T 0299/14 () of 18.10.2018

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2018:T029914.20181018
Date de la décision : 18 Octobre 2018
Numéro de l'affaire : T 0299/14
Numéro de la demande : 08827561.5
Classe de la CIB : D21F 11/08
D21H 21/42
D21H 21/44
D21H 27/30
D21H 27/32
D21H 21/40
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : PROCÉDÉ DE FABRICATION D'UN MATÉRIAU EN FEUILLE
Nom du demandeur : Oberthur Fiduciaire SAS
Nom de l'opposant : GIESECKE & DEVRIENT GmbH
Chambre : 3.2.07
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 12(2)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 12(4)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 13(1)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 13(3)
European Patent Convention Art 56
European Patent Convention Art 114(2)
Mot-clé : Moyens de preuve produits avec les motifs du recours
Moyens de preuve - recevabilité (oui)
Document produit tardivement dans la procédure de recours
Document produit tardivement - justification du retard (non)
Activité inventive - (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0009/91
G 0010/91
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La requérante (opposante) a formé un recours contre la décision de la Division d'Opposition de rejeter l'opposition.

L'opposition avait été formée contre le brevet dans son ensemble sur la base des motifs selon l'article 100 a) CBE (nouveauté et activité inventive).

II. La Chambre a informé les parties de son opinion provisoire en annexe à la citation en procédure orale selon laquelle les moyens de preuve D14 (cf. point V ci dessous) déposés par la requérante pour la première fois avec son mémoire exposant les motifs de recours pourraient être admis dans la procédure de recours et que les objets des revendications indépendantes 1 et 15 du brevet tel que délivré pourraient être considérés comme nouveaux et inventifs au vu des documents cités.

La requérante a réagi à cette opinion provisoire avec son courrier du 17 septembre 2018, en particulier en citant pour la première fois en procédure de recours le document D5 (cf. point V ci dessous).

Une procédure orale a eu lieu le 18 octobre 2018 au cours de laquelle ont été discutés, inter alia, les points suivants:

- l'admission dans la procédure de recours des moyens de preuve D14 et du document D5; et

- l'activité inventive de l'objet des revendications 1 et 15 du brevet tel que délivré.

Le dispositif de la présente décision a été annoncé à la fin de la procédure orale.

III. Requêtes

La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet ainsi que l'admission dans la procédure de recours des moyens de preuve D14.

L'intimée a demandé le rejet du recours pour manque de fondement, alternativement dans le cas où la décision serait annulée, le maintien du brevet sur la base de l'une des requêtes subsidiaires 1 à 5 déposées avec la réponse du 27 octobre 2014, ou l'une des requêtes subsidiaires 6 et 7 déposées avec le courrier du 3 juillet 2015.

L'intimée a également requis que les moyens de preuve D14 ne soient pas admis dans la procédure de recours.

La recevabilité du document D5 a aussi été disputée par les parties.

IV. La revendication indépendante 1 de la requête principale (brevet tel que délivré) s'énonce comme suit:

"Procédé de fabrication d'un matériau en feuille (1) comportant au moins deux jets (2, 5) fibreux juxtaposés l'un sur l'autre, ledit procédé comportant les étapes suivantes :

- réaliser un premier jet (2) de papier, comportant au moins une zone allongée d'épaisseur nulle (4), par filtration d'une suspension aqueuse de fibres sur la toile d'une première forme ronde (R1) ou d'un former,

- réaliser un second jet (5) de papier sur la toile d'une seconde forme ronde (R2) de façon à former au moins un évidement (6) dans le second jet (5),

- disposer au moins un élément au moins partiellement transparent (10) entre les deux jets (2, 5) encore humides et réunir les deux jets de sorte que ledit au moins un évidement (6) du second jet (5), ledit au moins un élément au moins partiellement transparent (10) et ladite au moins une zone allongée d'épaisseur nulle (4) du premier jet (2) soient situés en regard les uns des autres,

- sécher la structure ainsi obtenue,

caractérisé en ce que ledit au moins un élément au moins partiellement transparent (10) est une bande continue et présente la même longueur que ladite au moins une zone allongée d'épaisseur nulle (4) du premier jet (2)."

