T 0630/16 (Détection simultanée d'un antigène et d'un anticorps/BIO-RAD) of 26.11.2019

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2019:T063016.20191126
Date de la décision : 26 Novembre 2019
Numéro de l'affaire : T 0630/16
Numéro de la demande : 03749938.1
Classe de la CIB : G01N33/576
G01N33/569
C07K16/10
C07K16/42
C07K14/005
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : PROCEDE DE DETECTION SIMULTANEE D'UN ANTIGENE ET D'UN ANTICORPS D'UN MICROORGANISME INFECTIEUX
Nom du demandeur : Bio-Rad Europe GmbH
Nom de l'opposant : Biomérieux
Adams, Harvey Vaughan John
Chambre : 3.3.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 108 (2007)
European Patent Convention Art 84 (2007)
European Patent Convention Art 123(2) (2007)
European Patent Convention Art 56 (2007)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 12(4) (2007)
Mot-clé : Recevabilité du recours - acte et mémoire de recours
Revendications - clarté
Revendications - requête principale (non), requête auxiliaire 2 (oui)
Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée
Modifications - requête auxiliare 1 (oui)
Activité inventive - requête auxilaire 2 (non)
Requêtes auxiliaires produites tardivement - recevable (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 1504266, qui a été délivré avec un jeu de 31 revendications, se base sur la demande européenne n° 03749938.1.

II. Entre autres, les documents suivants ont étés cités au cours des procédures d'opposition et de recours :

D1 EP 1020727

D2 WO 01/96875

III. Deux oppositions ont été formées, requérant la révocation du brevet dans son intégralité sur la base de l'article 100a) CBE pour manque de nouveauté et d'activité inventive, de l'article 100b) CBE pour insuffisance de l'exposé, et de l'article 100c) CBE au motif que l'objet du brevet s'étend au-delà du contenu de la demande telle que déposée.

IV. Par une décision intermédiaire annoncée à l'issue de la procédure orale du 16 octobre 2015, la division d'opposition a conclu que le brevet pourrait être maintenu sous forme modifiée (articles 101(3)a) et 106(2) CBE) sur la base du jeu de revendications de la requête subsidiaire 2 déposé lors de la procédure orale et resoumis avec lettre du 28 octobre 2015.

V. La titulaire du brevet (requérante-titulaire) et l'opposant 2 (requérant-opposant 2) ont chacun formé un recours contre cette décision.

VI. Avec son mémoire exposant les motifs du recours, la requérante-titulaire a sollicité l'annulation de la décision attaquée pour vice substantiel de procédure et le renvoi à la division d'opposition conformément à l'article 11 RPCR (requête principale). À titre subsidiaire, la requérante-titulaire a demandé le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base du jeu de revendications de la requête subsidiaire 1 (identique à la requête subsidiaire 1 servant de base à la décision attaquée), ou le rejet du recours du requérant-opposant 2 (requête subsidiaire 2).

VII. Avec son mémoire exposant les motifs du recours, le requérant-opposant 2 a demandé l'annulation de la décision de la division d'opposition et la révocation du brevet dans sa totalité. Il a aussi demandé que la Chambre ne renvoie pas l'affaire à la division d'opposition.

VIII. Dans sa réponse au recours de la requérante-titulaire, l'opposante 1 (l'intimée) a demandé le rejet du recours déposé par la requérante-titulaire et la confirmation de la décision de la division d'opposition. Elle a aussi demandé de ne pas renvoyer l'affaire à la division d'opposition.

IX. La requérante-titulaire a répondu au recours du requérant-opposant 2 avec lettre datée du 23 septembre 2016. Elle a demandé le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base de l'un des jeux de revendications de la requête principale ou des requêtes subsidiaires 1 ou 2 (toutes soumises avec la même lettre), ou encore, à défaut, sur la base de la combinaison des requêtes subsidiaires 1 et 2. Les revendications de la requête principale étaient identiques à celles de la requête subsidiaire 1 soumises avec son mémoire exposant les motifs du recours.

X. Avec sa lettre de réponse au recours et à la lettre du 23 septembre 2016 de la requérante-titulaire, le requérant-opposant 2 a demandé que les requêtes subsidiaires 1 et 2 ne soient pas admises dans la procédure. Il a aussi fourni une nouvelle pièce à titre de preuve, à savoir l'annexe I.

XI. La Chambre a envoyé une notification établie conformément à la règle 100(2) CBE, clarifiant la question de la requête en renvoi à la division d'opposition pour vice substantiel de procédure. Avec une autre notification, la Chambre a demandé que le requérant-opposant 2 clarifie des questions concernant la représentation.

XII. Le requérant-opposant 2 a répondu avec lettre datée 16 août 2018.

XIII. Une procédure orale devant la Chambre s'est tenue le 26 novembre 2019. Lors de la procédure orale, la requérante-titulaire a soulevé une objection concernant la recevabilité du recours du requérant-opposant 2, faisant valoir que l'acte de recours et le mémoire exposant les motifs du recours n'étaient pas signés par un mandataire agréé autorisé par le requérant-opposant 2. À la fin de la procédure orale, le président a annoncé la décision de la Chambre.

XIV. La revendication 1 de la requête principale s'énonce comme suit:

"1. Procédé de détection in vitro d'une infection par un microorganisme qui est un virus de l'hépatite C (VHC) ou un virus de l'immunodéficience humaine de type 1 (VIH-1) dans un échantillon biologique, comprenant la détection simultanée d'au moins un antigène dudit microorganisme et d'un anticorps dirigé contre ledit microorganisme, présents dans l'échantillon biologique, procédé comprenant

a) la mise en présence de l'échantillon biologique avec un anticorps de capture dirigé contre ledit microorganisme immobilisé sur une phase solide, et un antigène de capture dérivé dudit microorganisme immobilisé sur une phase solide ;

b) l'incubation du mélange dans des conditions permettant la formation de complexes antigènes-anticorps ;

c) la révélation des complexes antigènes-anticorps formés, qui met en ½uvre un anticorps de détection, marqué, capable de se lier à l'antigène dudit microorganisme capturé ;

et dans lequel l'antigène de capture dudit microorganisme comprend un fragment antigénique dudit microorganisme dont au moins un épitope est détruit,

l'antigène de capture comprenant un fragment antigénique de la protéine de capside du VHC dont au moins un épitope est détruit par substitution de deux, trois ou quatre acides aminés dans la partie constituée par les acides aminés 20 à 40 et dans la partie constituée par les acides aminés 44 à 47 de la protéine de capside du VHC, ou

