T 1420/21 (Gravure nanométrique de surface de frottement de système horloger/ … of 25.11.2024

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2024:T142021.20241125
Date de la décision : 25 Novembre 2024
Numéro de l'affaire : T 1420/21
Numéro de la demande : 15187489.8
Classe de la CIB : G04B 13/02
G04B 15/14
G04B 17/32
G04B 31/004
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Système horloger avec des propriétés tribologiques améliorées
Nom du demandeur : Richemont International S.A.
Nom de l'opposant : ICB Ingénieurs Conseils en Brevets SA
Chambre : 3.4.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 84
European Patent Convention R 99(2)
European Patent Convention Art 111(1)
European Patent Convention R 103(1)(a)
Mot-clé : Recevabilité du recours - recours suffisamment motivé (oui)
Remboursement de la taxe de recours - violation du droit d'être entendu (non)
Revendications - clarté
Revendications - requête principale (non)
Revendications - clarté
Revendications - requête subsidiaire (non)
Décision sur le recours - renvoi à la l'instance du premier degré (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0003/14
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La titulaire (requérante) a formé le présent recours à l'encontre de la décision de la division d'opposition en date du 2 juillet 2021 concernant la révocation du brevet Nº EP 3 002 637.

Selon la décision contestée, la revendication 1 selon la requête principale ne satisfait pas aux exigences de clarté énoncées à l'article 84 CBE. Les requêtes subsidiaires 1 à 12 ne sont pas recevables car elles sont tardives et présentent le même défaut de clarté que la requête principale.

Il est fait référence aux documents suivants :

E1|Déclaration écrite faite sous la foi du sermentde Nancy A. Burnham|

E2|Vrbka, M. et al. :« Effect of surface texturing on rolling contact fatigue within mixed lubricated non-conformal rolling/sliding contacts »,Tribology International, 43 (2010), pages 1457 à 1465|

E3|Hansen, P.-E. et Roebben, G. (éditeurs) :« Introductory guide to nanometrology »ISBN : 978-0-9566809 1-4|

E4|Shum, P.W. et al. :« To increase the hydrophobicity, non-stickiness and wear resistance of DLC surface by surface texturing using a laser ablation process », Tribology International, 78 (2014), pages 1 à 6|

II. Les requêtes des parties se présentent comme suit :

La requérante requiert

à titre principal l'annulation de la décision contestée, le remboursement de la taxe de recours, et le renvoi en première instance pour suite à donner, ou

à titre subsidiaire le maintien du brevet opposé sur la base des revendications de la requête principale, ou,

aussi à titre subsidiaire, le maintien du brevet opposé sur la base des revendications selon l'une des requêtes subsidiaires 1 à 12, redéposées avec le mémoire de recours, ou l'une des requêtes subsidiaires 13 à 15 déposées avec le mémoire de recours.

L'intimée (opposante) requiert

le rejet du recours.

III. Dans une notification au titre de l'article 15(1) RPCR, la chambre a émis un avis à titre préliminaire et a convoqué les parties à une procédure orale programmée pour le 25 novembre 2024.

IV. Dans sa lettre en date du 12 septembre 2024, la requérante a retiré sa requête en procédure orale.

V. La revendication 1 selon la requête principale est libellée comme suit :

« Procédé de fabrication d'un système horloger (1) comprenant les étapes de :

fournir un premier composant avec au moins une première zone fonctionnelle (200) et un deuxième composant avec au moins une seconde zone fonctionnelle (300), la première zone fonctionnelle (200) venant en contact de frottement 5 avec la seconde zone fonctionnelle (300) lors du fonctionnement du système horloger, ce contact impliquant un glissement avec ou sans choc ;

modifier la topographie de la surface de la première zone fonctionnelle (200) et/ou de la seconde zone fonctionnelle (300), de sorte qu'au moins l'une de la première zone fonctionnelle (200) et de la seconde zone fonctionnelle (300) comporte une structuration submicronique contrôlée ;

caractérisé en ce que

ladite modification de la topographie est réalisée par : une gravure sélective de la surface exposée ;

la structuration submicronique est contrôlée pour former sur la surface des structures d'une polarité positive ou négative ayant des dimensions de 1 à 1000 nm et une densité des structures formées sur la surface structurée variant entre 15% et 80% de la surface. »

VI. Pour la présente décision, il n'est pas nécessaire de reproduire le libellé des revendications selon les requêtes subsidiaires 1 à 15. Il suffit de mentionner que toutes les revendications indépendantes présentent la caractéristique contestée de la revendication 1 selon la requête principale.

