European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2019:T217914.20191121 | ||||||||
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Date de la décision : | 21 Novembre 2019 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 2179/14 | ||||||||
Numéro de la demande : | 07731004.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | B29C 55/28 B29C 71/02 B32B 27/08 B29L 9/00 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé de fabrication d'un film multicouche | ||||||||
Nom du demandeur : | Linpac Packaging Pontivy | ||||||||
Nom de l'opposant : | Abitz & Partner Südpack Verpackungen GmbH & Co. KG |
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Chambre : | 3.2.05 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : | |||||||||
Mot-clé : | Recevabilité du recours (oui) Requête produite tardivement (non) Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée (non) Modifications - extension de la protection (non) Possibilité d'exécuter l'invention (oui) Nouveauté (oui) Activité inventive (oui) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La titulaire ainsi que les opposants 1 et 2 ont formé recours contre la décision intermédiaire de la division d'opposition postée le 22 septembre 2014 concernant le maintien du brevet européen No. 1 993 809 dans une forme modifiée.
II. Les oppositions des opposantes 1 et 2 avaient été formées contre le brevet dans son ensemble et étaient fondées sur l'article 100 b) CBE 1973 et 100 a), ensemble articles 54 et 56 CBE 1973.
III. Avec leurs actes de recours respectifs, les requérantes II et III (opposantes 1 et 2) ont, à titre subsidiaire, demandé une procédure orale. Dans leurs lettres du 18 octobre 2019 et du 8 novembre 2019, respectivement, elles ont ensuite déclaré qu'elles ne participeraient pas à la procédure orale prévue pour le 21 novembre 2019. De ce fait, la chambre a annulé la procédure orale.
IV. La requérante I (titulaire du brevet) demande, à titre principal, l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base de la requête principale ou de la requête subsidiaire 1, requêtes déposées par lettre en date du 26 octobre 2015. A titre alternatif, elle requiert le rejet du recours des opposantes 1 et 2.
V. Les requérantes II et III demandent la révocation du brevet.
VI. Les parties se réfèrent notamment aux documents suivants :
Annexe A1 : "TEST METHODS Appendix to the Giflex Sales Specifications", rév. no. 2, décembre 2005;
Annexe A2 : ASTM F 904, janvier 1998;
Annexe A3 : Extrait de "L'expertise technique et scientifique de référence" : "Soudage des thermoplastiques - Eléments de base sur le soudage, 10 janvier 2005; extrait du dictionnaire Larousse : "soudage";
D1 : J. Schiffmann, "Triple bubble film lines for manufacturing 7-layercoextruded films"; Proceedings of 9**(th) Worldwide Flexible Packaging Conference, Flex-Pak Americas 2000, 14 et 15 mars 2000, pages 95 à 120;
D10 : WO 99/55528;
E13 : Impression du site Internet de UNITIKA Ltd., caractéristiques de "EMBLON M" et "EMBLON E";
E14 : Brochure "Nurel Promyde Polyamide 6 for Packaging and Film";
E15 : Patent Abstracts of Japan 07-178883;
F1 : GB 2 055 855;
F2 : US 3,791,915;
F3 : US 3,570,748;
F4 : "Orientation of films and fibrillation", G. Schuur and A. K. van der Vegt, "Structure and Properties of Oriented Polymers", Springer Science + Business Media, Dordrecht, 1975, pages 413 à 453;
F5 : Déclaration par Prof. Dr. Theo A. Tervoort en date du 29 janvier 2015;
F6 : Curriculum vitae du Prof. Dr. Theo A. Tervoort;
F7 : US 3,652,759;
F8 : "Plastic Films, Technology and Packaging Applications", K. R. Osborn and W. A. Jenkins, Technomic Publishing Co., Inc., 1992, pages 60 et 61;
F9 : J. Greener et al., Polym. Eng. & Sci., 1999, vol. 39, pages 2403 à 2418;
F10 : R. M. Gohil, J. Appl. Polym. Sci., 52, 1994, pages 925 à 944;
F11 : Fiche technique ADMER NF911E, août 2014.
VII. Les revendications indépendantes 1 et 5 selon la requête principale sont rédigées de la manière suivante :
"1. Procédé de fabrication d'un film multicouche comprenant :
a) une étape de coextrusion de résines pour former un film tubulaire extrudé sous la forme d'une première bulle, ledit film tubulaire comportant au moins une couche de surface extérieure comprenant une résine polyester ou une résine polyoléfine, une couche intermédiaire comprenant une résine polyamide, et une couche de surface intérieure de thermo-scellage comprenant une résine polyoléfine ou un mélange de résines polyoléfine [sic],
b) une étape d'orientation biaxiale du film tubulaire chauffé sous la forme d'une deuxième bulle, et
c) une étape de stabilisation par traitement thermique, et éventuellement de relaxation, du film tubulaire sous la forme d'une troisième bulle,
caractérisé en ce que lors de l'étape de stabilisation c), le film tubulaire est porté à une température de stabilization [sic] supérieure ou égale à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire de ladite couche de surface intérieure de thermo-scellage."
"5. Film multicouche susceptible d'être obtenu par le procédé selon l'une des revendications 1 à 4, comportant au moins une couche de surface extérieure comprenant une résine polyester ou une résine polyoléfine, une couche intermédiaire comprenant une résine polyamide, et une couche de surface intérieure de thermo-scellage comprenant une résine polyoléfine ou un mélange de résines polyoléfine [sic], caractérisé en ce qu'il présente une résistance au déchirement supérieure ou égale à 30 N/mm, tant dans la direction machine (MD) que dans la direction transversale (TD), et une résistance à la délamination de la couche de surface intérieure de thermo-scellage supérieure à 15 N/15mm dans la direction machine (MD) et transversale (TD)."
VIII. Les arguments de la requérante I sont les suivants :
Recevabilité du recours de la requérante I
La revendication 8 de la requête principale comporte une faute de frappe ("une épaisseur totale comprise entre 20 et 50 Pm" au lieu d'"une épaisseur totale comprise entre 20 et 50 mym"). Comme mentionné dans son mémoire exposant les motifs du recours, l'intention de la requérante I a été de déposer une requête principale correspondant à la première requête subsidiaire déposée en première instance (voir mémoire exposant les motifs du recours de la requérante I, paragraphe 1).