l'antigène de capture comprenant la séquence SEQ ID NO: 23 dont au moins un épitope est détruit par substitution de deux, trois, quatre ou cinq acides aminés,

l'antigène de capture étant rendu incapable d'être reconnu par l'anticorps de capture et/ou de détection dirigé contre l'antigène tout en étant capable de lier les anticorps dirigés contre le microorganisme, par reconnaissance d'autres sites épitopiques restés intacts ;

et l'anticorps de capture et/ou de détection, qui sont des anticorps monoclonaux ou polyclonaux monospécifiques, reconnaît ledit au moins un épitope, intact, de l'antigène capturé ;

dans lequel la détection d'au moins un antigène dudit microorganisme présent dans l'échantillon biologique est réalisée par un immunoessai de type sandwich, et la détection d'un anticorps dirigé contre ledit microorganisme présent dans l'échantillon biologique est réalisée par un immunoessai en format indirect ; et

dans lequel, si l'anticorps de capture est immobilisé sur la même phase solide que l'antigène de capture, alors l'antigène de capture comprend un fragment antigénique dudit microorganisme dont deux épitopes sont détruits, et l'anticorps de capture est choisi de manière à ce qu'il reconnaisse spécifiquement un des deux épitopes, intacts, sur l'antigène dudit microorganisme présent dans l'échantillon biologique, tandis que l'anticorps de détection est choisi de manière à ce qu'il reconnaisse spécifiquement l'autre des deux épitopes, intacts, sur l'antigène dudit microorganisme présent dans l'échantillon biologique ; et

le procédé évite l'interférence entre l'anticorps de détection marqué et l'anticorps dirigé contre ledit microorganisme, présent dans l'échantillon biologique, pour la liaison de l'antigène de capture."

La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 a le libellé suivant :

"1. Procédé de détection in vitro d'une infection par un virus de l'hépatite C de génotype 1 (VHC-1) dans un échantillon biologique, comprenant la détection simultanée d'au moins un antigène dudit VHC-1 et d'un anticorps dirigé contre ledit VHC-1, présents dans l'échantillon biologique, le procédé comprenant

a) la mise en présence de l'échantillon biologique avec un anticorps de capture du VHC-1 et un antigène de capture du VHC-1 fixés sur une phase solide ;

b) l'incubation du mélange dans des conditions permettant la formation de complexes antigènes-anticorps ;

c) la séparation de la phase solide et de la phase liquide ;

d) la révélation des complexes antigènes-anticorps formés, qui met en ½uvre la mise en contact de la phase solide avec, d'une part, un anticorps de détection, marqué, capable de lier l'antigène de VHC-1 capturé, et d'autre part, un anticorps, anti-immunoglobuline ou anti-isotype, marqué, capable de lier l'anticorps anti-VHC-1 capturé,

et dans lequel l'antigène de capture dudit VHC-1 comprend un fragment antigénique dudit VHC-1 dont deux épitopes sont détruits, étant rendu incapable d'être reconnu par les anticorps de capture et de détection dirigés contre l'antigène tout en étant capable de lier les anticorps dirigés contre le VHC-1, par reconnaissance d'autres sites épitopiques restés intacts ;

l'antigène de capture d'anticorps anti-VHC-1 étant un peptide de séquence SEQ ID NO:4, SEQ ID NO:5 ou SEQ ID NO:6,

et les anticorps de capture et de détection, qui sont des anticorps monoclonaux ou polyclonaux monospécifiques, reconnaissant chacun un desdits épitopes, intacts, de l'antigène de capside capturé."

La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 diffère de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 en ce que "VHC-1" a été remplacé par "VHC" et en ce que la référence à la séquence SEQ ID NO:6 a été supprimée.

XV. La requérante-titulaire a soumis pour l'essentiel les arguments suivants :

Recours de l'opposant 2

Aucun recours recevable n'a été formé de la part de l'opposant 2. L'acte de recours et le mémoire exposant les motifs du recours n'ont pas été signés par un mandataire autorisé par l'opposant 2.

Requête principale - article 84 CBE

L'exigence dans la revendication 1 selon laquelle "au moins un épitope est détruit par substitution de deux, trois ou quatre acides aminés dans la partie constituée par les acides aminés 20 à 40 et dans la partie constituée par les acides aminés 44 à 47 de la protéine de capside du VHC" précisait la définition structurelle de l'antigène de capture mentionné d'avant et était claire. La limitation du nombre de substitutions des acides aminés se référait à la région entière définie, et non à chacune des deux parties : cette interprétation était fondée sur la description, paragraphes [0074] et [0066].

Admission des requêtes subsidiaires 1 et 2 - article 12(4) RPCR

Les requêtes subsidiaires 1 et 2 se fondaient sur la requête qui avait été considérée par la division d'opposition comme conforme aux exigences de la CBE, avec des modifications mineures introduites en réponse aux objections de l'opposant 2. Les deux requêtes avaient été soumises avec la réponse au recours de l'opposant 2 et, même si elles n'étaient pas convergentes, étaient justifiées par le fait qu'elles essayaient de résoudre des problèmes différents. De plus, la convergence n'était pas un critère pour leur admission dans la procédure de recours.

Requête subsidiaire 1 - article 123(2) CBE

Par rapport à la revendication 1, l'explicitation du génotype VHC-1 se fondait sur la page 8, ligne 31 à la page 9, ligne 1 de la demande telle que déposée. L'objection concernant cette limitation n'avait pas été soulevée par écrit et ne devrait pas donc être admise.

Requête subsidiaire 2 - articles 123(2) et 84 CBE

Les séquences SEQ ID NO.4 et 5 étaient décrites individuellement à la page 19 comme des mutations particulièrement intéressantes et préférées que l'on pourrait utiliser comme antigène de capture ou de détection. Dans le procédé revendiqué, il était clair que les séquences devraient être utilisées comme antigène de capture.

Les séquences SEQ ID NO.4 et 5 dérivait de la SEQ ID NO:1, qui était la séquence consensus du virus VHC-1, mais la mise en ½uvre permettait la détection de l'infection par le VHC, indépendamment du génotype, comme il ressortait des exemples de la demande telle que déposée, qui utilisaient le peptide avec la SEQ ID NO:4 (pages 35 et 42) et ne spécifiaient pas quel génotype devait être détecté.

Quant à l'objection au titre de l'article 84 CBE, il était clair que l'anticorps de détection mentionné à la fin de la revendication 1 ne correspondait pas à l'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype mentionné à l'étape d) de la revendication.

