European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2019:T092414.20190403 | ||||||||
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Date de la décision : | 03 Avril 2019 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0924/14 | ||||||||
Numéro de la demande : | 05825868.2 | ||||||||
Classe de la CIB : | G11C 16/02 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Mémoire PMC ayant un temps de rétention et une vitesse d'écriture améliorés | ||||||||
Nom du demandeur : | Commissariat à l'Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.5.07 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée (non) Revendications - clarté après modification (oui) Nouveauté - (oui) Activité inventive - (oui) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le requérant forma un recours contre la décision de la division d'examen de refuser la demande de brevet européen no. 05825868.2, déposée comme demande internationale PCT/FR2005/051114 et publiée sous
WO 2006/070151. La décision se référa explicitement aux documents suivants :
D1 : US2003/0209728 A1, publié le 13 novembre 2003
D2 : US2003/0209971 A1, publié le 13 novembre 2003
II. La division d'examen décida que :
- la requête principale et la première requête subsidiaire n'étaient pas brevetables car la revendication 1 de chacune de ces requêtes ne satisfaisait pas aux exigences de l'article 84 et de la règle 43(1) CBE, et car la revendication 1, ainsi que la revendication indépendante 16 de chacune de ces requêtes, manquaient de nouveauté par rapport à D1 d'une part, et à D2 d'autre part (article 54 CBE) ;
- concernant la deuxième requête subsidiaire, sa mise en forme en deux parties ne tenait pas compte des caractéristiques divulguées dans D1 contrairement aux exigences de l'article 84 CBE et de la règle 43(1) CBE. Cette deuxième requête subsidiaire n'était donc pas acceptable non plus.
III. Avec le mémoire de recours, le requérant déposa une requête principale et trois requêtes subsidiaires.
IV. En réponse à une notification de la Chambre établie conformément à l'article 15(1) RPCR accompagnant une citation à une procédure orale selon la règle 115(1) CBE, le requérant, par lettre du 21 décembre 2018, déposa une nouvelle requête principale et cinq requêtes subsidiaires.
V. Par fax daté du 17 janvier 2019, la procédure orale prévue le 23 janvier 2019 fut annulée. Le requérant fut informé qu'une nouvelle communication de la Chambre suivrait.
VI. Dans une nouvelle communication de la Chambre datée du 28 janvier 2019, la Chambre indiqua qu'elle prévoyait d'annuler la décision contestée et de renvoyer l'affaire à la division d'examen avec l'ordre de délivrer un brevet sur la base de la requête principale déposée le 21 décembre 2018 mais indiqua quelques modifications qui restaient encore à effectuer par le requérant.
VII. Par lettre du 27 février 2019 le requérant déposa un nouveau jeu de revendications 1 à 17, ainsi qu'une nouvelle description comprenant des pages numérotées 1 à 16.
VIII. Le requérant demande que la décision attaquée soit annulée et qu'un brevet soit délivré sur la base des revendications 1 à 17 et de la description, pages 1 à 16, déposées le 27 février 2019, ainsi que - implicitement selon la compréhension de la Chambre - sur la base des pages 1/4 à 4/4 des figures telles que déposées à l'origine.
IX. La revendication 1 est rédigée comme suit :
"Mémoire à conduction ionique PMC comportant une cathode inerte (6), une anode soluble (8) et un électrolyte solide (4) placé entre ladite cathode et ladite anode, caractérisée en ce qu'elle comporte une résistance (20) chauffante pour chauffer l'électrolyte solide, située à proximité de ce dernier, pour porter celui-ci, transitoirement lors d'une écriture dans la mémoire, à une température d'écriture supérieure à sa température de fonctionnement en dehors de l'étape d'écriture."
Les revendications 2 à 14 dépendent, directement ou indirectement, de la revendication 1.
La revendication 15 définit une :
"Matrice de mémoires à conduction ionique selon l'une des revendications 1 à 14, comportant des moyens d'adressage de lignes (WL), des moyens d'adressage de colonnes (BL), et des moyens d'adressage des résistances (20) chauffantes."
La revendication 16 définit un :
"Procédé de fonctionnement d'une mémoire à conduction ionique selon l'une des revendications 1 à 14, dans lequel, lors d'une phase d'écriture dans la mémoire :
- on applique une tension d'écriture à l'électrolyte solide (4),
- à l'aide de la résistance (16, 18, 20) chauffante, on porte 1'électrolyte solide (4) transitoirement, à une température d'écriture supérieure à sa température de fonctionnement en dehors de l'étape d'écriture."