Requête principale
L'invention, qui concerne le contrôle des conditions opératoires afin d'obtenir un film multicouche avec des caractéristiques spécifiques telles que précisées dans les revendications, a été suffisamment divulguée. La première partie de la revendication 1, qui comprend les caractéristiques techniques connues de l'art antérieur, c'est-à-dire le procédé triple bulle, forme le préambule. La seconde partie, qui se rapporte à la température de stabilisation de l'étape c), forme la partie caractérisante. Cette dernière définit la contribution de l'invention à l'art antérieur. La première partie et la seconde partie en combinaison définissent la portée de la revendication 1. Comme illustré par les nombreux documents déposés par les requérantes II et III, l'homme du métier est familier du procédé triple bulle et saurait mettre en ½uvre les étapes a) à c) telles que définies par la revendication 1.
Les étapes et conditions selon les revendications et leurs effets respectifs sur les produits finals sont décrits. Dans les exemples, les matériaux de départ sont énumérés dans le tableau I et les conditions opératoires sont résumées dans le tableau II.
En ce qui concerne l'argument de la requérante II, que l'homme du métier ne saurait pas comment mettre en ½uvre et mesurer une température de stabilisation de 100°C ou plus, il est remarqué que le réglage de la température d'un procédé triple bulle est connu de l'art antérieur. En effet, le document D10 décrit une température de 60 à 98°C dans un procédé triple bulle (voir D10, page 22, lignes 20 à 25).
Par ailleurs, les termes utilisés dans la revendication 1 indique clairement comment la température de stabilisation est sélectionnée, c'est-à-dire supérieure ou égale à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire de la couche de surface intérieure de thermo-scellage.
Selon la jurisprudence, une objection d'insuffisance de description présuppose un doute sérieux fondé sur des faits vérifiables. De tels faits vérifiables n'ont pas été présentés par la requérante II lorsqu'elle affirme qu'il n'est pas possible de déterminer la température d'un four à infrarouge avec une précision de 1°C. Tout d'abord, il est précisé que la revendication 2 se référe à la température de stabilisation du film tubulaire au moyen d'un four à infrarouge. En effet, le paragraphe [0031] du brevet indique que le film tubulaire est porté à une température de stabilisation comprise entre 80 et 150°C. Il s'agit donc de la température du film et non du four comme l'a affirmé la requérante II. L'auteur du document D10 peut mettre en ½uvre une température de 98°C par un procédé utilisant de la vapeur d'eau ou de l'eau chaude. Il est remarqué qu'un procédé utilisant un four à infrarouge est aussi précis, si ce n'est plus précis, et que, par conséquent, une précision de 1°C peut être obtenue. Ainsi, l'homme du métier saurait comment mettre en ½uvre la température de stabilisation par un procédé utilisant un four à infrarouge.
Quant à la revendication 3, le paragraphe [0030] du brevet démontre comment l'homme du métier saurait mettre en ½uvre un taux de relaxation TD dans la troisième bulle à la lecture du brevet.
Concernant la revendication 4, il est fait référence au paragraphe [0025] du brevet.
Concernant la méthode pour mesurer la résistance à la délamination, la requérante I a fourni les annexes A1 et A2. Il est également noté que l'annexe A1 confirme que l'unité de la résistance à la délamination est le N/15mm. Quant à l'objection soulevée par la division d'opposition concernant la méthode décrite au paragraphe [0040] du brevet que le film était soudé sur lui-même, deux possibilités ont été évoquées :
(1) couche de surface intérieure sur couche de surface extérieure, ou
(2) couche de surface intérieure sur couche de surface intérieure.
Il est évident pour l'homme du métier que la seconde option est correcte, c'est-à-dire couche de surface intérieure sur couche de surface intérieure. Le film doit d'abord être soudé sur un support et la pratique courante est simplement de souder le film sur lui-même. La température de soudage suggérée au paragraphe [0040] est de 110°C. La couche de surface extérieure comprend une résine polyoléfine avec un point de fusion préféré entre 130°C et 170°C ou une résine polyester avec un point de fusion préféré entre 200 °C et 260°C (voir paragraphe [0020] du brevet). Le point de fusion préféré de la résine polyoléfine (ou du mélange de résines polyoléfines) de la couche intérieure thermo-scellable se situe entre 80°C et 150°C (voir paragraphe [0020] du brevet) et doit être inférieur à celui constitutif des couches extérieure et intermédiaire. Suivant l'option (1) suggérée ci-dessus, la couche intérieure thermo-scellable pourrait fondre, mais ne pourrait pas se souder à la couche de surface extérieure avec un matériau complètement non fondu, puisque son point de fusion est au moins 20°C (et jusqu'à 150°C) au-dessus de la température de soudage de 110°C, comme indiqué au paragraphe [0040]. D'après la définition, un soudage est l'assemblage par fusion de la matière afin d'assurer la continuité entre les parties à assembler (voir annexe A3). Suivant l'option (2), le film est replié sur lui-même (la couche de surface intérieure contre la couche de surface intérieure). Le matériau de la couche de surface intérieure a un point de fusion entre 80°C et 150°C fond. La résistance à la délamination peut être mesurée en tirant sur le film replié sur lui-même par exemple avec un appareil de traction "Lloyd Instruments". La valeur à mesurer est la résistance à la délamination de la couche de surface intérieure de thermo-scellage du reste du film. Au vu des explications ci-dessus, il serait évident pour l'homme du métier qu'une soudure de type (1), c'est-à-dire couche de surface intérieure sur couche de surface extérieure, ne serait pas efficace et ne permettrait pas de mesurer la résistance à la délamination de la couche de thermo-scellage du reste du film, puisque la couche de surface intérieur ne collerait (souderait) pas ou se décollerait trop facilement de la couche de surface extérieure. Par ailleurs, le film multicouche est défini en détail dans la revendication 5 par le procédé par lequel il est directement obtenu, par sa composition (une couche de surface extérieure, une couche intermédiaire et une couche de surface inférieure de thermo-scellage) et par ses propriétés physiques (une gamme de résistance au déchirement et une gamme de résistance à la délamination). Dans le paragraphe [0010] du brevet, il est expliqué que la température de stabilisation telle que définie dans la revendication 1 entraîne une augmentation de la résistance au déchirement et de la résistance à la délamination. De plus, les valeurs de résistance peuvent être facilement mesurées par des procédés connus dans l'état de la technique (voir paragraphes [0038] et [0040]). Par conséquent, l'invention telle que définie à la revendication 5 est décrite de façon suffisamment claire et complète pour être mise en ½uvre par un homme du métier.