Requête subsidiaire 2 - article 56 CBE

Le document de l'état de la technique le plus proche n'était pas D2 mais D1, parce que D2 ne traitait pas du problème d'interférence avec les essais combinés antigènes/anticorps. Quel que soit le point de départ, le problème à résoudre était la mise à disposition d'un procédé alternatif. La contribution du brevet par rapport à l'art antérieur résidait dans la destruction par substitution de certains acides aminés particuliers dans l'antigène de capture. En revanche, le document D2 décrivait un antigène de capture comprenant une substitution de l'acide aminé 47, c'est-à-dire uniquement une substitution présente à une position identique à l'une des trois substitutions présentes dans chacun des peptides de séquences SEQ ID NO: 4 et 5, et décrivait également un antigène, non pas de capture mais de détection, comportant une substitution de l'acide aminé 44. Il décrivait donc uniquement une substitution présente à une position correspondant à l'une des trois substitutions présentes dans le peptide de séquence SEQ ID NO: 4 et 5. L'homme du métier aurait pensé que la substitution simultanée de trois acides aminés dans des régions impliquées dans la liaison des anticorps aurait eu pour conséquence de limiter fortement la liaison des anticorps dans ces régions, ce qui aurait eu pour effet de diminuer de manière drastique la sensibilité de la méthode de détection. Il n'était pas possible de prédire quelles modifications convenaient ou ne convenaient pas et quelles modifications fonctionnaient mieux que d'autres. En fait, des autres séquences du brevet, même celles qui étaient basées également sur la région Cap 1-75, ne résoudraient pas le problème, comme cela était démontré dans l'exemple 4 du brevet, comparant la sensitivité des peptides de SEQ ID NO: 4, 14 et 15 (tableau 7). Il était tout à fait surprenant que les inventeurs aient découvert que la présence de ces trois substitutions dans l'antigène de capture permettait le développement d'une méthode de détection simultanée des antigènes et des anticorps du VHC présents dans l'échantillon biologique, ayant une très bonne sensibilité.

XVI. Le requérant-opposant 2 et l'intimée ont soumis pour l'essentiel les arguments suivants:

Recours de l'opposant 2

Le requérant-opposant 2 a fait valoir que son recours a été dûment formé et était recevable. La mandataire agréée qui avait signé l'acte de recours et le mémoire exposant les motifs du recours, Mme Gibbs, apparaît sur la liste intitulée "Additional Representatives under Association No 171" qui avait été déposée avec l'acte d'opposition.

Requête principale - article 84 CBE

La revendication 1 requérait qu'au moins un épitope soit détruit, mais demandait aussi que deux, trois ou quatre substitutions soient présentes dans les parties des acides aminés 20-40 et 44-47. On ne voyait pas clairement comment il convenait d'interpréter ces limitations, trois interprétations étant possibles. En fonction de l'interprétation choisie, différents modes de réalisation entraient ou non dans le cadre de la revendication, comme le montrait l'annexe 1. Il n'était pas donc possible de distinguer les limites de la protection de la revendication 1.

Admission des requêtes subsidiaires 1 et 2 - article 12(4) RPCR

Les deux requêtes avaient été seulement soumises avec la réponse au recours de l'opposant 2, alors qu'elles auraient pu être soumises plus tôt, et la requérante-titulaire n'avait même pas expliqué pourquoi ces requêtes étaient soumises à un stade si tardif et quelles objections elles traitaient. Les requêtes n'étaient pas convergentes, ce que entraînait la nécessité de discuter des questions pour la requête subsidiaire 2 qui avaient déjà été résolues dans la requête subsidiaire 1. De plus, les requêtes engendraient des problèmes d'admission dans la procédure ainsi que des problèmes liés à l'article 123(2) CBE. La requérante-titulaire avait choisi les séquences SEQ ID NO:4, 5 et 6 seulement lors de la procédure orale devant la division d'opposition, ce qui avait eu pour conséquence que les objections concernant cet objet n'avaient pu être soulevées plus tôt. La requérante-titulaire ne devrait pas avoir d'avantages résultant de moyens soumis tardivement.

Requêtes subsidiaires 1 et 2 - article 123(2) CBE

Le choix des SEQ ID NO: 4, 5 et 6 était une sélection arbitraire, qui n'était pas divulguée dans la demande telle que déposée. Rien n'indiquait, à la page 19 ou dans la revendication 42 telle que déposée, que ces séquences avaient la préférence par rapport à toutes les autres dans le groupe de 15 séquences listées. Il était en outre nécessaire de faire une autre sélection, à savoir entre l'utilisation comme antigène de capture ou comme antigène de détection. Les exemples aux pages 35, 38, 39 et 45 ne pouvaient pas non plus constituer de fondement, parce qu'il s'agissait de protocoles très spécifiques, avec d'autres séquences ajoutées et des anticorps spécifiques. La modification de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1, selon laquelle le procédé de détection visait à déterminer l'isotype spécifique VHC-1, ne pouvait pas être déduite de la demandé telle que déposée.

Quant à la requête subsidiaire 2, la revendication 1 ne se limitait plus au VHC-1. Or les éléments divulgués aux pages 19 à 22 s'inscrivaient seulement dans le contexte de VHC-1 et la demande telle que déposée ne contenait aucun élément suggérant que les séquences décrites dans ces pages, toutes dérivées de la séquence consensus du génotype 1 (SEQ ID NO:1), pourraient également être utilisées pour la détection d'autres génotypes.

Requête subsidiaire 2 - article 84 CBE

L'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype mentionné à l'étape d) du procédé revendiqué était en fait un anticorps de détection. Comme la partie finale de la revendication demandait que les anticorps de détection reconnaissent les épitopes intacts de l'antigène de capside capturé, il n'était pas possible d'établir clairement quelle devrait être la spécificité de l'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype de l'étape d).

