T 0792/22 () of 8.2.2024

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2024:T079222.20240208
Date de la décision : 08 Fevrier 2024
Numéro de l'affaire : T 0792/22
Numéro de la demande : 16741353.3
Classe de la CIB : B29C 49/64
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : Procédé de chauffe hybride infrarouge et micro-ondes d'ébauches de récipients
Nom du demandeur : Sidel Participations
Nom de l'opposant : Krones AG
Chambre : 3.2.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 54
European Patent Convention Art 100(a)
European Patent Convention Art 111(1)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 11
Mot-clé : Nouveauté (non)
Renvoi (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0607/17
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. L'opposante a formé un recours après le rejet par la division d'opposition de son opposition contre le brevet européen n° 3 313 643 (ci-après « le brevet »).

II. Parmi tous les documents considérés dans la décision objet du recours, seul le document DE 10 2008 014 215 A1 (ci-après « document E8 ») s'est avéré pertinent pour la décision de la chambre.

III. La procédure orale devant la chambre de recours a eu lieu le 8 février 2024.

IV. La requérante (opposante) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen.

L'intimée (titulaire du brevet) a demandé le rejet du recours (requête principale). À titre subsidiaire, elle a demandé l'annulation de la décision contestée et le renvoi de l'affaire à la division d'opposition pour suite à donner (requête auxiliaire 0) ou l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sous une forme modifiée sur la base des revendications des requêtes auxiliaires 1 à 9, déposées en réponse au mémoire exposant les motifs du recours (par lettre en date du 5 octobre 2022).

V. La revendication 1 du brevet tel que délivré est rédigée comme suit (les références pour les caractéristiques utilisées par la chambre sont indiquées entre crochets) :

« 1. [1] Procédé de chauffe d'une ébauche (3) de récipient en matière plastique qui s'étend suivant un axe (X) principal, ce procédé comprenant :

- [2] une phase de préchauffe lors de laquelle l'ébauche (3) est soumise à un rayonnement électromagnétique dans le domaine de l'infrarouge ;

- [3] une phase de chauffe lors de laquelle l'ébauche (3) est soumise ensuite à un rayonnement électromagnétique dans le domaine des micro-ondes ;

ce procédé étant caractérisé en ce que, [4] lors de la phase de préchauffe, le rayonnement infrarouge présente une puissance et/ou une longueur d'onde variable le long de l'axe (X) principal de l'ébauche (3) et/ou autour de cet axe (X), [5] en sorte qu'à l'issue de la phase de préchauffe la préforme (3) présente au moins une zone (16) dite froide portée à une température T1 [6] et au moins une zone (6,15) dite chaude portée à une température T2 strictement supérieure à T1. »

VI. L'argumentation des parties concernant les points décisifs pour le recours peut se résumer comme suit :

a) Interprétation de la revendication 1

i) Requérante (opposante)

La revendication 1 ne mentionne pas de sources du rayonnement. L'homme du métier aurait compris que la puissance du rayonne­ment dont il est question à la caractéristique 4 est la puissance du rayonnement reçue par les préformes. La revendication 1 n'établit pas de lien causal entre la température T1 et le chauffage par rayonnement infrarouge. Les caractéristiques 4 à 6 ne se fondent pas exclusivement sur un tel rayonnement. Tout ce qui est exigé, c'est qu'à l'issue de la phase de préchauffe, il y ait des zones de température T1 et T2. Il n'y a pas de pondération des contributions des différents moyens de chauffe.

ii) Intimée (titulaire du brevet)

La requérante confond puissance émise et puissance reçue. L'expression « rayonnement infrarouge » vise le rayonnement produit. C'est ce qu'enseignent les figures 2 et 3, dans lesquelles apparaît une courbe montrant les variations de la puissance P d'émission des lampes (cf. le paragraphe [0028]). Même si l'expression désignait la puissance reçue, la caractéristique 4 ne couvrirait pas une variation de cette puissance en fonction de la distance entre la préforme et la source de rayonnement infra­rouge. La revendication 1 n'exclut pas la présence d'autres étapes, mais elle requiert que la préforme est portée à la température T1 à l'issue de la phase de préchauffe. C'est le sens de l'expression « en sorte que ». D'éventuels moyens de chauffe supplémentaires ne sont pas visés par les caractéristiques 4 à 6 ; ils sont nécessairement accessoires. Seuls les moyens de chauffe par rayonnement infrarouge doivent être conformes à ces caractéristiques. C'est là ce qui est nécessaire. L'ajout d'éléments supplémentaires ne doit pas modifier ce qui est nécessaire.