La caractéristique de la revendication 6 ne nécessite aucun effort déraisonnable d'expérimentations ou un programme de recherche comme l'a affirmé la requérante II, puisque le paragraphe [0045] du brevet explique clairement que plus la température de stabilisation appliquée sur le film tubulaire de la troisième bulle est élevée, plus le taux de rétraction du film multicouche diminue et plus le taux de relaxation appliqué sur le film de la troisième bulle est élevé, plus le taux de rétraction diminue. En outre, des informations détaillées concernant la mesure du taux de rétraction sont fournies au paragraphe [0037] du brevet.
Quant à la revendication 7, il est expliqué au paragraphe [0012] du brevet que la contrainte de rétraction est ajustée en réglant la température de stabilisation et le taux de relaxation. De plus, des informations détaillées concernant la mesure de la contrainte de rétraction sont fournies au paragraphe [0041] du brevet. Le manque de clarté dû à l'incohérence entre la revendication 7 et l'exemple 3 a été notée et il est proposé soit de renommer l'exemple 3 "exemple comparatif 3" pour indiquer qu'il est en-dehors de la portée de la revendication 7 soit tout simplement de supprimer cet exemple dans la description afin de rétablir la clarté du texte.
Généralement la charge de la preuve que l'homme du métier lisant le brevet et utilisant ses connaissances générales soit incapable de mettre en ½uvre l'invention repose sur les opposantes, qui n'ont pas apporté cette preuve en l'espèce.
Le brevet dans son ensemble fournit à l'homme du métier des instructions claires et précises, nécessaires à la mise en ½uvre de l'invention revendiquée.
Quant à la question de la nouveauté, le chapitre 5 du document D1 décrit un procédé triple bulle utilisant un "System for the production of a biaxially oriented polyamide film (BOPA)" (voir D1, page 103, dernier paragraphe). Que la troisième bulle a été chauffée jusqu'à approximativement 180 à 190°C est divulgué dans le contexte de ce mode de réalisation particulier. La température de stabilisation de la troisième bulle est de 150 à 190°C, tandis que le polyamide 6 a une température de fusion d'environ 220°C. Ce passage ne décrit donc pas que la température de stabilisation est supérieure ou égale à la température de fusion de la résine majoritaire de la couche de surface inférieure de thermo-scellage selon l'étape c) du de la revendication 1. Le chapitre 5 mentionne bien quelques matériaux autres que le BOPA, mais seulement à titre d'illustrations. Cette partie du document D1 ne suggère pas expressément une étape de coextrusion telle que définie dans la revendication 1, avec la formation d'un film tubulaire comprenant au moins une couche de surface extérieure comprenant une résine polyester ou une résine polyoléfine, une couche intermédiaire comprenant une résine polyamide et une couche de surface intérieure de thermo-scellage ou thermo-soudage comprenant une résine polyoléfine ou un mélange de résines polyoléfines. Le raisonnement proposé par la requérante II est basé sur la combinaison du chapitre 5, qui décrit un mode de réalisation particulier relatif à "System for the production of a biaxialiy oriented polyamide film (BOPA)", et du chapitre 3, qui décrit des matériaux utilisés dans des procédés différents. Il est rappelé que deux modes de réalisation d'un même document ne peuvent être combinés pour détruire la nouveauté d'une revendication. Ces raisons s'appliquent également au produit selon la revendication 5 obtenu directement avec le procédé de la revendication 1.
En ce qui concerne l'activité inventive, le chapitre 5 du document D1 concerne un film polyamide qui est chauffé à une température de stabilisation de 150 à 190°C, ce qui est inférieur à la température de fusion du polyamide. Le problème technique objectif de l'invention est formulé dans le paragraphe [0010] du brevet et concerne la diminution de la rétraction thermique, la contrainte de rétraction thermique de l'ensemble du film, l'augmentation de la résistance au déchirement et de la force de délamination de la couche intérieure de thermo-scellage du reste de la structure. Ce problème est notamment rencontré dans le contexte des films d'emballage rétractables pour une utilisation sur des operculeuses pour l'operculage de barquettes ou conteneurs, ainsi que des films d'emballage non-rétractables pour une utilisation sur des operculeuses ou des machines formeuse-remplisseuse-scelleuse (voir paragraphe [0001] du brevet). Le procédé selon la revendication 1 résoudrait ce problème comme le démontraient les exemples 1 à 5. Comme l'attestent les résultats du tableau II, les valeurs des résistances des exemples 1 à 5 sont clairement supérieures à celles de l'exemple comparatif. Le document D1 ne décrit pas que la température de stabilisation doit être supérieure ou égale à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire de la couche de surface intérieure de thermo-scellage. Le premier paragraphe de la page 105 décrit que la température de stabilisation est choisie "depending on the material", mais aucune information supplémentaire n'est fournie pour expliquer comment le choix du or des matériaux affecterait la température de stabilisation. La pertinence de la gamme de températures proposée et des valeurs relatives de la température de stabilisation et de la température de fusion de la couche de surface intérieure de thermo-scellage n'est également pas expliquée. L'enseignement du document D1 va même à l'encontre du procédé tel que revendiqué puisque, dans le procédé triple bulle du document D1, la température de stabilisation est inférieure à la température de fusion de la résine majoritaire de la couche de surface intérieure. La requérante II cite le document F4 afin de démontrer que la mise en ½uvre de l'étape de stabilisation à une température supérieure ou égale à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire de la couche de surface intérieure de thermo-scellage fait partie des connaissances générales de l'homme du métier à la date de priorité du brevet. Toutefois, le document F4 ne décrit pas une structure multicouche telle que définie dans la revendication 1, l'ajustement de la température de stabilisation dans la troisième bulle d'un procédé triple bulle comme l'indique la revendication 1 et comment ajuster la force de délamination entre une couche de thermo-scellage et la couche adjacente dans un film multicouche. Il est important de noter que le document F4 enseigne que la force d'un matériau cristallin augmente lorsque le film cristallin est chauffé "to near Tm" (voir F4, page 418, ligne 2), et non pas à une température égale ou supérieure à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire d'une couche de surface intérieure de thermo-scellage. Ainsi, même si l'homme du métier avait combiné les enseignements des documents D1 et F4, il n'aurait pas réalisé le procédé revendiqué dans la mesure où aucun document ne décrit la caractéristique de la partie caractérisante de la revendication 1. L'objet de la revendication 1 implique par conséquent une activité inventive par rapport aux documents D1 et F4. Concernant le rapport F5 du Professeur Tervoort, il est remarqué que le Professeur Tervoort ne pouvait être considéré comme un homme du métier avec des connaissances moyennes dans le domaine technique et dépourvu de capacité inventive. De plus, la déclaration du Prof. Tervoort est biaisée par la lecture préalable du brevet. Aucun des documents cités par le Prof. Tervoort dans son rapport ne divulgue la caractéristique de la partie caractérisante du procédé revendiqué et ses effets techniques, à savoir une meilleure résistance au déchirement et à la délamination. Les documents cités enseignent une borne supérieure pour une température de traitement thermique tandis que la revendication 1 est basée sur une température de stabilisation minimum dans un procédé triple bulle, avec un lien direct avec un composant spécifique d'un film multicouche. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 implique une activité inventive par rapport à une combinaison du document D1 avec les documents F4 ou F5 et tous les documents cités dans le document F5. Cette argumentation est essentiellement la même si, au lieu du document D1, le document D10 était utilisé comme point de départ.