Requête subsidiaire 2 - article 56 CBE

Le document D2, décrivant des essais combinés en vue de la détection des antigènes et des anticorps du VHC, constituait l'état de la technique le plus proche. L'antigène de capture MEFA12, représenté dans la figure 8, correspondait à la définition structurelle de l'antigène de capture donnée dans la revendication 1, comme cela ressortait de la page 33, lignes 11 à 25, et de la page 29, tableau 2 de D2. D2 traitait donc aussi de manière implicite du problème de l'interférence. L'essai de D2, qui mettait en pratique le concept de l'invention revendiquée, enseignait la destruction des épitopes dans la région 1 à 75 de la capside, et en particulier la substitution des résidus 44 (MEFA12) ou 47 (antigène de détection c22ks Delta47-L44W, aussi décrit à la page 33). La différence par rapport à l'objet revendiqué résidait dans la séquence exacte des peptides de SEQ ID:4 et 5 ainsi que dans le fait que des anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype étaient utilisés comme moyens de détection. Il n'y avait pas de comparaison de l'objet revendiqué avec l'état de technique le plus proche, et D2 utilisait la même région de la capside qui avait été modifiée dans les séquences revendiquées. Ainsi, aucun effet associé avec ces différences n'avait été démontré ; même s'il y avait des avantages, ils dépendraient de tous les réactifs utilisés. Le problème à résoudre consistait donc simplement à fournir des essais alternatifs, et la solution revendiquée était évidente parce que les peptides consistaient en alternatifs arbitraires. L'utilisation des anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype pour la détection était courante pour l'homme du métier (D1, exemple 6).

XVII. La requérante-titulaire a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base des revendications de la requête principale ou, à titre subsidiaire, sur la base des revendications de la requête subsidiaire 1 ou de la requête subsidiaire 2, toutes soumises avec la lettre du 23 septembre 2016.

Le requérant-opposant 2 a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet.

L'opposante 1 a demandé le rejet du recours déposé par la requérante-titulaire, autrement dit la confirmation de la décision de la division d'opposition.

Motifs de la décision

1. Recours de l'opposant 2

1.1 Un recours a été formé au nom de l'opposant 2. Ce recours est également recevable, puisqu'il satisfait aux exigences des articles 106 à 108 CBE.

1.2 En ce qui concerne la formation du recours, l'acte de recours et le mémoire exposant les motifs du recours avaient tous deux été déposés sous forme électronique et portaient la signature de la mandataire agréée, Mme Bethany Katherine Gibbs, en conformité avec les dispositions de la décision du Président de l'Office européen des brevets, en date du 10 novembre 2015, relative au dépôt électronique de documents (cf. JO OEB 2016, publication supplémentaire n° 1, XI.2). Il n'a pas été contesté que Mme Gibbs, au moment du dépôt de ces documents, faisait partie du groupement de mandataires no° 171, Mathys and Squire.

1.3 Dès la formation de l'opposition, le groupement de mandataires no° 171 - ou plus précisément, selon la règle 152(11) CBE, chaque membre appartenant au groupement au moment en question -, était habilité à agir pour l'opposant 2 en qualité de mandataire agréé. Même si les indications dans le Registre européen des brevets suggèrent que M. Harvey Adams était le seul mandataire agréé en l'espèce (cf. règle 143(1)h) CBE), tel n'était pas le cas. Une irrégularité dans les données du Registre ne tire d'ailleurs pas à conséquence, puisque ces indications ont un caractère uniquement déclaratif, et non constitutif.

1.4 Le formulaire OEB 2300E, déposé lors de la formation de l'opposition, ne mentionne que M. Harvey Adams, de Mathys & Squire LLP, à la rubrique IV.1 intitulée "Representative", et la case "Multiple representatives (see additional sheet)" n'était pas cochée. Néanmoins, un document additionnel avait été également déposé en même temps. Il est intitulé "Additional Representatives under Association No 171:" et contient une liste de trente-cinq noms de personnes physiques, accompagnée de l'indication attenante "{All of: Mathys & Squire LLP...". Le nom de Mme Gibbs figure lui aussi sur cette liste.

1.5 Dans ces circonstances, notamment au vu du document spécifique ayant été déposé, on ne peut que conclure que l'omission de la croix dans la section IV. représente une erreur évidente.

1.6 Il en ressort donc que ce n'était pas seulement M. Adams qui s'était fait connaître comme mandataire agréé vis-à-vis l'OEB, mais également le groupement de mandataires n° 171 (par rapport au pouvoir d'agir séparément, lorsque plusieurs mandataires ont été désignés, voir règle 152(10) CBE). En conformité avec l'article 1(1) de la décision de la Présidente de l'Office européen des brevets, en date du 12 juillet 2007 relative au dépôt de pouvoirs (cf. JO OEB 2007, édition spéciale n° 3, L.1), le dépôt d'un pouvoir signé n'était pas requis.

1.7 Que rien d'autre n'ait été voulu que le fait que tout mandataire du groupement soit également considéré comme mandataire agréé habilité à agir, est confirmé par les lettres soumises pendant la procédure d'opposition, par exemple celle en date du 16 septembre 2015, précisant qu'elle était déposée "For and on behalf of MATHYS & SQUIRE LLP Association No 171".

1.8 Par conséquent, l'acte de recours et le mémoire exposant les motifs ont été dûment déposés au nom de l'opposant 2.

2. Requête principale

2.1 Article 84 CBE

2.1.1 L'article 84 CBE dispose que les revendications définissent l'objet de la protection demandée. D'après cet article, les revendications doivent être claires et concises et se fonder sur la description. Les chambres de recours ont confirmé à maintes reprises que, dans l'intérêt de la sécurité juridique, les revendications doivent être claires lorsqu'elles sont lues par l'homme du métier, sans qu'il soit nécessaire de prendre connaissance du contenu de la description. Elles manquent de clarté lorsqu'elles ne permettent pas de distinguer exactement les limites de l'étendue de la protection.

2.1.2 La revendication 1 de la requête principale découle de la revendication 1 du brevet délivré, à laquelle de nombreuses modifications ont été ajoutées. Entre autres, la caractéristique suivante a été introduite pour préciser la définition structurelle de l'antigène de capture : "l'antigène de capture comprenant un fragment antigénique de la protéine de capside du VHC dont au moins un épitope est détruit par substitution de deux, trois ou quatre acides aminés dans la partie constituée par les acides aminés 20 à 40 et dans la partie constituée par les acides aminés 44 à 47 de la protéine de capside du VHC".

2.1.3 Cette définition manque de clarté, puisqu'elle ne permet pas d'établir si les limitations du nombre d'acides aminés à être substitués s'appliquent dans l'extension des deux parties identifiées de la protéine de capside du VHC ou dans chacune de ces parties ou éventuellement dans une des deux parties uniquement. Les trois interprétations ayant un sens technique pour l'homme du métier, il n'est donc pas possible de trancher en faveur d'une ou de l'autre des interprétations possibles. Néanmoins l'interprétation de cette caractéristique est essentielle pour déterminer quels modes de réalisation entrent ou non dans le cadre de la revendication, comme le montrent les exemples présentés dans l'annexe au mémoire exposant les motifs du recours du requérant-opposant 2.