b) Nouveauté de l'objet de la revendication 1 au vu du document E8

i) Requérante (opposante)

Le document E8 divulgue l'objet de la revendication 1 du brevet. Il décrit un procédé de chauffage d'une ébauche en matière plastique s'étendant selon un axe principal (cf. les paragraphes [0001] et [0011]) selon la caractéristique 1. La caractéristique 2 est divulguée par le paragraphe [0051] du document E8, la caractéristique 3 par les revendications 1 et 9 ainsi que le paragraphe [0007]. La caractéristique 4 résulte du paragraphe [0051] et de la figure 5 du document E8. Les émetteurs infrarouges 21, 27 provoquent un échauffe­ment supplémen­taire dans la zone du dôme 10b ou dans une zone 10e située sous l'anneau porteur de la pré­forme. Les caractéristiques 5 et 6 découlent égale­ment du paragraphe [0051] et de la figure 5 du document E8. En particulier, la température dans les zones 10e et 10b doit être corrigée vers le haut par rapport au reste de la zone 10c de la préforme par le rayonnement infrarouge. Ainsi, les zones 10e et 10b ont chacune une température supérieure à celle de la zone 10c. Un rayonnement uniforme, homogène et unidirectionnel est impossible à obtenir en pratique. Le chauffage par l'air chaud décrit dans le document E8 est un chauffage par rayonnement infrarouge. L'affirmation contraire insiste indûment sur les termes au détriment de la fonction. Le fait que les moyens de chauffe par rayonnement infrarouge ne se trouvent que d'un côté de l'ébauche à la figure 5 du document E8 ne constitue pas une différence par rapport au brevet, car on observe le même arrangement dans les figures 2 et 3 du brevet. Les moyens d'irradiation par infrarouge de la figure 5 du document E8 ne chauffent pas seulement l'air, car le paragraphe [0051] de ce document précise qu'ils chauffent les zones 10b et 10e de l'ébauche.

ii) Intimée (titulaire du brevet)

La figure 5 du document E8 ne divulgue pas une phase de préchauffe avec les caractéristiques 4 à 6 puisque ce ne sont pas les moyens de chauffe par infrarouge qui produisent la zone à température T1 et T2. Dans le document E8, la chauffe est assurée pour l'essentiel par l'air chaud (cf. figure 5, zones 15 et 16). Les capots censés concentrer l'air chaud dans les zones 10e et 10b ne pouvant pas être en appui sur les préformes, il y a de l'air chaud qui passe et qui avance vers la zone 10c. Il chauffe la zone 10c d'une manière non contrôlée. Les moyens de chauffe par infrarouge sont additionnels (cf. paragraphe [0051] : zusätzlich) et ne servent qu'à corriger la température. Ils sont mentionnés uniquement au paragraphe [0051] qui décrit la figure 5. Celle-ci ne doit pas être détachée de l'ensemble de l'enseigne­ment du document E8, qui vise l'utilisation d'air chaud pour la préchauffe (cf. les paragraphes [0016], [0018], [0042] à [0044], [0047] et [0049]). La chaleur générée par micro-ondes est renvoyée sous forme d'air chaud vers les préformes sur le parcours 14 (cf. les figures 2, 4 et 5). Considérant que les moyens 21 et 27 ne sont disposés qu'à gauche de la préforme, l'homme du métier aurait compris qu'ils ont pour effet d'augmenter la température de l'air dans les enceintes. L'objectif n'est pas d'irradier la préforme d'une manière contrôlée. La situation est différente dans le brevet, car les supports sont tournants et une surface réfléchissante est prévue. Lorsque l'ébauche est transportée, elle est chauffée des deux côtés. Le document E8 ne divulgue donc pas que la zone 10c est portée à une température par la puissance des sources infrarouges 21 et 27. Or, l'expression « en sorte que » exige que ce soit la puissance de la source infrarouge qui produise la zone froide. Les sources de la figure 5 ne servent qu'à chauffer les zones chaudes 15 et 16. S'il devait y avoir une zone froide, ce serait la zone 10c. Tout autre interprétation de la figure 5 repose sur une lecture ex post de ce document. Par ailleurs, la caractéristique 6 ne saurait être divulguée par le document E8, car la température des zones 10b et 10e n'est pas déterminée par la puissance ou la longueur d'onde du rayonnement infrarouge. Elle est déterminée par la température de l'air chaud circulant dans les zones 16, 17, qui provient du dispositif de chauffe micro-ondes (cf. les paragraphes [0016], [0025] et [0043]). Le document E8 ne décrit pas l'emploi des micro-ondes pour une amplification des différences de température entre zones froides et chaudes d'une préforme préalable­ment chauffée par infrarouge. Tout au contraire, il décrit une chauffe micro-ondes globalement uniforme. Les zones problématiques sont préchauffées à cette fin (cf. les paragraphes [0026] et [0031]). L'affirmation qu'un rayonnement homogène et unidirectionnel n'est pas atteignable en pratique confond le rayonnement émis et le rayonnement reçu par les préformes. La revendication 1 est une revendication de procédé. Pour antérioriser la revendication 1, le document E8 devrait divulguer, ou le procédé revendiqué, ou un dispositif qui est manifestement apte à réaliser ce procédé. Or, ce n'est pas le cas, car le document E8 ne divulgue pas un dispositif manifestement apte à mettre en ½uvre la caractéristique 5.