Le document F1 ne décrit pas un procédé triple bulle mais au contraire un procédé d'étirement. Le document F1 ne mentionne aucune des étapes a) à c). De plus, la structure multicouche telle que définie par la revendication 1, en particulier avec une couche intermédiaire comprenant une résine polyamide, et l'aspect que, pour la mise en ½uvre d'une étape de stabilisation c) d'un procédé triple bulle, la température de stabilisation était égale ou supérieure à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire d'une couche de surface intérieure de thermo-scellage, ne sont pas divulgués par le document F1. Ainsi, le document F1 concerne une structure de film différente obtenue par une méthode différente. Le problème technique résolu par la présente invention est de fournir des films multicouches présentant la structure telle que définie à la revendication 1, avec une meilleure résistance au déchirement et à la délamination, en utilisant un procédé triple bulle. Le document F1 vise à améliorer le module d'élasticité et les caractéristiques de rétractation (voir F1, page 2, ligne 31) et la force de scellage thermique (voir F1, page 4, ligne 2). Ce document ne mentionne pas de résistance au déchirement et à la délamination. Il est également rappelé que la résistance à la délamination est définie dans le brevet comme la délamination de la couche de surface intérieure de thermo-scellage polyoléfine du reste de la structure multicouche. Par conséquent, la résistance à la délamination est différente pour le film du document F1 et pour la structure de la revendication 1. Le document F1 enseigne que les films (qui sont différents des films tels que définis par la revendication 1) sont soumis à un traitement thermique (dans un procédé qui était différent du procédé tel que défini par la revendication 1) à une température au-dessus de la température de fusion de la couche thermo-scellable pour améliorer le module d'élasticité, les caractéristiques de rétractation et la force de scellage thermique. Le document F2 décrit des films multicouches comprenant un film à base de polyamide qui peut être formé selon "any of the various known methods used for manufacturing laminates" (voir F2, colonne 5, lignes 51 à 53). Aucune autre indication n'est fournie concernant ces procédés. Ce document ne décrit pas la structure multicouche telle que définie à la revendication 1 et ne s'intéresse pas au problème de résistance au déchirement et à la délamination. Le document F3 est un autre document décrivant une film multicouche comprenant un film à base de polyamide. Comme le document F2, F3 ne divulgue pas un procédé triple bulle, une structure multicouche telle que définie à la revendication 1 ou le problème de résistance au déchirement et à la délamination. Il es donc conclu que, même si l'homme du métier devait combiner les enseignements du document F1 avec F2 ou F3, la présente invention n'aurait pas pu être mise en ½uvre. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête principale implique une activité inventive par rapport à ces documents.
IX. Les requérantes II et III ont développé les arguments suivants :
Recevabilité du recours de la requérante I
Selon l'article 12 RPCR, le mémoire exposant les motifs du recours doit contenir l'argumentation complète de la requérante. Il faut par conséquent, y exposer expressément tous les faits, arguments et preuves invoqués. Avec son mémoire exposant les motifs du recours du 21 janvier 2015, la requérante I a demandé, en tant que requête principale, de faire droit à la première requête subsidiaire telle que déposée pendant la procédure d'opposition. En plus de cette requête, la requérante I a soumis, avec son mémoire exposant les motifs du recours, un nouveau jeu de revendications 1 à 9 sous le titre "requête principale". Toutefois, ces requêtes - première requête subsidiaire précitée et requête principale déposée avec le mémoire exposant les motifs du recours - ne sont pas cohérentes. Ainsi, la portée de la requête principale est mal définie. Il en va de même, mutatis mutandis, pour la nouvelle requête subsidiaire 1 déposée avec le mémoire exposant les motifs du recours. En conclusion, le recours complet doit être rejeté comme irrecevable, l'étendue du recours n'étant pas clairement définie.
Requête principale
La requête principale a été présentée pour la première fois dans le cadre de la procédure de recours. En outre, elle ne satisfait pas, de prime abord, aux exigences de la CBE. Elle n'est donc pas recevable.
Le changement de l'unité de résistance à la délamination de "N" à "N/15mm" constitue une violation des dispositions de l'article 123(2) et (3) CBE. Par ailleurs, une telle correction du brevet délivré n'est possible ni en vertu de la règle 140 CBE, comme cela a été énoncé dans la décision G 1/10, ni en vertu de la règle 139 CBE. En ce qui concerne une éventuelle extension ou un éventuel déplacement de la protection au sens de l'article 123(3) CBE causé par cette modification, il doit être relevé qu'une valeur de 12N mesurée sur un échantillon de 10 mm de largeur ne serait pas couverte par la revendication telle que délivrée ("supérieure à 15N"), mais serait désormais incluse dans la revendication modifiée ("supérieure à 15N/15mm"), parce que la valeur de 12N/10mm correspond à 18N/15mm.
