European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2024:T123022.20240911 | ||||||||
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Date de la décision : | 11 Septembre 2024 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1230/22 | ||||||||
Numéro de la demande : | 16795096.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | A61F 2/24 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | ASSEMBLAGE POUR LE REMPLACEMENT DE LA VALVE ATRIO-VENTRICULAIRE TRICUSPIDE | ||||||||
Nom du demandeur : | T-Heart SAS | ||||||||
Nom de l'opposant : | Tricares SAS | ||||||||
Chambre : | 3.2.01 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Nouveauté - (oui) Activité inventive - requête principale Activité inventive - (non) Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée (non) Requête subsidiaire (recevable) Objections soumises tardivement - recevables (non) |
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Exergue : |
La question de la recevabilité des moyens est une question relative à l'objet du litige, qui constitue le fondement de la décision à prendre. Ainsi,malgré son aspect procédural, il s'agit d'une question de fond. La chambre est donc convaincue qu'il convient d'appliquer les mêmes règles aux demandes d'irrecevabilité de nouveaux moyens qu'aux demandes de ne pas admettre ces demandes d'irrecevabilité. Si ces dernières sont introduites tardivement dans la procédure, il s'agit également de modifications qui doivent satisfaire aux exigences des Articles 12 et 13 RPCR . (par dérogation à la décision T 1006/21) |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le recours a été formé par l'opposante (requérante) contre la décision par laquelle la division d'opposition a rejeté l'opposition formée contre le brevet en litige (ci-après le "brevet").
II. La division d'opposition a estimé dans sa décision
(1) que l'objet des revendications du brevet tel que délivré ne s'étend pas au-delà du contenu de la demande telle que déposée.
(2) que l'objet des revendications du brevet tel que délivré est nouveau par rapport aux documents D1 (WO 2012/178115 A2) à D7 (WO 2015/107226 A1) et implique une activité inventive partant de D1, D5 (US 2014/0194983 A1) ou D7.
III. La procédure orale devant la chambre a eu lieu le 11 septembre 2024.
IV. La requérante (opposante) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet.
L'intimée (titulaire du brevet) a demandé que le recours soit rejeté et le brevet maintenu tel que délivré ou à titre subsidiaire, que le brevet soit maintenu sur la base de la requête auxiliaire 1 (soumise comme requête auxiliaire 6 avec la réponse au mémoire de recours). Les autres requêtes auxiliaires ont été retirées.
V. La revendication 1 de la requête principale s'énonce comme suit :
1.1 Assemblage pour orifice tricuspide d'un c½ur humain comprenant :
1.2 une armature extérieure (100) reliée à
1.3 un stent intérieur (200) de forme cylindrique et portant
1.4 une bioprothèse (210) de valve tricuspide et de forme cylindrique et
1.5 une jupe d'étanchéité (610)
1.6 dans lequel l'armature extérieure (100) est configurée pour se maintenir dans un anneau tricuspide natif ;
1.7 le stent intérieur (200) est relié à l'armature extérieure par un ou plusieurs brins de fixation
1.8 la jupe d'étanchéité (610) recouvre l'espace interstitiel existant entre l'armature extérieure (100) et le stent intérieur (200)
1.9 dans lequel la jupe d'étanchéité (610) est configurée pour obstruer l'espace de contact compris entre l'armature extérieure (100) et l'emplacement du tissu natif dans la zone de l'anneau tricuspide natif
1.10 caractérisé en ce que l'armature extérieure (100) comprend trois zones de diamètres différents formant un espace interstitiel entre l'armature (100) et le stent (200)
1.11 les zones présentant deux zones convexes orientées vers l'extérieur et séparées par une zone ayant un diamètre plus petit que les zones convexes.