La revendication 17 dépend de la revendication 16.
Motifs de la décision
1. Le recours est conforme aux provisions énoncées à la règle 101 CBE et est donc recevable.
L'invention
2. La demande concerne les cellules mémoires à conduction ionique, dites "PMC" en anglais ("PMC" pour
« programmable metallization cells »).
2.1 Le principe de fonctionnement des mémoires PMC repose sur la migration d'ions (par exemple Ag+) dans un électrolyte solide (par exemple GeSe) placé entre une cathode inerte (par exemple en Ni) et une anode soluble (par exemple en Ag) (voir description telle que déposée, à la page 3, lignes 9 à 13).
2.1.1 A un état "OFF", des ions sont dispersés dans la matrice formant une phase de grande résistivité. En appliquant une différence de potentiel de quelques 100 mV entre l'anode et la cathode sous la forme d'une impulsion de quelques 10 ns, les ions migrent vers la cathode en formant un dépôt métallique. On obtient ainsi l'état "ON", de basse résistivité (description, page 3, lignes 20 à 26).
2.1.2 En appliquant une différence de potentiel de même intensité et durée mais de signe opposé, le dépôt métallique se redissout sous forme d'ions dans l'électrolyte et on revient à l'état OFF (description, page 3, lignes 27 à 30).
2.1.3 Le signal de lecture résulte de la différence de résistivité électrique entre ces deux états "ON" et "OFF" (description, page 3, lignes 17 à 19).
2.2 L'inconvénient des mémoires PMC telles que décrites dans l'état de l'art est qu'elles ne permettent pas d'obtenir à la fois un temps d'écriture court et un temps de rétention long, ces deux paramètres variant en sens opposé : lorsqu'on atteint une vitesse d'écriture rapide, le temps de rétention est trop court, et lorsque ce dernier devient plus long, on constate en général un ralentissement de la vitesse d'écriture (description, page 4, lignes 9 à 17).
2.3 L'invention propose une structure PMC comportant un élément chauffant pour que la température du matériau actif au moment de l'écriture augmente localement au niveau du point mémoire et transitoirement au moment de l'écriture (description, page 4, lignes 26 à 29, et page 5, lignes 5 à 7).
2.4 La température d'un point mémoire lorsque la mémoire est utilisée en dehors de l'étape d'écriture, ou température de fonctionnement de la mémoire (Tf), est supérieure à la température ambiante, de l'ordre de
80° C (description, page 5, lignes 8 à 13).
2.4.1 Dans une structure PMC de l'art antérieur, la température atteinte pendant l'étape d'écriture, ou température d'écriture de la mémoire (Te), est égale à sa température de fonctionnement (Tf) (description, page 5, lignes 16 à 18).
2.4.2 Dans une structure PMC selon l'invention, la température d'écriture (Te) est supérieure à la température de fonctionnement (Tf), tout en restant inférieure à la température de transition vitreuse du matériau constitutif de l'élément actif de la mémoire, par exemple du chalcogénure amorphe. Cette température d'écriture peut atteindre 150° C (description, page 5, lignes 21 à 26, et page 15, lignes 15 à 23).
2.4.3 Une telle mémoire pour laquelle on augmente localement et transitoirement la température du point mémoire au moment de l'écriture, par exemple à une température comprise entre 300 K et 450 K, est appelée dans la demande "mémoire à écriture assistée thermiquement" (description, de la page 5, ligne 30, à la page 6, ligne 3).
2.4.4 Ainsi le coefficient de diffusion chimique de ce système est faible à la température de fonctionnement de la mémoire, mais le coefficient de diffusion sous champ électrique est élevé au cours de l'étape d'écriture. Il en résulte une augmentation du temps de rétention et de la vitesse d'écriture (description, page 6, lignes 4 à 10).
