European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2024:T064822.20241112 | ||||||||
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Date de la décision : | 12 Novembre 2024 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0648/22 | ||||||||
Numéro de la demande : | 13815065.1 | ||||||||
Classe de la CIB : | F16C 3/02 F16C 33/10 F16C 17/02 F16C 33/04 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | ORGANE DE GUIDAGE SOUS FORME D'UNE BAGUE POUR LE MONTAGE AVEC FROTTEMENT ET AVEC CAPACITE D'ARTICULATION ET/OU DE COULISSEMENT D'UN ELEMENT. | ||||||||
Nom du demandeur : | H.E.F. | ||||||||
Nom de l'opposant : | S.I.BO. S.r.l. | ||||||||
Chambre : | 3.2.08 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Nouveauté - (oui) Activité inventive - (non) Exigences de l'article 12(3) RPCR 2020 satisfaites (non) Pouvoir d'appréciation en vertu de l'article 12(5) RPCR 2020 Pouvoir - éléments pas admis Répartition des frais - abus de procédure (non) |
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Exergue : |
- |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le recours a été formé par l'opposante (requérante) contre la décision par laquelle la division d'opposition a rejeté l'opposition formée contre le brevet en litige (ci-après le "brevet").
II. La procédure orale devant la chambre a eu lieu le 12 novembre 2024.
III. La requérante (opposante) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen.
IV. L'intimée (titulaire du brevet) a demandé le rejet du recours comme irrecevable ou le rejet du recours sur le fond, et donc le maintien du brevet tel que délivré (requête principale). Elle a également demandé la répartition des frais, et le renvoi à la division d'opposition pour la poursuite des requêtes subsidiaires 1 à 6 (déposées avec la lettre du 10 octobre 2022) au cas où la requête principale ne serait jugée pas admissible.
V. La revendication 1 de la requête principale s'énonce comme suit :
1.1 |"Organe de guidage sous forme |
1.1a|d'une bague (1) et |
1.1b|d'un élément (2) pour le montage avec frottement et avec capacité d'articulation et/ou de coulissement de l'élément (2) dans la bague (1), |
1.2 |ladite bague (1) ou ledit élément (2) présentant des agencements (3-4-5) pour alimenter en graisse la zone de frottement selon des périodes déterminées, |
1.3 |l'alésage de la bague (1) présentant des agencements (1a) aptes à faire office de réserve de graisse |
|caractérisé en ce que |
1.4 |l'alésage de la bague présente des canaux (1b) reliant chacun des agencements (1a) aptes à faire office de réserve de graisse pour mettre en communication les agencements (3-4-5) d'alimentation en graisse avec la totalité des agencements (1 a) faisant office de réserve de graisse,|
1.5 |lesdits canaux (1 b) étant disposés en hélice." |
VI. Dans la présente décision, il est fait référence aux documents suivants :
D5 |Fax de Dessin "Bague PEL BH2 3870389"|
D23|Déclaration Mr. Alberto Calabrese |
D24|Déclaration Mme. Stefania Brusori |
VII. Les arguments de la requérante peuvent être résumés comme suit :
Recevabilité du recours
Le recours est recevable. Le mémoire de recours permet de comprendre immédiatement en quoi la décision de la première instance serait incorrecte, par exemple en ce qui concerne l'objection relative à l'article 100c) CBE ou la nouveauté par rapport à D5.
Requête principale - nouveauté par rapport à D5 et activité inventive partant de D5
La requérante a reçu le dessin de D5 par téléfax exactement tel qu'il est reproduit dans ce document. Il n'y a pas eu d'obligation de confidentialité. D5 appartient donc à l'état de la technique.
L'objet de la revendication 1 n'est pas nouveau car toutes les caractéristiques sont au moins implicitement divulguées dans D5. L'objet n'est en tout cas pas inventif à partir de D5, car il est évident pour l'homme de métier de réaliser la partie de la bague non représentée dans les dessins de la même manière que dans les coupes montrées et d'étendre également toutes les rainures jusqu'à la gorge au centre de la bague par laquelle le lubrifiant est amené aux rainures.
Requêtes subsidiaires - admission
Les requêtes subsidiaires ne doivent pas être admises dans la procédure de recours, car l'intimée n'a pas expliqué en quoi elles satisfont aux exigences de la CBE dans le cadre de la procédure de recours.