VI. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 correspond à la revendication 1 de la requête principale avec la modification des caractéristiques 1.10 et 1.11 comme suit:
"1.10 caractérisé en ce que l'armature extérieure (100) comprend trois zones de diamètres différents formant l' espace interstitiel entre l'armature (100) et le stent (200)"
"1.11 les zones présentant deux zones convexes orientées vers l'extérieur et séparées par une zone ayant un diamètre plus petit que les zones convexes et configurée par la zone annulaire, une zone convexe étant configurée par la zone ventriculaire et une zone convexe étant configurée par la zone auriculaire et ayant un diamètre supérieure au diamètre de la zone ventriculaire".
VII. La decision fait en outre référence au document
D6: US 2014/0222142 A1.
Motifs de la décision
1. Requête principale
2. Activité inventive partant de D5
L'objet de la revendication 1 est nouveau par rapport à D5 mais n'implique pas d'activité inventive partant de ce même document.
2.1 L'intimée (titulaire) soutient que l'objet de la revendication 1 diffère de la prothèse valvulaire de D5 en ce que :
- l'armature extérieure comprend trois zones de diamètres différents formant un espace interstitiel entre l'armature et le stent (caractéristique 1.10),
- les zones présentant deux zones convexes orientées vers l'extérieur et séparées par une zone ayant un diamètre plus petit que les zones convexes (caractéristique 1.11).
Selon l'intimée, D5 divulgue différents modes de réalisation :
- le paragraphe [0041] divulgue différentes formes possibles de l'armature extérieure: droite, évasée, bombée, en forme de sablier,
- les paragraphes [0038] et [0045] ainsi que la figure 17 divulguent la possibilité d'avoir des composants modulaires séparés attachés l'un à l'autre à la place de parties interne et externe reliées par des bras de connections (connecting arms 130) formées d'un seul tenant,
- la figure 8 et le paragraphe [0049] divulguent la possibilité d'avoir des bras d'engagement (engagement arms 310) attachés à la partie interne 110 correspondant anatomiquement aux feuillets de la valve native.
Il est donc nécessaire de choisir des caractéristiques parmi plusieurs modes de réalisation différents. Mais même dans ce cas, la personne du métier n'arrive pas à l'objet de la revendication 1 qui exige un unique espace interstitiel sans interruption entre le stent et l'armature extérieure comprenant trois zones de diamètres différents.
Partant du mode de réalisation de la figure 6, si la personne du métier choisit la forme de sablier pour la partie externe, l'espace interstitiel entre la partie externe 120 et la partie interne 110 ne comprend pas trois zones avec chacun un diamètre différent mais seulement 2 diamètres différents puisqu'un sablier est symétrique et comprend de part et d'autre de l'étranglement deux zones de même diamètre.
De plus, un sablier peut avoir plusieurs formes et notamment la forme de deux cônes opposés reliés au sommet par un col étroit. Ce type de sablier ne présente pas de forme convexe.
Selon l'intimée il n'y a aucune raison pour la personne du métier de donner à l'armature extérieure une forme de sablier avec deux zones convexes. Partant de l'enseignement de D5, la personne du métier cherchera à ce que la partie extérieure 120 ait un diamètre supérieur au diamètre de l'anneau de la valve native (voir D5, paragraphe [0041]). L'intimée souligne que la prothèse de valve cardiaque du document D5 est conçue pour une valve mitrale et non pour une valve tricuspide qui comme le souligne le brevet a des propriétés très différentes (brevet paragraphes [0005], [0006], [0058]-[0062]).
En tout état de cause, si la partie externe 120 a la forme d'un sablier comprenant deux zones convexes de part et d'autre du col étroit, l'espace interstitiel entre la partie externe 120 et la partie interne 110 ne comprend pas de parties convexes puisque celles-ci sont situées au-dessus et en dessous de la région où la partie interne (inner portion 110) chevauche avec la partie externe (outer portion 120).
De plus, si la partie externe 120 a la forme d'un sablier, alors la zone étroite de la partie externe vient en contact avec la partie intérieure et l'espace entre la partie externe 120 et la partie interne 110 ne forment plus un unique espace interstitiel ininterrompu mais deux espaces interstitiels.