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours et qualité de partie à la procédure de la titulaire

1.1 La titulaire et requérante est partie à la procédure de recours au sens de l'article 107, première phrase, de la CBE ; l'intimée est de droit partie à la procédure au sens de la seconde phrase de cet article.

1.2 La requérante possède la qualité de partie à la procédure au sens de l'article 107 CBE.

L'intimée fait valoir qu'un opposant « perdrait » sa qualité de partie à la procédure s'il était constaté ultérieurement qu'aucun de ses moyens d'attaque tels que soumis dans le délai initial de 9 mois prescrit par l'article 99(1) CBE n'était recevable. Elle en conclut qu'un titulaire devrait perdre de même sa qualité de partie à la procédure - ou au moins que toute possibilité de déposer de nouvelles requêtes lui soit refusée - lorsqu'il est constaté ultérieurement qu'aucun de ses moyens de défense tels que soumis dans le délai initial prescrit par la règle 79(1) CBE n'est recevable. Si tel n'était pas le cas, un titulaire bénéficierait d'un traitement plus favorable que celui réservé à un opposant. Une telle différence de traitement serait manifestement contraire au principe d'égalité procédurale des parties, qui est l'un des principes les plus fondamentaux des procédures inter partes de l'OEB. (réponse du 14 mars 2022, point 98).

1.3 Ces arguments ne convainquent pas la chambre.

L'article 99(3) CBE prescrit que les opposants sont parties, avec le titulaire du brevet, à la procédure d'opposition. Cette disposition n'énonce aucune condition additionnelle, au-delà de la condition implicite qu'une procédure est en cours à laquelle l'on peut être partie(« à la procédure d'opposition »).

1.4 Un opposant n'est pas le seul à « perdre sa qualité de partie à la procédure » si les moyens qu'il a déposés avec son acte d'opposition en vertu de la règle 76(2)c) CBE ne sont pas conformes à cette règle. Au contraire, dans ce cas d'espèce, l'opposition doit être rejetée comme irrecevable et il n'existera donc plus de procédure d'opposition à laquelle l'opposant et le titulaire du brevet pourraient être parties.

Par souci d'exhaustivité, la chambre considère les allégations de l'intimée dans le sens qu'un opposant (comme le titulaire du brevet à l'encontre duquel se dirige l'opposition) perd sa qualité de partie si son opposition est rejetée comme irrecevable. Pour cette raison, un titulaire devrait perdre sa qualité de partie à la procédure ou toute possibilité de déposer de nouvelles requêtes lorsqu'il est constaté ultérieurement qu'aucun de ses moyens de défense tels que soumis dans le délai initial prescrit par la règle 79(1) CBE n'est recevable. Cela découle du principe d'égalité procédurale des parties.

À cet égard, il suffit de constater que la CBE, dans son article 99(3) et ses règles 77 et 79 en particulier, n'inclut aucune disposition à cet effet. Un titulaire qui ne défend pas son brevet risque de le perdre. S'il soumet des requêtes subsidiaires, il n'y a pas de dispositions légales comparables à celles de l'article 12 et 13 RPCR. À condition que la soumission de ces requêtes ne constitue pas d'abus de procédure, la division d'opposition est dans l'obligation de les examiner. Mais même dans ce cas d'espèce, le titulaire ne perdra pas sa qualité de partie à la procédure de recours.

L'argument de l'intimée part du principe qu'une procédure d'opposition pourrait être en cours, mais que l'opposant pourrait perdre sa qualité de partie à la procédure. Or, une telle situation ne peut pas se produire. Par conséquent, le principe même de l'argument et de l'inégalité de traitement alléguée n'est pas pertinent :

La chambre observe que la division d'opposition ne dispose pas de pouvoir d'appréciation lui permettant de ne pas recevoir les moyens d'attaque déposés dans les neuf mois. Selon la règle 77(1) CBE, seule l'opposition dans sa totalité (et non pas seuls les moyens d'attaque déposés dans les neuf mois) est rejetée comme irrecevable si l'opposition n'est pas conforme à la règle 76(2)c) CBE selon laquelle l'acte d'opposition doit contenir « les motifs sur lesquels l'opposition se fonde ainsi que les faits et les preuves invoqués à l'appui de ces motifs ».