c) Renvoi à la division d'opposition

i) Requérante (opposante)

En l'espèce, il n'y a pas de situation particulière qui

justifierait un renvoi de l'affaire à la division d'opposition. L'intimée n'a pas présenté d'argumentaire complet concernant les requêtes auxiliaires en réponse au mémoire exposant les motifs du recours. Elle s'est contentée de faire référence à ces requêtes, sans les motiver. Le nouveau règlement de procédure des chambres de recours (RPCR) s'applique désormais. Or, ce règlement exige que la réponse de l'intimée au mémoire exposant les motifs du recours doit contenir l'ensemble des moyens qu'elle invoque. La présentation de requêtes auxiliaires sans motivation ne satisfait pas à cette exigence. Le comportement de l'intimée contrevient donc aux exigences des articles 12(3) et 12(4) RPCR.

ii) Intimée (titulaire du brevet)

Compte tenu de la conclusion de la chambre concernant la requête principale, et du changement de l'inter­prétation de la revendication qui la sous-tend, un renvoi de l'affaire à la division d'opposition semble indiqué. La situation est semblable à celle du cas

T 607/17 où la chambre compétente a estimé qu'il s'agissait d'une affaire nouvelle (fresh case) qui justifiait à elle seule un renvoi. Un tel renvoi ne serait pas au seul bénéfice de l'intimée, mais permettrait aux deux parties d'obtenir un examen de la requête auxiliaire 1 par deux instances. Le temps mis par l'intimée pour la justification des requêtes auxiliaires s'explique par une prise de décision assez longue au sein de l'entreprise. Il ne repose aucunement sur la volonté d'abuser de la procédure. Bien que présentées tardivement, ni les requêtes, ni leur justification constituaient une surprise pour la requérante. La conclusion que le document E8 antériorise l'objet de la revendication 1 est une surprise pour l'intimée ; il serait donc équitable de lui donner l'occasion d'obtenir deux examens des requêtes auxiliaires sur la base de l'interprétation nouvelle. Le fait d'éliminer ce débat à cause du caractère tardif de la motivation des requêtes semble déséquilibré au seul bénéfice de la requérante. Il est également à prendre en compte que l'intimée ne pouvait pas prévoir l'interprétation de la revendication par la chambre, qui résulte entre autres d'échanges lors de la procédure orale. En ce sens, la conclusion de la chambre a créé une situation nouvelle qui justifie un renvoi de l'affaire à la division d'opposition.

Motifs de la décision

1. Interprétation de la revendication 1 du brevet tel que délivré

1.1 Caractéristique 2

La caractéristique 2 exige l'existence d'une phase de préchauffe lors de laquelle l'ébauche est soumise à un rayonnement infrarouge. Elle n'exclut pas la présence de moyens de chauffage supplémentaires (comme, par exemple, un flux d'air chaud).