2.2 La requérante (opposante) considère que l'objet de la revendication 1 n'est pas nouveau par rapport à D5. En particulier, le paragraphe [0041] divulgue que la partie externe 120 peut avoir la forme d'un sablier. Avec une telle configuration, la prothèse de valve cardiaque du mode de réalisation de la figure 6 a toutes les caractéristiques de la revendication 1. Selon elle tous les sabliers ont des parties convexes si leurs extrémités sont tubulaires.
La requérante (opposante) fait valoir que si la chambre considère que D5 ne divulgue pas implicitement que la partie externe en forme de sablier a deux parties convexes, elle considère que c'est une alternative évidente au vu des connaissances générales de la personne du métier.
L'avantage des formes convexes, par rapport aux formes planes, est un contact plus étroit entre l'armature extérieure et l'anneau natif.
Le problème technique objectif consiste donc à fournir une prothèse de valve cardiaque qui soit le plus possible en contact avec l'anneau natif et qui empêche ainsi efficacement son déplacement.
La personne du métier reconnait immédiatement que la forme traditionnelle du sablier comprenant deux zones convexes de part et d'autre du col correspond le mieux à un anneau valvulaire naturel. Par conséquent, le fait de doter l'armature extérieure de deux zones convexes serait simplement un choix évident pour la personne du métier.
La requérante (opposante) note également que la construction du profil en sablier avec des zones convexes serait un choix évident au vu d'autres citations, telles que D1, D6 ou D7, qui montrent des dispositifs d'ancrage avec une armature externe présentant des zones incurvées dans le ventricule droit et l'oreillette droite, de manière à englober étroitement l'anneau natif. Par conséquent, face au nombre limité de choix concernant la création d'un profil en sablier, la personne du métier choisirait clairement, au vu de D1, D6 ou D7, un profil en sablier incurvé, et parviendrait à la solution de la revendication 1.
2.3 La chambre juge que D5 ne divulgue pas de manière non ambigüe l'armature extérieure comprenant deux zones convexes orientées vers l'extérieur. En effet, la divulgation du sablier au paragraphe [0041] peut avoir une configuration dans laquelle les deux parties de part et d'autre du col étroit ont une forme conique sans partie convexe.
2.3.1 La chambre en revanche juge que le paragraphe [0041] définissant les formes possibles de la partie externe s'applique tout particulièrement au mode de réalisation décrit aux paragraphes précédents. Le mode de réalisation de la figure 6 ayant une partie externe en forme de sablier est ainsi divulgué sans ambiguïté dans D5. La chambre note qu'il n'est pas nécessaire de faire appel à d'autres caractéristiques provenant d'autres modes de réalisation. Notamment il n'est pas nécessaire de faire référence au mode de réalisation de la figure 8.
De plus, la partie externe 120 de la figure 6 en forme de sablier ne touchera pas la partie interne 110 contrairement à ce qu'indique l'intimée. En effet, il n'y a aucune divulgation dans D5 que tel est le cas et les bras de connexion 130 empêchent une telle configuration.
La chambre note que le sablier comprend trois zones de diamètres différents. En effet le diamètre du col est plus petit que le diamètre des zones de part et d'autre du col, qui varie entre le col et les extrémités.
2.3.2 La chambre juge que la forme de sablier ayant deux parties convexes de part et d'autre du col est la forme la plus courante et celle que retient la personne du métier de manière évidente partant du mode de réalisation de la figure 6 et de la forme en sablier de la partie externe 120 divulguée au paragraphe [0041].
En effet comme l'indique la requérante (opposante) les parties convexes s'adaptent mieux à l'anatomie du c½ur de part et d'autre de l'anneau natif.
Le problème technique objectif peut être défini comme la mise en ½uvre d'une prothèse de valve cardiaque qui soit maintenue de manière efficace, empêchant ainsi tout déplacement de celle-ci.
Partant du mode de réalisation de la figure 6 de D5 comprenant la partie externe en forme de sablier, la personne du métier est amenée à sélectionner la forme d'un sablier avec deux parties convexes de chaque côté de la partie rétrécie au vu de l'anatomie de la valve tricuspide et des tissus de part et d'autre.
