T 1243/17 (Procédé de pilotage/NAILLON) of 4.12.2020

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2020:T124317.20201204
Date de la décision : 04 Décembre 2020
Numéro de l'affaire : T 1243/17
Numéro de la demande : 99400939.7
Classe de la CIB : G06F9/44
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Procédé de pilotage d'un processus décisionnel lors de la poursuite d'un but dans un domaine d'application déterminé, tel qu'économique, technique organisationnel ou analogue et système pour la mise en oeuvre du procédé
Nom du demandeur : Naillon, Martine
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.5.06
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
blankCEDH Art 6(1)
Mot-clé : Activité inventive - (non)
Stagnation de la procédure d'examen sans explication - (oui)
Obligation de la requérante de raccourcir la procédure autant que possible remplie - (non)
Violation de l'article 6(1) CEDH - (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0001/05
G 0002/08
T 0261/88
T 0641/00
T 0315/03
T 0823/11
T 1824/15
T 2707/16
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 2805/19

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours est formé contre la décision de la division d'examen de rejeter la demande de brevet européen n° 99 400 939.7 en raison d'un manque de clarté selon l'article 84 CBE de la revendication 1 de la requête principale et de la deuxième requête subsidiaire, et de la non-conformité à l'article 123(2) CBE de la deuxième requête subsidiaire. Une première requête subsidiaire n'a pas été admise en application de la règle 137(3) CBE, en raison d'un manque de clarté prima facie selon l'article 84 CBE.

II. Un recours a été formé le 27 février 2017, et la taxe de recours a été reçue le 28 février 2017.

III. Avec un mémoire de recours, reçu le 28 avril 2017, la requérante a déposé des revendications selon une requête principale, basée sur celles de la deuxième requête subsidiaire de la décision, et a demandé la délivrance d'un brevet sur la base de ces nouvelles revendications. La requérante s'est plaint de la longueur de la procédure d'examen et a requis une procédure orale dans l'éventualité d'une opinion contraire de la chambre.

IV. Par une lettre datée du 2 mai 2017, la requérante a présenté des revendications 1 à 7 au titre d'une requête principale (intitulée "Revendication") ainsi qu'une revendication 1 subsidiaire (intitulée "Revendication subsidiaire") et un mémoire de recours modifié, qui diffère de la version originale par des modifications figurant à la page 3, deuxième paragraphe.

V. Dans une annexe à une convocation à la procédure orale la chambre a résumé son avis provisoire comme suit:

"La chambre estime que les revendications 1 et 5 des deux requêtes sont suffisamment claires (article 84 CBE 1973) pour que l'activité inventive puisse être évaluée (article 56 CBE 1973).

L'objet de la revendication 1 des deux requêtes semble être exclu de la brevetabilité en tant que méthode dans l'exercice d'activités intellectuelles (article 52(2)(c) CBE 1973).

L'objet des revendications 1 et 5 des deux requêtes ne produit pas un effet technique et ne semble pas résoudre un problème technique, de sorte qu'il manque d'activité inventive (article 56 CBE 1973).

La chambre note que la procédure d'examen, du moins entre le rapport de recherche et la première notification, a "stagné sans explication" pendant plus de huit ans, sans réclamation du demandeur qui a pourtant écrit à l'OEB pendant cette période au sujet de l'enregistrement d'une licence, alors qu'il est, selon la jurisprudence de la CEDH, censé raccourcir la procédure dans la mesure du possible. La chambre doute toutefois qu'une telle durée soit contraire à l'article 6, paragraphe 1, de la CEDH."

VI. Par une lettre datée du 17 juin 2020 la requérante a demandé le report de la procédure orale en raison des restrictions et précautions sanitaires imposées par la COVID-19. La chambre a donc renvoyé la procédure orale au 12 octobre 2020.