1.2 Caractéristique 3

La caractéristique 3 exige qu'il y ait une phase de chauffe lors de laquelle l'ébauche est soumise à un rayonnement électromagnétique dans le domaine des micro-ondes. S'agissant d'une « phase de chauffe », cette phase a nécessairement lieu après la « phase de préchauffe » de la caractéristique 2. Cela est confirmé par l'adverbe « ensuite ». Il en découle que l'ébauche n'est pas irradiée par micro-ondes pendant la phase de préchauffe, car sinon les phases de préchauffe et de chauffe se confondraient. La présence de moyens de chauffage autres que les micro-ondes pendant la phase de chauffe n'est pas exclue.

1.3 Caractéristique 4

La caractéristique 4 exige que lors de la phase de

préchauffe, le rayonnement infrarouge présente une puissance et/ou une longueur d'onde variable le long de l'axe principal de l'ébauche et/ou autour de cet axe.

1.3.1 « Le rayonnement infrarouge »

Les parties ont une compréhension différente de la notion de « rayonnement infrarouge ». L'intimée estime qu'il s'agit du rayonnement émis par la source. Elle s'appuie notamment sur les figures 2 et 3 du brevet qui comprennent une courbe typique illustrant les variations de la puissance P d'émission (cf. le paragraphe [0028] de la description du brevet).

FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE

Extrait de la figure 2 du brevet

La requérante considère que c'est le rayonnement reçu par l'ébauche. Elle fait valoir que la revendication 1 ne mentionne pas de source et que le brevet s'intéresse aux effets de la température à l'endroit des préformes.

L'absence de référence à une source n'est pas détermi­nante, car le rayonnement a nécessairement une source. Les caractéristiques 5 et 6 aident à l'inter­prétation de la caractéristique 4, dans la mesure où elles indiquent l'effet recherché, à savoir de générer des zones de température différentes de la préforme. Le rayonnement qui « compte » est donc celui qui est reçu par l'ébauche, et c'est ainsi que la chambre interprète l'expression.

1.3.2 Rapport à l'axe principal

La chambre fait sienne l'interprétation donnée par la division d'opposition au point 3.5.5 des motifs de la décision objet du recours.

1.4 Caractéristiques 5 et 6

1.4.1 « En sorte que »

Les caractéristiques 5 et 6 expliquent la conséquence des caractéristiques précédentes et plus particulière­ment de la caractéristique 4, à savoir établir des zones de température différentes de la préforme par la variation de la puissance reçue.

1.4.2 « Zone »

Le brevet ne définit pas l'expression « zone ». Il convient donc d'interpréter ce mot selon son sens habituel « portion d'espace quelconque » (dictionnaire Larousse en ligne). Au point 3.4.6 des motifs de la décision objet du recours, la division d'opposition a expliqué que le terme exprime une certaine étendue spatiale. La chambre partage cet avis. La critique de la requérante, qui signale qu'un « Bereich » doit être compris comme un ensemble d'éléments et peut comprendre un seul élément, relève davantage de la théorie des ensembles que de la compréhension du terme par l'homme du métier dans le contexte de la revendication.

1.4.3 Apport de ces caractéristiques

Les caractéristiques 5 et 6 exigent qu'à l'issue de la phase de préchauffe, la préforme présente au moins une zone portée à une température T1 et au moins une zone portée à une température T2 supérieure à T1.

Dans la vie réelle, un procédé de préchauffage ne conduit jamais à une homogénéité en température parfaite, de sorte qu'il est toujours possible de trouver deux zones de température différentes.

La division d'opposition a interprété le fait qu'à l'issue de la phase de préchauffe la préforme présente des zones « portées » (c'est-à-dire amenées) à une température T1 ou T2 comme signifiant que ce changement de température au cours de la phase de préchauffe doit nécessairement avoir été provoqué par le seul rayonne­ment infrarouge. La chambre ne partage pas ce point de vue, car la présence de moyens de chauffage supplémen­taires n'est pas exclue par la caractéristique 2 (voir le point 1.1 ci-dessus).

Les caractéristiques 5 et 6 délimitent la portée de l'ensemble des caractéristiques 1 à 4 de par leur influence sur l'interprétation de la caractéristique 4. Elles ont également pour conséquence que la création de zones de température différentes doit être due, au moins en partie, à la variation de la puissance reçue.