La chambre n'est pas convaincue par l'argument de l'intimée selon lequel dans le mode de réalisation de la figure 6, les parties convexes de la partie extérieure ne seraient pas en vis à vis de la partie intérieure et ne pourraient pas former un espace interstitiel selon la revendication 1.
Tout d'abord cette affirmation peut être seulement valable si les parties convexes sont éloignées du col du sablier.
Ensuite, les figures 3A, 4A, 5A et 6A du brevet divulguent une configuration similaire à celle envisagée par l'intimée. Sur ces figures, même si elles ne sont que schématiques, le stent intérieur est plus court que l'armature extérieure et la partie convexe supérieure (ventriculaire) est au-dessus du stent. De plus rien n'indique dans le brevet que les parties convexes de l'armature extérieure doivent se situer à la hauteur du stent intérieur. L'espace interstitiel et l'emplacement des parties convexes ne peuvent pas être interprétés de manière si restrictive comme le fait l'intimée car cela serait en contradiction avec les modes de réalisation divulgués dans le brevet.
3. Requête auxiliaire 1
La requête auxiliaire 1 correspond à la requête principale avec les modifications des caractéristiques suivantes:
- "caractérisé en ce que l'armature extérieure (100) comprend trois zones de diamètres différents formant l' espace interstitiel entre l'armature (100) et le stent (200)" (caractéristique 1.10)
- "les zones présentant deux zones convexes orientées vers l'extérieur et séparées par une zone ayant un diamètre plus petit que les zones convexes et configurée par la zone annulaire, une zone convexe étant configurée par la zone ventriculaire et une zone convexe étant configurée par la zone auriculaire et ayant un diamètre supérieure au diamètre de la zone ventriculaire". (caractéristique 1.11)
3.1 Recevabilité - Article 12(6) RPCR
La requête auxiliaire 1 soumise en tant que requête auxiliaire 6 avec la réponse au mémoire de recours est recevable.
3.2 La requérante (opposante) demande pour la première fois pendant la procédure orale en recours que la requête auxiliaire 1 ne soit pas admise car selon l'article 12(6) RPCR, l'intimée (titulaire) aurait dû soumettre la requête auxiliaire 1 pendant la procédure d'opposition.
La requérante indique que cet argument ne peut pas être considéré comme tardif puisque la chambre n'a pas le pouvoir discrétionnaire d'admettre cette requête auxiliaire.
Selon elle, la dernière phrase de l'article 12(6) RPCR indique que la chambre ne doit pas admettre cette requête auxiliaire qui aurait dû être soumise pendant la procédure d'opposition.
La requérante soumet que l'intimée aurait dû déposer la requête auxiliaire 1 pendant la procédure d'opposition car elle ne pouvait pas être certaine que la division d'opposition considèrerait la requête principale admissible.
Pour soutenir ses arguments, la requérante fait référence au point 6 de la décision T1456/20.
3.3 La chambre n'est pas convaincue par les arguments de la requérante.
3.3.1 Tout d'abord l'objection de recevabilité de la requête auxiliaire 1, soumise pour la première fois pendant la procédure orale en recours représente une modification des moyens présentée après la notification de la chambre conformément à l'article 15(1) RPCR qui, en principe, n'est pas prise en compte, sauf en cas de circonstances exceptionelles, que la partie concernée a justifiées avec des raisons convaincantes (Article 13(2) RPCR).