VII. Par une lettre datée du 9 octobre 2020 la requérante a retiré sa requête en procédure orale (voir la référence au "Retrait de la requête en procédure orale" sur le formulaire F1038 soumise par la requérante). La chambre a dès lors annulé la procédure orale.

VIII. Selon le dossier, la demande se présente comme suit:

Description (pour les deux requêtes):

pages 1 à 43, telles qu'elles ont été déposées à l'origine.

Revendications (toutes reçues le 2 mai 2017):

Requête principale : 1 à 7 ("Revendication").

Requête subsidiaire : 1 ("Revendication subsidiaire") ainsi que les revendications 2 à 7 de la requête principale.

Dessins (pour les deux requêtes):

Pages 1/4 à 4/4, telles que déposées à l'origine.

La revendication 1 de la requête principale se lit comme suit:

"Procédé de pilotage automatique d'un processus décisionnel pour la poursuite d'un but global dans un domaine d'application déterminé, suite à la détection d'une anomalie dans les données de ce domaine déterminé, et pour agir contre cette anomalie, le procédé comportant les opérations :

- de créer un réseau d'agents de traitement d'informations chacun pourvu de règles de but individuel et de stratégie, déterminées en fonction du but global, qui présente une structure hiérarchisée en forme d'une pyramide comportant un nombre prédéterminé de niveaux superposés dans lesquels sont disposés les agents de traitement d'informations, et qui sont organisés dans cette pyramide en boucles comportant chacune un agent fonctionnant en agent maître de la boucle, situé dans un niveau (n) de la pyramide et au moins un agent fils associé à l'agent maître et situé dans le niveau immédiatement en dessous (n-1), de manière à ce que la stratégie suivie par l'agent maître constitue le but individuel de l'agent fils, les boucles à la base de la pyramide étant des boucles d'analyse comportant chacun un agent d'analyse maître et, comme agent fils des agents cognitifs (FOC, LOC, VAL) créateurs d'objets de connaissance; les objets de connaissance ayant une structure prédéterminée qui comporte des champs destinés à l'inscription d'éléments de connaissance supplémentaires;

- de construire une boucle en amenant l'agent maître de la boucle à demander à un agent de structuration des services (C0TSs) préalablement établi, de lui envoyer les services qui vont constituer les agents fils destinés à mettre en ½uvre la stratégie qui lui est octroyée dans le cadre du but global et à un agent de structuration des données (COTSD) également préalablement établi, pour qu'il envoie les données dont les agents fils ont besoin pour mettre en ½uvre la stratégie de l'agent maître;

- de placer dans ce réseau d'agents au sommet de la pyramide un agent maître du groupe formé par l'ensemble des agents, qui comporte une interface Homme/Machine;

- d'établir à la base de la pyramide une première boucle comportant au moins un agent cognitif FOC, qui observe les données réelles du domaine de connaissance dans lequel peut se produire l'anomalie précitée, en les comparant à des données de référence, et qui est destinée à créer un objet de connaissance d'indice d'alerte (O1), déclenchant une première étape décisionnelle du processus décisionnel, lorsqu'ils détectent un écart entre les données réelles et les données de référence, supérieur à une valeur prédéterminée et ainsi représentatif d'une anomalie précitée,

- de faire monter selon des règles de retour l'objet de connaissance d'indice d'alerte à l'Agent Maître au sommet de la pyramide,

- de mettre en ½uvre une deuxième étape décisionnelle de validation de l'objet de connaissance (O1) d'indice d'alerte, selon des règles prédéterminées de validation, qui incluent le but global et cet objet de connaissance,

- d'établir au cours de cette deuxième étape décisionnelle au moins une deuxième boucle d'analyse des données d'un domaine de connaissances différent du domaine de connaissance de la première boucle, et susceptible de donner une autre vue sur l'anomalie, et qui permet d'ajouter à l'objet d'indice d'alerte des éléments de connaissance supplémentaires,

- de faire descendre l'objet de connaissance d'indice d'alerte et le but global, dans la deuxième boucle d'analyse avec les stratégies de validation transmises d'un agent à 1'autre.