Modifications, support
3. La Chambre considère que la revendication 1 se fonde sur la revendication 1 d'origine, et l'expression "à conduction ionique" pour caractériser la mémoire PMC se base sur la description telle que déposée, notamment sur le fait que le matériau actif considéré soit à conduction ionique (voir description telle que déposée de la page 2, ligne 30, à la page 3, ligne 3, ainsi qu'à la page 3, lignes 9 à 30, où la migration d'ions est décrite). La structure de la mémoire PMC ayant une cathode inerte, une anode soluble et un électrolyte solide placé entre ladite cathode et ladite anode, est décrite à la page 3, lignes 9 à 13, de la description. Les caractéristiques et fonctionnalité de la résistance chauffante se fondent sur la description, de la page 4, ligne 26, à la page 5, ligne 7, à la page 5, lignes 21 à 26, et de la page 5, ligne 30 à la page 6, ligne 3. La caractéristique que la résistance chauffante est située à proximité de l'électrolyte solide provient de la page 6, lignes 24 à 26, et de la page 8, lignes 6 à 8, de la description.
La revendication 16 définit le procédé de fonctionnement de la mémoire correspondant et se base sur l'ensemble de la description et des figures telles que déposées.
Les revendications dépendantes 2 à 9 se fondent sur les revendications dépendantes 2 à 9 telles que déposées à l'origine. La revendication dépendante 10 se fonde sur la revendication dépendante 10 ainsi que sur la page 8, lignes 15 à 19 de la description, telles que déposées à l'origine. Les revendications dépendantes 11 à 14 se fondent sur les revendications dépendantes 11 à 14 telles que déposées à l'origine (avec quelques modifications). La revendication 15 se base sur la revendication 15 telle que déposée à l'origine. La revendication dépendante 17 se base sur la description telle que déposée (page 15, lignes 15 à 23, la valeur de 353,15 K correspondant à 80 °C ; de la page 5, ligne 30, à la page 6, ligne 3).
Clarté (article 84 CBE)
4. La revendication 1 de la requête principale définit une mémoire à conduction ionique PMC comportant une cathode inerte, une anode soluble et un électrolyte solide placé entre ladite cathode et ladite anode,
caractérisée en ce qu'elle comporte
(a) une résistance chauffante pour chauffer l'électrolyte solide, située à proximité de ce dernier, pour porter celui-ci, transitoirement lors d'une écriture dans la mémoire, à une température d'écriture supérieure à sa température de fonctionnement en dehors de l'étape d'écriture.
4.1 Dans les motifs de la décision de refus, à la section 1 aux pages 2 et 3, la division d'examen avait expliqué que la revendication 1 de la requête principale d'alors mentionnait deux contacts d'une cellule mémoire pour l'application d'une tension d'écriture dans la cellule, donc deux contacts qui convenaient à l'application d'une tension d'écriture, caractéristique qui en fait serait remplie par "n'importe quel type de contact y compris les contacts qui ne servent a priori que pour la lecture comme dans D2 ((120),(130))".
La revendication 1 de la requête actuelle ne mentionne plus de contacts, donc cette objection ne s'applique plus. Il est à noter toutefois que l'homme de métier, ayant connaissance des mémoires à conduction ionique PMC de l'art antérieur, saurait comment utiliser la mémoire à conduction ionique PMC de la revendication 1 en appliquant une différence de potentiel entre l'anode et la cathode via des contacts externes à la mémoire, accolés à celles-ci par exemple, pour écrire des données dans la mémoire.
4.2 Concernant la caractéristique (a), dans les motifs de la décision de refus (section 1, page 3), la division d'examen avait souligné que la revendication 1 d'alors définissait une résistance chauffante qui convenait à l'échauffement de la cellule mémoire (ou plutôt de la zone active ou électrolyte solide) à une température d'écriture supérieure à la température de fonctionnement, caractéristique qui serait remplie, selon la division d'examen, par "n'importe quelle résistance ayant une résistivité faible et qui se situe à proximité de la zone active: lorsque que celle-ci est parcourue par un courant, elle est capable par effet Joule de chauffer la zone active".
Le requérant a fait valoir dans son mémoire de recours que, dans une mémoire PMC, le courant qui pourrait éventuellement circuler dans la zone active est extrêmement faible, et a attiré l'attention de la Chambre sur les explications données dans la demande, en liaison avec les Figures 1 et 2. Il ne serait donc pas réaliste de parler d'un quelconque effet Joule.
Il a aussi insisté sur le fait qu'une résistivité n'équivalait pas à une résistance.
Or, selon la Chambre, il n'apparaît pas de ces explications des Figures 1 et 2 quelles intensités le courant circulant dans la zone active atteindrait.
(Il est à noter que la résistance considérée par la division d'examen n'était pas la zone active où pourrait circuler un courant, mais la partie "gauche" de l'électrode 130 de D1.)
