brevet attaqué soit nouveau et implique une activité inventive, comme démontré ci-dessus, est déjà suffisant en soi.

5.5. En l'absence de toute argumentation de la part de la requérante, la Chambre ne peut prendre position sur la seule affirmation contenue dans le mémoire de recours selon laquelle le produit intermédiaire revendiqué en serait pas brevetable au vu des principes énoncés dans la décision T 65/82 "Cyclopropane" publiée dans JO OEB, 1983, 327. En fait, dans le cas T 65/82, il s'agissait de l'activité inventive d'un produit intermédiaire transformable en une seule étape en un produit connu ; par contre, dans le cas présent, il convient d'apprécier l'activité intermédiaire d'un produit intermédiaire nouveau obtenu, comme dans le cas T 22/82, au cours d'un procédé par étapes nouveau et considéré globalement comme inventif (voir ci-dessus).

5.6. Selon la décison T 163/84 "Dérivés d'acétophénone" publiée dans JO OEB, 1987, 301, la brevetabilité d'un produit intermédiaire ne découle pas de l'activité inventive du procédé par étapes pris dans sa totalité, mais du caractère inventif de la transformation de ce produit intermédiaire en produit final (points 6 et 8). En réalité, ce critère n'est pas le seul concevable pour apprécier l'activité inventive d'un produit intermédiaire ; la préparation d'un produit intermédiaire destiné à l'obtention d'un produit connu par un procédé de synthèse nouveau peut suffire en soi, dès lors que celui-ci conduit à un résultat inattendu, par exemple sous la forme d'une amélioration surprenante du rendement comme dans le cas présent.

5.7. Pour ces raisons, la Chambre considère comme inventif l'objet de la revendication 1. Cette conclusion s'étend à la revendication 2 qui concerne le chlorhydrate du composé selon la revendication 1 et repose pour l'essentiel sur le même concept inventif.

6. La revendication 8 porte sur la condensation du produit intermédiaire défini dans la revendication 1 avec la 4,7-dichloroquinoléine en vue de préparer la glafénine. Le produit intermédiaire étant nouveau, il en est évidemment de même de toute utilisation.

L'activité inventive de cet objet repose en premier lieu sur la mise à disposition du produit intermédiaire selon la revendication 1, sans laquelle la synthèse améliorée de la glafénine n'est précisément pas concevable. Elle peut également s'apprécier en termes qualitatifs à partir du document (2). La requérante a en effet abondamment démontré que les acétonides sont généralement très sensibles à un milieu acide et en a déduit que la seule connaissance de l'anthranilate de (2,3-isopropylidène dioxy) propyle devait inévitablement suggérer l'anthranilate de glycéryle, même à un homme du métier peu imaginatif. La Chambre ne peut partager cette conclusion, car il convient au contraire de rapprocher les connaissances de l'homme de métier relatives à la sensibilité des acétonides à l'hydrolyse acide des douze années qui séparent la date de publication du document (2) de la date de priorité du brevet attaqué. Le fait précisément que l'homme de l'art ne soit parvenu à isoler l'anthranilate de glycéryle qu'au bout de tant d'années malgré les nombreux travaux effectués dans ce domaine et les diverses méthodes de synthèse explorées, plaide en faveur d'une activité inventive.

Les autres documents dont l'objet est encore plus éloigné ne permettent pas d'infirmer cette conclusion.

7. En conclusion les dispositions de l'article 56 CBE sont satisfaites pour les revendications 1, 2 et 8 qui étaient l'objet du recours.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté

Quick Navigation