La divulgation de l'invention dans la revendication 1 est insuffisante. Le brevet ne contient aucun exemple détaillé de la manière dont le procédé revendiqué peut être exécuté. Parmi les exemples cités, seulement les exemples 1 à 5 concernent l'invention. Les exemples 1 à 3 utilisent une température de stabilisation pendant l'étape c) de 100°C, qui correspond à la température de fusion du polyéthylène utilisé. Cependant, il n'est pas clair, d'après le brevet, comment la température exacte de 100°C peut être atteinte, comparé aux exemples comparatifs 6 et 7, où la température était de 99°C. La divulgation de l'invention n'est donc pas suffisante. De plus, la couche intérieure peut être constituée d'un mélange de polyoléfines. Si ceux-ci ont une température de fusion différente, le brevet n'explique pas comment sélectionner la température de stabilisation après l'étape c).
En ce qui concernent les revendications 2 à 4, il n'est pas décrit comment la température dans un four infrarouge peut être mesurée jusqu'à une valeur exacte de 1°C et comment le taux de relaxation transversale TD et le taux d'étirement transversale TD peuvent être atteints ou mesurés.
Le brevet n'explique pas comment obtenir les caractéristiques de résistance au déchirement et à la délamination de la revendication 5. Selon le paragraphe [0011] du brevet en litige, la température de stabilisation et le taux de relaxation appliqués à la troisième bulle de l'étape c) sont déterminés de sorte que le film multicouche refroidi obtenu après l'étape c) présente une résistance au déchirement supérieure ou égale à 30 N/mm, tant dans la direction machine MD que dans la direction transversale TD, de préférence supérieure ou égale à 40 N/mm, mieux encore supérieure ou égale à 5,0 N/mm, et/ou une résistance à la délamination de la couche de surface intérieure de thermo-scellage supérieure à 15 N dans la direction machine MD et la direction TD. Toutefois, il n'est pas décrit avec quelles conditions de procédé le résultat revendiqué peut être atteint. Il serait excessif que l'homme du métier les trouverait lui-même par des tests exhaustifs. De plus, le paragraphe [0040] du brevet en litige concerne la mesure de la résistance à la délamination du film multicouche et non celle de la couche de surface intérieure, qui, selon la revendication 5, devrait être de 15 N/15mm. Comme l'indique la décision attaquée, il ne ressort pas non plus de ce paragraphe si, pour mesurer la résistance à la délamination du film, les deux couches de surface intérieure sont superposées ou si la couche de surface intérieure est soudée sur la couche extérieure. Comme les deux couches peuvent avoir des propriétés similaires, les deux variantes sont possibles. A cet égard, les annexes A1 et A2 fournies par la requérante I avec son mémoire exposant les motifs du recours, n'ont pas apporté d'informations additionnelles. La caractéristique de la résistance au déchirement n'est pas claire.
Il n'est également pas décrit avec quelles conditions de procédé le résultat revendiqué dans les revendications 6 et 7 peut être atteint. En effet, la réalisation de ces caractéristiques nécessite un programme de recherche. Le fait que l'exemple 3 ne tombe pas sous la revendication 7 démontre que la valeur de 3 MPa a été choisie arbitrairement.
Quant à la revendication 9, il doit être relevé que dans tous les exemples du brevet, une couche adhésive de type ADMER NF911E est utilisée comme couches 2 et 6, qui a une température de fusion de 97°C (voir document F11), ce qui est inférieur au point de fusion de la couche de surface intérieure. Par conséquent, il ne semble pas possible de produire un film dans lequel la couche de surface intérieure a une température de fusion inférieur à celle de la couche extérieure et de la couche intermédiaire.
L'objet de la revendication 1 n'est pas nouveau par rapport au document D1. En particulier, le chapitre 5 de ce document décrit un procédé triple bulle à l'aide de l'exemple d'un polyamide mono- ou multicouche (voir les documents E13 à E15 pour une définition de "BOPA"), qui s'applique également à un film jusqu'à sept couches (voir D1, page 103, dernier paragraphe et page 104, premier paragraphe). Dans le premier paragraphe de la page 105, il est indiqué que le film est chauffé à 150 à 190°C lorsqu'il est gonflé à la troisième bulle. Etant donné que ce procédé peut être appliqué à la structure à cinq ou sept couches, chacune avec une couche extérieure de polyéthylène (voir D1 page 101, dernier paragraphe), l'objet de la revendication 1 n'est pas nouveau. Comme le document D1 présente toutes les caractéristiques du procédé selon la revendication 1, le produit ainsi obtenu selon la revendication 5 n'est pas nouveau par rapport à cet état de la technique.
En ce qui concerne l'activité inventive, le document D1 est l'état de la technique le plus proche. La différence par rapport à l'objet de la revendication 1 réside dans le fait que le film de l'étape c) selon la revendication 1 est chauffé à une température supérieure à la température de fusion de la couche de surface intérieure. La comparaison des exemples 1 et 5 avec les exemples 6 et 7, qui n'est pas selon l'invention, montre qu'il s'agit d'une sélection arbitraire sans aucun effet technique. La caractéristique distinctive est suggérée par les connaissances générales de l'homme du métier. Le document F4, par exemple, enseigne que la température de stabilisation au sens du brevet en litige détermine la température à laquelle le film se rétracte. Si l'on veut éviter le retrait lors du thermo-scellage, il faut choisir une température de stabilisation supérieure à la température de fusion de la couche de thermo-scellage. Déjà pour cette raison, l'objet de la revendication 1 n'est pas inventif pour l'homme du métier. L'expertise du Professeur Tervoort (document F5) arrive également à cette conclusion. Selon lui, il est bien connu avant 2006 que les films bi-axialement orientés de polyesters, polyoléfines et polyamides peuvent être soumis à des traitements de thermo-fixage pour augmenter la cristallinité du polymère dans le film, que plus la température de thermo-fixage est élevée, plus le degré de cristallinité du film est élevé et que plus le degré de cristallinité est élevé, meilleure est la résistance à la déchirure et la stabilité dimensionnelle du film. Ainsi, l'objet de la revendication 1 manque d'activité inventive à la lumière du document D1 seul ou en combinaison avec les documents F4 ou F5 (prouvant les connaissances générales de l'homme du métier). Cette argumentation est essentiellement la même si, au lieu du document D1, le document D10 est utilisé comme point de départ.
