T 0288/84 (Support activé) of 7.2.1986

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1986:T028884.19860207
Date de la décision : 07 Fevrier 1986
Numéro de l'affaire : T 0288/84
Numéro de la demande : 78200273.7
Classe de la CIB : B01J 27/08
Langue de la procédure : DE
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Stamicarbon
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.01
Sommaire : Lorsqu'une invention concerne un perfectionnement apporté par rapport à un état de la technique déjà cité à l'origine dans la description de l'invention, une caractéristique (en l'occurrence: un support "activé") largement décrite dans le document cité, mais qui n'est pas mentionnée spécialement dans l'exposé de l'invention est reputée suffisamment exposée lorsqu'elle apparaît dans les exemples de réalisation de l'invention, sous forme d'un mode de mise en oeuvre également mentionné dans le document cité (en l'occurrence: activation par broyage).
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 83
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
Mot-clé : Exposé de l'invention
Caractéristique de l'état de la techn. introduite dans revendications
Modification d'une revendication par caractéristique dans préambule
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 1125/17

Exposé des faits et conclusions

I. A la suite du dépôt, le 30 octobre 1978, de la demande de brevet européen n° 78 200 273.7, revendiquant la priorité d'une demande néerlandaise en date du 1er novembre 1977, un brevet européen n° 1862 a été délivré le 7 juillet 1982, sur la base de dix revendications, dont la première et la septième s'énoncent comme suit:

"1. Composant catalytique halogénure de titane sur un halogénure de magnésium servant de support, utilisable pour la polymérisation d'alcènes-1 ou la copolymérisation d'alcènes-1 entre eux ou avec l'éthylène, caractérisé en ce que l'halogénure de magnésium contient moins de 0,2 % en poids d'humidité et, pour ce qui concerne la teneur en magnésie, moins de 0,1 milli-équivalent de base titrable par g d'halogénure de magnésium, et est préparé par chauffage d'un halogénure de magnésium contenant de l'eau et/ou de la magnésie dans un courant gazeux de vapeurs d'halogénure de carbone et/ou d'un mélange d'oxyde de carbone et d'un halogène."

"7. Procédé de polymérisation des alcènes-1 ou de copolymérisation des alcènes-1 entre eux ou avec l'éthylène par utilisation d'un système catalyseur / qui contient / un composant halogénure de titane sur un halogénure de magnésium qui sert de support et un composant d'organo-aluminium, lequel composant d'organo-aluminium contient un complexe d'un composé organique de l'aluminium avec un ester d'un acide organique oxygéné, caractérisé en ce que l'on utilise un composant halogénure de titane selon l'une des revendications 1 à 6".

II. L'opposante a fait opposition au brevet dans un acte d'opposition reçu le 18 mars 1983. Présentant les résultats de ses propres essais, elle a fait valoir l'insuffisance de l'exposé de l'invention et l'impossibilité de mettre en oeuvre l'objet du brevet contesté, et a cité à l'appui de ses affirmations le document américain A-4 298 718, publié après la date de priorité (document n° 1). La titulaire du brevet a riposté en se référant au document néerlandais A-7 208 558 (document n° 2) déjà cité à la colonne 1, ligne 15 du fascicule du brevet en litige.

III. Par décision en date du 10 octobre 1984, la Division d'opposition a révoqué le brevet, en faisant valoir que, d'après la revendication 1 et les développements figurant à la colonne 3, lignes 54 à 56 de la description du brevet en litige, l'halogénure de titane pouvait être introduit de n'importe quelle manière connue dans le support d'halogénure de magnésium. L'homme du métier aurait certes pu déduire de l'état de la technique (document n° 2 cité par la titulaire du brevet) qu'il convenait d'utiliser comme support de l'halogénure de magnésium activé ; les essais effectués par l'opposante montrent toutefois qu'un simple mélange d'une suspension de chlorure de magnésium activé avec une solution de TiC14 et, pour le reste, un traitement classique, ne conduisent pas au résultat escompté. Les essais effectués par l'opposante prouvent en outre que la finesse du support n'est pas non plus un critère suffisant pour garantir la reproductibilité. Etant donné que la titulaire du brevet n'a ni réfuté les résultats des essais effectués par l'opposante, ni limité les revendications, comme on le lui avait suggéré, à ce qui était indiqué à la colonne 3, ligne 57 de la description (broyage simultané de l'halogénure de titane et de l'halogénure de magnésium), le brevet délivré sur la base desdites revendications doit être révoqué, l'invention ne pouvant être mise en oeuvre.