- d'amener selon des règles de validation comportant le but global et l'objet de connaissance (O1) d'indice d'alerte, les agents cognitifs de cette boucle d'analyse (LOC, FOC, VAL) à rechercher s'il existe dans les données du domaine de connaissances différent un contexte en forme d'une propriété commune entre ces données et l'objet des connaissances d'indice d'alerte (O20), à créer dans l'affirmatif un objet de connaissances de contexte (O20), à rechercher s'il existe un écart supérieur à une valeur prédéterminée dans les données de l'objet de connaissances de contexte et dans l'affirmative, créer un objet de connaissance de type indice (O2), à rechercher s'il existe une corrélation en forme d'une caractéristique commune entre l'objet de connaissances d'indice d'alerte (O1) et les objets de connaissances de contexte (O20) et de type indice (O2) et de créer dans l'affirmative, un élément de connaissances supplémentaires à ajouter à l'objet de connaissances d'indice d'alerte par inscription dans un champ approprié de cet objet de connaissance, la corrélation ayant fait de l'objet d'indice (O2) un point d'appui.

- et de faire remonter l'objet de connaissance d'indice d'alerte muni des éléments de connaissances supplémentaires et les objets de connaissance de contexte et d'écart de données à l'Agent Maître au sommet de la pyramide,

- cet agent maître dispose alors d'un ensemble d'objets de connaissance provenant de boucles d'analyses dans des domaines de connaissance différents, reliés à l'objet de connaissance d'indice d'alerte, obtenu de façon automatique et accessible à l'homme par l'intermédiaire de l'interface Homme/Machine de l'agent maître."

IX. La revendication 1 selon la requête subsidiaire diffère de celle de la requête principale en ce que:

- à la fin du cinquième paragraphe ("- d'établir ...") la phrase suivante a été ajoutée:

"et un agent cognitif LOC destiné à établir s'il existe une propriété commune appelée contexte entre les données de l'objet de connaissances d'indice d'alerte (O1) et les données du domaine de connaissances et à créer dans l'affirmatif un objet de connaissances de contexte (O7), ce qui constitue un élément de connaissances supplémentaire qui sera ajouté à l'objet de connaissances d'indice d'alerte (O1) en enrichissant celui-ci",

- dans le dixième paragraphe ("- d'amener ...") l'expression "à rechercher s'il existe dans les données du domaine de connaissances différent un contexte" a été modifiée en "à préciser le contexte de l'objet d'indice d'alerte (O1) dans les données du domaine de connaissances différent";

- dans le douzième paragraphe le mot "construits" a été ajouté entre les mots "connaissance" et "provenant" et l'expression suivante a été ajoutée à la fin:"et qui donnent une visibilité à l'homme sur l'anomalie constatée, permettant à celui-ci d'intervenir, le cas échéant, sur la suite du processus décisionnel."

X. La revendication 5 des deux requêtes concerne un système pour la mise en oeuvre du procédé selon, entre autres, la revendication 1.

Motifs de la décision

1. La recevabilité du recours

Compte tenu des faits exposés aux points I à III ci-dessus, le recours remplit les critères de recevabilité au regard de la CBE et est donc recevable.

2. Résumé de l'invention

2.1 La présente invention concerne un procédé de pilotage d'un processus décisionnel lors de la poursuite d'un but dans un domaine d'application déterminé, tel qu'économique, technique, organisationnel ou analogue et un système pour la mise en oeuvre du procédé (voir premier paragraphe de la description).

2.2 La figure 1 illustre une "structure hiérarchisée d'un réseau d'agents de création d'objets de connaissances et d'agents constructeurs d'objets de connaissances, pour la mise en oeuvre du procédé de pilotage d'un processus décisionnel de l'invention" (voir page 3, lignes 22 à 26).

