T 1433/19 () of 4.9.2023

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2023:T143319.20230904
Date de la décision : 04 Septembre 2023
Numéro de l'affaire : T 1433/19
Numéro de la demande : 12290207.5
Classe de la CIB : H04N 9/76
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 489 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Procédé et dispositif de superposition en temps réel d'images issues d'au moins deux flux vidéo
Nom du demandeur : MBDA France
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.5.04
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
Rules of procedure of the Boards of Appeal 2020 Art 013(2)
European Patent Convention Art 56
Mot-clé : Modification après signification d'une citation à une procédure orale
Modification après signification - circonstances exceptionnelles (non)
Activité inventive - (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0049/04
T 1023/06
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le présent recours a été formé contre la décision de la division d'examen datée du 8 janvier 2019 rejetant la demande de brevet européen n° 12 290 207.5 publiée sous le numéro EP 2541942 A1.

II. La décision faisant l'objet du recours cite les documents suivants:

D1: US 2009/0310023 A1

D2: EP 1 521 458 A1

D3: US 2003/0184556 A1

D4: US 2003/0184553 A1

III. La décision faisant l'objet du recours est fondée sur les motifs suivants:

- Les revendications 1 et 10 de la requête principale alors au dossier ne satisfaisaient pas à l'exigence de clarté de l'article 84 CBE.

- L'objet des revendications des requêtes principale et subsidiaire alors au dossier n'impliquait pas d'activité inventive compte tenu des divulgations des documents de l'état de la technique D1 et D2 et des connaissances générales de la personne du métier (articles 52(1) et 56 CBE).

IV. Avec le mémoire de recours, la requérante (demanderesse) a déposé des revendications selon une requête principale et une première et une deuxième requêtes subsidiaires.

La requérante a requis l'annulation de la décision attaquée et la délivrance du brevet sur la base des revendications de la requête principale, de la première requête subsidiaire ou de la deuxième requête subsidiaire, toutes déposées avec le mémoire de recours. À titre de précaution, la requérante a également requis la tenue d'une procédure orale.

V. La chambre a envoyé à la requérante une citation à une procédure orale et une notification au titre de l'article 15(1) RPCR 2020. Dans cette notification, la chambre a présenté l'avis provisoire selon lequel le procédé de la revendication 1 de la requête principale et des première et deuxième requêtes subsidiaires était dépourvu d'activité inventive par rapport aux documents D1 et D2.

Dans la notification, la chambre a également noté que le document D3 cité dans la décision n'était pas le même que le document D3 cité par la division d'examen dans la notification du 2 mai 2018. Pour éviter toute confusion, la chambre a décidé de renommer ce dernier D5 (FR 2 900 261 A1).

VI. Par lettre datée du 30 juin 2023, la requérante a déposé des revendications modifiées selon une requête principale (Annexe 1B) et une requête principale alternative (Annexe 4B) et a maintenu les première et deuxième requêtes subsidiaires déposées avec le mémoire de recours. À la page 3 de cette lettre, la requérante a également exprimé l'intention de revenir à la requête principale déposée avec le mémoire de recours si la chambre n'acceptait pas les deux nouvelles requêtes principales (Annexes 1B et 4B).

VII. La procédure orale s'est tenue le 4 septembre 2023 par visioconférence. Lors de la procédure orale, la requérante a retiré deux de ses requêtes.

Les requêtes finales de la requérante étaient l'annulation de la décision attaquée et la délivrance d'un brevet européen sur la base des revendications de la requête principale déposée comme requête principale 1B par lettre datée du 30 juin 2023, de la première requête subsidiaire, déposée comme requête principale avec le mémoire de recours, ou de la deuxième requête subsidiaire déposée avec le mémoire de recours.

A la fin de la procédure orale, la Présidente a annoncé la décision de la chambre.