Pour que la situation envisagée par l'intimée puisse se produire, il serait nécessaire que l'opposition soit conforme à la règle 76(2)c) CBE alors que tout moyen d'attaque déposé dans les neuf mois est irrecevable, et ce sans que la division d'opposition ne dispose de pouvoir d'appréciation lui permettant de ne pas admettre les moyens d'attaque présentés dans les neuf mois. Cela n'est pas possible.

Ne serait-ce que pour cette raison, l'argument selon lequel, pour des raisons d'égalité de traitement, le titulaire du brevet devrait perdre sa qualité de partie à la procédure si tous les moyens qu'il a invoqués dans sa réponse à l'opposition conformément à la règle 79(1) CBE s'avéraient irrecevables n'est pas valable.

1.5 Le mémoire exposant les motifs du recours satisfait aux exigences de l'article 99(2) CBE.

1.6 L'intimée estime que le recours ne serait pas recevable (voir la réponse au recours, points 85 à 87, et la lettre en date du 11 mars 2024, point 8). Selon elle, la requérante, avec ses moyens nouveaux, chercherait à répondre à une problématique autre qu'un motif décisif de la décision contestée, ainsi ne remettant pas en cause cette décision. Selon la lettre en date du 11 mars 2024, le mémoire ne répondrait ni à l'aspect de l'étendue exacte de la « surface des structures d'une polarité positive ou négative » ni à l'aspect de l'étendue exacte de « la surface structurée ».

1.7 Cela ne convainc pas la chambre. La décision contestée repose sur les motifs suivants :

a) le paramètre « densité » dans la revendication fait l'objet d'une contradiction intrinsèque ;

b) la méthode employée pour mesurer le paramètre revendiqué n'apparaît pas dans la revendication 1. Il n'existe pas de méthode standard et des méthodes différentes n'aboutissent pas au même résultat. La mesure du paramètre est rendue incertaine par la forme des structurations submicroniques.

Le mémoire de recours comprend des arguments et moyens de preuve E1 à E6 visant à démontrer que l'expression « une densité des structures formées sur la surface structurée variant entre 15% et 80% de la surface » telle qu'utilisée dans la revendication 1 selon la requête principale est acceptée par la personne du métier dans le domaine technique de la revendication et qu'elle est, en tant que telle, claire. Si ces nouveaux moyens de preuve étaient admis, cette ligne d'argumentation serait susceptible de répondre au motif a).

De plus, le mémoire de recours comprend des arguments et moyens de preuve visant à démontrer qu'il existe une méthode standard (l'AFM, voir le document E1) pour la détermination du paramètre revendiqué. Aux pages 8 et 10 se trouvent des arguments visant à répondre au motif b), notamment celui selon lequel les surfaces qui entrent dans le calcul du paramètre doivent être prises au niveau de la surface de frottement. Contrairement à l'intimée, la chambre ne comprend pas l'argumentaire de la titulaire dans le sens qu'il ne serait pas possible de déterminer les profils de nanostructures sur toute leur hauteur, mais dans le sens que la revendication ne peut pas être comprise comme se référant à une hauteur autre que celle observée au niveau de la surface de frottement.

S'agissant de l'étendue de la surface structurée, l'intimée se réfère aux arguments présentés dans le mémoire de recours quant au fond. La référence à ces arguments est suffisamment concrète et ne met pas en évidence une absence de motifs justifiant d'infirmer la décision, mais seulement une affirmation de la part de l'intimée que de tels motifs ne seraient pas convaincants. Toutefois, la question de savoir si ces arguments sont convaincants ou non ou prétendument incohérents avec d'autres affirmations faites par la titulaire n'est pas une question de recevabilité mais relève de l'examen quant au fond.

1.8 Dans sa lettre en date du 11 mars 2024, au point 9, l'intimée estime que le recours est irrecevable parce que le mémoire de recours ne contient pas d'explication sur les raisons pour lesquelles le brevet en litige et les requêtes subsidiaires satisferaient aux autres exigences de la Convention énoncées à l'article 101(3) CBE. Par conséquent, selon l'intimée, le mémoire de recours ne satisfait pas aux exigences de l'article 108 CBE, troisième phrase et de la règle 99(2) CBE telles que reprises dans l'article 12(3) RPCR.

La chambre n'est pas convaincue par cette affirmation.

Un recours est recevable si les conditions de recevabilité existent relativement à une seule requête. Selon la CBE, il n'y a pas de « recevabilité partielle », voir la Jurisprudence des Chambres de recours, 10**(e) édition, juillet 2022 (« JCR »), V.A.2.6.8.

