T 2208/22 (FABRICATION DE PAPIER ET CARTON/SPCM) of 6.12.2024

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2024:T220822.20241206
Date de la décision : 06 Décembre 2024
Numéro de l'affaire : T 2208/22
Numéro de la demande : 17707367.3
Classe de la CIB : D21H 17/41
D21H 21/10
D21H 21/18
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : PROCÉDÉ DE FABRICATION DE PAPIER ET DE CARTON
Nom du demandeur : S.P.C.M. SA
Nom de l'opposant : Kemira Oyj
Chambre : 3.3.06
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 83
European Patent Convention Art 54
European Patent Convention Art 56
Mot-clé : Possibilité d'exécuter l'invention - (oui)
Nouveauté - (oui)
Activité inventive - (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0555/18
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours de l'opposante fait suite à la décision de la division d'opposition de rejeter l'opposition formée à l'égard du brevet européen n° 3 423 630, dont la revendication 1 est libellée comme suit:

"1. Procédé de fabrication d'une feuille de papier et/ou de carton à partir d'une suspension fibreuse, selon lequel, avant la formation de ladite feuille, on ajoute à la suspension fibreuse, en un ou plusieurs points d'injection, au moins deux agents de rétention respectivement :

(a) 100 à 1500 g, par tonne de papier et/ou de carton sec, d'au moins un polymère P1 cationique organique hydrosoluble présentant une cationicité supérieure à

2 meq.g**(-1), et

(b) 100 à 1500 g, par tonne de papier et/ou de carton sec, d'au moins un polymère P2 amphotère hydrosoluble d'au moins un monomère anionique et d'au moins un monomère cationique,

caractérisé en ce que le polymère P2 est ajouté dans la suspension fibreuse après dissolution en solution aqueuse du polymère P2 préalablement obtenu par l'une des techniques de polymérisation suivantes:

- polymérisation en gel,

- polymérisation en suspension,

- polymérisation en émulsion inverse,

- polymérisation en dispersion,

et en ce que le polymère P2 présente un facteur F > 2,

ledit facteur F étant défini par la formule:

F = UL**(2) x [(100-A)/(100-C)]

avec UL: viscosité Brookfield du polymère P2 à 0.1 % en poids dans une solution aqueuse à 1 M de NaCl, à 23°C, avec un module UL et à 60 tr.min**(-1)

A et C correspondant respectivement aux pourcentages molaires des monomères anioniques et cationiques du polymère P2,

le polymère P1 étant choisi parmi:

(i) les polyvinylamines et/ou

(ii) les polyéthylènimines, et/ou,

(iii) les polyamines, et/ou,

(iv) les poly(chlorure de diallyldiméthylammonium), et/ou,

(v) les poly(amidoamine-epihalohydrine)."

II. La requérante a fait valoir que l'objet du brevet tel que délivré présentait non seulement une insuffisance de description, mais également un défaut de nouveauté au regard de:

- D1 (WO 2014/076372) s'appuyant sur D8 (publication interne de KEMIRA, 2019), D16 (déclaration du 28 avril 2022 de Jonni Ahlgren, Senior Principal Scientist of Kemira Oyj) ou D20 (rapport expérimental de KEMIRA);

- D2 (JP 2014-1473) et sa traduction D3 (ci-après, il sera fait référence à D2/D3) s'appuyant sur D8, D16 ou D20;

- D4 (JP 2005-281922) et ses traductions D5 et D5T (ci-après, il sera fait référence à D4/D5) s'appuyant sur D8, D16 ou D20;

- D7 (US 3,949,014) s'appuyant sur D8, D16 ou D20;

ainsi qu'un défaut d'activité inventive au regard de:

- D1 combiné à l'enseignement de D2/D3, D4/D5, D9 (Sivén et Manner, 2011), D10 (résumé de D9) et D11 (Svedberg, mémoire de thèse, 2012);

- D2/D3 combiné à l'enseignement de D12 (Gess, Retention of Fines and Fillers During Papermaking, 1998);

- D4/D5 combiné à l'enseignement de D6 (WO 2006/071961 A), D12 (Retention of Fines and Fillers During Papermaking, Ed. J.M. Gess, TAPPI Press, 1975) et D13 (Raimo, Papermaking Chemistry, 2007);

- D7 combiné à l'enseignement de D6, D12 et D13, pris en combinaison avec les connaissances générales de l'homme du métier telles que décrites dans D12.

III. Avec sa réponse datée du 25 avril 2023, la propriétaire (ci-après l'intimée) a déposé 15 jeux de revendications modifiées à titre de requêtes auxiliaires.