IV. Le 8 décembre 1984, la requérante (titulaire du brevet) a formé un recours contre cette décision de la Division d'opposition et a acquitté la taxe correspondante. Par un télex du 11 février 1985, confirmé par une lettre du 14 février 1985, elle a exposé les motifs de son recours, qui peuvent se résumer comme suit :

Le document n° 2 montre non seulement la nécessité d'un support d'halogénure de magnésium activé, mais indique aussi comment on peut provoquer l'activation et comment on peut distinguer l'halogénure de magnésium activé du non activé. Les essais effectués par l'intimée (l'opposante) montrent simplement qu'un support d'halogénure de magnésium non activé conduit à de mauvais résultats. L'exposé actuel de l'invention est donc suffisant, mais la requérante est disposée à préciser la revendication 1, si la Chambre le juge nécessaire.

V. L'intimée critique cette argumentation en faisant valoir que l'utilisation d'halogénure de magnésium activé n'est pas mention née dans les pièces déposées initialement et qu'elle ne découle pas non plus imméditaement du fascicule du brevet contesté, tel que pourrait l'interpréter l'homme du métier. Elle conclut au rejet du recours.

VI. La Chambre a fait savoir aux parties que l'adjonction du mot "activé" après "halogénure de magnésium" n'appelle pas d'objections du point de vue de la forme et lui semble s'imposer dans le préambule non seulement de la revendication 1, mais également de la revendication 7 ; pour apprécier si l'exposé est suffisant ou non, il peut être déterminant de savoir si l'intimée a utilisé pour ses essais de l'halogénure de magnésium activé ou non activé.

VII. La requérante a répondu à ce sujet le 14 octobre 1985 qu'il ressortait déjà de l'acte d'opposition, en date du 17 mars 1983, que les essais de l'intimée ont été effectués avec de l'halogénure de magnésium non activé. Elle demande l'annulation de la décision attaquée et le maintien du brevet "dans son texte actuel".

VIII. Finalement, l'intimée a demandé qu'une décision soit rendue sur la base du dossier, en son état actuel.

IX. Par notification en date du 19 décembre 1985, la Chambre a fait savoir aux parties, en leur fixant un délai de réponse conformément à la règle 58(4) de la CBE, comment elle interprète la conclusion de la requérante et dans quel texte elle envisage le maintien du brevet. Or, à l'expiration du délai d'un mois qui leur avait été imparti, les parties n'avaient pas marqué leur désaccord sur ce texte.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108, ainsi qu'à la règle 64 de la CBE ; il est donc recevable.

2. Bien qu'ayant déclaré sommairement, lorsqu'elle a formé opposition, que non seulement l'exposé de l'invention était insuffisant, mais que l'objet du brevet en litige ne remplissait pas "au sens de l'article 100, paragraphes a et b de la CBE" les conditions requises pour être brevetable, l'intimée n'a à aucun des stades de la procédure d'opposition ou de la procédure de recours fourni de preuves à l'appui de ses allégations relatives à l'article 100, paragraphe a (et donc relatives aussi, de manière indirecte, aux articles 52 à 57). Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire grief à la première instance de n'avoir pas examiné dans sa décision si les conditions visées aux articles 52 à 57 étaient réunies. Les compétences spécifiques de la Chambre ne lui ont pas permis à elle non plus de découvrir dans l'état de la technique de document susceptible de faire obstacle à ce sujet à la brevetabilité de l'objet du brevet en litige. Il suffit donc d'examiner si l'invention, dans le brevet en litige, est exposée de façon suffisamment claire et complète, au sens visé à l'article 100, paragraphe b, pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter (article 83 de la CBE).

3. Les parties ont fini par convenir que le procédé de polymérisation selon la revendication 7 ne peut être mis en oeuvre avec le succès indiqué que si l'halogénure de magnésium servant de support au composant halogénure de titane - protégé par la revendication 1 - du catalyseur est un halogénure de magnésium activé. Il faut donc rechercher si cette caractéristique, sans avoir été mentionnée expressément, a été exposée dans les pièces déposées initialement et est encore présente dans le texte du brevet tel qu'il a été délivré.