Alternativement, le document F1 (voir page 2, ligne 9 à 10 et page 2, ligne 65 à page 3, ligne 10) pourrait également être utilisé comme état de l'art le plus proche. Ce document montre un film de polyoléfine à deux couches qui, après orientation bi-axiale, est stabilisé à une température supérieure à la température de fusion de la couche de thermo-scellage. Là, l'orientation du film ne se fait pas au moyen d'une troisième bulle, mais au moyen d'un étirage, ce qui est équivalent pour l'homme du métier. La seule différence substantielle réside dans le fait qu'il n'y a pas de couche de polyamide. Le problème à résoudre par rapport au document F1 est de réaliser des films multicouches thermo-soudables améliorés pour l'emballage alimentaire. La solution selon le brevet en litige est de modifier la méthode du document F1 en insérant une couche de polyamide dans les films du document F1. Cette solution est évidente à la date de priorité, et bien avant. On sait depuis longtemps que les couches de polyamide ont des propriétés souhaitables dans les films d'emballage alimentaire multicouches et qu'elles sont bien adaptées à l'appariement avec les couches de thermo-scellage à base de polyoléfine. Par exemple, le document F2 décrit les films multicouches ayant une couche de polyamide et une couche de polyéthylène, pour l'emballage alimentaire (voir F2, colonne 1, lignes 11 à 14 et 18 à 22; colonne 6, lignes 14 à 15). Aussi le document F3 enseigne qu'une méthode de fabrication d'un film multicouche thermo-scellable, telle que celle décrite dans le document F1, pourrait être facilement modifiée par l'ajout d'une couche de polyamide. Il y a de nombreuses raisons de le faire, car les couches de polyamide sont connues pour donner aux films des propriétés barrières à l'oxygène et plus de résistance physique. L'objet de la revendication 1 manque d'activité inventive au regard du document F1 et de l'enseignement des documents F2 ou F3.
Motifs de la décision
1. Recevabilité du recours de la requérante I
1.1 La requérante II considère le recours de la requérante I comme irrecevable parce qu'elle n'a pas défini l'étendue du recours. A cet égard, elle renvoie aux dispositions de l'article 12 RPCR.
1.2 La chambre de recours constate tout d'abord que les conditions de recevabilité d'un recours ne sont pas fixées par l'article 12 RPCR.
En outre, il convient de noter que les conditions de la règle 99 CBE relatives à la recevabilité du recours de la requérante I sont remplies dans la mesure où l'acte de recours contient le nom et l'adresse de la requérante ainsi que l'indication de la décision attaquée et une requête définissant l'objet du recours. Par ailleurs, dans l'exposé des motifs du recours, la requérante I a présenté les motifs pour lesquelles il y a lieu d'annuler la décision attaquée ou la mesure dans laquelle elle doit être modifiée, ainsi les faits et les preuves sur lesquels son recours est fondé. Compte tenu de la modification de la revendication 8 présentée par la requérante I dans sa lettre du 26 octobre 2015 et du fait que la première requête subsidiaire déposée au cours de la procédure d'opposition se différencie des revendications telles que délivrées uniquement dans l'unité "N/15mm" de la revendication 5 (voir lettre de la titulaire du 30 juillet 2014, page 5), il n'y a aucune contradiction relative à la requête principale telle que déposée en procédure de recours.
Comme les exigences des articles 106 à 108 CBE et de la règle 97 CBE ont également été remplies, le recours de la requérante I est recevable.
2. Requête principale
2.1 Recevabilité
Étant donné que la requête principale a déjà été déposée en première instance en tant que première requête subsidiaire et qu'elle fait l'objet de la décision attaquée, son traitement n'est pas laissé à l'appréciation de la chambre de recours en vertu de l'article 12(4) RPCR. Cette requête doit donc être examinée dans le cadre de la procédure de recours.
2.2 Modifications
2.2.1 Dans la revendication 5, l'unité de la résistance à la délamination est modifiée de "N" à "N/15mm" par rapport à la version délivrée du brevet en litige. La chambre constate que dans la version originale de la demande de brevet, l'unité "N/15mm" est mentionnée à la page 17, dernier paragraphe, pour la résistance à la délamination.
Par conséquent, les exigences de l'article 123(2) CBE sont remplies.
2.2.2 En ce qui concerne une éventuelle extension ou un éventuel déplacement de la protection au sens de l'article 123(3) CBE causé par cette modification, la chambre de recours estime que l'homme du métier reconnaîtra que l'unité "N" pour la résistance à la délamination, au sens du brevet en litige, n'a pas de signification technique. Dans ces circonstances, il devrait déterminer l'étendue de la protection de la revendication 5 telle que délivrée par l'article 69(1) CBE 1973 en utilisant la description. Au paragraphe [0040] de la description du fascicule de brevet, il est clairement défini comment la résistance à la délamination est déterminée et qu'elle est exprimée dans l'unité "N/15mm". Sur cette base, l'homme du métier aurait interprété l'étendue de la protection de la revendication 5 telle que délivrée comme explicitement exprimée dans la présente revendication 5 modifiée.
Ainsi, les conditions de l'article 123(3) CBE sont remplies.
2.3 Exposé de l'invention
2.3.1 D'une manière générale, il est rappelé qu'une objection relative à l'insuffisance de l'exposé de l'invention ne peut aboutir que si de sérieuses réserves peuvent être formulées, celles-ci étant étayées par des faits vérifiables. Pour que l'insuffisance de l'exposé soit établie dans des procédures inter-partes, il appartient à l'opposante de prouver, selon la "balance des probabilités", qu'un homme du métier lisant le brevet serait incapable d'exécuter l'invention à partir de ses connaissances générales de base (voir La Jurisprudence des Chambres de recours de l'Office européen des brevets, neuvième édition, juillet 2019, II.C.9). En l'espèce, les allégations d'une insuffisance de l'exposé de l'invention formulées par les requérantes II et III ne sont pas étayées par des faits vérifiables.
2.3.2 En ce qui concerne la revendication 1, la requérante II fait valoir essentiellement qu'il n'est pas possible pour l'homme du métier de régler exactement la température de stabilisation du film à 100°C (la température de fusion du polyéthylène) pendent l'étape c) comme dans les exemples 1 à 5 du brevet.