IV. En réponse à l'opinion préliminaire de la chambre, l'intimée a déclaré retirer les requêtes subsidiaires 1, 2 et 4 à 15 et soumis de nouvelles requêtes auxiliaires 16 et 17.

V. A l'audience du 6 décembre 2024, la requérante a fait référence à ses écrits concernant le défaut de nouveauté. Concernant l'insuffisance de description, elle a fait référence à ses écrits mais qu'au vu de la décision T 555/18, le paramètre F était un paramètre inhabituel, si bien que la charge de la preuve revenait à l'intimée. Eu égard au défaut d'activité inventive, elle s'est limitée à l'objection partant de D2/D3 comme état de la technique le plus proche.

Concernant les requêtes finales des parties, la requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet. L'intimée a pour sa part demandé le rejet du recours à titre principal et, à titre subsidiaire, le maintien du brevet sous une forme modifiée sur la base des revendications selon l'une des requêtes subsidiaires 16 ou 17 déposées par courrier du 4 octobre 2024, ou alternativement, selon la requête subsidiaire 3, déposée en réponse au recours.

Motifs de la décision

1. Suffisance de description de l'invention

1.1 La requérante ayant fait référence à ses écrits à la procédure orale eu égard à l'avis préliminaire de la chambre, cette dernière maintient son raisonnement, à savoir que s'il est exact que les exemples du brevet ne donnent aucune précision sur la structure, la provenance et la manière dont les polymères amphotères B1 à B4 ont été préparés, l'homme du métier est pleinement mis en mesure de sélectionner un polymère amphotère adéquat en s'appuyant sur les paragraphes [0070] à [0076] de la description, qui précisent non seulement les monomères préférentiels mais aussi les modes de polymérisation à mettre en ½uvre pour obtenir ledit polymère amphotère. Il s'ensuit qu'en l'absence de preuve du contraire, en particulier de tests expérimentaux montrant que des tests de routine ne sont pas suffisants pour reproduire de tels polymères, la chambre ne peut se joindre à l'argument selon lequel l'homme du métier en charge de reproduire l'invention serait confronté à un programme de recherche nécessitant un effort excessif de mise en ½uvre.

1.2 Concernant les paramètres nécessaires au calcul du facteur F défini à la revendication 1 du brevet, à savoir la viscosité Brookfield du polymère P2 à 0.1% en poids dans une solution aqueuse à 1M de NaCl, à 23°C, avec un module UL et à 60 tr.min**(-1), ainsi que les pourcentages molaires des monomères anionique A et cationique C du polymère P2, ceux-ci sont incontestablement courants du domaine technique des polymères (voir en particulier D8 concernant la viscosité Brookfield), de sorte que le facteur F peut aisément en être déduit de la formule définie à la revendication 1 objet du brevet tel que délivré.

Il s'ensuit que même si le facteur F n'est pas courant du domaine des polymères, il n'en est pas pour autant un paramètre inhabituel au sens de la jurisprudence des chambres de recours, puisqu'il est déductible de paramètres usuels du domaine concerné, si bien que la charge de la preuve ne peut être inversée, tel que requis par la requérante.

1.3 Eu égard à la décision T 555/18, sur laquelle s'est appuyée la requérante, celle-ci conclut comme suit (voir "headnote"; traduit par la chambre de l'original en langue anglaise): "Si la seule caractéristique qui distingue une revendication de l'état de la technique le plus proche est une plage de valeurs d'un paramètre inhabituel, et qu'il serait évident pour l'homme du métier de résoudre le problème technique sous-jacent par des moyens dont on peut présumer qu'ils conduisent intrinsèquement à des valeurs comprises dans la plage revendiquée ou proches de celle-ci, c'est au titulaire qu'il incombe de démontrer que la mise en ½uvre de ces solutions ne conduirait pas à la plage paramétrique revendiquée."

Cette décision ne s'applique toutefois pas au cas d'espèce car - tel qu'indiqué ci-avant - le paramètre F n'est pas un paramètre inhabituel au sens de la jurisprudence des chambres de recours, puisqu'il est aisément déductible (par calcul) de paramètres usuels du domaine concerné, ce qui n'était pas le cas dans T 555/18, où le paramètre inhabituel, était:

"FTIR Transmission Absorbance Ratio:

FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE

wherein A1199 is determined by integrating a peak area between 1223.6 cm **(-1) and 1186.0 cm **(-1) with a baseline made by connecting points on the curve at 1223.6 cm **(-1) and 1186.0 cm **(-1) with a straight line, and wherein A1170 is determined by integrating a peak area between 1186.0 cm **(-1) and 1152.5 cm **(-1) with a baseline made by connecting points on the curve at 1186.0 cm **(-1) and 1152.5 cm **(-1) with a straight line".