2.1.4 La requérante-titulaire a fait valoir que l'on pouvait établir clairement, sur le fondement de la description, que la limitation du nombre de substitutions ne pouvait que s'appliquer dans l'extension des deux parties identifiées, et non dans chacune de ces parties. S'il y avait un autre épitope détruit, les mêmes limitations s'appliquaient aussi. Cette interprétation était en conformité avec la description du brevet au paragraphe [0074], où tous les exemples de modes de réalisation décrivaient trois substitutions dans cette région composée des deux parties. Le paragraphe [0066] enseignait aussi qu'"Une modification d'au moins un acide aminé, de préférence deux acides aminés, dans chaque site épitopique visé, peut suffire à détruire l'épitope".

2.1.5 La Chambre n'est pas convaincue par ces arguments. Le paragraphe [0074] du brevet explique en fait que "Des peptides préférés présentent une substitution de deux, trois ou quatre acides aminés, notamment dans la partie constituée par les acides aminés 20 à 40 et dans la partie constituée par les acides aminés 44 à 47" ; comme la revendication 1, ce passage n'explicite pas que les deux, trois ou quatre substitutions sont dans l'ensemble des deux parties ou dans chacune des parties. Il est aussi à noter que ce passage n'explicite même pas que les substitutions détruisent au moins un épitope, comme le requiert la revendication 1. Les exemples de mutations "particulièrement intéressantes et préférées" listées au paragraphe [0074] du brevet ont certes trois acides aminés substitués dans cette région : par exemple, SEQ ID NO. 4 comprend les substitutions G34-G44-G47, c'est-à-dire, une substitution dans la partie des acides aminés 20-40 et deux substitutions dans la partie des acides aminés 44-47. Pourtant, on ne sait pas si ces substitutions correspondent à la définition de la revendication 1, parce qu'il n'y a aucune information concernant la destruction des épitopes. Au paragraphe [0105] le peptide 1-75 (G34-G44-G47), correspondant à la séquence SEQ ID NO:4, est mentionné comme exemple d'un "peptide de capside du VHC muté en au moins deux sites épitopiques distincts", mais cette information n'aide pas davantage à l'interprétation de la caractéristique en question. Comme il s'agit de trois substitutions qui détruisent deux épitopes, on peut conclure qu'"au moins un épitope est détruit par substitution de deux acides aminés", et cela suffit pour que le peptide entre dans le cadre de la revendication, indépendamment de l'interprétation choisie. Quant au passage du paragraphe [0066], la Chambre ne voit pas comment il peut contribuer à l'interprétation de la caractéristique contestée, puisqu'il précise seulement qu'une modification d'au moins un acide aminé peut suffire à détruire l'épitope, tandis que la revendication 1 exige qu'au moins deux acides aminés soient substitués.

2.1.6 La revendication 1 de la requête principale ne satisfait donc pas aux exigences de l'article 84 CBE. Le brevet ne peut donc pas être maintenu sur la base du jeu de revendications de la requête principale.

3. Requête subsidiaire 1

3.1 Admission dans la procédure - article 12(4) RPCR

3.1.1 Selon l'article 12(1) RPCR, la procédure de recours se fonde sur l'acte de recours et le mémoire exposant les motifs du recours et, lorsqu'il y a plusieurs parties, sur toute réponse écrite de l'autre ou des autres parties aux motifs du recours et sur toute notification envoyée par la Chambre et toute réponse à celle-ci produite conformément aux ordonnances de la Chambre. La Chambre a pourtant le pouvoir, selon l'article 12(4) RPCR, de considérer comme irrecevables les faits, preuves et requêtes qui auraient pu être produits ou n'ont pas été admis au cours de la procédure devant la division d'opposition.

3.1.2 La requête subsidiaire 1 a été soumise par la requérante-titulaire avec sa réponse au recours du requérant-opposant 2. Cette requête doit par conséquent être prise en considération par la Chambre, à moins que des raisons ne s'y opposent. Lorsqu'elle contient de nouvelles modifications par rapport aux requêtes qui avaient été soumises pendant la procédure d'opposition, ces modifications sont simples et ont été introduites comme réaction directe aux objections de l'opposant 2. Même si au moins une de ces objections a déjà été soulevée lors de la procédure orale devant la division d'opposition, la requérante-titulaire n'a pas eu de raison de soumettre ces modifications plus tôt, puisque la division d'opposition a tranché cette question particulière en sa faveur.

3.1.3 La Chambre ne voit donc pas de raisons de juger la requête subsidiaire 1 irrecevable. La requête subsidiaire 1 est dès lors admise dans la procédure en vertu de l'article 12(4) RPCR.

3.2 Article 123(2) CBE

3.2.1 Selon l'article 123(2) CBE, la demande de brevet européen ou le brevet européen ne peut être modifié de manière que son objet s'étende au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée.

3.2.2 La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 porte sur un "procédé de détection in vitro d'une infection par un virus de l'hépatite C de génotype 1 (VHC-1)". Comme base pour l'explicitation du virus de l'hépatite C de génotype 1 (VHC-1), la requérante-titulaire a indiqué le passage allant de la page 8, ligne 31, à la page 9, ligne 1 de la demande telle que déposée.

3.2.3 Le passage cité s'insère dans la section intitulée "Définitions" et explique que "Le procédé de l'invention vise en effet à détecter toute infection par le VHC, quels que soient son origine et son génotype. Ceci comprend en particulier les types et sous-types bien connus du virus circulant en Europe, aux États-Unis, au Japon, etc... (c'est-à-dire les 6 génotypes majeurs : 1, 2, 3, 4, 5, 6 et leurs sous-types 1a, 1b, 3a,...)". Ce passage établit donc clairement que l'invention a pour but la détection de l'infection par le virus de l'hépatite C, indépendamment de son origine et génotype, et non la détection d'un génotype spécifique de l'hépatite C. De plus, ce passage n'établit pas de lien entre la détection de l'infection par un virus de l'hépatite C de génotype 1 (VHC-1) et les autres caractéristiques de la revendication, à savoir l'utilisation des peptides avec des séquences spécifiques.