VIII. La revendication 1 selon la requête principale s'énonce comme suit:

"Procédé de superposition en temps réel d'images issues d'au moins deux flux vidéo, procédé selon lequel on réalise, de façon automatique et répétitive, la suite d'opérations successives suivante :

a) on reçoit une première image (I1) faisant partie d'un premier flux vidéo, ladite première image (I1) comportant une scène réelle filmée représentant un paysage ;

b) on reçoit une pluralité de secondes images (I2) faisant partie d'une pluralité de seconds flux vidéo,

lesdites secondes images illustrant chacune une cible virtuelle,

à l'étape b), pour chaque pixel de chacune desdites secondes images (I2), une partie de la représentation numérique des trois composantes définissant la couleur constituant le pixel étant affectée, à une composante alpha contenant une information relative à la transparence et permettant sa gestion, de manière à obtenir une image codée ;

c) on superpose lesdites secondes images (I2) à ladite première image (I1),

en ce que, au niveau d'une carte d'électronique numérique (9) :

- on décode ladite image codée pour extraire l'information relative à la transparence ; et

- on fusionne ladite image ainsi décodée et ladite première image (I1), en tenant compte de ladite information relative à la transparence, l'image (I3) résultant de cette fusion étant affichée à l'étape d),

lesdites secondes images (I2) étant de type virtuel et étant synchronisées sur ladite première image (I1) ; et

d) on affiche l'image (I3) résultant de la fusion."

IX. La revendication 1 selon la première requête subsidiaire s'énonce comme suit:

"Procédé de superposition en temps réel d'images issues d'au moins deux flux vidéo, procédé selon lequel on réalise, de façon automatique et répétitive, la suite d'opérations successives suivante :

a) on reçoit une première image (I1) faisant partie d'un premier flux vidéo, ladite première image (I1) comportant une scène réelle filmée représentant un paysage ;

b) on reçoit une pluralité de secondes images (I2) faisant partie d'une pluralité de seconds flux vidéo, lesdites secondes images illustrant chacune une cible virtuelle ;

c) on superpose lesdites secondes images (I2) à ladite première image (I1) ; et

d) on affiche cette superposition,

procédé selon lequel de plus :

- à l'étape b) on affecte, pour chaque pixel de chacune desdites secondes images (I2), une partie de la représentation numérique des trois composantes définissant la couleur constituant le pixel, à une composante alpha contenant une information relative à la transparence et permettant sa gestion, de manière à obtenir une image codée ;

- à l'étape c), au niveau d'une carte d'électronique numérique (9) :

· on décode ladite image codée pour extraire l'information relative à la transparence ; et

· on fusionne ladite image ainsi décodée et ladite première image (I1), en tenant compte de ladite information relative à la transparence, l'image (I3) résultant de cette fusion étant affichée à l'étape d) ; et

- lesdites secondes images (I2) sont de type virtuel et elles sont synchronisées sur ladite première image (I1) à l'étape c)."

X. La revendication 1 selon la deuxième requête subsidiaire s'énonce comme suit (par rapport à la revendication 1 de la première requête subsidiaire, le texte ajouté est souligné, le texte supprimé est [deleted: barré]):

"Procédé de superposition en temps réel d'images issues d'au moins deux flux vidéo, procédé selon lequel on réalise, de façon automatique et répétitive, la suite d'opérations successives suivante :

a) on reçoit une première image (I1) faisant partie d'un premier flux vidéo, ladite première image (I1) comportant une scène réelle filmée représentant un paysage ;

b) on reçoit une pluralité de secondes images (I2) faisant partie d'une pluralité de seconds flux vidéo, lesdites secondes images illustrant chacune une cible virtuelle ;

c) on superpose lesdites secondes images (I2) à ladite première image (I1) ; et

d) on affiche cette superposition,

procédé selon lequel de plus :

- à l'étape b) on affecte, pour chaque pixel de chacune desdites secondes images (I2), une partie de la représentation numérique des trois composantes définissant la couleur constituant le pixel, à une composante alpha contenant une information relative à la transparence et permettant sa gestion, de manière à obtenir une image codée, les bits de la composante alpha étant répartis de façon non uniforme sur les trois composantes de couleurs constituant le pixel en privilégiant une couleur ;

- à l'étape c), au niveau d'une carte d'électronique numérique (9) :

· on décode ladite image codée pour extraire l'information relative à la transparence ; [deleted: et]

· on fusionne ladite image ainsi décodée et ladite première image (I1), en tenant compte de ladite information relative à la transparence, l'image (I3) résultant de cette fusion étant affichée à l'étape d) ; et

· on réalise des traitements complémentaires sur l'image fusionnée ; et

- lesdites secondes images (I2) sont de type virtuel et elles sont synchronisées sur ladite première image (I1) à l'étape c)."