La chambre ne partage pas l'opinion selon laquelle les demandes d'irrecevabilité des moyens tardifs doivent toujours être considérées quel que soit le stade de la procédure. Contrairement à l'opinion exprimée dans la décision T 1006/21, points 27 et 29 des motifs, la recevabilité de requêtes subsidiaires, de faits ou d'arguments n'est pas une question purement procédurale comme l'est la recevabilité d'un recours ou le renvoi d'une affaire à l'instance qui a issu la décision. Au contraire, la question de la recevabilité des moyens est une question relative à l'objet du litige, qui constitue le fondement de la décision à prendre. Ainsi, malgré son aspect procédural, il s'agit d'une question de fond. La chambre est donc convaincue qu'il convient d'appliquer les mêmes règles aux demandes d'irrecevabilité de nouveaux moyens qu'aux demandes de ne pas admettre ces demandes d'irrecevabilité. Si ces dernières sont introduites tardivement dans la procédure, il s'agit également de modifications qui doivent satisfaire aux exigences des Articles 12 et 13 RPCR.
La requérante n'a pas invoqué de circonstances exceptionnelles justifiant le caractère tardif de l'objection de recevabilité de la requête auxiliaire 1. Cette objection ne devrait donc pas être prise en compte dans la procédure de recours conformément à l'article 13(2) RPCR.
3.3.2 Mais indépendamment de cela, la dernière phrase de l'article 12(6) RPCR s'énonce comme suit:
"La chambre n'admet ni requêtes, ni faits, ni objections, ni preuves qui auraient dû être soumis ou qui n'ont pas été maintenus dans la procédure ayant conduit à la décision attaquée, à moins que les circonstances du recours justifient leur admission".
Cette phrase n'indique pas que la chambre n'a pas de pouvoir discrétionnaire quant à la recevabilité des requêtes et qu'elle doit systématiquement ne pas admettre les requêtes auxiliaires qui n'ont pas été soumises pendant la procédure d'opposition. En effet la dernière partie de la phrase indique:
"à moins que les circonstances du recours justifient leur admission".
La chambre doit donc dans un premier temps déterminer si les requêtes auraient dû être soumises pendant la procédure d'opposition avant de décider si elle admet les requêtes auxiliaires.
La chambre note que l'article 12(6) RPCR s'inscrit dans le cadre de l'article 12 RPCR. Or l'article 12(4) RPCR s'énonce comme suit:
"Tout élément des moyens invoqués par une partie dans le cadre du recours qui ne satisfait pas aux exigences prévues au paragraphe 2 doit être considéré comme une modification, à moins que la partie ne démontre que cet élément a été valablement soulevé et maintenu dans la procédure ayant conduit à la décision attaquée. L'admission de telles modifications est laissée à l'appréciation de la chambre".
La dernière phrase indique clairement que l'admission des modifications est laissée à l'appréciation de la chambre, or une nouvelle requête auxiliaire déposée avec la réponse au mémoire de recours est une modification telle que définie par l'article 12(4) RPCR.
La chambre note que dans cette affaire il n'y avait aucune raison pour l'intimée de déposer la requête auxiliaire 1 pendant la procédure d'opposition puisque la division d'opposition avait tout d'abord exprimé un avis préliminaire positif pour la titulaire dans l'annexe à l'invitation à la procédure orale, et ensuite avait rejeté l'opposition lors de la procédure orale. Ayant obtenu le maintien du brevet tel que délivré il n'y avait aucune raison pour l'intimée de déposer des requêtes auxiliaires plus restrictives, ce qu'elle aurait éventuellement pu faire si la division d'opposition avait annoncé vouloir dévier de son avis préliminaire lors de la procédure orale. Et, de toute manière, même si des requêtes auxiliaires avaient été déposées, elle n'auraient pas été traitées dans la décision de la division d'opposition en cause.
3.3.3 Enfin, les circonstances de l'affaire citée par la requérante sont très différentes de la présente affaire.
Dans l'affaire T 1456/20 la chambre n'avait pas admis la requête auxiliaire 7 qui avait été soumise avec la réponse au mémoire de recours car la titulaire aurait dû la déposer pendant la procédure d'opposition.
En effet pendant la procédure d'opposition, la titulaire avait renoncé à poursuivre une revendication indépendante portant sur un support et avait déposé une requête subsidiaire III qui ne comprenait plus que des revendications indépendantes portant sur un système de support.