3.2.4 Bien que l'objection au titre de l'article 123(2) CBE concernant la caractéristique "de génotype 1 (VHC-1)" n'ait été soulevée par l'opposante 1 que lors de la procédure orale devant la Chambre et que la requérante-titulaire ait demandé qu'elle ne soit pas admise, la Chambre l'a admise dans la procédure, l'objection en question n'étant pas complexe. De plus, la requérante-titulaire a sollicité une interruption pour le cas où cette objection serait admise, ce qui a permis à la Chambre de conclure que la requérante-titulaire était en mesure de traiter cette nouvelle objection, et qu'elle était même prête à y réagir. Bien évidemment, pour respecter la position de la requérante-titulaire et préserver son droit à se défendre, la Chambre a offert à la requérante-titulaire la possibilité d'y réagir de la manière qui lui semblait nécessaire, mais elle n'en a pas fait usage et a déclaré de ne pas avoir de commentaires à soumettre.

3.2.5 La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 ne satisfait donc pas aux exigences de l'article 123(2) CBE.

4. Requête subsidiaire 2

4.1 Admission dans la procédure - article 12(4) RPCR

4.1.1 Comme la requête subsidiaire 1, la requête subsidiaire 2 a aussi été soumise avec la réponse de la requérante-titulaire au recours de l'opposant 2 et doit donc être prise en considération par la Chambre, à moins que des raisons ne s'y opposent. À l'instar de la requête subsidiaire 1, elle contient de nouvelles modifications par rapport à la requête qui avait été considérée par la division d'opposition comme conforme aux exigences de la CBE, ces modifications étant simples et ayant été introduites comme réaction directe aux objections de l'opposant 2. S'agissant du fait que les deux requêtes subsidiaires comportent des modifications différentes, la Chambre accepte l'explication de la requérante-titulaire selon laquelle le manque de convergence est justifié par le fait que les requêtes essaient de surmonter des objections différentes.

4.1.2 La Chambre ne voit donc pas de raison de juger la requête subsidiaire 2 irrecevable. La requête subsidiaire 2 est dès lors admise dans la procédure en vertu de l'article 12(4) RPCR.

4.2 Article 123(2) CBE

4.2.1 La page 19, lignes 1 et 2, de la demande telle que déposée indique que "[f]ont également partie de l'invention des peptides ou polypeptides modifiés, utiles comme antigènes de capture, et/ou de détection". Des exemples de ces peptides ou polypeptides modifiés sont ensuite décrits à la page 19, lignes 13 à 36, parmi lesquels les séquences SEQ ID NO: 4 et 5 sont explicitement et individuellement divulguées comme utiles dans le cadre de l'invention. La divulgation des peptides à la page 19 (et pages 20 à 22) n'identifie pas un groupe de peptides mais des peptides individuels, chacun convenant à l'invention. L'explicitation de deux de ces peptides dans la revendication 1 ne consiste donc pas en une définition d'un sous-groupe par rapport à un groupe initial de 15 peptides, mais en une sélection de deux modes de réalisation parmi les 15 modes de réalisation qui étaient divulgués à l'origine comme également utiles. Pour chacun de ces 15 modes de réalisation, il y avait deux alternatives d'utilisation du peptide, à savoir comme antigène de capture ou comme antigène de détection, ce qui dépendait du format de l'essai qu'on voulait effectuer.

4.2.2 En plus, la Chambre considère qu'il n'est pas nécessaire d'indiquer que ces peptides sont dérivés du génotype VHC-1. Les peptides sont définis structurellement par leur séquence d'acides aminés ; l'indication de leur origine n'ajoute rien à cette définition. D'ailleurs, et comme expliqué par rapport à la requête subsidiaire 1 (section 3.2.3), la demande telle que déposée ne comporte aucun élément divulguant que ces peptides doivent être utilisés pour la détection du VHC-1 au lieu du VHC en général.

4.2.3 Les exigences de l'article 123(2) sont donc remplies par la revendication 1 de la requête subsidiaire 2. En l'absence d'objections au titre de l'article 123(2) CBE pour les autres revendications, la requête subsidiaire 2 satisfait à l'article 123(2) CBE.

4.3 Article 84 CBE

4.3.1 Le requérant-opposant 2 a allégué que la revendication 1 ne fait pas clairement apparaître si l'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype, qui peut être aussi considéré comme anticorps de détection, doit être capable de lier l'épitope intact de l'antigène du VHC, comme on peut le lire dans la dernière partie de la revendication.

4.3.2 La Chambre ne trouve pas ces arguments convaincants. Lorsque l'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype est en fait utilisé dans le procédé revendiqué comme un anticorps de détection (comme d'habitude dans plusieurs essais immunologiques), il est apparent au sens de la présente invention, et en particulier en vue de l'étape d) de la revendication, que la désignation "anticorps de détection" est utilisée pour un autre type d'anticorps. L'étape d) du procédé revendiqué consiste dans la révélation (mise en évidence) des complexes antigènes-anticorps formés avec, d'un côté, l'anticorps de capture introduit et l'antigène viral (capturé) présent dans l'échantillon, et, de l'autre côté, l'antigène de capture introduit et l'anticorps anti-VHC du patient (capturé) présent dans l'échantillon ; cette mise en évidence est réalisée, dans le premier cas, avec un anticorps de détection, marqué, capable de lier l'antigène de VHC capturé, et, dans le second cas, avec un anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype, marqué, capable de lier l'anticorps anti-VHC capturé. Il est donc clair que l'anticorps de détection mentionné dans la dernière partie de la revendication est "l'anticorps de détection, marqué, capable de lier l'antigène de VHC capturé" et pas l'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype mentionné à l'étape d).

4.3.3 Bien que la revendication soit claire par elle-même sans qu'il soit nécessaire de consulter la description, on peut encore ajouter que cette interprétation est aussi en conformité avec la description telle que déposée. La page 9, ligne 26, à la page 10, ligne 2, explique que "La présence des anticorps et antigènes dans l'échantillon biologique est révélée par des 'moyens de détection'. S'agissant de la détection de l'antigène, l'invention prévoit notamment une détection à l'aide d'au moins 'un anticorps de détection'. Un tel anticorps de détection, marqué, est capable de se lier à l'antigène capturé (...). S'agissant de la détection des anticorps, on peut utiliser notamment des anticorps anti-immunoglobuline, ou anti-isotype, marqués, par exemple des anti-immunoglobulines G".

4.3.4 Les exigences de l'article 84 sont donc remplies par la revendication 1 de la requête subsidiaire 2. En l'absence d'objections au titre de l'article 84 CBE pour les autres revendications, la requête subsidiaire 2 satisfait à l'article 84 CBE.