La revendication indépendante 15 de la requête principale (brevet tel que délivré) s'énonce comme suit:

"Matériau en feuille (1) comportant:

- au moins deux jets (2, 5) fibreux juxtaposés l'un sur l'autre,

- un premier jet (2) de papier, comportant au moins une zone allongée d'épaisseur nulle (4),

- un second jet (5) de papier,

- au moins un évidement (6) dans le second jet (5),

- au moins un élément au moins partiellement transparent (10) entre les deux jets (2, 5), ledit au moins un évidement (6) du second jet (5), ledit au moins un élément au moins partiellement transparent (10) et ladite au moins une zone allongée d'épaisseur nulle (4) du premier jet (2) étant situés en regard les uns des autres,

caractérisé en ce que ledit au moins un élément au moins partiellement transparent (10) est une bande continue et présente la même longueur que ladite au moins une zone allongée d'épaisseur nulle (4) du premier jet (2)."

Au vu de la présente décision il est inutile de reprendre ici les termes des revendications indépendantes des requêtes subsidiaires de l'intimée.

V. Documents

Les documents suivants de la procédure d'opposition ont été cités dans la procédure de recours:

D1: WO 00/39391 A;

D2: EP 0 229 645 A;

D3: WO 2005/105472 A;

D4: WO 2006/099971 A et

D5*: WO 95/09274.

*Comme indiqué ci-avant le document D5 a été cité pour la première fois en procédure de recours avec le courrier de la requérante en date du 17 septembre 2018.

Les moyens de preuve D14 suivants ont été déposés avec le mémoire de recours:

D14_1: Reproduction recto-verso du billet de banque de 10,000 Tenge du Kazakhstan et agrandissements de zones du billet, 2 pages, date inconnue;

D14_2: George S. Cuhaj, "Standard Catalog of WORLD PAPER MONEY - Modern issues • 1961-Present" Krause Publications, Wisconsin, Etats-Unis, pages 546-548, 2008, ISBN-13: 978-0-89689-632-1, avec une page supplémentaire comprenant: "2004 issue" et "2006 issue";

D14_3: Extrait d'une page internet "2007 Excellence in Currency Awards", url: http://www.currency-news.com/excellence-in-currency-awards-2007/print, date de publication inconnue;

D14_4: Diapositives d'une présentation de Malcolm Knight, "Banknote Substrate & Security Developments" à la conférence en mai 2004: "Currency Conference May 2004";

D14_5: Extrait d'une page internet "De La Rue's innovation is rewarded with a Queen's Award", 16 décembre 2013, url: http://www.basingstokegazette.co.uk/business/10879412.print/;

D14_6: "CURRENCY NEWS", Volume 2, N°5, mai 2004, pages 1 et 8; et

D14_7: Site internet de la Banque Nationale du Kazakhstan, url: http://www.nationalbank.kz/?docid=271, version anglaise (cf. url du site en question: http://www.nationalbank.kz/document/?docid=5954&switch=eng).

Un billet de banque original de 10,000 Tenge du Kazakhstan (ci-après dénommé "D14_0") n'a pas été déposé mais a été présenté par la requérante lors de la procédure orale devant la Chambre.

VI. La requérante a développé les arguments suivants qui sont discutés plus en détail dans les motifs de la décision:

Recevabilité du document D5

Le document D5, même cité tardivement dans la procédure de recours ne peut pas être considéré comme irrecevable du fait qu'il a été utilisé dans la procédure de délivrance du brevet contesté et qu'il est cité dans le brevet lui-même. D5 est obligatoirement dans la procédure de recours.