Quand un recours est recevable, les conséquences légales d'une absence, dans le mémoire de recours, d'arguments concernant la brevetabilité du brevet opposé dans la version des requêtes subsidiaires sont codifiées selon l'article 12 RPCR, notamment les paragraphes (4) et (5). Ces dispositions donnent à la chambre de recours le pouvoir discrétionnaire de ne pas prendre en considération les requêtes subsidiaires, mais ne prévoient pas l'irrecevabilité du recours dans son ensemble comme conséquence juridique.

1.9 À la lumière de ce qui précède, force est de constater que le recours satisfait aux exigences des articles 106 à 108 CBE et de la règle 99 CBE. Il est donc recevable.

2. Allégation de vice de procédure et requête en remboursement de la taxe de recours

2.1 La requérante fait grief à la division d'opposition d'avoir commis un vice de procédure substantiel. Selon la requérante il n'a pas (mémoire de recours), ou du moins pas suffisamment (lettre en date du 7 septembre 2022), été discuté que plusieurs méthodes pouvaient être utilisées pour mesurer le paramètre densité et pouvaient aboutir à des résultats différents. Ceci est, selon la requérante, contraire au droit à être entendu au titre de l'article 113(1) CBE et constitue donc un vice de procédure, ce qui devrait conduire au remboursement de la taxe de recours.

2.2 Les arguments de la requérante ne convainquent pas la chambre.

En ce qui concerne la requête principale, la décision contestée repose sur les motifs indépendants a) et b) énoncés au paragraphe 3.3 ci-dessus. Même si l'on suppose que la requérante n'ait pas pu prendre position sur le motif b), le motif a) de la décision contestée aurait toujours mené à la révocation du brevet objet du litige. Il s'ensuit que même dans l'hypothèse où la chambre accepterait la présence d'un vice de procédure, ce vice ne serait ni un vice substantiel au sens de la règle 103(1)a) CBE, ni un vice majeur au sens de l'article 11 RPCR. En effet, en règle générale, un lien de causalité doit exister entre le vice substantiel de procédure allégué et la décision de l'instance du premier degré qui a rendu nécessaire la formation d'un recours (JCR, V.A.11.7.1). Or, dans le cas d'espèce, ce lien n'a pas été établi. Un vice de procédure qui n'est pas substantiel ne saurait pas justifier le remboursement de la taxe de recours.

2.3 Par souci d'exhaustivité, la chambre remarque qu'elle n'est pas convaincue que la procédure devant la division d'opposition soit entachée d'un vice de procédure.

La titulaire connaissait l'objection sur laquelle repose le motif b) de la décision contestée:

L'intimée a présenté, à la page 30 de sa lettre du 9 avril 2021 au point 27, l'argument que, pour qu'une revendication soit claire et satisfasse à la condition (ii) de la partie F-IV, 4.11 des Directives relatives à l'examen pratiqué à l'Office européen des brevets, toutes les méthodes de mesure connues pour déterminer un paramètre, dans le domaine technique pertinent, doivent aboutir au même résultat, avec un degré adéquat de précision.

L'intimée estime, au paragraphe se trouvant entre les pages 33 et 34, au point 29, que les structures de dimensions submicroniques sont, de par leur extrême petitesse, très incertaines non seulement dans leurs dimensions telles que fabriquées mais aussi dans leurs dimensions telles que mesurées. La combinaison des deux contraintes fait qu'une méthode à résultat non dimensionnel ne permettrait certainement pas d'aboutir à un degré de précision adéquat.

De surcroît, lors de la procédure orale devant la division d'opposition, la clarté de la requête principale a été discutée pendant à peu près une heure, entre 10h23 et 11h27 (voir les points 5.11 et 6.16 du procès-verbal). De plus, selon le point 12 du procès-verbal, les parties n'avaient pas de requêtes supplémentaires.

La requérante a donc eu l'occasion de prendre position, par écrit en réponse à la lettre de l'intimée mentionnée ci-dessus, aussi bien que lors de la procédure orale.

3. Requête principale - défaut de clarté

3.1 La revendication 1 selon la requête principale ne satisfait pas aux exigences énoncées à l'article 84 CBE.

3.2 L'intimée estime que la requête principale ne devrait pas être admise en vertu de l'article 12(5) RPCR (voir la lettre du 11 mars 2024, point 11). La chambre n'est pas convaincue par cet argument pour des raisons analogues à celles présentées dans le contexte de la discussion de la recevabilité du recours ci-dessus.