Par contre, la Chambre est d'avis qu'en effet le terme "une résistance", en électricité, a une signification bien précise. C'est un composant électrique qui possède deux bornes qui peuvent laisser entrer ou sortir le courant électrique, donc un dipôle, pour lequel la tension entre les bornes est proportionnelle à l'intensité du courant qui le traverse. On peut l'appeler conducteur ohmique, ou résistor, ou bien encore "résistance" (il est à noter que le quotient de la tension U entre les bornes d'une résistance par l'intensité I du courant qui la traverse, i.e. R=U/I, est aussi appelée "résistance").
Il est vrai que toute résistance traversée par un courant électrique non nul est le siège d'un dégagement de chaleur, ce phénomène étant dénommé "effet Joule". L'énergie électrique dissipée en chaleur par une résistance soumise à un courant I pendant une durée t est ainsi W=R*I**(2)*t.
Par contre, un autre paramètre important est la capacité thermique ou calorifique d'un corps, c'est-à-dire l'énergie qu'il faut apporter à un corps pour augmenter sa température de 1 degré Kelvin. Elle s'exprime en Joule/Kg/Kelvin. Elle dépend du matériau. Plus la capacité thermique d'un corps est grand, plus il faut d'énergie pour élever sa température.
L'expression "résistance chauffante" de la présente revendication 1 définit, au moins de manière implicite, que cette résistance est conçue pour chauffer. Une telle résistance chauffante peut être en un métal tel que l'aluminium, le cuivre, le tungstène, le titane ou le nitrure de titane par exemple. L'homme de métier, un électronicien ayant des connaissances en thermodynamique, saurait choisir et déterminer un métal approprié. Il saurait aussi calculer la distance entre la résistance et l'électrolyte solide, selon les paramètres de la résistance, entre autres sa longueur par exemple, et selon la capacité thermique de l'électrolyte considéré, ceci pour que la résistance chauffante chauffe l'électrolyte solide (transitoirement lors d'une écriture dans la mémoire) à une température d'écriture supérieure à sa température de fonctionnement en dehors de l'étape d'écriture.
4.3 Dans sa décision de refus, à la page 3, la division d'examen avait argumenté que les caractéristiques essentielles suivantes n'étaient pas présentes dans la revendication 1, contrairement aux exigences qui découlent de l'article 84 et de la règle 43(1) et (3) CBE :
- la mémoire comprend des moyens d'écriture capables pendant l'écriture d'appliquer une tension d'écriture aux deux contacts et d'appliquer une impulsion de chauffage à la résistance chauffante de manière à porter la zone active à la température d'écriture (la division d'examen se référa aux pages 8 et 9 de la description) ;
- la résistance chauffante peut intervenir uniquement pendant l'écriture, c'est-a-dire peut être adressée indépendamment et de manière additionnelle aux contacts appliquant les tensions de lecture et d'écriture.
Or la Chambre est d'avis que la formulation de ces caractéristiques sous forme de définition fonctionnelle, i.e. sous forme de la caractéristique (a) telle que formulée dans la revendication 1, est acceptable et reflète ces caractéristiques de façon intrinsèque. En effet, la revendication 1 définit une mémoire à conduction ionique PMC qui comporte une résistance chauffante pour porter l'électrolyte solide de la mémoire, "transitoirement lors d'une écriture dans la mémoire, à une température d'écriture supérieure à sa température de fonctionnement en dehors de l'étape d'écriture" (soulignements par la Chambre). Ceci exprime donc une période transitoire, donc une période qui a une durée limitée, qui correspond à la période d'écriture dans la mémoire, pendant laquelle la résistance chauffante porte l'électrolyte solide à une température d'écriture supérieure à sa température de fonctionnement. La température de fonctionnement est la température en dehors de l'étape d'écriture, c'est-à-dire avant ou après cette étape d'écriture.
Nouveauté (article 54 CBE)
5. Dans le paragraphe 2.1 de la décision attaquée, la division d'examen avait analysé la structure de la mémoire décrite dans le document D1, Figure 1, comme comportant, d'une part, des contacts pour 1'application d'une tension d'écriture, et, d'autre part, une résistance chauffante : pour ce faire, elle avait procédé à un « découpage virtuel », entre partie droite et partie gauche, des électrodes 120 et 130.