La titulaire avait ainsi délibérément limité l'objet revendiqué dans une seule direction et avait renoncé, dans la procédure d'opposition, à l'examen d'une revendication portant sur un support comportant d'autres caractéristiques limitatives.
Or, la revendication 1 de la requête auxiliaire 7 soumise avec la réponse au mémoire de recours visait à nouveau un support comprenant les caractéristiques additionnelles 8 et 8.1.
Comme l'indique la chambre dans cette affaire, il n'est généralement pas possible d'admettre des requêtes dont les revendications comprennent des objets dont l'examen a été sciemment omis dans la procédure d'opposition. La chambre a donc exercé son pouvoir d'appréciation au titre de l'article 12(6), RPCR 2020 et n'a pas admis la requête subsidiaire 7 dans la procédure de recours.
3.3.4 Dans la présente affaire, la requête auxiliaire 1, soumise en tant que requête auxiliaire 6 n'aurait pas dû être soumise en opposition. Car comme indiqué ci-dessus, l'opposition a été rejetée. L'intimée (titulaire) a obtenu le maintien du brevet tel que délivré. Elle n'a renoncé à aucune revendication.
La chambre note que dans l'affaire T 1456/20, le pouvoir discrétionnaire de la chambre d'admettre ou non des requêtes auxiliaires selon l'article 12(6) RPCR est reconnu (voir en particulier le point 6.5).
4. Recevabilité des objections de manque de nouveauté, manque d'activité inventive et des modifications de la revendication 1 selon l'article 123(2) CBE - Article 13(2) RPCR
La Chambre n'admet pas les objections suivantes soulevées pour la première fois au cours de la procédure orale en recours au titre de l'article 13(2) RPCR:
- Le manque de nouveauté de l'objet de la revendication 1 par rapport à D5,
- le manque d'activité inventive de l'objet de la revendication 1 partant de D5 seul ou en combinaison avec D7, et
- les modifications apportées aux caractéristiques 1.10 et 1.11 s'étendant au-delà de la demande telle que déposée.
4.1 La requérante (opposante) argumente dans un premier temps que l'objet de la revendication 1 n'est pas nouveau au vu D5 car la forme d'un sablier au paragraphe [0041] doit être interprétée de manière large, un coté du col pouvant être plus large que l'autre. Tel est le cas pour les bouteilles de coca cola qui sont considérées comme ayant une forme de sablier.
Elle ajoute que partant de D5, la caractéristique ajoutée n'a pas d'effet technique et qu'il serait évident pour la personne du métier qu'une des parties convexes de l'armature externe ait un diamètre plus large que l'autre. D7 montre une telle forme, il serait donc évident pour la personne du métier de combiner D5 avec D7 pour arriver à l'objet de la revendication 1.
Dans un deuxième temps, la requérante argumente que les caractéristiques ajoutées à la revendication 1 ne limitent pas la revendication et donc que l'objection de nouveauté au vu de D5 et l'objection d'activité inventive partant de D5 restent les mêmes que pour la requête principale.
La requérante fait valoir également que les modifications apportées à la revendication 1 s'étendent au-delà de la demande telle que déposée sans étayer l'objection.
4.2 L'intimée (titulaire) demande que les objections de la requérante produites tardivement le jour de la procédure orale ne soient pas admises dans la procédure de recours. Selon elle, ces objections auraient dû être déposées au moins en amont de la procédure orale afin qu'elle puisse se préparer à y répondre.
4.3 La chambre ne prend pas en compte les objections de la requérante (opposante) soumises pour la première fois pendant la procédure orale en recours conformément à l'article 13(2) RPCR.
La requérante (opposante) n'a soumis aucune objection avant la procédure orale concernant la requête auxiliaire 1 qui avait été pourtant soumise le 18 novembre 2022 avec la réponse au mémoire de recours en tant que requête auxiliaire 6.
Les objections concernant l'objet de la revendication 1 de la requête auxiliaire 1 soulevées le jour de la procédure orale en recours, constituent une modification des moyens présentée par la requérante après la notification de la chambre, conformément à l'article 15(1) RPCR, sans que des circonstances exceptionnelles justifiées avec des raisons convaincantes aient été invoquées.