2. Motif d'opposition selon l'article 100 a) CBE ensemble l'article 54(1) CBE ; nouveauté de l'objet de la revendication 1 au vu du document E8

Le document E8 décrit un dispositif de chauffage de préformes 10 par micro-ondes et une unité de préchauffage 4 disposée en amont du dispositif de chauffage par micro-ondes. Dans le mode de réalisation de la figure 5, on utilise des émetteurs infrarouges 21 et 27 dans les zones de température 16 et 17, qui provoquent un réchauffement supplémentaire de la zone critique du fond 10b et de la zone 10e située sous l'anneau de support 10d. Ainsi, il est possible d'augmenter la température dans ces zones, au préalable ou ultérieurement (cf. le paragraphe [0051] de la description du document E8).

FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE

La division d'opposition a examiné la nouveauté de l'objet de la revendication 1 au vu du document E8 au point 3.3 des motifs de la décision objet du recours. Elle a conclu que ce document ne divulgue pas les caractéristiques 4 à 6.

La question à trancher par la chambre est de savoir si ces caractéristiques sont reproduites lorsque l'ébauche est chauffée au préalable à l'aide des émetteurs infra­rouges 21 et 27, comme cela est décrit au para­graphe [0051]. Il est incontestable que la puissance du rayonnement infrarouge reçu par l'ébauche varie le long de l'axe principal de celle-ci, ne serait-ce que par l'effet de la géométrie : les parties de l'ébauche plus éloignées des sources 21 et 27 reçoivent nécessairement une puissance moindre, ce qui a pour effet qu'ils sont portées à une température plus basse, étant donné aussi qu'il n'y a pas d'émetteurs infrarouge au milieu de l'ébauche (à hauteur de la zone 10c). A l'issue de cette phase de préchauffe, les zones 10b et 10e sont donc des « zones chaudes », et la zone 10c une « zone froide », au sens des caractéristiques 6 et 5.

La division d'opposition a néanmoins conclu que la caractéristique 5 n'était pas reproduite, car la zone 10c n'est pas « portée à » la température T1 par le rayonnement infrarouge : en effet, dans cette zone, la température de l'ébauche est surtout déterminée par le flux d'air chaud. Il est correct que le chauffage par l'air chaud décrit dans le document E8 ne saurait être assimilé à un chauffage par rayonnement infrarouge. Néanmoins, pour les raisons données au point 1.4.3 ci-dessus, la chambre ne suit pas la division d'opposition et l'intimée dans son interprétation de la caractéristique 5.

Comme, à l'issue de la phase de préchauffe la préforme présente une zone froide portée à une température T1 et au moins une zone chaude portée à une température T2 supérieure à T1, et que la création de zones de température différentes est due en partie à la variation de la puissance reçue du rayonnement infrarouge, les caractéristiques 5 et 6 sont antériorisées.

Il s'ensuit que le document E8 antériorise l'objet de la revendication 1.

Le motif d'opposition selon l'article 100 a) CBE ensemble l'article 54(1) CBE s'oppose donc au maintien du brevet tel que délivré. Par conséquent, la chambre conclut qu'il ne peut être fait droit à la requête principale de l'intimée visant à rejeter le recours de la requérante.

3. Requête auxiliaire 0 : renvoi de l'affaire à la division d'opposition

Par cette requête, l'intimée demande le renvoi de l'affaire à la division d'opposition faisant valoir que le rejet de sa requête principale repose sur une inter­prétation du libellé de la revendication 1 qui a été présentée pour la première fois dans la notifi­ca­tion de la chambre selon l'article 15(1) RPCR en date du 12janvier 2024 et qui a été approfondie lors de la discussion à la procédure orale.

Cette requête constitue donc, selon la chambre, une réaction légitime au changement de l'interprétation retenue par la chambre lors de la procédure orale.

La division d'opposition avait donné son avis prélimi­naire concernant l'objet de la requête auxiliaire 1 dans l'annexe à la citation à la procédure orale en date du 28 janvier 2021, mais cet avis était basé sur une interprétation différente de l'inter­prétation de la chambre exposée ci-dessus.

Il y a donc des raisons particulières au sens de l'article 11 RPCR qui justifient de faire droit à la requête en renvoi.

Au vu de cette conclusion, la question d'admission des requêtes auxiliaires 1 à 9 ne se pose pas.

Par conséquent, la chambre juge approprié d'annuler la décision objet du recours et de renvoyer l'affaire à la division d'opposition pour suite à donner, en exerçant son pouvoir d'appréciation au titre des articles 111(1) CBE et 11 RPCR.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition pour suite à donner.

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