A cet égard, la chambre note que la caractéristique c) de la revendication 1 définit simplement que la température de stabilisation doit être supérieure ou égale à la température de fusion de la polyoléfine majoritaire. Il n'est pas nécessaire que la température de fusion soit atteinte avec précision; ceci n'est donc pas un obstacle pour l'homme du métier dans l'exécution de l'invention revendiquée. Il en va de même dans le cas d'un mélange de polyoléfines : dans ce cas, la revendication 1 spécifie que la température de fusion du polyoléfine majorité constitue la limite inférieure de la température de stabilisation.
2.3.3 La revendication dépendante 2 définit que le traitement thermique de l'étape c) s'effectue au moyen d'un four infrarouge et que la température de stabilisation du film doit être comprise entre 80 et 150°C. Ainsi, selon la revendication 2, comme selon la revendication 1, il n'est pas nécessaire que la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire de la couche de surface intérieure du film soit atteinte exactement à un degré près. Quant à la revendication 3, le paragraphe [0030] du brevet explique comment mettre en ½uvre un taux de relaxation TD dans la troisième bulle. Concernant le taux d'étirement transversal TD de la revendication 4, il est fait référence au paragraphe [0025] du brevet.
2.3.4 Dans la décision attaquée (voir point 9 des motifs), la division d'opposition a estimé que la divulgation de la caractéristique de la résistance à la délamination dans la revendication 5 était insuffisante, car il n'était pas clair si, dans la méthode de détermination visée au paragraphe [0040] du brevet, selon laquelle le film doit être soudé sur lui-même, la couche de surface intérieure était soudée sur la couche de surface extérieure, ou bien si la couche de surface intérieure était soudée sur la couche de surface intérieure.
La chambre observe que, selon le paragraphe [0035], la procédure décrite au paragraphe [0040] concerne spécifiquement la mesure de la résistance au délaminage du film produit conformément aux paragraphes [0033] à [0034] et aux tableaux I et II. Il en ressort que la température de soudage de 110°C expressément mentionnée au paragraphe [0040] est adaptée aux matériaux du film dans les exemples 1 à 5. Étant donné que, d'après ces exemples, la couche extérieure est constituée d'un PET avec une température de fusion de 220°C et la couche intérieure d'un polyéthylène avec une température de fusion de 100°C (voir tableau I du brevet), à une température de soudage de 110°C, seule la soudure de la couche intérieure sur la couche intérieure est faisable. Ainsi, pour l'homme du métier, le brevet définit clairement comment déterminer la résistance au délaminage revendiquée.
Le requérante II critique également que le brevet ne montrait pas clairement comment les valeurs de résistance au déchirement et de la résistance au délaminage définies dans la revendication 5 pourraient être atteintes. À cet égard, la chambre renvoie au paragraphe [0010] du brevet, où il est expliqué que la température de stabilisation telle que définie par la revendication 1 entraînait une augmentation de la résistance au déchirement et de la résistance à la délamination. Pour les exemples 1 à 5 du brevet les matériaux de départ sont énumérés dans le tableau I et les conditions opératoires sont indiquées dans le tableau II. La divulgation de l'objet de la revendication 5 est donc suffisante pour l'homme du métier.
2.3.5 Concernant la revendication 6, le paragraphe [0045] du brevet explique que plus la température de stabilisation appliquée sur le film tubulaire de la troisième bulle était élevée, plus le taux de rétraction du film multicouche diminuait et plus le taux de relaxation appliqué sur le film de la troisième bulle était élevé, plus le taux de rétraction diminuait. La mesure du taux de rétraction est définie dans le paragraphe [0037] du brevet. Dans le paragraphe [0012] du brevet, il est expliqué que le taux de rétraction est ajusté en réglant la température de stabilisation et le taux de relaxation. De plus, des informations détaillées concernant la mesure du taux de rétraction sont fournies dans le paragraphe [0037] du brevet.
2.3.6 Quant à la revendication 7, il est expliqué au paragraphe [0012] du brevet que la contrainte de rétraction est ajustée en réglant la température de stabilisation et le taux de relaxation. De plus, des informations concernant la mesure de la contrainte de rétraction sont fournies dans le paragraphe [0041] du brevet. Les objections concernant une incohérence entre l'exemple 3 et la revendication 7 visent la clarté, mais pas l'exposé de l'objet tel que défini dans la revendication 7.
2.3.7 La revendication 9 ne prescrit pas qu'une couche adhésive doit être prévue entre chacune des trois couches mentionnées, et encore moins que l'adhésif utilisé doit avoir une température de fusion de 97°C. La revendication 9 concerne plutôt la relation entre les températures de fusion de la couche extérieure, de la couche de surface intérieure et de la couche intermédiaire. La possibilité d'une couche adhésive additionnelle avec une température de fusion de 97°C ne s'y oppose pas et ne fait pas obstacle à la réalisation de l'invention.
2.3.8 Par conséquent, l'invention telle que définie par les revendications de la requête principale est divulguée de façon suffisamment claire et complète pour être mise en ½uvre par un homme du métier (article 100 b) CBE 1973).
2.4 Nouveauté
2.4.1 La question de la nouveauté dépend principalement de la question de savoir si les températures du film pendant l'étape c) mentionné au chapitre 5 du document D1 sont divulguées directement et sans ambiguïté en combinaison avec les matériaux des couches du chapitre 3 de ce document. A cet égard, il convient de noter que le chapitre 5 mentionne la température entre 150 et 190°C, qui dépend toutefois du matériau (voir D1, page 105, premier paragraphe). En outre, un certain nombre de matériaux sont énumérées à la page 106, mais sans information sur la séquence concrète des couches. Il en va de même pour la référence générale à une structure à sept couches à la page 104, premier paragraphe, et aux polymères qui sont mentionnés au troisième paragraphe de cette page. Au chapitre 6, les propriétés physiques du film semblent être décrites sur la base d'un film polyamide monocouche et d'un film multicouche avec un LLDPE comme couche centrale du film (voir D1, page 107, deuxième paragraphe et tableau 6.1; page 108, premier paragraphe). Néanmoins, la structure à cinq ou sept couches du film selon le chapitre 6 ne correspond pas à celle de la revendication 1, en particulier en termes de couche de surface intérieure en polyoléfine. Bien que le chapitre 3 du document D1, au dernier paragraphe de la page 101, mentionne un film avec une séquence de couches correspondant à celle de la revendication 1 du brevet, il n'est pas indiqué sans équivoque et directement que ce film spécifique est chauffé à l'étape c) à la température de 150 à 190°C généralement mentionnée au chapitre 5. Cette conclusion n'est pas remise en cause par le contenu des documents E13 à E15 (dans la mesure où ils appartiennent à l'état de la technique).