Recevabilité des moyens de preuve D14

L'intimée a elle-même mentionné le billet de banque de 10,000 Tenge du Kazakhstan concerné par les moyens de preuve D14 dans la procédure d'opposition peu de temps avant la procédure orale devant la Division d'Opposition. La requérante ne pouvait les citer à son tour en temps utile de façon étayée qu'au moment du dépôt du mémoire de recours. Ils doivent donc être admis dans la procédure de recours.

Revendication 1

L'objet de la revendication 1 manque d'activité inventive sur la base de la divulgation du document D2 seul ou alors du document D2 pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement d'un des documents D1, D3, D14 et D4 ou avec les connaissances générales de l'homme du métier telles qu'illustrées par D2 et/ou D4.

Revendication 15

L'objet de la revendication 15 manque d'activité inventive sur la base de D2 pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement d'un des documents D1, D3, D14 et D4 pour les mêmes raisons que celles fournies pour la revendication 1.

Vis-à-vis de D4 pris comme art antérieur le plus proche, aucune caractéristique distinctive ne peut être établie puisque l'expression "entre les jets" utilisée à la revendication 15 permet une large interprétation et englobe la configuration du matériau en feuille de D4. Dans le cas où cette caractéristique serait considérée comme distinctive, soit elle est évidente en elle-même, soit l'homme du métier trouverait la solution dans l'enseignement de D2 de telle manière à aboutir à l'objet revendiqué de manière évidente.

VII. L'intimée a développé les arguments suivants qui sont discutés plus en détail dans les motifs de la décision:

Recevabilité du document D5

Un document n'est pas automatiquement dans la procédure de recours par le simple fait qu'il a été mentionné ou utilisé dans une procédure de première instance et/ou qu'il est cité dans le brevet contesté. La requérante n'a fourni aucune raison qui pourrait justifier le dépôt tardif de D5 dans la procédure de recours. Il est donc irrecevable.

Recevabilité des moyens de preuve D14

Les moyens de preuve D14 ne sont pas pertinents et ne peuvent pas conduire à la révocation du brevet. Ils ne doivent donc pas être admis dans la procédure.

Revendication 1

Partant de D2 comme art antérieur le plus proche, aucun des documents cités ne divulgue ou ne rend évident la caractéristique distinctive b) suivante de la revendication 1:

b) - ledit au moins un élément présente la même longueur que ladite au moins une zone allongée d'épaisseur nulle du premier jet.

Cette caractéristique distinctive b) ne fait pas partie des connaissances générales de l'homme du métier et la requérante n'a apporté aucune preuve démontrant le contraire.

L'activité inventive de l'objet de la revendication 1 doit donc être reconnue.

Revendication 15

Les raisons fournies pour la revendication 1 s'appliquent à la revendication 15 en partant de D2 comme art antérieur le plus proche.

La caractéristique que l'élément se trouve "entre les deux jets" est une caractéristique distinctive par rapport à la divulgation de D4 pris comme art antérieur le plus proche. Elle ne peut pas être considérée comme évidente en elle-même en l'absence de fondement.

Elle permet d'obtenir un meilleur ancrage de l'élément entre les deux jets dans le matériau en feuille bi-jets.

Des solutions simples à cet effet sont déjà connues de D4 et donc l'homme du métier ne serait pas incité à chercher des solutions dans D2. Pour obtenir le produit revendiqué il devrait de plus modifier le procédé et dispositif de D4 sans aucune indication à sa disposition pour ce faire, ni dans D4, ni dans D2. L'homme du métier ne chercherait pas à combiner le procédé de D4 pris comme art antérieur le plus proche avec l'enseignement du document D2 puisqu'ils ont des enseignements contraires.

L'activité inventive de l'objet de la revendication 15 doit donc être reconnue.

Motifs de la décision

1. Documents

1.1 Recevabilité du document D5

1.1.1 La requérante a cité le document D5 pour la première fois dans la procédure de recours avec son courrier en date du 17 septembre 2018, c'est-à-dire après la réponse de l'intimée et l'envoi aux parties de la citation en procédure orale. Son admission dans la procédure est donc sujette au pouvoir discrétionnaire de la Chambre défini aux articles 13(1) et (3) RPCR.