VIII. Les arguments de l'intimée peuvent être résumés comme suit :
Recevabilité du recours
Le recours n'est pas recevable. En effet, le mémoire de recours ne permet pas de comprendre en quoi la décision de la première instance serait incorrecte, la requérante se limitant à répéter les arguments de la procédure d'opposition et aux nouvelles objections soulevées pour la première fois dans la procédure de recours.
Requête principale - nouveauté par rapport à D5 et activité inventive partant de D5
Dans le dessin de D5 la mention "confidential" a été noircie. Il est même possible que cette modification ait été apportée après la réception du téléfax. D5 est donc à considérer comme confidentiel et ne fait pas partie de l'état de la technique.
L'objet de la revendication 1 est nouveau, puisque les caractéristiques 1.1b, 1.3 et 1.4 ne sont pas divulguées dans D5. L'homme du métier n'a pas de raison de modifier l'anneau de la D5 de manière à ce qu'il présente toutes ces caractéristiques.
Requêtes subsidiaires - admission
Les requêtes subsidiaires ont été déposées dès la procédure d'opposition et font donc partie de la procédure de recours, d'autant que l'intimée a demandé un renvoi à la division d'opposition pour l'examen de ces requêtes.
Répartition des frais
La répartition des frais est justifiée par un abus de procédure.
Motifs de la décision
1. Recevabilité du recours
L'intimée a fait valoir que le recours était irrecevable, car le mémoire de recours ne permettait pas de comprendre en quoi la décision de la première instance serait erronée.
La chambre estime qu'au moins le point 2 du mémoire de recours concernant l'article 100c) CBE, ainsi que l'argumentation des pages 21 à 24 concernant la nouveauté par rapport à D5 permettent de comprendre les raisons pour lesquelles la requérante estime que la décision est erronée.
Le recours est donc recevable, et conformément à la jurisprudence, il l'est dans son intégralité, car un recours ne peut pas être partiellement recevable.
2. D5 - état de la technique
2.1 L'intimée a fait valoir que le document D5 ne faisait pas partie de l'état de la technique. Il porte la mention "confidential" et le fait de rayer cette mention ne pourrait pas retirer sa confidentialité. Une conviction absolue est nécessaire lorsque les éléments de preuve sont évalués et, en l'espèce, un doute subsiste quant à l'identité de la personne ayant noirci le document, étant donné qu'il n'est pas possible d'exclure que cela ait été fait après la réception du téléfax.
2.2 Selon la requérante, le fait que la mention "confidential" ait été noircie ne permet pas de soupçonner que ce document soit soumis à la confidentialité. De plus, il ne serait pas clair qui a noirci le terme "confidential", mais en tout cas, ce document a été reçu déjà noircie, comme le prouvent les affidavits de deux témoins soumis au dossier (D23 et D24).
2.3 La chambre est convaincue que le téléfax D5 a été reçu par la requérante sans obligation de confidentialité.
Il n'y a pas de mention du terme "confidential" visible sur le document. Néanmoins, il est supposé, en faveur de l'intimée, que cette mention était sur le document à un moment donné, même si seule la lettre L du mot "confidential" est visible.
En revanche, et contrairement à ce qu'affirme l'intimée, il ressort des preuves apportées par la requérante que le téléfax a été reçu avec la mention "confidential" déjà noircie sur ce document. Les déclarations des deux témoins confirment que le document D5 correspond exactement au téléfax reçu par la requérante et donc avec l'information noircie (D23, point 6 et D24, point 5). Il a également été confirmé que le document n'avait pas été modifié (D23, point 8). De manière plus générale, il n'existait pas d'accord de non-divulgation (D23, point 5). Contrairement à ce qu'affirme l'intimée, au vu des éléments apportés, il ne fait aucun doute que le téléfax D5 a été reçu avec le noircissement déjà apporté au document.
2.4 En résumé, le document D5 n'était pas soumis à une obligation de confidentialité lorsque le fax a été reçu par la requérante. Le document constitue donc un état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE.
3. Requête principale - Nouveauté par rapport à D5 et activité inventive partant de D5
Il n'a pas été contesté que les dessins de D5 divulguent une bague de palier lisse qui présente les caractéristiques 1.1, 1.1a et 1.2.
3.1 L'intimée a fait valoir que l'objet de la revendication 1 se distingue de cette bague par les caractéristiques 1.1b, 1.3 et 1.4.
Selon l'intimée, il ne peut pas être déduit directement et sans ambiguïté que les cavités représentées par des cercles dans les dessins sont des agencements aptes à faire office de réserve de graisse au sens de la caractéristique 1.3. La bague pourrait aussi bien être prévue pour une lubrification à l'huile.