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

L'invention

2. La présente invention concerne un procédé et un dispositif de superposition en temps réel d'images issues d'au moins deux flux vidéo, avec une gestion de la transparence entre ces images (pour de la réalité augmentée par exemple).

Requête principale - admission dans la procédure

3. En l'espèce, la citation à la procédure orale a été signifiée après la date d'entrée en vigueur du Règlement de procédure des chambres de recours 2020 (RPCR 2020), soit le 1er janvier 2020 (article 24(1) RPCR 2020). Ainsi, conformément à l'article 25(1) et (3) RPCR 2020, l'article 13(2) RPCR 2020 s'applique à la question de savoir s'il faut admettre les revendications modifiées selon la requête principale de la requérante, qui ont été déposées après la signification de la citation à la procédure orale. Les revendications modifiées de la requête principale sont donc des modifications au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.

4. Selon l'article 13(2) RPCR 2020, "[t]oute modification des moyens présentée par une partie ... après la signification d'une citation à une procédure orale n'est, en principe, pas prise en compte, sauf en cas de circonstances exceptionnelles, que la partie concernée a justifiées avec des raisons convaincantes."

Les remarques explicatives suivantes relatives à l'article 13(2) RPCR 2020 sont données dans Règlement de procédure des chambres de recours 2020, Publication supplémentaire 2 - JO OEB 2020:

"Selon le principe de base du troisième niveau de l'approche convergente, les modifications apportées aux moyens invoqués par une partie ne doivent pas être prises en compte à ce stade de la procédure de recours. Il est toutefois prévu une exception limitée : une partie doit en ce cas présenter des raisons impérieuses qui expliquent clairement pourquoi les circonstances ayant conduit à la modification sont bel et bien exceptionnelles dans le recours en question ("raisons convaincantes"). Par exemple, si une partie fait valoir que la chambre a soulevé une objection pour la première fois dans une notification, elle doit expliquer précisément pourquoi cette objection est nouvelle et ne relève pas des objections précédemment soulevées par la chambre ou une partie."

5. Selon la requérante, la revendication 1 de la requête principale est une réécriture de la revendication 1 de la requête principale déposée avec le mémoire de recours pour des raisons de clarté sans modifier sa portée (voir point I.1 à la page 2 du mémoire de recours).

6. La chambre note qu'elle n'a pas soulevé d'objection de manque de clarté selon l'article 84 CBE dans la notification établie conformément à l'article 15(1) RPCR 2020. Par conséquent, les modifications de la requête principale ne peuvent être justifiées par une objection de manque de clarté soulevée pour la première fois dans la notification. La chambre ne voit donc aucunes "circonstances exceptionnelles" pouvant justifier l'admission de cette requête dans la procédure.

7. Pour les raisons susmentionnées, la chambre a décidé de ne pas admettre la requête principale dans la procédure de recours, exerçant son pouvoir d'appréciation selon l'article 13(2) RPCR 2020.

Première requête subsidiaire - remarque préliminaire

8. Les revendications de la première requête subsidiaire sont identiques à celles de la requête subsidiaire considérée dans la décision attaquée.

Première requête subsidiaire - activité inventive (articles 52(1) et 56 CBE)

9. État de la technique le plus proche

La requérante n'a pas contesté que le document D1 pouvait représenter l'état de la technique le plus proche (voir point I.3.A du mémoire de recours).