Or, ce paramètre n'était lui-même calculable qu'à partir de paramètres eux-mêmes non usuels du domaine concerné, à savoir les paramètres A1199 et A1170, qui correspondent à des surfaces supposées être calculées sur le spectre infra-rouge d'un polyamide particulier, avec le paramètre A1199 correspondant à la surface du pic à 1199 cm**(-1) et le paramètre A1170 correspondant à la surface du pic à 1170 cm**(-1).

1.4 S'il est en outre exact - tel qu'avancé par la requérante - que la portée de la revendication 1 telle que délivrée est très large, il n'y a toutefois pas de raison apparente - à tout le moins en l'absence de preuve du contraire - de conclure que certains des polymères P2 tombant sous le libellé de la revendication 1 telle que délivrée ne puissent servir d'agent de rétention. Concernant les polymères amphotères spécifiques cités par la requérante, ceux-ci sont manifestement exclus de l'objet revendiqué puisqu'ils ne sont pas hydrosolubles.

1.5 Il suit de ce qui précède que la requérante n'a pas été en mesure d'identifier de lacune d'information s'opposant à l'exécution par l'homme du métier de l'invention revendiquée, si bien que le brevet pris dans son ensemble ne peut être jugé non conforme aux dispositions de l'article 83 CBE.

2. Nouveauté

2.1 Eu égard au défaut de nouveauté allégué par la requérante, la chambre ne peut suivre les arguments avancés, car ceux-ci sont essentiellement basés sur des estimations du facteur F (dérivées des données fournies par les documents D8 et D16) dans les procédés selon les documents D1, D2/D3, D4/D5 et D7, et ce pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 2.2. de la décision attaquée, également développées par l'intimée aux points II, V et VI de sa réponse au mémoire de recours.

2.1.1 En particulier, les données fournies par D8 et D16 sont basées sur des polyacrylamides (ci-après "PAMs") cationiques et anioniques de structure chimique inconnue, qui ne permettent donc pas de tirer une conclusion directe et sans équivoque quant à la valeur du facteur F dans le procédé mis en ½uvre dans chacun des documents D1, D2/D3, D4/ D5 ou D7. De même, les données de viscosité Brookfield en fonction du poids moléculaire dérivées des tableau 1 et Figure 2 du document D20 ne sont pas plus convaincantes, car concernant des PAM amphotères dont la composition chimique n'est également que partiellement décrite.

2.2 Le Tableau 2 du document D20 décrit toutefois des valeurs de viscosité Brookfield par module UL (ci-après "viscosité UL") mesurée pour trois PAM amphotères (EPAM AMP1, EPAM AMP2 et EPAM AMP3) obtenus à partir de tentatives raisonnables de reproduction des échantillons 8 et 10 de D2/D3, ainsi que le facteur F (calculé) pour chacun de ces PAM amphotères, et dont la valeur est largement supérieure (d'environ un ordre de magnitude) au seuil minimum de 2 exigé par le brevet opposé, et tombe ainsi sous le libellé de la revendication 1 telle que délivrée.

En dépit d'un facteur F largement supérieur à 2, il ne découle toutefois pas de manière directe et sans équivoque des exemples 37 et 39 de D2/D3 (qui correspondent respectivement à la combinaison des échantillons 8 et 26 et des échantillons 10 et 27 du tableau 1 de D2/D3) - allégués comme destructeurs de nouveauté - que le polymère amphotère doit y être dissout dans l'eau avant d'être ajouté dans la suspension fibreuse. En outre, les quantités de polymère mises en ½uvre sont bien inférieures aux minimas imposés par la revendication 1 du brevet tel que délivré, puisque D2/D3 décrit l'utilisation de 200 ppm des échantillons du tableau 2 [0039], c'est-à-dire 200 ppm d'une composition contenant 100 ppm d'une émulsion eau dans huile du polymère 8 ou 10, et 100 ppm d'une émulsion eau dans huile du polymère 26 ou 27, et donc des valeurs bien inférieures à 100 g/t.

2.3 Il s'ensuit que l'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré se distingue des exemples 37 et 39 de D2/D3 à tout le moins par:

i) l'ajout du polymère P2 dans la suspension fibreuse sous forme de solution aqueuse, et

ii) les quantités des polymères cationique et amphotère sont comprises entre 100 et 1500 g/t.

2.4 Il s'ensuit qu'il ne découle pas de manière directe et sans équivoque des documents D1, D2/D3, D4/D5 et D7 pris isolément que la revendication 1 du brevet opposé présente un défaut de nouveauté.