3.3 Dans la présente procédure de recours faisant suite à une opposition, la conformité aux exigences de l'article 84 CBE ne peut être examinée que dans la mesure où la modification de la revendication 1 selon la requête principale, à savoir l'ajout de la caractéristique « une densité des structures formées sur la surface structurée variant entre 15% et 80% de la surface », aboutit à une violation de l'article 84 CBE. (voir l'exergue de la décision G 0003/14.)

3.4 L'intimée estime à juste titre que la densité est une grandeur physique dimensionnelle tandis que le paramètre « densité » tel que revendiqué est non dimensionnel. Ce dernier vise plutôt à exprimer le rapport entre deux surfaces. Cela représente un premier défaut de clarté.

En dehors de la question de l'admission de ces documents, la chambre note que les auteurs des documents E2 et E4 utilisent l'expression « densité » comme désignant un rapport entre deux surfaces. Toutefois, deux publications individuelles, qui semblent employer un jargon scientifique, ne peuvent pas établir que l'expression « densité » serait généralement acceptée comme désignant le rapport de deux surfaces dans le domaine technique de la revendication 1.

3.5 Même si l'on supposait que ce soit le cas, afin de pouvoir déterminer si une personne du métier travaille dans le domaine couvert par la revendication, la détermination du paramètre « densité » devrait être sans ambiguïté.

L'intimée fait valoir à juste titre aux points 144 à 147 de sa réponse du 14 mars 2022 que la personne du métier est confrontée à une incertitude en ce qui concerne la surface qui sert de dénominateur pour le calcul du rapport des surfaces. La revendication fait référence à trois surfaces:

- les surfaces de la première ou seconde zone fonctionnelle,

- la surface exposée,

- la surface structurée.

La caractéristique ajoutée à la revendication

« une densité des structures formées sur la surface structurée variant entre 15% et 80% de la surface » (soulignement par la chambre)

est ambigüe car elle n'indique pas à laquelle des trois surfaces figurant dans la revendication se réfère « la surface » qui sert de dénominateur du paramètre « densité ».

La désignation délibérément différente des trois surfaces semble indiquer qu'elles sont de tailles différentes. Même si l'on supposait que toute la surface de la zone fonctionnelle soit exposée pour la gravure, il ne s'ensuit pas que la surface structurée après gravure soit forcément identique à la surface de la zone fonctionnelle et de la surface exposée.

3.6 Les arguments de la requérante ne convainquent pas la chambre.

La requérante donne comme explication que le rapport surfacique se réfère à « la surface avant le gravage ». Toutefois, cette définition ne figure pas dans la revendication. De plus, cette explication n'établit aucun rapport entre la surface avant gravure et une des surfaces figurant dans la revendication.

Lors de la procédure orale devant la division d'opposition (voir les points 6.7 et 6.8 du procès-verbal), la requérante a fait valoir que la surface à considérer serait la surface de contact avec l'autre zone fonctionnelle. Cette explication repose sur l'hypothèse que la surface de la zone fonctionnelle et la surface structurée sont de taille identique. La revendication n'est cependant pas limitée à ce cas d'espèce. La requérante a au contraire choisi des désignations différentes pour ces surfaces, incluant ainsi dans la portée de la revendication le cas dans lequel elles sont de tailles différentes.

La requérante estime que la microscopie à force atomique (dénommée « AFM » par la suite) représenterait la seule méthode pour déterminer le paramètre revendiqué et qu'elle permettrait de mesurer la taille de la surface non-modifiée et celle de la surface gravée. De plus, selon elle, les logiciels de microscopie à force atomique permettraient également de déterminer directement le rapport entre la surface non modifiée et la surface structurée.

Cependant, le problème réside précisément dans le fait qu'il manque une définition de la surface de référence. Certes, il est possible d'effectuer une mesure d'une partie d'une surface correspondant à la gamme de balayage des actuateurs piézoélectriques d'un microscope à force atomique. Une telle mesure est montrée à la page 10 du mémoire de recours reproduisant la figure 3.2.3 du document E3. Toutefois, cette surface mesurée ne correspond à aucune des surfaces qui figurent dans la revendication. Il s'agit d'abord de déterminer, étant donné que l'on a ici un composant d'un système horloger, la surface de sa zone fonctionnelle, la surface exposée et la surface structurée. Ni la surface de la zone fonctionnelle ni la surface structurée ne sont clairement définies. La mesure d'une surface dont l'étendue est définie par le microscope à force atomique employé ne permet pas de conclure à la densité au sens de la revendication dans la surface structurée entière.