Il n'est pas non plus divulgué que les rainures sont des canaux par lesquels la graisse peut s'écouler, ni qu'elles s'étendent jusqu'à la gorge centrale qui, avec les trous dans la paroi de la bague, servent d'agencement pour alimenter en graisse la zone de frottement. Au contraire, le dessin de D5 qui représente le détail E de façon agrandie montre que la rainure ne débouche pas dans la gorge centrale.
En outre, les dessins ne montrent que trois quarts de la bague. Il n'y a donc pas de divulgation concernant les cercles et les rainures pour le quart non représenté sur les dessins, et il n'est notamment pas précisé si la totalité des cercles sont en communication avec une rainure (caractéristique 1.4).
Enfin, D5 ne divulgue pas implicitement un élément pour le montage avec frottement et avec capacité d'articulation et/ou de coulissement de l'élément dans la bague (caractéristique 1.1b).
3.1.1 La revendication ne définit pas la taille ou la géométrie des "agencements aptes à faire office de réserve de graisse", mais exige seulement qu'ils soient adaptés pour faire "réserve de graisse". La chambre considère que pour l'homme de métier ayant des connaissances en matière de bagues lubrifiées à la graisse, il est évident que les cavités de la bague de D5 sont adaptées à cet effet. La caractéristique 1.3 est donc divulguée dans D5.
Il est également évident pour l'homme de métier que les rainures qui relient les cavités servent de canaux dans lesquels la graisse peut s'écouler, ce qui est la seule raison d'avoir prévu de telles rainures à l'intérieur de la bague.
Le détail "E", qui représente un agrandissement de la bague, montre à gauche une rainure située en bas de et adjacente à la gorge centrale. Comme visible sur la coupe A-A, cette rainure dépasse l'axe longitudinal de la bague. Compte tenu du pas de la rainure montré dans le détail "E", cette rainure débouche inévitablement un peu à droite du détail "E" dans la gorge centrale.
En outre, la coupe A-A montre que la rainure à pente opposée, située en bas de la gorge centrale et commençant directement au-dessus de la cavité à droite du cercle qui marque le détail "E", débouche dans la gorge centrale. Les rainures situées en bas de la gorge centrale dans la coupe A-A sont donc en communication avec les trous qui servent d'"agencements pour alimenter en graisse la zone de frottement", comme défini dans la caractéristique 1.4.
Comme indiqué explicitement dans D5, les rainures sont disposées en hélice, conformément à la caractéristique 1.5.
3.1.2 Comme le fait valoir l'intimée, il n'est pas possible de déduire directement et sans ambiguïté des dessins de D5 que les rainures sont reliées à la totalité des cavités dans le quart de la bague non représenté sur les dessins et que toutes les rainures débouchent dans la gorge centrale.
Il convient toutefois de noter qu'il n'est pas non plus révélé que les cavités ne sont pas reliées par les rainures dans le quart non représenté ou que certaines rainures ne s'étendent pas jusqu'à la gorge centrale. Ces informations sont tout simplement inconnues.
Par ailleurs, il est également vrai qu'un "élément pour le montage avec frottement ... dans la bague" n'est pas implicitement divulgué dans D5, même si la bague est prévue pour un tel élément (caractéristique 1.1b).
3.1.3 L'objet de la revendication 1 est donc nouveau et se distingue de la bague de D5 par la caractéristique 1.1b, ainsi que par le fait que l'on ne sait pas si toutes les cavités sont reliées aux rainures dans le quart non représenté et si toutes les rainures sont reliées à la gorge centrale.
3.2 Selon l'intimée, les caractéristiques distinctives 1.3 et 1.4 résolvent le problème de l'amélioration du graissage.
L'intimée fait valoir que l'homme de métier aurait de nombreuses autres pistes pour améliorer le graissage, par exemple en modifiant la profondeur des rainures ou des cavités, ou la chimie du lubrifiant. De plus, il ne serait pas facile de relier toutes les cavités avec les rainures lors de la fabrication de la bague.
3.2.1 Toutefois, comme indiqué précédemment, pour la chambre, la caractéristique 1.3 et la caractéristique 1.4 ne sont que partiellement distinctives, voir point 3.1.3 ci-dessus.
3.2.2 Avec ces caractéristiques distinctives, le problème formulé par l'intimée n'est pas correct. En effet, les caractéristiques distinctives résolvent deux problèmes partiels, comme l'a soutenu la requérante.
Le fait qu'un quart de la bague ne soit pas représenté dans D5 met l'homme de métier face au premier problème consistant à réaliser la bague entière, ce qui inclut le quart non représenté sur les dessins.