La chambre considère que le document D1 divulgue les caractéristiques suivantes de la revendication 1:

Procédé de superposition en temps réel d'images issues d'au moins deux flux vidéo [voir le "video composition model" résumé aux paragraphes 4 et 5 et illustré à la figure 2; le caractère "en temps réel" est implicite à la lumière, notamment, de la figure 2 et de l'expression "in a single pass" à la première phrase du paragraphe 23 et du fait que le flux d'images fusionnées est affiché sur un écran (paragraphe 51, "the output video may be communicated to the display device 120")], procédé selon lequel on réalise, de façon automatique et répétitive [implicite puisque réalisé image par image sans intervention manuelle], la suite d'opérations successives suivante:

a) on reçoit une première image faisant partie d'un premier flux vidéo [figure 2 et paragraphe 23: "receive input streams 201c, 201d and 201e"; paragraphe 24: "the video stream at the lowest z-order may be used for a background image" - un des flux vidéo est donc le flux de base, et peut être considéré comme un "premier flux video"], [deleted: ladite première image comportant une scène réelle filmée représentant un paysage];

b) on reçoit une pluralité de secondes images faisant partie d'une pluralité de seconds flux vidéo [figure 2 et paragraphe 23: "receive input streams 201c, 201d and 201e"; paragraphe 24: "the video stream at the lowest z-order may be used for a background image" - un des flux est le flux de base comme indiqué ci-dessus, les flux restants représentent "une pluralité de seconds flux vidéo"], [deleted: lesdites secondes images illustrant chacune une cible virtuelle];

c) on superpose lesdites secondes images à ladite première image [figure 2 et paragraphe 6, ainsi que paragraphes 50 et 51 et les étapes 506 et 508 de la figure 5]; et

d) on affiche cette superposition [paragraphe 51: "the output video may be communicated to the display device 120"],

procédé selon lequel de plus :

- à l'étape b) on affecte, pour chaque pixel de chacune desdites secondes images, [deleted: une partie de la représentation numérique des trois composantes définissant la couleur constituant le pixel, à] une composante alpha contenant une information relative à la transparence et permettant sa gestion ["per-pixel alpha", "alpha channel data (e.g., ARGB32)" et "each input stream may have a per-pixel alpha" aux paragraphes 40 et 51: une composante alpha est affectée à chaque pixel de chacune desdites secondes images], de manière à obtenir une image codée [la Table 1 au paragraphe 49 divulgue que deux des seconds flux vidéo comprennent des bits alpha indiquant un niveau de transparence; en outre, les expressions "an alpha value specified in the background color" au paragraphe 24 et "ARGB32" au paragraphe 40 indiquent que les images comportent 32 bits par pixels: 8 bits alpha et 8 bits pour chacune des couleurs R, G et B; les images comprenant des bits alpha peuvent donc être considérées comme étant des images codées par l'ajout des bits alpha];

- à l'étape c), au niveau d'une carte d'électronique numérique [paragraphe 18, "video graphic card"]:

· on décode ladite image codée pour extraire l'information relative à la transparence [implicite puisque les bits alpha doivent être déterminés pour chaque image: voir étape 506 de la figure 5]; et

· on fusionne ladite image ainsi décodée et ladite première image, en tenant compte de ladite information relative à la transparence, l'image résultant de cette fusion étant affichée à l'étape d) [paragraphes 39, 40 et 51 et étape 508 de la figure 5]; et

- lesdites secondes images sont de type virtuel [paragraphe 49, Table 1, "Closed captions" et "Presentation graphics" sont des images de type virtuel] et elles sont synchronisées sur ladite première image à l'étape c) [paragraphe 25: les flux vidéos ont le même "frame rate" en sortie. Les images des différents flux sont donc synchronisées].

10. Caractéristiques distinctives

10.1 Pour les raisons ci-dessus, la chambre considère que le procédé de la revendication 1 diffère du procédé du document D1 par les caractéristiques suivantes:

(i) "ladite première image comportant une scène réelle filmée représentant un paysage" et "lesdites secondes images illustrant chacune une cible virtuelle"; et

(ii) on affecte, pour chaque pixel de chacune desdites secondes images, "une partie de la représentation numérique des trois composantes définissant la couleur constituant le pixel à" une composante alpha.

10.2 Ces caractéristiques distinctives sont les mêmes que celles identifiées par la division d'examen (voir point 1.2.1 des motifs de la décision).