4.4 Article 56 CBE

L'invention

4.4.1 L'invention revendiquée concerne la détection in vitro d'une infection par le virus de l'hépatite C (VHC) en utilisant un procédé de détection simultanée d'un antigène du virus, et d'anticorps dirigés contre ce même virus (brevet, paragraphe [0001]). Un tel procédé de détection simultanée d'antigène et d'anticorps a l'avantage de permettre la détection précoce de l'infection, parce qu'il est capable de détecter la présence du virus lui-même, avant l'apparition d'anticorps et le plus tôt possible après la contamination, et offre en même temps la possibilité de détecter les réponses anticorps postérieures à la séroconversion sur toute la durée de l'infection (brevet, paragraphe [0014]). Ainsi, le dépistage de masse, nécessaire pour réduire les risques post-transfusionnels, peut être effectué avec des méthodes simples et susceptibles d'être automatisables (brevet, paragraphe [0015]). Cependant, la détection simultanée des anticorps anti-VHC et d'un antigène de VHC pose un problème majeur, celui de l'interférence, sur le dosage de l'antigène de VHC, entre les anticorps anti-VHC présents dans le sérum et des anticorps anti-VHC marqués. L'introduction sur une phase solide, en vue de la détection d'un anticorps donné, d'un antigène cible qui aurait les mêmes épitopes que ceux reconnus par le(s) anticorps marqué(s), utilisé(s) en vue de la détection simultanée en sandwich d'un antigène, entraînerait une fixation d'anticorps marqué(s) sur la phase solide et donc une réponse faussement positive de l'essai (brevet, paragraphe [0016]).

4.4.2 Pour contourner ce risque d'interférence, les auteurs de l'invention ont rendu artificiellement différents, par une modification de structure, certains épitopes des antigènes cibles utilisés pour capturer les anticorps. Les épitopes ainsi modifiés sont alors détruits. Simultanément, les anticorps utilisés pour la capture et/ou la détection des antigènes sont eux choisis de telle sorte qu'ils reconnaissent précisément des épitopes non modifiés présents sur les antigènes du patient, et qu'ils ne puissent ainsi pas se lier aux antigènes modifiés, qui ne présentent plus ces mêmes épitopes. Puisque les épitopes ne sont plus identiques, il n'existe donc plus de compétition entre les anticorps utilisés pour capturer et/ou détecter l'antigène de VHC et les anticorps du patient (brevet, paragraphe [0027]).

4.4.3 De multiples épitopes ayant été identifiés dans la partie N-terminale de la capside, cette zone protéique, est, selon l'invention, la plus appropriée pour obtenir à la fois une détection très sensible de l'antigène de capside et des anticorps anti-capside (brevet, paragraphe [0028]). Le procédé de détection selon la revendication 1 utilise comme antigène de capture d'anticorps anti-capside des peptides de séquences SEQ ID NO:4 ou 5, qui sont des peptides comprenant un fragment antigénique du VHC, notamment de ladite partie terminal de la capside, Cap 1-75 (paragraphe [0074]), dont deux épitopes sont détruits par des substitutions G34-G44-G47 (SEQ ID NO:4) et G31-G44-G47 (SEQ ID NO:5). Ledit fragment antigénique est donc rendu incapable d'être reconnu par les anticorps de capture et de détection dirigés contre l'antigène spécifique, tout en étant capable de lier les anticorps dirigés contre le VHC, par reconnaissance d'autres sites épitopiques restés intacts.

L'état de la technique le plus proche

4.4.4 Le document D2, qui décrit un procédé de détection combinée d'antigène et d'anticorps pour diagnostiquer l'infection par le VHC (page 1, lignes 9 à 11), et particulièrement un procédé pour détecter simultanément l'antigène et l'anticorps sur une phase solide unique (page 3, lignes 22 à 24), est le document de l'état de la technique le plus proche. Le procédé du document D2, représenté graphiquement dans la figure 8, comprend l'étape de la mise en présence de l'échantillon biologique avec un antigène de capture dérivé de la capside du VHC et avec des anticorps de capture dirigés contre le VHC, tous immobilisés sur une phase solide. La figure 8 de D2 montre que deux anticorps monoclonaux, désignés c11-3 et c11-7, sont immobilisés : ils sont réactifs avec un épitope de la partie N-terminal de la capside, acides aminés 10-53 (D2, page 32, lignes 25 à 29). Deux antigènes de capture sont aussi immobilisés, parmi lesquels celui avec la désignation MEFA-12 est un "multiple epitope fusion antigen" (MEFA), c'est à dire un polypeptide de fusion comprenant plusieurs épitopes (D2, page 24 ligne 29 à page 25, ligne 1). MEFA-12, qui peut être considéré comme "un fragment antigénique du VHC", comprend les régions [9-53, R47L], [64-88] et [67-84] de la capside (D2, page 29, tableau 2). La mise en évidence des complexes antigènes-anticorps formés avec, d'un côté, les anticorps de capture et les antigènes présents dans l'échantillon et, de l'autre côté, les antigènes de capture et les anticorps présents dans l'échantillon est réalisée, dans le premier cas, avec l'anticorps c11-14, marqué avec l'enzyme HRP, et, dans le second cas, avec deux antigènes de détection, parmi lesquels le c22ks Delta47-L44W, marqué avec SOD, et étant détecté avec un anticorps anti-SOD, lui-même marqué avec HRP. Selon D2 (page 45, lignes 12 à 14), l'anticorps c11-14 est dirigé contre les acides aminés 120-130 de la capside ; ainsi il ne reconnaît pas l'antigène de capture MEFA-12, qui n'inclut pas cette région, mais reconnaît, naturellement, l'antigène de capside capturé. Quant à l'antigène c22ks Delta47-L44W, il s'agit d'un antigène dérivé du antigène c22, qui comprend 119 acides aminés de la partie N-terminal de la capside du VHC et dont le résidu Arg47 a été supprimé et le résidu Leu44 a été substitué par un tryptophane (W), comme décrit à la page 43, lignes 18 à 21, de D2 ; ainsi, l'antigène c22ks Delta47-L44W peut se lier aux anticorps anti-capside VHC présents dans l'échantillon, mais ne peut pas se lier à l'anticorps c11-14 (qui est dirigé contre les acides aminés 120-130 de la capside, non présents dans l'antigène c22ks Delta47-L44W).