2.3 Le système se présente sous forme d'un réseau d'une multitude d'agents de traitement d'informations organisés, dans une structure hiérarchisée en forme d'une pyramide, en boucles dont chacune comporte un agent maître et au moins un agent fils, ce dernier constituant l'agent maître d'une boucle d'un niveau inférieur (voir page 4, lignes 3 à 22). Plus précisément, la pyramide sur la figure 1 comporte au sommet formant le niveau n un agent maître de groupe GM auquel sont associés dans l'exemple représenté trois agents fils, appelés agents utilisateurs maîtres UM qui forment le niveau inférieur n-1. Chaque agent UM pilote un certain nombre d'agents canal C formant le niveau n-2. A chaque agent C est associé au moins un agent de piste P alors du niveau n-3. Chaque agent P dispose d'au moins un agent d'analyse A du niveau n-4. A chaque agent d'analyse A sont associés un ou plusieurs agents appelés agents cognitifs AC qui ont pour fonction de capter ou détecter des informations contenues dans la scène représentative de l'application considérée, qu'ils observent.

3. Les objections suivantes ont, entre autres, été soulevées par la chambre dans l'annexe à la convocation à la procédure orale. Le requérant n'a présenté aucun argument supplémentaire en réaction à la convocation. La chambre ne voit donc aucune raison de modifier son appréciation du recours.

4. Activité inventive (article 56 CBE 1973)

Le procédé selon la revendication 1 et le système selon la revendication 5 couvrent des processus et systèmes décisionnels de contrôle n'ayant aucun effet technique et ne s'appliquant pas à un problème technique. La seule indication que le processus n'est pas effectué par des personnes est le terme "automatique". Le domaine d'application n'est pas spécifié dans les revendications, mais la description explique qu'il pourrait s'agir de domaines économiques ou organisationnels, domaines qui ne sont pas considérés techniques selon l'article 52(2) CBE. En outre, les revendications n'impliquent pas que, par exemple, l'invention améliore la vitesse, réduit la consommation de mémoire ou améliore la précision du procédé et du système revendiqués. L'objet des revendications 1 et 5, n'implique donc pas une activité inventive (article 56 CBE 1973; voir T 0641/00).

5. La durée de la procédure

5.1 La requérante considère que, conformément à la décision T 0823/11, un délai de cinq ans entre le rapport de recherche et la première notification, ainsi qu'un délai de deux ans entre une réponse à une notification et la notification suivante sont inacceptables. Dans la présente procédure, les délais ont été encore considérablement plus longs. De plus, selon cette jurisprudence, la lenteur de la procédure d'examen dans le cas présent devrait même être considérée comme constituant une violation de l'article 6(1) de la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH). La requérante n'a formulé aucune requête explicite fondée sur la durée de la procédure d'examen.

5.2 La chambre considère que la requérante demande implicitement que soit établie une violation de l'article 6(1) CEDH. Il est statué ci-dessous sur cette requête, même si la chambre estime que la CBE ne prévoit aucun correctif contre une telle violation (voir T 1825/15, point 2.2, et T 0315/03, point 15.6).

5.3 L'article 6(1) CEDH, première phrase, dispose que "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle". L'article 6(1) CEDH a également été reconnu par les chambres de recours de l'OEB comme pertinent pour les décisions rendues en vertu de la CBE, notamment dans le contexte de l'article 125 CBE, en tant qu'indicateur des principes de droit procédural généralement reconnus dans les États contractants (voir la décision intermédiaire dans l'affaire T 0261/88 (JO OEB 1992, 627, motifs, point 3.2, deux derniers paragraphes) ainsi que les décisions G 0001/05 (JO 2007, 362, motifs, point 22) et G 0002/08 (non publiée, motifs, point 3.3) de la Grande Chambre de Recours. Lorsque, par conséquent, l'article 6(1) CEDH est appliqué dans les procédures de l'OEB, cet article doit être interprété par l'OEB et ses chambres de recours. En particulier, l'OEB et ses chambres de recours doivent déterminer et décider si le "délai raisonnable" prévu à l'article 6(1) CEDH est respecté ou non.