10.3 La requérante n'a pas contesté la caractéristique distinctive (i). Par contre, elle a considéré que la caractéristique distinctive (ii) était plus large qu'avancé par la chambre en ce que l'affectation ("on affecte") d'une composante alpha à chaque pixel n'était pas divulguée dans D1. La requérante a également fait valoir que le verbe "affecter" impliquait que la composante alpha était intégrée dans chaque pixel.

10.4 La chambre ne partage pas l'avis de la requérante pour les raisons suivantes.

Les expressions "per-pixel alpha" aux paragraphes 6, 40 et 51 de D2 divulgue clairement que des bits alpha (codant la transparence) sont associés à chaque pixel des secondes images. Le verbe "affecter" n'implique pas nécessairement une intégration des bits alphas dans chaque pixel; il couvre également une association des bits alpha avec chaque pixel, comme c'est le cas dans le document D2.

11. Effet technique

11.1 Concernant la caractéristique distinctive (i)

11.1.1 La caractéristique distinctive (i) précise que la première image comporte une scène réelle filmée représentant un paysage et que les secondes images illustrent chacune une cible virtuelle. Autrement dit, la caractéristique (i) définit le contenu cognitif de ces images.

La caractéristique (i) n'apporte aucune information technique sur les premières et secondes images, ni explicitement, ni implicitement. Le fait qu'une image représente une scène réelle filmée ou une image virtuelle générée par ordinateur ne dit rien sur les données fonctionnelles de l'image telle que son format (par exemple JPEG, PNG, GIF,...), sa résolution ou son codage des couleurs.

Par conséquent, la caractéristique (i) est, a priori, non-technique (voir Jurisprudence des Chambres de recours de l'Office européen des brevets, 10ème édition 2022, "Jurisprudence", I.D.9.2.10.c). Toutefois, afin de s'en assurer, il convient d'examiner si cette caractéristique produit un effet technique.

Quant à l'effet de la caractéristique (i), c'est-à-dire l'effet dû à la superposition de cibles virtuelles sur une scène réelle filmée représentant un paysage, il relève de la présentation d'information et ne produit un effet que dans l'esprit humain. Conformément à la jurisprudence établie, cet effet est non-technique (voir Jurisprudence, I.D.9.2.10 et I.D.9.2.10.a).

11.1.2 La requérante a avancé que l'effet technique de la caractéristique (i) était que "la scène vidéo affichée puisse être la plus réelle et la plus cohérente possible" et que la représentation vidéo soit "appropriée à une simulation d'entraînement au tir" (voir page 3 du mémoire de recours).

11.1.3 La chambre ne conteste pas que la caractéristique (i) puisse produire les effets ci-dessus, mais considère qu'ils ne sont pas de nature technique. En effet, ces effets relèvent du domaine des présentations d'information et/ou des jeux, tous deux non-techniques (voir Jurisprudence, I.D.9.2.10 et I.D.9.2.14).

11.1.4 La requérante a également fait valoir que la superposition de cibles virtuelles sur une scène réelle filmée représentant un paysage augmentait la visibilité de l'affichage et que les décisions T 1023/06 et T 49/04 avaient établi qu'un tel effet était technique. À l'appui de l'existence de cet effet, la requérante a cité le passage suivant du document D5 (de la page 1, ligne 35 à la page 2, ligne 5):

"De ce fait, les yeux n'accommodent pas de la même façon en environnement virtuel et dans le monde réel. En réalité virtuelle, les objets semblent plus près ou plus loin qu'ils ne le sont en réalité, entraînant une désorientation causée par une surcharge sensorielle, un déficit visuel temporaire sérieux et des symptômes potentiellement incapacitants ressemblant au mal des transports."

11.1.5 La chambre note que la demande telle que déposée ne mentionne pas d'effet d'augmentation de la visibilité de l'affichage due à la superposition de cibles virtuelles sur une scène réelle filmée représentant un paysage. Elle note également que l'effet mentionné dans le document D5 (voir paragraphe ci-dessus) concerne le cas d'une image stéréoscopique, c'est-à-dire une image différente pour chaque oeil, alors que la présente demande ne fait aucune mention de vision stéréoscopique.