1.1.2 La requérante argue que le document D5 est de facto obligatoirement dans la procédure puisqu'il a été utilisé dans la procédure de délivrance du brevet contesté, d'ailleurs comme art antérieur le plus proche, et qu'il est cité dans le brevet lui-même, paragraphe 6, formant ainsi le point de départ de l'invention revendiquée. D5 est donc primordial pour la discussion de l'activité inventive des objets revendiqués, entre autres pour pouvoir déterminer le problème technique objectif qu'ils cherchent à résoudre.

1.1.3 La Chambre n'est pas convaincue par les arguments de la requérante pour les raisons suivantes discutées lors de la procédure orale.

Comme indiqué par l'intimée, un document n'est pas automatiquement dans la procédure de recours par le simple fait qu'il est cité dans le brevet contesté et/ou qu'il a été mentionné ou utilisé dans la procédure d'examen, voire même d'opposition. Ceci serait en effet contraire aux exigences de l'article 12(2) RPCR qui spécifie que:

"[L]le mémoire exposant les motifs du recours et la réponse doivent contenir l'ensemble des moyens invoqués par une partie. Ils doivent présenter de façon claire et concise les motifs pour lesquels il est demandé d'annuler, de modifier ou de confirmer la décision attaquée, et doivent exposer expressément et de façon précise tous les faits, arguments et justifications qui sont invoqués" (emphase ajoutée par la Chambre).

De plus, comme aussi mis en avant par l'intimée, rien dans ses courriers en procédure de recours, ni dans l'opinion provisoire de la Chambre ne permet de justifier le dépôt tardif de D5 par la requérante. En fait, la requérante n'a fourni aucune justification quant au dépôt tardif de ce document et n'a développé aucune argumentation quant aux critères spécifiés aux articles 13(1) et (3) RPCR.

L'intimée ainsi d'ailleurs que la Chambre se voient ainsi confrontées de façon très tardive dans la procédure à un nouveau point complexe de discussion relatif à une nouvelle ligne d'attaque de manque d'activité inventive à l'encontre de l'objet de la revendication 1 à partir de D5. Une telle attitude de la part de la requérante tend à contraindre la Chambre à reporter la procédure orale, voire à renvoyer l'affaire à la Division d'Opposition.

Pour ces raisons, la Chambre décide de ne pas admettre le document D5 dans la procédure de recours (articles 13(1) et (3) RPCR).

Comme l'a également fait remarquer l'intimée, une attaque sur la base de D5 n'a jamais été soulevée dans la procédure d'opposition à l'encontre des revendications indépendantes et, par conséquent, ne fait pas partie du cadre légal et factuel de la décision contestée. Admettre D5 si tardivement dans la procédure de recours serait de toute évidence contraire au principe de la bonne répartition des tâches entre les première et deuxième instances et aussi au principe de l'économie de la procédure. Ces raisons aussi concourent à l'irrecevabilité du document D5 dans la procédure de recours.

1.2 Recevabilité des moyens de preuve D14

1.2.1 Les moyens de preuve D14 ont été invoqués pour la première fois par la requérante avec son mémoire exposant les motifs de recours conformément à l'article 12(2) RPCR. Leur admission dans la procédure est donc sujette au pouvoir discrétionnaire de la Chambre défini à l'article 12(4) RPCR.

1.2.2 L'intimée conteste leur admission dans la procédure en arguant qu'au vu de G 9/91 et G 10/91, publiées au JO OEB 1993, 408 et 420, ils ne pourraient être admis qu'à titre exceptionnel, uniquement dans le cas où ils seraient pertinents pour la révocation du brevet, ce qui ne serait pas le cas ici.

1.2.3 La Chambre ne partage pas l'avis de l'intimée. Comme indiqué lors de la procédure orale le critère de pertinence de prime abord n'est pas mentionné dans l'article 12(4) RPCR. Il convient plutôt de déterminer si les moyens de preuve D14 auraient pu ou dû être produits dans la procédure d'opposition, plus précisément s'il existe une raison pour laquelle ils ne sont produits pour la première fois qu'avec le dépôt du mémoire de recours.