Il est évident pour l'homme de métier de réaliser le quart non montré de la même manière que les trois quarts représentés sur les dessins. Il aurait donc relié toutes les cavités aux rainures, comme cela est montré de manière non contestée dans les coupes A-A et B-B, également pour la partie non montrée.
Le fait que toutes les rainures hélices soient reliées à la gorge centrale a pour effet d'améliorer l'alimentation des rainures en graisse. Le second problème partiel consiste donc à améliorer l'alimentation en graisse.
Il est évident pour l'homme du métier à la recherche d'une solution à ce problème de s'assurer que toutes les rainures débouchent dans la gorge centrale, comme cela est déjà le cas pour les rainures situées au-dessus de cette gorge dans la coupe A-A.
Il est donc évident pour l'homme du métier de modifier la bague de D5 de manière à ce qu'elle présente la caractéristique 1.4. La bague résultante présente les caractéristiques 1.1a et 1.2 à 1.5.
3.2.3 La combinaison d'une telle bague de palier lisse avec un élément selon la caractéristique 1.1b, pour lequel la bague est incontestablement prévue, n'est pas inventive.
3.3 Pour les raisons susmentionnées, l'objet de la revendication 1 n'implique pas d'activité inventive.
L'objection fondée sur l'article 100a) CBE en combinaison avec l'article 56 CBE s'oppose donc au maintien du brevet tel que délivré.
4. Requêtes subsidiaires - admission
4.1 Selon l'article 12(3), première phrase, RPCR, la réponse au mémoire de recours doit contenir l'ensemble des moyens invoqués par une partie dans le cadre du recours. L'article 12(5) RPCR prévoit que la chambre peut, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, ne pas admettre les éléments soumis par une partie s'ils ne satisfont pas aux exigences prévues à l'article 12(3) RPCR.
4.2 L'intimée a demandé avec la réponse au mémoire de recours que l'affaire soit renvoyée à la division d'opposition pour traiter de la brevetabilité des requêtes subsidiaires présentées lors de la procédure d'opposition dans le cas où ses arguments concernant la brevetabilité de la requête principale ne seraient pas acceptés. La requérante a demandé que ces requêtes subsidiaires ne soient pas admises dans la procédure.
La chambre note que l'intimée n'a pas demandé à la chambre de maintenir le brevet sur la base de ces requêtes subsidiaires. Néanmoins, que l'intimée demande à la chambre de maintenir le brevet sur la base des requêtes subsidiaires ou de renvoyer l'affaire à la division d'opposition pour le traitement de ces requêtes subsidiaires, l'article 12(3), première phrase, RPCR implique que des arguments doivent être soumis par l'intimée quant au bien-fondé de ces requêtes et/ou quant à leur admission. En effet, si la chambre décidait de ne pas admettre les requêtes subsidiaires, le renvoi en première instance pour le traitement de ces requêtes serait dépourvu de toute utilité.
L'intimée n'a fourni aucun argument dans sa réponse, mais s'est contentée de faire référence aux requêtes subsidiaires déjà présentées lors de la procédure d'opposition (et de requérir le renvoi de l'affaire mentionné ci-dessus ; voir point 8 de la réponse au mémoire du recours du 10 octobre 2022). Par conséquent, les requêtes subsidiaires sont des "éléments" qui ont été soumis par l'intimée au sens de l'article 12(5) RPCR, mais qui ne satisfont pas aux exigences de l'article 12(3) RPCR.
4.3 L'article 12(5) RPCR donne à la chambre le pouvoir d'appréciation en ce qui concerne l'admission des requêtes subsidiaires. Dans ce contexte, la chambre est consciente du fait qu'il s'agit de requêtes subsidiaires qui avaient antérieurement été déposées devant la division d'opposition et qui ont fait partie de la discussion entre les parties dans leurs écritures devant la division d'opposition. Cela pourrait plaider en faveur de leur admission, bien qu'elles ne satisfassent pas aux exigences de l'article 12(3) RPCR.
4.4 La chambre a néanmoins décidé de ne pas les admettre, estimant que l'ensemble des circonstances de l'affaire ne plaidait pas en ce sens, pour les raisons suivantes.
4.4.1 La requérante a demandé dans sa lettre du 5 décembre 2022 que les requêtes subsidiaires ne soient pas admises dans la procédure de recours. Elle a fait cette requête le plus tôt possible, car elle répondait ainsi à la réponse de l'intimée au mémoire de recours en date du 10 octobre 2022, dans laquelle l'intimée avait mentionné les requêtes subsidiaires.