Pour ces raisons, la chambre n'est pas convaincue que l'effet mentionné dans le document D5 existe dans l'invention de la revendication 1. Au contraire, il semble que l'utilisation d'une scène réelle filmée représentant un paysage, qui comprend généralement plus de bruit et de détails qu'une scène virtuelle, aurait tendance à réduire la visibilité de l'affichage plutôt qu'à l'augmenter.

11.1.6 Etant donné que la chambre ne reconnaît pas l'existence d'un effet d'augmentation de la visibilité de l'affichage, les décisions T 1023/06 et T 49/04 citées par la requérante à l'appui du caractère technique de cet effet ne sont pas pertinentes et la chambre n'estime pas nécessaire de commenter leur contenu.

11.2 Concernant la caractéristique distinctive (ii)

11.2.1 La division d'examen a considéré que l'effet technique de la caractéristique distinctive (ii) était de fournir une solution alternative pour gérer la transparence (voir page 6, dernière phrase, de la décision).

11.3 La requérante a fait valoir que l'effet technique de la caractéristique (ii) était non seulement de fournir une solution alternative pour gérer la transparence mais aussi de diminuer la latence (voir, par exemple, le point B aux pages 3 et 4 du mémoire de recours).

11.3.1 La chambre considère que l'effet technique de la caractéristique (ii) est de gérer de manière alternative la transparence.

En ce qui concerne la latence, la chambre partage l'avis de la division d'examen qu'il n'y a pas de raison technique pour laquelle le codage de la transparence selon la caractéristique (ii) diminuerait la latence par rapport au codage de la transparence dans le document D1 (voir page 9, deuxièmes à quatrièmes alinéas, de la décision). En effet, le fait que les bits alpha de D1 soient transmis pour chaque pixel séparément des composantes de couleur du pixel, alors que les bits alpha de la revendication 1 sont intégrés dans les composantes de couleur, n'implique pas une latence plus élevée. Quant au fait que l'étape de superposition de la revendication 1 est réalisé par une carte d'électronique numérique, il ne permet pas non plus de conclure à une latence réduite par rapport à l'étape de superposition du document D1 qui est réalisée par un GPU (114) sur une carte graphique (112) (voir paragraphe 18 et figure 1).

11.4 Concernant l'absence de synergie entre les caractéristiques distinctives (i) et (ii)

La chambre considère qu'il n'y pas de synergie entre les caractéristiques distinctives (i) et (ii). La première concerne le contenu cognitif des images, la seconde concerne le codage de la transparence.

12. Problème(s) technique(s) objectif(s)

12.1 Problème technique objectif partiel de la caractéristique (i)

Selon la jurisprudence constante des chambres de recours de l'OEB (Jurisprudence, I.D.9.2.6, "approche COMVIK"), lorsque la revendication se réfère à un but à atteindre dans un domaine non technique, ce but peut être donné à la personne du métier et légitimement être énoncé dans la formulation du problème en tant que partie du cadre dans lequel s'inscrit le problème technique à résoudre, notamment en tant que contrainte à respecter.

En l'espèce, la chambre considère que le but non technique de superposer des cibles virtuelles sur une scène réelle filmée représentant un paysage peut légitimement être énoncé dans la formulation du problème technique objectif.

Par conséquent, la chambre est de l'avis que le problème technique objectif partiel de la caractéristique (i) est comment superposer des cibles virtuelles sur une scène réelle filmée représentant un paysage.

12.2 Problème technique objectif partiel de la caractéristique (ii)

À la lumière de l'effet technique de la caractéristique (ii) (voir point 11.3.1 ci-dessus), la chambre considère que le problème technique objectif partiel de la caractéristique (ii) est comment gérer de manière alternative la transparence.

12.3 Les problèmes techniques objectifs proposés par la requérante ne sont pas convaincants parce qu'ils se fondent sur des effets techniques, à savoir une augmentation de la visibilité de l'affichage ou une réduction de la latence, qui ne sont pas obtenus par l'objet de la revendication 1 pour les raisons données à la section 11. ci-dessus.