4. Aussi bien dans la demande déposée initialement que dans le fascicule du brevet, le préambule de la description précise que l'invention concerne un composant halogénure de titane sur un support d'halogénure de magnésium, ainsi que l'utilisation de ce système catalyseur dans un procédé de polymérisation. Dans la suite de la description, il est indiqué qu'un catalyseur de ce type, constitué d'halogénure de titane sur de l'halogénure de magnésium anhydre, ainsi que d'un composant d'organo-aluminium (plus précisément dé fini par son mode d'obtention), et l'utilisation de ce catalyseur dans un tel procédé sont déjà connus d'après le document n° 2. L'inconvénient d'un tel système catalyseur tient à la stéréospécificité insuffisante du procédé de polymérisation.

Puis il est expliqué dans la description que l'on obtient une certaine amélioration de la stéréospécificité à l'aide d'un composant d'organo-aluminium modifié comme l'expose le document néerlandais A-7 509 735 (document n° 3, qui appartient également à l'état de la technique), mais qu'il est nécessaire de l'améliorer encore (colonne 1, lignes 44 à 46).

5. Il ne ressort pas d'emblée des passages auxquels il vient d'être fait référence que c'est de l'halogénure de magnésium activé qui est mis en oeuvre selon l'état de la technique cité par la titulaire du brevet ; ceci apparaît toutefois clairement à la lecture des documents appartenant à cet état de la technique :

5.1. Déjà dans la revendication 1 du document n° 2, le support du composant halogénure de titane défini dans le paragraphe b (page 27, lignes 15 et suivantes) est caractérisé par sa surface spécifique ainsi que par son spectre de rayons X, dont il est précisé qu'il présente une raie caractéristique de l'halogénure de magnésium normal, non activé, mais étalée (page 27, lignes 21 à 23). La description figurant dans ce même document est encore plus nette et très détaillée à ce sujet : il est mentionné tout d'abord, page 6, lignes 13 à 14, de l'halogénure de magnésium "sous forme préalablement activée", lequel est ensuite (lignes 16 à 20) caractérisé à nouveau, comme ci-dessus, par sa surface spécifique et son spectre de rayons X. Puis à la page 7, lignes 9 à 14, l'halogénure de magnésium "sous forme activée" est expressément défini de la manière indiquée, après quoi (de la page 7, ligne 15, à la page 8, ligne 7) sont décrites plusieurs méthodes permettant de mettre l'halogénure de magnésium "sous forme activée".

5.2. Le document n° 3 part de l'état de la technique correspondant au document n° 2 et mentionne une première fois, dans l'appréciation qu'il donne de celui-ci, page 2, lignes 8 à 9, l'halogénure de magnésium activé. Etant donné que le document n° 3 a trait essentiellement à la modification du composant d'organo-aluminium du système catalyseur, il est normal que le support d'halogénure de magnésium du composant halogénure de titane ne soit pas décrit avec autant de détails que dans le document n° 2 ; mais il est précisé là aussi que l'on obtient des résultats particulièrement avantageux du point de vue de l'activité et de la stéréospécificité du catalyseur si l'on utilise un support d'halogénure de magnésium qui a été activé d'une manière particulière et qui, tout comme dans le document n° 2, est caractérisé par sa surface spécifique et son spectre de rayons X (page 4, lignes 11 à 15).

6. Le lien entre cet état de la technique et l'objet du brevet en litige apparaît en particulier à deux endroits :

6.1. Après qu'il a été indiqué en colonne 1, lignes 5 à 12, sur quoi porte l'invention, suit dans le fascicule du brevet en litige une appréciation en ces termes du document n° 2 : "Un tel composant halogénure de titane et un tel procédé ..." (colonne 1, lignes 13 à 14). Il en résulte que, pour l'invention selon le brevet en litige, qui part des documents n°s 2 et 3, ce n'est pas un halogénure de magnésium quelconque, mais l'halogénure de magnésium (anhydre et activé) selon le document n° 2 qu'il faut prendre comme support, pour le soumettre ensuite à un traitement selon l'invention.