La chambre note, par souci d'exhaustivité, qu'elle n'est pas convaincue par l'argument selon lequel l'AFM serait la seule technique qui pourrait être utilisée pour déterminer les surfaces qui entrent dans le calcul du paramètre. Ce point de vue repose sur l'hypothèse non convaincante qu'une seule technique doit être capable de déterminer à la fois l'étendue des surfaces dans toute la gamme revendiquée et la polarité des structures et qu'elle doit être non-destructrice. Or, il est seulement nécessaire qu'une technique puisse déterminer l'étendue des surfaces pertinentes.

3.7 En dehors de sa recevabilité, la déclaration d'expert (le document E1) n'apporte aucun élément permettant de clarifier la définition des surfaces.

L'affirmation selon laquelle « un pourcentage compris entre 15 % et 80 % signifie que la surface originale et certaines structures sont toujours visibles » est complètement qualitative. Or, il s'agit de définir de manière claire un rapport quantitatif.

La déclaration contient, comme paraphrase de la caractéristique dans le cas en l'espèce « [l]es tomates occupent 60% de la surface de mon jardin ». Toutefois, un jardin représente une surface clairement définie, contrairement au cas de l'objet de la revendication 1.

La déclaration fait valoir que, en ce qui concerne la variabilité des résultats, si les différentes techniques sont bien calibrées et utilisées par une personne compétente, les résultats pour la polarité de surface (sic!) devraient être les mêmes. La chambre ne peut que répéter que le problème de clarté réside dans l'absence de définition claire concernant la surface de référence. Ce problème est indépendant de l'instrument utilisé ou de sa calibration et aussi de la détermination de la polarité.

La déclaration contient des considérations concernant l'impact de la résolution latérale de différentes techniques sur la précision de la mesure des surfaces. Cela ne résout pas le problème de la revendication, qui, encore une fois, est l'absence d'une définition de la surface de référence.

4. Requêtes subsidiaires

4.1 La requérante n'a pas présenté de requête explicite concernant les requêtes subsidiaires au-delà de leur admission dans la procédure. La chambre interprète la présentation des requêtes subsidiaires au moins comme une requête implicite de maintenir le brevet litigieux sur la base des revendications selon ces requêtes subsidiaires.

4.2 En dehors de la question de savoir si les requêtes subsidiaires devraient être prises en compte (voir notamment l'article 12(6), première phrase, RPCR, pour les requêtes subsidiaires 1 à 12 et l'article 12(6), deuxième phrase, RPCR, pour les requêtes subsidiaires 13 à 15), la caractéristique de la revendication 1 selon la requête principale qui aboutit à une non-conformité aux exigences de l'article 84 CBE, est présente dans toutes les revendications indépendantes selon les requêtes subsidiaires 1 à 15. Les autres modifications apportées aux requêtes subsidiaires ne sont pas de nature à clarifier la définition du paramètre « densité » qui ne satisfait pas aux exigence de l'article 84 CBE.

Par conséquent, aucune des requêtes subsidiaires n'est conforme aux exigences énoncées à l'article 84 CBE.

5. En vue de ce qui précède, il ne peut être fait droit au recours sur aucune des requêtes en instance.

6. Requête en renvoi pour suite à donner

6.1 Selon l'article 111(1) CBE, à la suite de l'examen au fond du recours, la chambre de recours statue sur le recours. Elle peut soit exercer les compétences de l'instance qui a rendu la décision attaquée, soit renvoyer l'affaire à ladite instance pour suite à donner.

Selon l'article 11 RPCR, la chambre ne renvoie l'affaire pour suite à donner à l'instance qui a rendu la décision attaquée que si des raisons particulières le justifient. En règle générale, la présence de vices majeurs entachant la procédure de cette instance constitue une raison particulière.

6.2 La chambre ne considère pas que la procédure d'opposition est entachée d'un vice majeur au sens de l'article 11 RPCR, comme expliqué au point 2. des motifs ci-dessus.

Étant donné que la chambre ne peut pas faire droit au recours parce qu'aucune des requêtes remplit les conditions de la CBE, il n'y a aucun objet auquel la division d'opposition pourrait donner suite.

La chambre ne peut donc évidemment pas faire droit à la requête en renvoi conformément à l'article 111(1), seconde phrase, CBE.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté.

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