13. Inventivité

13.1 Caractéristique distinctive (i)

13.1.1 La personne du métier à qui l'on aurait confié, pour des raisons non techniques, le but de superposer des cibles virtuelles sur une scène réelle filmée représentant un paysage n'aurait aucune difficulté à choisir une première image représentant une scène réelle filmée représentant un paysage et des secondes images représentant des cibles virtuelles.

La personne du métier arriverait ainsi à la caractéristique distinctive (i) sans exercer d'activité inventive.

13.1.2 Les arguments de la requérante concernant la caractéristique distinctive (i) ne sont pas convaincants parce que fondés sur un effet technique qui n'est pas obtenu par l'objet de la revendication 1 pour les raisons données aux sections 11.1 et 12.1 ci-dessus.

13.2 Caractéristique distinctive (ii)

13.2.1 Le document de l'état de la technique D2 divulgue une manière alternative de gérer la transparence lors de la superposition de deux images. À la différence du document D1, les bits alpha (6 bits) codant la transparence d'une image ne sont pas transmis en plus des bits (24 bits) codant les trois couleurs RGB, mais à la place d'une partie des bits normalement utilisés pour coder les trois couleurs RGB (voir figure 6). Ainsi, une image codée ("synthetic image data Vd" aux figures 2 et 6) est obtenue, dans laquelle 2 bits alpha par couleur sont affectés au codage de la transparence: voir paragraphe 104 et figure 6.

Selon le document D2, l'avantage de cette solution par rapport à une solution du type divulgué dans le document D1(voir figure 1 et paragraphes 6 à 13 de D2) est qu'il n'est plus nécessaire d'avoir une mémoire tampon pour stocker les bits alpha puisque ceux-ci sont inclus dans le codage de la couleur (voir paragraphes 14 et 17 de D2). Les auteurs du document D2 admettent que cette solution a également un désavantage, à savoir une réduction du nombre de couleurs possibles puisque le nombre de bits codant la couleur de l'image superposée est réduit de 24 à 18 (paragraphe 136). Toutefois, ce désavantage est considéré comme acceptable lorsque l'image superposée représente, par exemple, une interface utilisateur (paragraphe 136).

13.3 La chambre partage l'avis de la division d'examen (voir le paragraphe faisant le lien entre les pages 7 et 8 de la décision) qu'il aurait été évident pour la personne du métier d'appliquer l'enseignement du document D2 au procédé du document D1 afin d'obtenir l'avantage susmentionné et d'arriver ainsi à la caractéristique distinctive (ii) sans activité inventive.

13.4 La requérante a fait valoir que même si la personne du métier combinait les enseignements des documents D1 et D2, elle n'arriverait pas l'objet de la revendication 1 pour les raisons suivantes.

Le paragraphe 142 de D2 divulgue que plusieurs secondes images peuvent être superposées sur une première image. Toutefois, l'expression "with one of the images being superposed in a translucent state on another or the other images" au paragraphe 143 indique qu'une seule de ces secondes images est transparente.

En appliquant cet enseignement du procédé du document D2 au procédé du document D1, la personne du métier n'arriverait donc pas à une pluralité de secondes images comprenant des bit alpha relatifs à la transparence dans les composantes couleur de leurs pixels.

13.5 La chambre n'est pas convaincue par ces arguments pour les raisons suivantes.

Le paragraphe 143 de D2 est indépendant du paragraphe 142 de D2 et ne constitue donc pas une limitation de la divulgation de ce dernier. En outre, même si cela était le cas, il serait évident pour la personne du métier que chacune des secondes images superposées mentionnées au paragraphe 142 de D2 pourraient inclure des bits alpha dans les composantes de couleur de leurs pixels selon l'enseignement du document D2.

13.6 Les autres arguments de la requérante concernant la caractéristique distinctive (ii) ne sont pas convaincants parce que fondés sur un effet technique qui n'est pas obtenu par l'objet de la revendication 1 pour les raisons données aux sections 11.2 et 12.2 ci-dessus.

14. Conclusion concernant l'activité inventive

Pour les raisons qui précèdent, la chambre considère que le procédé de la revendication 1 de la première requête subsidiaire est dépourvu d'activité inventive par rapport aux documents D1 et D2 (articles 52(1) et 56 CBE).