6.2. De même, l'exposé de l'invention dans le brevet en litige, qu'il s'agisse de l'énoncé du problème ou de la solution, est replacé dans le cadre que constitue l'état de la technique selon les documents n°s 2 et 3, et les éléments connus sont mis en relation avec le perfectionnement apporté par l'invention, en ce sens qu'il est indiqué que l'on peut augmenter la stéréospécificité "d'un tel système catalyseur" - c'est-à-dire de celui du document n° 3 - en utilisant un halogénure de magnésium qui n'est pas seulement - comme c'est le cas selon les documents n°s 2 et 3 - anhydre, mais aussi exempt de magnésie, pratiquement tout au moins, et est obtenu d'une certaine manière (colonne 1, lignes 47 à 57) ; en d'autres termes, aux caractéristiques de l'halogénure de magnésium selon les documents n°s 2 et 3 - anhydre et activé - viennent s'ajouter - selon le brevet - l'absence de magnésie et le mode de préparation.

6.3. Il s'ensuit que l'interprétation que l'homme du métier auquel s'adresse le fascicule du brevet devait donner tant de l'état de la technique représenté par les documents n°s 2 et 3, auquel il est fait référence dans ce fascicule, que du perfectionnement avantageux apporté par rapport à cet état de la technique par le brevet en litige, était que l'halogénure de magnésium caractérisé et utilisé conformément aux revendications doit en outre être également "activé" au sens o" l'entendent les documents n°s 2 et 3.

6.4. Cette interprétation trouve une autre confirmation dans le fait que dans chacun des sept exemples donnés dans le fascicule du brevet en litige, l'activation qui précède l'invention proprement dite est effectivement décrite, même si elle n'est pas nommément caractérisée comme telle : selon le document n° 2, page 7, lignes 32 à 35, l'activation se fait de préférence par broyage de l'halogénure de magnésium, en particulier dans un broyeur à billes, comme cela est expliqué en détail dans les exemples I à XII, XIV à XXV, LVI à LXI, LXXII à LXXIII du document n° 2, o" il est précisé que l'on broie ensemble l'halogénure de magnésium avec l'halogénure de titane ou un complexe contenant ce dernier. De même, chacun des neuf exemples du document n° 3 fait intervenir un tel broyage. Un broyage analogue est décrit dans chacun des sept exemples du fascicule du brevet en litige : voir colonne 6, lignes 22 à 26 ; colonne 7, lignes 31 à 36 et 56 à 58 ; colonne 9, lignes 18 à 21, 34 à 37, et 51 à 54, ainsi que colonne 10, lignes 25 à 26.

6.5. Lorsqu'une invention concerne un perfectionnement apporté par rapport à un état de la technique déjà cité à l'origine dans la description de l'invention, une caractéristique (en l'occurrence : un support "activé") largement décrite dans le document cité, mais qui n'est pas mentionnée spécialement dans l'exposé de l'invention, est réputée suffisamment exposée lorsqu'elle apparaît dans les exemples de réalisation de l'invention, sous forme d'un mode de mise en oeuvre également mentionné dans le document cité (en l'occurrence : activation par broyage).

7. L'utilisation d'halogénure de magnésium activé ayant par conséquent été clairement exposée pour l'homme du métier aussi bien dans les pièces de la demande déposée initialement que dans le fascicule du brevet en litige, il est permis et il est même nécessaire d'insérer le mot "activé" dans les passages correspondants du préambule des revendications 1 à 7 ; en effet, il est encore possible, même au cours de la procédure d'opposition ou de recours, d'introduire dans les revendications une caractéristique déjà exposée à l'origine, qui a pour effet de limiter le texte des revendications.

8. En conséquence, les objections que l'intimée a formulées en vertu de l'article 100, paragraphe b de la CBE à l'encontre des revendications 1 et 7 dans le texte proposé actuellement ne peuvent être retenues. Il en va de même des sous-revendications 2 à 6 et 8 à 10 qui y sont respectivement rattachées.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée devant la première instance, pour maintien du brevet européen dans sa forme modifiée par introduction dans le texte allemand de la revendication 1, à la ligne 41 de la colonne 10, et de la revendication 7, à la ligne 18 de la colonne 11, du mot "aktivierten" (activé) avant le mot "Magnesiumhalogenid" (halogénure de magnésium).

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