Comme indiqué par la requérante, l'intimée a elle-même mentionné ce billet de banque dans la procédure d'opposition avec son courrier du 21 octobre 2013, cf. par exemple annexe A1, le billet de banque de 10,000 Tenge du Kazakhstan. La Chambre ne voit donc pas de raisons qui empêcheraient la requérante de l'utiliser à son tour. Du fait du peu de temps restant avant la procédure orale devant la Division d'Opposition, la Chambre considère que la requérante ne pouvait le faire en temps utile de façon étayée qu'au moment du dépôt du mémoire exposant les motifs de recours conformément à l'article 114(2) CBE.

La Chambre admet donc les moyens de preuve D14 dans la procédure de recours, conformément à l'article 114(2) CBE et les articles 12(2) et 12(4) RPCR.

1.2.4 Accessibilité au public du billet de banque de 10,000 Tenge du Kazakhstan (D14_0)

La Chambre partage l'avis de la requérante que les billets de banque de 10,000 Tenge du Kazakhstan (D14_0) tels que reproduits dans D14_1 ont bien été mis à la disposition du public avant la date de priorité du brevet contesté, en particulier au vu des documents D14_2, D14_3, D14_5 et D14_7. Ceci n'a pas été contesté par l'intimée.

Un billet de banque D14_0 original a été présenté à la procédure orale devant la Chambre de recours de telle manière que celle-ci ainsi que l'intimée ont pu vérifier sa conformité avec la copie D14_1.

2. Revendication 1 - requête principale

2.1 La requérante conteste dans ses écrits que l'objet de la revendication 1 présente une activité inventive sur la base de la divulgation du document D2 pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement d'un des documents D1, D3, D14 et D4.

Lors de la procédure orale elle a simplement fait référence à ses écrits en ce qui concerne ces objections et exposé d'autres attaques de manque d'activité inventive de l'objet de la revendication 1, en l'occurrence sur la base du document D2 seul ou à partir du document D2 pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec les connaissances générales de l'homme du métier telles qu'illustrées par D2 et/ou D4. Dans ces approches lors de la procédure orale les moyens de preuve D14 sont utilisés pour démontrer l'incitation qu'a l'homme du métier à modifier D2 de telle manière à obtenir un billet de banque avec un élément intégré comme dans D14_0.

2.2 Art antérieur le plus proche

La Chambre partage l'avis des parties que le document D2 peut être considéré comme un art antérieur le plus proche plausible pour la revendication 1, car il se trouve dans le même domaine technique des procédés de fabrication de matériau en feuille comportant au moins deux jets fibreux juxtaposés l'un sur l'autre (revendication 1; figures).

2.3 Divulgation de D2

Le document D2 (page 3, ligne 26 à page 5, ligne 1; page 8, ligne 31 à page 9, ligne 37; figures 1, 2, 6, 7) divulgue un procédé de fabrication d'un matériau en feuille ("Papier") comportant au moins deux jets ("Papierbahnen" 3, 5) fibreux juxtaposés l'un sur l'autre, ledit procédé comportant les étapes suivantes:

- réaliser un premier jet 3 de papier, comportant au moins une zone d'épaisseur nulle ("Löcher", "Lochmuster" 10), par filtration d'une suspension aqueuse de fibres sur la toile d'une première forme ronde ("Rundsieb" de la cuve "Naßpartie" 1),

- réaliser un second jet 5 de papier sur la toile d'une seconde forme ronde ("Rundsieb" de la cuve "Naßpartie" 2) de façon à former au moins un évidement ("Löcher", "Lochmuster" 11) dans le second jet 5,

- disposer au moins un élément ("Sicherheitsfaden" 7) entre les deux jets 3, 5 encore humides et réunir les deux jets de sorte que ledit au moins un évidement 11 du second jet 5, ledit au moins un élément 7 et ladite au moins une zone d'épaisseur nulle 10 du premier jet 3 soient situés en regard les uns des autres (cf. en particulier page 9, lignes 6-15, "die Lochmuster...deckungsgleich übereinanderfallen"),

- sécher la structure ainsi obtenue.