La chambre note qu'avec sa notification conformément à l'article 15(1) RPCR datée du 13 mars 2024 elle a indiqué aux parties qu'
"A ce stade de la procédure la Chambre est de l'avis préliminaire que seul l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 6 [correspondant à la requête auxiliaire 1] apporte une caractéristique distinctive supplémentaire par rapport à D5 et pourrait rendre l'objet de la revendication 1 inventive. En effet la revendication 1 de la requête subsidiaire 6 spécifie que la zone convexe auriculaire a un diamètre supérieur au diamètre de la zone convexe ventriculaire, or cette caractéristique n'est pas divulguée dans D5".
La requérante (opposante) n'a pourtant pas réagi et a attendu le jour de la procédure orale pour soumettre des objections envers la requête auxiliaire 1. Cette manière de procéder empêche l'intimée de se préparer de manière adéquate pour répondre aux objections soulevées.
De toute manière la chambre fait remarquer que l'argument de la requérante (opposante) selon lequel les caractéristiques ajoutées à la revendication 1 de la requête auxiliaire 1 ne limitent pas l'objet de la revendication n'est pas convaincant. En effet les caractéristiques ajoutées spécifient la taille du diamètre des zones de l'armature extérieure les unes par rapport aux autres et leur configuration.
4.4 La requérante (opposante) maintient ses objections concernant les modifications de la requête principale s'étendant au-delà de la demande telle que déposée soumis avec le mémoire de recours.
Les parties font référence à leurs écritures. Dans sa notification conformément à l'article 15(1) RPCR la chambre a donné son avis préliminaire selon lequel la revendication 1 de la requête principale ne s'étend pas au delà de la demande telle que déposée. La chambre n'a aucune raison de modifier son avis, qui est réitéré ci-dessous:
4.4.1 La requérante (opposante) soumet que:
- la demande telle que déposée (voir pages 17 et 18) ne divulgue pas "deux zones convexes vers l'extérieur" mais trois zones différentes avec une zone concave prévue au milieu entre les deux zones convexes et des dimensions spécifiques. Or la revendication 1 ne définit pas ces caractéristiques. De plus comme le montre la figure 3A, la partie auriculaire a un diamètre supérieur à celui de la partie ventriculaire. La disposition effilée du cadre externe en combinaison avec les deux régions convexes reliées par une région concave de diamètre inférieur est une caractéristique essentielle qui a été omise de la revendication 1.
- Les caractéristiques 1.8 et 1.10 décrivent deux espaces interstitiels distincts, qui contrairement à l'opinion de la division d'opposition ne peuvent être interprétés comme s'agissant des mêmes espaces interstitiels.
4.4.2 La chambre n'est pas convaincue par les arguments de la requérante (opposante). En effet au vu des figures et de la description dans son ensemble, la revendication 1 ne s'étend pas au-delà de la demande telle que déposée.
Les dimensions ne sont qu'indicatives. La personne du métier comprend que d'autres dimensions peuvent être choisies tant que le diamètre des parties convexes est supérieur au diamètre de la zone située entre elles.
L'intimée requiert que les deux nouvelles objections de la requérante selon lesquelles le cadre est effilé et les deux parties convexes sont séparées par une partie concave ne soient pas admises. Ces objections sont soulevées pour la première fois avec le mémoire de recours sans justification alors qu'elles auraient pu être soulevées en procédure d'opposition.
La Chambre note que même si ces objections sont admises, ces deux formes ne sont pas mentionnées explicitement dans la demande telle que déposée et ne sont pas essentielles pour l'invention.
Enfin, comme l'indique la division d'opposition, la personne du métier comprend à la lecture de la revendication 1 qu'il s'agit du même espace interstitiel.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition avec l'ordre de maintenir le brevet sous forme modifiée selon la requête auxiliaire 1 (soumise comme requête auxiliaire 6 avec la réponse au mémoire de recours) et une description à adapter.