5.4 La jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH)

La Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) résume sa propre jurisprudence concernant l'article 6 CEDH dans un document intitulé "Guide sur l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme - Droit à un procès équitable (volet civil)". La version actuelle (à la date du présent document, "Mis à jour au 30 avril 2020") est disponible à l'adresse Internet suivante:

https://echr.coe.int/Documents/Guide_Art_6_FRA.pdf

5.4.1 Selon le point 414, page 86 (toutes références étant relative à la version du 30 avril 2020), le point de départ du délai est en principe la date de saisine de la juridiction compétente, à moins que la saisine d'une autorité administrative constitue une condition préalable à la saisine du tribunal, auquel cas le délai peut inclure le durée de la procédure administrative préliminaire obligatoire. Selon le point 432, page 88, le requérant a le devoir d'exploiter les possibilités offertes par le droit interne pour abréger la procédure. Selon le point 423, page 87, les longues périodes de stagnation sans explication ne sont pas acceptables. Selon le point 440, page 89, les États membres devant organiser leur système judiciaire de manière à garantir le droit à une décision de justice dans un délai raisonnable, la surcharge de travail ne peut entrer en ligne de compte. Cependant, un engorgement passager du rôle n'engage pas la responsabilité de l'État s'il prend, avec une promptitude adéquate, les mesures propres à redresser pareille situation exceptionnelle.

5.4.2 La chambre n'est pas convaincue que la jurisprudence de la CEDH permet de conclure que la durée de la procédure d'examen auprès de l'OEB a vocation à être systématiquement prise en compte dans l'appréciation du délai raisonnable visé par l'article 6(1) CEDH, première phrase (voir à ce titre l'analyse de la décision Kristiansen and Tyvik As v. Norway du 2 mai 2013 aux points 2.3.8 et 2.3.9 de la décision T 1824/15 concernant le déroulé de la procédure devant l'office norvégien des brevets). La Chambre souligne notamment que si cette décision a retenu une violation du droit d'accès à un tribunal au titre de l'article 6(1) CEDH, elle ne s'est pas prononcée s'agissant d'une éventuelle violation du droit d'être entendu dans un délai raisonnable (voir point 58 de la décision). Par ailleurs, et contrairement aux faits de la cause ayant conduit à la décision susvisée - où existait déjà dans le cadre de la procédure administrative une "contestation" soumise aux chambres (non judiciaires) de recours de cet organisme (voir point 51) - la procédure d'examen considérée ici est une procédure purement non contentieuse et unilatérale, et donc préalable à l'existence d'une « contestation » permettant l'application de l'article 6(1) CEDH. La chambre est d'avis que cette analyse est conforme aux décisions de la CEDH citées dans Meyer-Ladewig, Europäische Menschenrechtskonvention, Handkommentar, 4ème édition, 2017, article 6, numéro marginal 194, première phrase et bas de page 704, comme aussi cité dans T 2707/16, motifs, point 27, et également avec le commentaire de l'auteur lui-même dans la seconde phrase.

5.4.3 Néanmoins, la chambre estime que les principes développés par la CEDH concernant la durée de la procédure fournissent un cadre utile pour évaluer la longueur de la procédure dans le cas présent.

5.5 La procédure d'examen

5.5.1 Le rapport de recherche européenne a été publié environ sept mois après la date de dépôt. Un délai d'environ huit ans s'est ensuite écoulé avant que la division d'examen n'émette sa première communication de fond. La requérante a ensuite demandé une prorogation de deux mois du délai de réponse.