3. Activité inventive (Articles 100(a) et 56 CBE)

3.1 La requérante a maintenu ses objections de défaut d'activité inventive à l'encontre de la revendication 1 en prenant comme état de la technique le plus proche le contenu de chacun des documents D1, D2/D3, D4/5 et D7. Aux points 13.9, 14.8, 15.12 et 16.12 de son mémoire de recours, celle-ci fait valoir que les motifs avancés au point 2.3 de la décision attaquée seraient erronés, en particulier parce que la division d'opposition n'a pas reconnu, tel qu'expliqué dans D16, que les corrélations (entre la viscosité UL et la viscosité intrinsèque, d'une part, ainsi qu'entre la viscosité UL et le poids moléculaire des polyacrylamides, d'autre part) découlant des données présentées dans D8 permettaient de prédire que les copolymères amphotères mis en ½uvre dans D1, D2/D3, D4/D5 et D7 présentaient des viscosités UL (Brookfield) conduisant à des facteurs F nettement supérieurs à la valeur seuil de 2 revendiquée pour le polymère amphotère P2.

3.2 Ces arguments ne sont toutefois pas convaincants, à tout le moins pour ce qui concerne D1, D4/D5 et D7 car, comme discuté ci-avant au point relatif à la nouveauté, les données figurant dans D8, D16 (et D20 déposé avec le mémoire exposant les motifs du recours) ne permettent pas de conclure précisément sur les valeurs de viscosités UL mises en ½uvre dans les procédés selon D1, D4/D5 et D7.

3.3 Eu égard à l'état de la technique divulgué dans D2/D3, en particulier les paragraphes [0001], [0019] et [0034] à [0039] relatifs aux exemples 37 et 39 du tableau 2, que la requérante considère comme représentant l'état de la technique le plus proche, et correspondant respectivement à la combinaison des échantillons 8 et 26 et des échantillons 10 et 27 du tableau 1, la requérante a fait valoir qu'il découlait de D20 que les valeurs de viscosités UL mesurées sur des copolymères amphotères obtenus à partir de tentatives raisonnables de reproduction des échantillons 8 et 10 de D2/D3 menaient à des valeurs du paramètre F supérieures d'au moins un ordre de magnitude à la valeur seuil de 2 imposée par la revendication 1 en question pour le polymère amphotère P2. En outre, selon la requérante, les échantillons 26 et 27 décrits au tableau 1, et qualifiés au tableau 2 de "polymère hydrosoluble de polyvinylamine (C)", comprendraient exclusivement des monomères de N-vinylformamide (ci-après NVF) et respectivement 73 ou 48 mol% de monomères de vinylamine (ci-après VAM). Lesdites polyvinylamines hydrosolubles présenteraient ainsi une densité de charge cationique supérieure à 2 meq/g et répondraient donc à la définition du polymère cationique P1 selon la revendication 1 en litige (voir également les points

7.7 et 7.8 du mémoire de recours). Ainsi, l'objet de la revendication 1 du brevet attaqué ne se distinguerait de l'art antérieur divulgué dans D2/D3 que par les deux caractéristiques suivantes:

i) le polymère amphotère est dissout dans l'eau avant d'être ajouté à la suspension de fibres, et

ii) les quantités de polymère cationique et de polymère amphotère sont spécifiquement comprises entre 100 et 1500 g/t.

Etant donné qu'aucun des exemples du brevet ne compare l'invention alléguée à un procédé similaire dans lequel les quantités de polymères P1 et P2 seraient inférieures au seuil de 100 g/t, et/ou dans lequel le polymère amphotère aurait été rajouté sous une forme autre qu'en solution aqueuse - comme exigé par la revendication 1 du brevet - l'invention revendiqué ne sous-tendrait ainsi aucun effet technique particulier, contrairement aux allégation des paragraphes [00013] et [0014] du brevet. La requérante en conclut (en se référant en outre à D12) que l'objet de la revendication 1 du brevet opposé ne serait qu'une simple alternative évidente à l'art antérieur divulgué dans D2/D3.

3.4 Pour la chambre, même en acceptant en faveur de la requérante que D20 démontre de manière plausible que les échantillons 8 et 10 de D2/D3 présentent un facteur F supérieur à 2, le raisonnement de la requérante apparaît manifestement erroné et ne convainc pas pour les raisons qui suivent.

3.4.1 Tout d'abord, il apparaît que les densités de charge cationique calculées par la requérante pour les échantillons 26 et 27 de D3 sont basées sur l'hypothèse arbitraire que ces échantillons seraient constitués uniquement d'unités NVF et VAM. La requérante a justifié cette hypothèse en soulignant la divulgation au paragraphe [0025] de D3 selon laquelle le polymère de polyvinylamine (C), de préférence exempt de groupes carboxyles (anioniques), serait obtenu en hydrolysant des polymères de NVF.