Bien que dans D2 l'élément disposé entre les deux jets 3, 5 soit un fil (cf. page 3, lignes 26 à 34 où le problème que cherche à résoudre D2 ainsi que les modes de réalisation de D2 font référence à un fil "Faden" 7), D2 divulgue aussi que cet élément peut être une bande ("Band"), cf. page 1, lignes 1-4 et revendication 1.

2.4 Caractéristiques distinctives

2.4.1 D2 ne divulgue donc pas au moins la caractéristique b) suivante de la revendication 1:

b) - ledit au moins un élément présente la même longueur que ladite au moins une zone allongée d'épaisseur nulle du premier jet.

En effet, comme indiqué dans la décision contestée, page 7, troisième paragraphe, dans D2 les trous 10, 11 sont toujours d'extension limitée dans le sens longitudinal du fil.

2.4.2 Etant donné la conclusion positive ci-après sur l'activité inventive sur la base de la caractéristique b), il est inutile de trancher si la caractéristique a) suivante de la revendication 1:

a) - ledit au moins un élément est au moins partiellement transparent

est distinctive ou pas vis-à-vis de D2, en particulier au vu de la divulgation à la page 9, lignes 15-16 ("...bei Betrachtung im Auf- oder Durchlicht"; emphase ajoutée par la Chambre) cité par la requérante.

En tout état de cause, même si cette caractéristique a) était considérée comme distinctive vis-à-vis de D2, elle ne permettrait pas en elle-même de justifier l'activité inventive de l'objet revendiqué, ce qui a été admis par l'intimée lors de la procédure orale.

Cette caractéristique a) n'est donc pas pertinente et n'est plus discutée ci-après.

2.5 Effet(s) technique(s)

2.5.1 La Chambre partage l'avis de la requérante que l'effet technique mentionné dans la décision contestée selon lequel le procédé de fabrication revendiqué permettrait de renforcer la fixation de l'élément de sécurité avec le matériau en feuille n'est pas lié à la caractéristique distinctive b). Cet effet serait plutôt obtenu par le fait que le procédé consiste en la fabrication d'une feuille comportant au moins deux jets, cf. paragraphe 17 du brevet contesté. Il serait donc aussi obtenu par le procédé de D2 puisqu'il concerne un tel procédé.

2.5.2 L'effet technique d'obtenir une feuille avec une fenêtre comprenant un élément de sécurité sans surépaisseur notable (paragraphe 14 du brevet contesté) n'est pas non plus directement associé à la caractéristique distinctive b) puisque l'effet en question est plutôt lié à d'autres caractéristiques, comme par exemple l'épaisseur des jets, cf. brevet contesté, paragraphe 22, voire la surface de la zone de recouvrement entre, par exemple, l'élément disposé entre les jets et le premier jet, cf. paragraphe 7 et revendications 2 à 4 du brevet contesté. Le problème technique défini dans la décision contestée, page 6, premier paragraphe, n'est donc pas pertinent.

2.5.3 En fait, comme indiqué par l'intimée, page 3 de sa réponse, paragraphe 2, la caractéristique distinctive b) a pour effet technique que l'élément disposé entre les jets, c'est-à-dire la bande continue, est découvert sur toute sa longueur d'un côté du matériau et totalement découvert des deux côtés au niveau des évidements. Contrairement à l'avis de la requérante cet effet n'est en lui-même pas une caractéristique de la revendication 1. Il est aussi en lien avec une amélioration du contrôle visuel qui ne se retrouve pas non plus dans la revendication 1.