5.5.2 Après la réponse au fond de la requérante du 30 septembre 2008, il y a eu un délai de trois ans (au cours duquel la requérante s'est enquis à deux reprises de la date de la prochaine notification et a été informée, le 1er octobre 2010, que le délai était dû à "la charge de travail actuelle") jusqu'à l'émission de la deuxième communication au fond le 26 juillet 2011. La requérante a ensuite demandé une nouvelle prorogation de deux mois du délai de réponse.

5.5.3 Après la réponse au fond de la requérante du 19 mai 2012, il y a eu un délai de quatre ans (au cours duquel la requérante s'est enquis de la date de la prochaine notification et a de nouveau été informée, le 12 octobre 2015, que le délai était dû à "la charge de travail actuelle") jusqu'à la notification, le 18 mai 2016, de la convocation à la procédure orale. La décision contestée a été rendue, après la procédure orale, sept mois plus tard.

5.5.4 Par conséquent, la décision attaquée a été rendue le 19 décembre 2016, soit 17 ans et 8 mois après la date du dépôt de la demande du 16 avril 1999.

5.6 Les actions de la requérante

5.6.1 Bien que la requérante ait demandé à trois reprises quand une communication pouvait être attendue (23 septembre 2010, 1er juillet 2011 et 7 octobre 2015), elle n'a jamais présenté de demande d'accélération au titre du programme PACE pour raccourcir la procédure. En particulier, au cours des huit années qui se sont écoulées entre la publication du rapport de recherche européenne (le 5 novembre 1999) et la première notification au fond (le 13 décembre 2007), la requérante n'a posé aucune question sur la durée de la procédure ni demandé une accélération, bien qu'elle ait entre-temps écrit à la division juridique de l'OEB concernant l'inscription d'une licence exclusive dans le registre européen des brevets et souligné la nécessité de l'inscrire "dans les meilleur délais" car le cas faisait l'objet de litige.

5.6.2 A deux reprises (15 avril 2008 et 25 novembre 2011), la requérante a également demandé une prorogation de deux mois (règle 84 CBE 1973) du délai de réponse à une action officiel, retardant ainsi directement la procédure de quatre mois supplémentaires.

5.7 Les actions de l'OEB

Le dossier n'indique pas pourquoi il y a eu un délai de huit ans avant que la division d'examen ne publie sa première notification au fond. Bien que la CBE ne fixe pas de délai à l'OEB pour émettre une telle communication, la procédure semble avoir "stagné sans explication" pendant cette période, selon les termes de la CEDH. La requérante, qui a pourtant écrit à l'OEB pendant cette période au sujet de l'enregistrement d'une licence, n'a cependant formulé aucune réclamation à ce sujet.

5.8 Conclusion sur la durée de la procédure d'examen

La chambre n'est pas convaincue que la durée de la procédure d'examen auprès de l'OEB a vocation à être systématiquement prise en compte dans l'appréciation du délai raisonnable visé par l'article 6(1) CEDH (voir point 5.4.2 ci-dessus). Pour autant, la chambre observe que la procédure d'examen, du moins entre le rapport de recherche et la première notification, a "stagné sans explication" pendant plus de huit ans, ce qui est normalement inacceptable (voir aussi T 0315/03, point 15.5, T 1824/15, point 2.3.13, et T 2707/16, points 18 à 24). Cependant, la requérante n'a pas formulé de réclamation contre cette stagnation, bien qu'elle ait écrit à l'OEB pendant cette période au sujet de l'enregistrement d'une licence, alors que, selon la jurisprudence de la CEDH, elle est censée raccourcir la procédure dans la mesure du possible. La chambre considère aussi qu'un demandeur a un devoir de coopération avec la division d'examen, devoir que la requérante n'a pas rempli dans le cas présent. Au demeurant, celle-ci n'a formulé aucune demande précise, notamment au titre du remboursement de la taxe de recours (Règle 103 CBE), en lien avec la violation alléguée de l'article 6(1) CEDH.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté.

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