Ce découpage virtuel des électrodes de D1 (ou de D2) a été schématisé ci-dessous par la Chambre :
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
5.1 Le requérant avait alors argumenté dans son mémoire de recours que l'approche de la division d'examen dans son analyse était tout à fait irréaliste et ne correspondait pas à la lecture que l'homme de métier ferait du document D1 (ou du document D2), ni à la "réalité" technique qui était décrite dans le document D1 (ou D2). Cette interprétation faite des électrodes ne correspondrait pas au contenu technique de ce document. En outre, aucun élément du document D1 (ou D2) ne pourrait être vu comme un élément de chauffage. Rien ne suggérerait dans l'art antérieur de considérer une même électrode comme étant, d'une part, le contact pour l'application d'une tension d'écriture dans la cellule, et, d'autre part, une résistance chauffante. Cette démarche de couper virtuellement l'électrode impliquerait de multiplier les zones de contact et rendrait plus complexe la fabrication de la mémoire.
5.2 Dans sa décision de refus, la division d'examen, à la section 2.1, page 3, avait indiqué que, dans D1, respectivement D2, la résistance chauffante était considérée comme la "partie gauche de l'électrode (130)". La partie gauche de l'électrode 130 était formée d'un matériau inerte tel que le "tungstène, nickel, molybdène, platine, [...], et autres matériaux similaires" (se référant à D1, paragraphe [0041], voir aussi D2, paragraphe [0047]). La division d'examen avait indiqué la résistivité de certains de ces matériaux afin de montrer que celles-ci étaient équivalentes à la résistivité de la résistance chauffante de la demande faite elle de nitrure de titane (TiN) (voir description de la demande telle que déposée, à la page 9, ligne 8). Cette partie gauche de l'électrode 130 constituant la cathode aurait ainsi agi comme une résistance chauffante.
5.3 Cependant, la Chambre ne comprend pas comment cette partie "gauche" de la cathode 130 pourrait être considérée comme une résistance puisque toute cette partie est globalement au même potentiel.
Il se peut que la division d'examen ait considéré la description de la demande telle que déposée, à la page 9, lignes 17 à 24, qui évoque, dans le cas de la figure 6 où l'élément chauffant 20 est placé directement sous la cathode inerte 6, que l'élément chauffant 20 puisse même être utilisé comme cathode.
Or la Chambre est d'avis que cela ne signifie pas que toute cathode puisse être assimilée à un élément chauffant ou qui plus est à une résistance chauffante de la revendication 1.
5.4 Si l'intention de la division d'examen était d'écrire que les deux parties gauche de l'anode et de la cathode, par rapport à la ligne de partage virtuel, ainsi que le conducteur ionique qu'elles prennent en "sandwich", et situé à gauche de la ligne de partage virtuel, formaient une résistance chauffante au sens de la revendication 1 qui chaufferait la partie du conducteur ionique située à droite de la ligne de partage virtuel, la Chambre considère cette interprétation de la résistance chauffante définie par la revendication 1 comme artificielle.
5.5 Quand bien même l'homme de métier considérerait ces deux parties gauche de l'anode et de la cathode, ainsi que la partie du conducteur ionique qu'elles prennent en "sandwich" situé à gauche de la ligne de partage virtuel, comme une résistance séparée au sens de la revendication 1, la question est si cette entité pourrait constituer une résistance chauffante qui chaufferait le conducteur ionique situé à droite de la ligne de partage virtuel.
La Chambre rappelle qu'une résistance chauffante est un matériau conducteur présentant une résistance électrique au passage d'un courant qui la porte à une température donnée par effet joule.
Le requérant avait objecté, dans son mémoire de recours, à la section 2.1. C, que l'effet Joule ne dépendait pas seulement de la résistivité du matériau et de la densité du courant qui le parcourait mais surtout de la grandeur "résistance" en ohms, c'est-à-dire de paramètres géométriques associés tels que la longueur et la section de la portion de matériau parcourue.
Rien n'indique aussi, dans D1 ou D2, que la capacité calorifique de la zone active d'une mémoire à conduction ionique qui y est décrite serait suffisamment faible par rapport à l'effet Joule produit par l'entité formée des deux parties de l'anode et de la cathode de ladite mémoire, ainsi que du conducteur ionique que cette cathode et cette anode prennent en "sandwich", situés à gauche de la ligne de partage virtuel, pour que la température de cette zone active augmente par cet effet Joule. Aucune partie de D1 et D2 ne décrit un élément pour chauffer l'électrolyte de la mémoire à conduction ionique pendant l'écriture dans la mémoire.