2.5.4 Pour la requérante, comme aucune caractéristique de la revendication 1 ne permettrait l'ancrage de l'élément, il en résulterait un problème d'ancrage de l'élément dans la feuille bi-jets si celui-ci était considéré comme découvert sur toute sa longueur d'un côté dans la revendication 1. La requérante conteste donc que cet effet (élément découvert sur toute sa longueur d'un côté du matériau) puisse se déduire de la revendication 1.

Toujours d'après la requérante, la zone d'épaisseur nulle de la revendication 1 est un trou (ou évidement) de forme allongée dont la longueur est la même que celle de l'élément, c'est-à-dire la bande continue. Ce trou de forme allongée serait "dans" le premier jet et ne séparerait donc pas nécessairement le premier jet en deux parties. Dans la revendication 1 les trous seraient alors d'extension limitée dans le sens longitudinal de l'élément comme dans D2. La seule différence par rapport à la divulgation de D2 résiderait ainsi en ce que le trou est de forme allongée dans le premier jet. La requérante déduit alors que la seule différence vis-à-vis de D2 consisterait en le recouvrement d'évidements de formes non spécifiées présents dans les deux jets, l'un étant de forme allongée. Cette différence aurait simplement pour effet que la synchronisation des deux jets pour leur juxtaposition l'un sur l'autre lors de la fabrication du matériau en feuille ne devrait plus être aussi exigeante que dans l'art antérieur.

Ce recouvrement aurait aussi pour effet de permettre un meilleur contrôle visuel de l'élément sur une plus grande longueur/surface qu'avec un évidement de plus petite taille.

2.5.5 La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante, car même si la revendication 1 ne comprend pas de caractéristiques associées directement à l'ancrage de l'élément dans la feuille bi-jet, il est clair, comme indiqué par l'intimée, qu'il n'existe pas pour l'homme du métier d'empêchement technique à ce qu'un élément inséré dans une feuille bi-jets, en particulier une bande, soit découvert sur toute sa longueur d'un côté et ancré de façon appropriée. Des solutions sont d'ailleurs divulguées dans les revendications dépendantes 2 à 4 du brevet contesté.

La Chambre ne suit pas non plus l'avis de la requérante que la seule différence entre l'objet revendiqué vis-à-vis de la divulgation de D2 résiderait en la forme allongée des trous dans le premier jet, car cela consiste simplement à éluder la caractéristique b) qui spécifie que l'élément et la zone allongée d'épaisseur nulle du premier jet présentent la même longueur. Par conséquent, la Chambre ne suit pas l'avis de la requérante sur l'effet allégué d'une synchronisation moins exigeante entre les deux jets. A la procédure orale, la requérante n'a d'ailleurs pas mentionné cet aspect de synchronisation et a invoqué uniquement l'effet technique d'un meilleur contrôle visuel.

Au sujet de la caractéristique b), la Chambre considère, comme d'ailleurs suggéré par la requérante dans son courrier du 17 septembre 2018, page 3, troisième paragraphe, que dans la revendication 1 en regard de l'endroit de la zone d'épaisseur nulle du premier jet se trouve forcément l'élément, car, dans le cas contraire, cela conduirait à des modes de réalisation techniquement irréalistes. Comme l'élément et la zone d'épaisseur nulle ont la même longueur selon la caractéristique b), ils sont inévitablement en recouvrement exact sur toute leur longueur.

2.6 Problème à résoudre

2.6.1 Au vu des raisons ci-avant, plus particulièrement le point 2.5.3, le problème technique objectif à résoudre est formulé comme étant de modifier le procédé de D2 de telle manière à ce que l'élément disposé entre les jets soit découvert sur toute sa longueur d'un côté du matériau et totalement découvert des deux côtés au niveau des évidements tout en améliorant le contrôle visuel.

2.6.2 Dans ses écrits la requérante argue que le problème à résoudre devrait être défini comme étant de permettre l'incorporation d'un élément de sécurité entre deux jets de telle manière à obtenir une apparence extérieure alternative du matériau en feuille bi-jets et à améliorer le contrôle visuel (mémoire exposant les motifs de recours, page 3, dernier paragraphe et lettre du 7 janvier 2015, point II.1.1).