L'objet de la revendication 1 de la requête principale est donc nouveau en ce qui concerne la divulgation du document D1 (article 54(1) et (2) CBE 1973).
2.4.2 En ce qui concerne le film de la revendication 5 obtenu par le procédé de la revendication 1, il est observé que le document D1 ne mentionne pas la résistance au déchirement et à la délamination revendiquée pour le film multicouches selon la revendication 5. Le procédé de la revendication 1 n'étant pas divulgué dans le document D1, ces paramètres du film n'y sont pas non plus implicitement divulgués.
L'objet de la revendication indépendante 5 de la requête principale est donc lui aussi nouveau au sens de l'article 54(1) et (2) CBE 1973.
2.5 Activité inventive
2.5.1 Il y a consensus entre les parties que le document D1 ne décrit pas la caractéristique de la revendication 1 que la température de stabilisation est égale ou supérieure à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire d'une couche de surface intérieure de thermo-scellage.
2.5.2 En ce qui concerne l'effet technique de cette caractéristique distinctive, la chambre renvoie en particulier au tableau II du brevet en litige, où une comparaison des exemples 2, 4 et 5 avec l'exemple comparatif montre que l'augmentation de la température à l'étape c) de 91°C à la température de fusion du polyéthylène de 100°C (avec les mêmes matériaux et le même taux de relaxation au stade de la troisième bulle) augmente la résistance au déchirement et à la délamination.
Ainsi, le problème technique objectif est d'augmenter la résistance au déchirement et à la délamination de la couche intérieure de thermo-scellage du reste de la structure (voir paragraphe [0010] du brevet).
2.5.3 En ce qui concerne l'évidence de la solution revendiquée, les requérantes II et III se réfèrent aux connaissances générales de l'homme du métier qu'ils étayent par l'extrait F4 et par l'expertise F5. A cet égard, il convient tout d'abord de noter que le document de départ D1 divulgue à la page 105, premier paragraphe, que la température de stabilisation (150 à 190°C) est inférieure à la température de fusion (220°C) de la résine majoritaire de la couche de surface du film BOPA. Cet enseignement du document D1 va à l'encontre de la solution revendiquée.
De plus, le document F4 ne décrit ni une structure multicouche telle que spécifiée dans la revendication 1 ni l'ajustement de la température de stabilisation dans la troisième bulle d'un procédé triple bulle tel que défini par la partie caractérisante de la revendication 1. Le document F4 va plutôt dans la direction opposée en conseillant de ne réchauffer le film qu'à presque la température de fusion (voir F4, page 418, ligne 2 : "film is heated to near Tm").
De même, le rapport F5 et les documents qui y sont cités (documents F4 et F7 à F10) ne contiennent aucune référence à choisir une température de stabilisation égale ou supérieure à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire d'une couche de surface intérieure de thermo-scellage ou ses effets techniques. Tous ces documents mentionnés suggèrent à l'homme du métier que la température de stabilisation devrait être élevée, mais pas supérieure à la température de fusion de la couche de surface intérieure. Ils ne peuvent donc pas suggérer l'objet de la revendication 1, qui exige que la température de stabilisation soit égale ou supérieure à la température de fusion de la résine polyoléfine majoritaire d'une couche de surface intérieure de thermo-scellage.
2.5.4 Pour ces raisons, l'objet de la revendication 1 de la requête principale fait preuve d'une activité inventive partant du document D1 (article 56 CBE 1973).
Étant donné que l'objet de la revendication 1 diffère du document D10 par la même caractéristique distinctive, cette conclusion s'applique également si le document D10 sert de point de départ.
2.5.5 Alternativement, le document F1 est indiqué comme état de l'art le plus proche. Ce document ne décrit pas un procédé à triple bulle mais un procédé d'étirement. Il manque dans ce document la divulgation de la structure multicouche, en particulier de la couche intermédiaire comprenant une résine polyamide, et des étapes a) à c) de la revendication 1.
Même si on voyait le problème technique objectif dans la réalisation des films multicouches thermo-soudables améliorés pour l'emballage alimentaire, la solution revendiquée n'est pas évidente au regard des documents F2 ou F3. Le document F2 décrit des films multicouches comprenant un film à base de polyamide qui peut être formé selon "any of the various known methods used for manufacturing laminates" (voir F2, colonne 5, lignes 51 à 53). Aucune autre indication n'est fournie concernant ces procédés. Ce document, comme le document F3, ne divulgue ni la structure multicouche telle que définie à la revendication 1, ni le procédé à triple bulle, ni le problème de résistance au déchirement et à la délamination.
Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête principale implique une activité inventive au sens de l'article 56 CBE 1973 par rapport aux documents F1, F2 et F3.
2.5.6 Par souci d'exhaustivité, il est ajouté que les documents cités ne mentionnent pas la résistance au déchirement et à la délamination revendiquée pour le film selon la revendication indépendante 5 de la requête principale.
Par conséquent, l'objet de la revendication 5 implique également une activité inventive selon l'article 56 CBE 1973.
3. Conclusion
Pour ces raisons, aucune des objections soulevées par les requérantes II et III ne s'oppose au maintien du brevet contesté sur la base des revendications de la requête principale.
4. Droit d'être entendu
4.1 Dans leurs lettres du 18 octobre 2019 et du 8 novembre 2019, respectivement, les requérantes II et III ont indiqué qu'elles ne participeraient pas à la procédure orale prévue pour le 21 novembre 2019.
4.2 En principe, la chambre n'est pas tenue de tenir une procédure orale en l'absence d'une partie avant de se prononcer contre elle si elle a été informée à l'avance de la non-participation de celle-ci à la procédure orale. Étant donné que tel était le cas en l'espèce, la chambre de recours a pu statuer sur les recours sans tenir une procédure orale, tout en respectant le droit à être entendu.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet sur la base des revendications suivantes et une description à adapter :
Revendications :
N**(o) 1 à 9 de la requête principale produite avec lettre du 26 octobre 2015.
3. Les recours des requérantes II et III sont rejetés.