4.4.2 De plus, dans cette même lettre du 5 décembre 2022, la requérante a expliqué pourquoi chacune des requêtes ne remplissait pas les conditions de la CBE (par exemple les articles 123(2), 84, 54 ou 56). Toutefois, en dépit des observations de la requérante sur le fond, l'intimée n'a pas abordé les requêtes subsidiaires sur le fond dans ses écritures (notamment pas dans sa lettre du 27 février 2023).
4.4.3 Par ailleurs, la requérante a fait valoir dans sa lettre du 5 décembre 2022 que l'intimée n'avait apporté ni explication ni argument concernant les requêtes subsidiaires. L'intimée savait donc, à ce moment-là, que l'admission était contestée et en connaissait les raisons.
Il est vrai que dans la lettre du 27 février 2023, l'intimée a répondu à la requête de la requérante concernant la non-admission des requêtes subsidiaires. Elle a notamment fait référence à la décision T 184/19 pour faire valoir que dans cette décision, les requêtes subsidiaires ont été admises car elles n'avaient pas été examinées par la division d'opposition uniquement parce qu'il a été fait droit à une requête de rang supérieur.
Les conclusions de la décision T 184/19 ne s'appliquent toutefois pas au cas d'espèce. Dans cette affaire, la chambre avait appliqué l'ancien règlement de procédure de 2007 et, ce qui pour la présente chambre est décisif, la titulaire avait, au stade du recours, avancé des arguments sur le bien-fondé de ses requêtes - contrairement à ce que l'intimée a fait dans le cas présent.
4.4.4 De manière plus générale, la chambre comprend que, en ne demandant pas à la chambre de recours de maintenir le brevet sur la base des requêtes subsidiaires et en refusant d'aborder le fond des requêtes subsidiaires, l'intimée a cherché à forcer la chambre à renvoyer l'affaire devant la division d'opposition.
Dans une situation comme celle-ci, où une partie demande un renvoi à la division d'opposition, la chambre dispose d'un pouvoir d'appréciation : elle peut soit renvoyer l'affaire à la division d'opposition pour suite à donner, soit exercer les compétences de la division d'opposition et donc finir l'affaire et, par exemple, traiter les requêtes subsidiaires elle-même (article 111, deuxième phrase CBE).
C'est pourquoi, l'approche choisie par l'intimée est bien risquée : la chambre aurait pu rejeter la requête principale et la requête en renvoi, et mettre ainsi fin à la procédure à ce stade ; ou encore, si l'admission des requêtes subsidiaires fait finalement l'objet d'une discussion devant la chambre (comme en l'espèce), la chambre pourrait être disposée à les traiter elle-même, et donc statuer sur leur admission.
L'approche choisie par l'intimée est également injuste pour la requérante qui a non seulement demandé au stade du recours que les requêtes subsidiaires ne soient pas admises dans la procédure, mais a également soulevé le manque de bien-fondé des requêtes subsidiaires dans ces écritures.
4.5 La chambre a donc décidé, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation en vertu de l'article 12(5) RPCR, de ne pas admettre les requêtes subsidiaires dans la procédure de recours. Par conséquent, il n'y avait plus de raison de renvoyer l'affaire devant la division d'opposition.
5. Répartition des frais
L'intimée a demandé la répartition des frais. La chambre avait déjà émis un avis négatif à ce sujet dans sa notification et en avait donné les raisons. Au cours de l'audience, l'intimée n'a pas présenté d'autres observations.
La chambre confirme son avis préliminaire. Elle ne voit pas de raison pour une répartition différente de frais en vertu de l'article 104(1) CBE. Il est vrai que la requérante soulève de nouvelles objections au stade de recours, qu'elle présente plusieurs objections et qu'elle répète des arguments de la procédure d'opposition.
La chambre n'y voit toutefois pas un abus de procédure justifiant une répartition différente de frais. En effet, chaque partie a le droit de présenter son argumentation et ses objections de la manière qui lui semble appropriée. En l'espèce, il est par exemple tout à fait vrai qu'il existe un grand nombre d'objections en vertu des articles 54 et 56 CBE. En revanche, leur nombre n'est pas tel qu'il s'agisse d'un abus de procédure. De plus, le fait que l'a requérante répète des arguments de la procédure d'opposition, ne peut pas non plus être considéré comme un abus.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision contestée est annulée.
2. Le brevet est révoqué.
3. La requête de l'intimée en répartition des frais est rejetée.