Toutefois, comme souligné par l'intimée (voir par exemple les pages 19 et 20 de sa réponse au recours ainsi que le point [iv] à la page 8 de sa lettre du 4 octobre 2024), il ressort manifestement des paragraphes [0022] et [0025] à [0027] de D3 que le "polyvinylamine water-soluble polymer (C)" mentionné au tableau 2 de D3 peut aussi bien (et même plus probablement) être un polyvinylamine amphotère résultant de l'hydrolyse de copolymères de NVF avec des co-monomères non spécifiés. En particulier, le paragraphe [0025] de D3 décrit que l'hydrolyse dans des conditions acides de copolymères de NVF - contenant vraisemblablement aussi des unités co-monomères comprenant des groupes esters - produit des polyvinylamines amphotères solubles dans l'eau et portant également des groupes carboxyles, et l'hydrolyse, de préférence dans des conditions basiques, des copolymères NVF (probablement les mêmes) produit une polyvinylamine purement cationique essentiellement dépourvue de groupes carboxyles (c'est-à-dire contenant probablement encore les groupes ester) et hydrophobe.

Par conséquent la structure des échantillons 26 et 27 de D2/D3, alléguée comme comprenant uniquement des unités NVF et VAM, est en contradiction avec le paragraphe [0025] de D3 qui décrit des polyvinylamines contenant, en plus des unités monomères VMA et NVF, des quantités non divulguées d'autres co-monomères portant soit des groupes carboxyles anioniques, soit des groupes ester non hydrolysés.

Les densités de charge cationique calculées par la requérante pour les échantillons 26 et 27 sont donc purement spéculatives, si bien que l'objet de la revendication 1 délivrée se distingue également de D3 par une densité de charge cationique de plus de 2 meq/g pour le polymère anionique P1.

La requérante n'ayant pas fourni de raisonnement alternatif pour le cas où les arguments de l'intimée relatifs aux valeurs de densité de charge cationique calculées au point 7.7 du mémoire de recours seraient jugés convaincants par la chambre, les conclusions susmentionnées rendent non convaincants ses arguments relatifs au défaut d'activité inventive allégué à partir de D2/D3.

3.4.2 En second lieu, la requérante n'a pas plus convaincu en prétendant que l'invention revendiquée ne présentait aucun d'effet technique lié aux quantités de polymères P1 et P2 mis en ½uvre.

Au contraire, tel que souligné par l'intimée et repris aux paragraphes [0033] à [0036] du brevet, il existait un préjugé technique, à savoir l'"effet antagoniste entre, d'une part, la rétention des charges et l'égouttage, et d'autre part, entre la rétention des charges et les caractéristiques physiques du papier/carton", qui n'a au demeurant pas été démenti par la requérante.

La chambre juge en outre convaincante l'argumentation de l'intimée (par exemple en page 4 de sa lettre du 4 octobre 2024) selon laquelle "les tableaux 1, 2 et 6 du brevet EP'630 montrent que les propriétés recherchées s'améliorent lorsque la quantité de polymère augmente de 250 à 1500 g par tonne de papier, pour des fibres vierges (tableau 1), en présence d'un troisième agent (tableau 2) ou pour des fibres recyclées (tableau 6).

Ces résultats sont surprenants dans la mesure où l'augmentation de la quantité de polymère a

tendance à altérer les propriétés mécaniques en raison de la formation d'amas de fibres qui créent des points cassants dans la feuille de papier ou de carton. Ainsi, la personne du métier qui cherche à améliorer les propriétés mécaniques modifiera la chimie des polymères au lieu d'en augmenter le dosage".

Le brevet fournit ainsi une explication incontestée qui rend plausible que, par rapport à l'art antérieur le plus proche divulgué dans D3, l'objet de la revendication 1 incriminée résout non seulement le problème technique de rendre disponible un autre procédé de fabrication d'une feuille de papier et/ou de carton, mais aussi celui d'obtenir une bonne combinaison de rétention de charges, de drainage et de propriétés mécaniques, et ce problème est résout de manière surprenante en augmentant, entre autres, les quantités des deux polymères utilisés, ce qui va à l'encontre de l'enseignement de D3.

4. Il suit de ce qui précède que la chambre n'a pas été convaincue par les arguments présentés par la requérante, si bien qu'aucun des motifs d'opposition allégués ne porte pas atteinte au maintien du brevet tel que délivré. Le recours ne peut donc aboutir.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté.

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