Le problème à résoudre et la solution

4.4.5 La différence entre le procédé de l'invention et le procédé de D2 est donc que d'autres peptides, à savoir les peptides avec les séquences SEQ ID NO:4 et SEQ ID NO:5, sont utilisés comme antigènes de capture dans le procédé revendiqué. De plus, le procédé selon la revendication 1 utilise des anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype comme moyens de détection, au lieu du système comprenant des antigènes modifiés marqués (c22ks Delta47-L44W - SOD) qui sont reconnus par des anticorps anti-SOD. Il n'y a aucun élément dans le brevet, ni ailleurs dans le dossier, qui tend à prouver des avantages associés à ces différences. La requérante-titulaire n'a pas non plus fait valoir qu'il y aurait un effet technique dérivé de ces différences. Le problème technique à résoudre consiste dès lors, comme l'a également formulé la division d'opposition, à fournir un immunoessai alternatif de détection combinée d'antigènes et d'anticorps de VHC. La solution revendiquée est d'utiliser un antigène de capture qui est un peptide de séquence SEQ ID NO:4 ou 5, dont deux épitopes sont détruits, et des anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype pour détecter les complexes formés par l'antigène de capture et l'anticorps capturé. Au vu des enseignements du brevet, en particulier des exemples, la Chambre accepte que ce problème a été résolu par l'objet revendiqué.

Activité inventive de la solution revendiquée

4.4.6 La solution revendiqué n'implique pas d'activité inventive.

4.4.7 L'utilisation d'anticorps anti-immunoglobuline ou anti-isotype comme moyens de détection était déjà courante dans les essais immunologiques de l'état de la technique et ne peut pas donc justifier la reconnaissance d'une activité inventive. Quant aux peptides spécifiques, il s'agit de peptides de la région 1-75 de la capside (Cap 1-75), dont les acides aminés 34, 44 et 47 (SEQ ID NO:4) ou 31, 44 et 47 (SEQ ID NO:5) ont été substitués par des résidus glycine (demande telle que déposée, page 19, lignes 1 à 26). Au vu du document D2, décrivant déjà l'utilisation d'antigènes de capture qui ne sont pas reconnus par les anticorps de capture ou de détection (du fait qu'ils n'ont pas les épitopes reconnus par ces anticorps), mais qui sont capables de se lier, par des épitopes restés intacts, aux anticorps de l'échantillon, il aurait été évident pour l'homme du métier, confronté avec le problème formulé ci-dessus, de fournir d'autres peptides dont quelques épitopes sont détruits alors que d'autres sont intacts. De plus, le document D2 enseigne d'utiliser dans ce but le peptide MEFA-12, qui comprend la région des acides aminés 9 à 53, avec une substitution au résidu 47, et les régions 64 à 68 et 67 à 84, et décrit un autre peptide, utilisé dans la détection de l'anticorps capturé, comprenant 119 acides aminés de la partie N-terminal de la capside, avec des mutations dans les résidus 44 (substitution) et 47 (suppression). Il aurait donc été évident pour l'homme du métier de fournir d'autres peptides comprenant la partie N-terminal de la capside, avec des mutations dans la même région épitopique qui est décrite dans D2. Le choix des mutations spécifiques dans les peptides des séquences SEQ ID NO.4 et 5 est donc un choix arbitraire parmi les alternatives possibles de mutations dans une région connue pour être antigénique. L'objet revendiqué à la revendication 1 n'implique donc pas d'activité inventive.

4.4.8 La requérante-titulaire, bien que faisant valoir que D1, et non D2, devrait être considéré comme l'état de la technique le plus proche, a aussi formulé le problème technique, indépendamment de la question de savoir quel était l'art antérieur le plus proche, en ce sens qu'il consistait dans la mise à disposition d'un procédé alternatif pour la détection simultanée des antigènes et des anticorps du VHC. Ni D2, ni aucun autre document de l'état de la technique, ne décrivait l'utilisation d'un peptide ou polypeptide comportant simultanément les trois substitutions présentes dans les peptides de séquences SEQ ID NO: 4 et 5, c'est-à-dire comportant simultanément une substitution des acides aminés 44 et 47 et une substitution de l'un des acides aminés 31 ou 34. L'homme du métier aurait pensé que la substitution simultanée de trois acides aminés dans des régions impliquées dans la liaison des anticorps aurait eu pour effet de diminuer de manière drastique la sensibilité de la méthode de détection selon l'invention. Il n'était pas possible de prédire quelles modifications convenaient ou non et en fait, des autres séquences du brevet, même celles qui étaient basées également sur la région Cap 1-75, ne résoudraient pas le problème, comme cela était démontré dans l'exemple 4 du brevet, comparant la sensitivité des peptides de SEQ ID NO: 4, 14 et 15 dans le tableau 7.

4.4.9 La Chambre n'est pas convaincue par cette argumentation. Concernant l'état de la technique le plus proche, le document D2, même s'il n'utilise pas le mot "interférence", traite sans aucun doute de ce problème, en utilisant des antigènes de capture ou de détection qui peuvent se lier aux anticorps de l'échantillon mais pas aux anticorps de capture ou de détection. De plus, il décrit, comme l'invention revendiquée, un procédé pour la détection simultanée des antigènes du VHC et des anticorps contre le VHC dans des échantillons biologiques et est donc un point de départ approprié pour l'examen de l'activité inventive. Indépendamment du choix du document de l'état de la technique le plus proche, l'objet revendiqué doit être inventif par rapport à tous les documents de l'art antérieur. Le choix d'un document de l'état de la technique le plus proche a seulement le but de simplifier l'analyse de l'activité inventive, parce qu'il évite que cette analyse doive être faite par rapport à tous les documents pertinents de l'état de la technique.

4.4.10 Quant au choix des peptides spécifiques, il est vrai que l'on ne peut pas savoir à l'avance quelles mutations empêchent ou non la sensitivité des essais. Cependant, l'art antérieur avait déjà indiqué la région N-terminal de la capside, comprenant les acides aminés 1-75, comme région cible et avait déjà suggéré que deux des trois mutations présentes dans les peptides de la revendication n'avaient pas un impact négatif dans des essais. En outre, le but de l'invention est en fait de détruire des épitopes pour que les antigènes mutés ne soient plus reconnus par des anticorps dirigés contre ces épitopes, et l'homme du métier aurait su qu'il fallait toujours vérifier, avec des méthodes de routine, que les antigènes modifiés sont encore reconnus par les anticorps à détecter. L'homme du métier, incité à fournir d'autres peptides pour des essais alternatifs, aurait dès lors pu et voulu effectuer des essais de routine sur les mutations additionnelles dans la même région, avec une perspective raisonnable de réussite, et serait arrivé à l'objet revendiqué sans devoir faire preuve d'inventivité.

4.4.11 La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 ne satisfait pas aux exigences de l'article 56 CBE.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

1. La décision contestée est annulée.

2. Le brevet est révoqué.

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