15. Conclusion concernant la première requête subsidiaire

Puisque l'objet de la revendication 1 de la première requête subsidiaire ne satisfait pas à l'exigence d'activité inventive des articles 52(1) et 56 CBE, la première requête subsidiaire n'est pas admissible.

Deuxième requête subsidiaire - activité inventive (articles 52(1) et 56 CBE)

16. La revendication 1 de la deuxième requête subsidiaire diffère de la revendication 1 de la requête principale par les caractéristiques additionnelles suivantes:

(1) on réalise des traitements complémentaires sur l'image fusionnée; et

(2) les bits de la composante alpha sont répartis de façon non uniforme sur les trois composantes de couleurs constituant le pixel en privilégiant une couleur.

17. Concernant la caractéristique (1)

La caractéristique additionnelle (1) est divulguée par D1 (voir blocks 222 et 224 de la figure 2 et paragraphes 41 et 42), ce qui n'est pas contesté par la requérante.

18. Concernant la caractéristique (2)

18.1 La chambre note que le texte du paragraphe 140 de D2 est le suivant:

"[0140] In case the image data takes the combination of brightness signal Y and color-difference signals R-Y and B-Y or the combination of brightness signal Y and color signal C as the image data format, the alpha data or alpha entry data is not equally divided but different numbers of bits may be embedded in the brightness signal Y and color-difference signals R-Y and B-Y or color signal C, respectively."

La chambre considère qu'il n'est grammaticalement pas entièrement clair dans cette phrase si la répartition non uniforme des bits alpha est entre la luminance et la chrominance ou, également entre les différentes composantes (couleurs) de la chrominance. Toutefois, dans les deux cas, la chambre considère que le paragraphe 140 de D2 enseigne qu'une répartition non uniforme des bits alpha est possible. À la lumière de cet enseignement, la chambre considère qu'il aurait été évident pour la personne du métier que différentes répartitions non-uniformes étaient possibles, y compris entre les différentes couleurs, selon les applications. Les avantages et désavantages de ces diverses répartitions non uniformes auraient été évidents pour la personne du métier et constituent donc des alternatives évidentes qui ne peuvent rendre l'objet revendiqué inventif.

18.2 La requérante a fait valoir que le document D2 ne prévoyait pas de privilégier l'une des trois couleurs. Selon la requérante (voir pages 9 et 10 du mémoire de recours), cette différence a pour effet technique d'augmenter la lisibilité de l'affichage. Le document D2 ne mentionne pas cet effet et donc ne suggère pas cette solution.

18.3 La chambre n'est pas convaincue par ces arguments pour les raisons suivantes.

Le document D2 enseigne que différentes répartitions non-uniformes étaient possibles, y compris entre la composante de Y et les composantes R-Y et B-Y. Il aurait donc été évident pour la personne du métier, selon les applications et les types d'images et les composantes de couleur définies dans différents espaces de couleur utilisées, de placer plus de bits alpha dans les couleurs auxquelles l'oeil humain est le moins sensible et moins de bits alpha dans les couleurs auxquelles l'oeil humain est le plus sensible. La personne du métier arriverait ainsi à des répartitions non-uniformes des bits alpha privilégiant l'une des trois couleurs.

19. Conclusion concernant l'activité inventive

Pour les raisons qui précèdent, la chambre considère que le procédé de la revendication 1 de la deuxième requête subsidiaire est dépourvu d'activité inventive par rapport aux documents D1 et D2 (articles 52(1) et 56 CBE).

20. Conclusion concernant la deuxième requête subsidiaire

Puisque l'objet de la revendication 1 de la deuxième requête subsidiaire ne satisfait pas à l'exigence d'activité inventive des articles 52(1) et 56 CBE, la deuxième requête subsidiaire n'est pas admissible.

Conclusion

21. Puisque la requête principale n'est pas admise dans la procédure et que les première et deuxième requêtes subsidiaires ne sont pas admissibles, le recours doit être rejeté.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté.

Quick Navigation