5.6 Il semblerait que, pour la première requête auxiliaire sujette de la décision de rejet, la division d'examen avait fait une lecture différente, et donc un découpage "virtuel" différent, c'est-à-dire à la fois vertical et horizontal, de la Figure 1 des documents D1 ou D2.
Ce découpage est schématisé par la figure suivante (cependant adapté aux dénominations de la revendication 13 et aux vues des Figures 3A et 3B de la demande) :
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
5.7 Selon la division d'examen, la partie haute de l'électrode 130 formant la cathode constituait une résistance chauffante.
La Chambre ne considère pas que la partie "droite" de l'anode et la partie basse de la cathode permettent de chauffer la partie haute de la cathode. Il semblerait que la division d'examen ait considéré la situation particulière de la Figure 6 de la demande. En effet, dans la présente demande, page 8, lignes 24 à 26, il est proposé que l'élément chauffant soit situé "au plus près de l'élément actif 4", ce qui est le cas de la partie haute de la cathode.
La Chambre est d'avis que cette interprétation de D1 est artificielle et ne correspond pas à ce que D1 enseigne. Quand bien même l'homme de métier effectuerait un tel découpage de la Figure 1 de D1 (ou de D2), la partie haute de la cathode ne serait pas considérée comme une résistance chauffante pour l'homme de métier (voir aussi le point 4.2 supra soulignant que l'expression "résistance chauffante" de la revendication 1 définit que cette résistance est conçue pour chauffer).
5.8 En fait, ni D1, ni D2, ne mentionnent la présence d'une résistance chauffante pour chauffer la zone active transitoirement lors d'une écriture dans la mémoire.
5.9 La Chambre est donc d'avis que la caractéristique distinctive (a) de la revendication 1 rend cette dernière nouvelle par rapport à D1 ou à D2.
5.10 Ce même raisonnement s'applique également au procédé correspondant défini par la revendication indépendante 16, ainsi qu'à la matrice de mémoires à conduction ionique de la revendication 15.
Activité inventive (article 56 CBE)
6. La partie caractérisante (a) de la revendication 1 constitue la caractéristique distinctive de la mémoire à conduction ionique PMC de la revendication 1 par rapport aux mémoires à conduction ionique PMC de l'art antérieur d'une part, et par rapport à D1 et à D2 d'autre part.
6.1 L'effet technique atteint est que même si le coefficient de diffusion chimique de l'électrolyte solide est choisi faible à la température de fonctionnement de la mémoire, permettant donc d'obtenir un temps de rétention plus long, ce coefficient de diffusion chimique devient plus élevé au cours de l'écriture sous champ électrique, lorsque l'électrolyte solide est chauffé, permettant ainsi une vitesse d'écriture plus élevée.
6.2 Le problème à résoudre est donc d'obtenir à la fois un temps d'écriture court et un temps de rétention long (voir point 2.2 ci-dessus).
6.3 La solution énoncée par la revendication 1 est d'introduire dans la mémoire à conduction ionique PMC une résistance chauffante pour chauffer, transitoirement lors d'une écriture dans la mémoire, l'électrolyte solide, et située à proximité de ce dernier.
6.4 La Chambre considère la revendication 1 inventive par rapport aux mémoires à conduction ionique PMC de l'art antérieur, et par rapport à D1 et à D2. En effet, rien dans l'état de l'art décrit dans la demande, ou dans D1 et D2, n'inciterait l'homme de métier à utiliser une résistance chauffante pour chauffer l'électrolyte solide. En fait, rien dans l'art antérieur ne suggère que le problème technique à résoudre puisse être résolu en utilisant une résistance chauffante pour chauffer l'électrolyte solide de la mémoire pendant l'écriture dans la mémoire.
6.5 Ce même raisonnement s'applique également au procédé correspondant défini par la revendication indépendante 16, ainsi que pour la matrice de mémoires à conduction ionique de la revendication 15.
Conclusion
7. Les revendications 1 à 17 sont donc claires, nouvelles et inventives et se fondent sur la demande telle que déposée à l'origine. La décision attaquée est donc à annuler.
7.1 Les documents D1 et D2 n'ont pas encore été indiqués dans la description (règle 42(1)b)).
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'examen afin de délivrer un brevet sur la base des revendications 1 à 17 de la requête déposée le 27 février 2019, des pages 1/4 à 4/4 des figures telles que déposées à l'origine, et d'une description à adapter.