La Chambre ne partage pas cet avis car, comme discuté au point 2.5.3 ci-avant, la caractéristique distinctive b) implique un effet technique sur le matériau en feuille ainsi obtenu. Le problème qui en découle n'est donc pas lié à une apparence extérieure. Il ne s'agit donc pas de simplement changer le design du matériau en feuille de D2, contrairement à l'avis de la requérante.

2.7 D2 seul ou en combinaison avec les connaissances générales de l'homme du métier

2.7.1 Lors de la procédure orale la requérante a argué qu'au vu du succès du billet de banque de D14_0 l'homme du métier serait incité à modifier D2 de telle manière à obtenir un billet de banque avec un élément intégré comme dans celui de D14_0.

D2 seul

Pour la requérante, D2 divulgue bien que l'élément est découvert des deux côtés au même endroit ("...an der gleichen Stelle auf beiden Seiten freigelegt", page 9, lignes 7-23, cf. également page 4, lignes 10-15, page 5, lignes 11-16 et page 9, lignes 25-37), et suggère de plus à l'homme du métier la séparation en deux partie d'un jet du matériau en feuille du fait de la divulgation à la page 2, lignes 35-37 de "vollständig freiliegt" (emphase ajoutée par la Chambre). Pour la requérante, l'expression "vollständig freiliegt" doit être interprétée comme signifiant "complètement libre", c'est-à-dire complètement découvert au moins d'un coté du matériau en feuille. L'homme du métier appliquant cet enseignement de D2 au procédé qui y est divulgué aboutirait ainsi à l'objet revendiqué sans aucune activité inventive.

D2 en combinaison avec les connaissances générales de l'homme du métier

Pour réaliser la séparation en deux parties du jet et ainsi obtenir inévitablement la caractéristique distinctive b), la requérante considère qu'il suffit de mettre une zone de masquage sur tout le périmètre de la forme ronde utilisée pour produire le premier jet dans le procédé de D2 (cf. brevet contesté, figure 3 et paragraphes 69 et 70). Pour la requérante une telle zone de masquage ferait partie des connaissances générales de l'homme du métier comme illustré par D4, page 28, lignes 14-16 et page 29, lignes 5-12 ("Das Rundsieb...im Bereich des Sicherheitsfadens oder Sicherheitsbands abgeklebt sein..."; emphase ajoutée par la Chambre) voire suggéré dans les passages de D2 cités ci-avant. L'homme du métier penserait immédiatement à cette solution au vu du problème technique posé d'obtenir un meilleur contrôle visuel et il insérerait le fil dans la feuille bi-jets de D2 lorsque les jets sont encore humides, de la même manière que dans le brevet contesté, paragraphe 17, écartant ainsi les problèmes liés à l'ancrage de l'élément qui pourraient subvenir en raison du fait que le fil serait découvert sur toute sa longueur d'un côté du matériau en feuille. Ce faisant, il aboutirait à l'objet revendiqué de manière évidente.

2.7.2 La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante pour les raisons suivantes discutées lors de la procédure orale.

D2 seul

Pour la Chambre le passage de D2, page 2, lignes 35-37 qui mentionne "vollständig freiliegt" se réfère au fait que le fil puisse être découvert comme décrit de la page 8, ligne 31 à la page 9, ligne 5 et illustré à la figure 6, c'est-à-dire complètement (jet d'épaisseur nulle) mais de façon limitée en extension dans le sens longitudinal du fil. A la figure 6 le fil 7 est complètement découvert aux évidements 10 du premier jet 3. A la figure 7 il l'est aussi aux évidements 11 du second jet 5. Le fil 7 n'y est aucunement complètement découvert sur toute sa longueur d'un côté du matériau. Le document D2 ne suggère en fait en aucun point la solution revendiquée de la caractéristique b). Par conséquent, l'homme du métier ne trouvera pas dans le document D2 lui-même d'indication lui permettant d'aboutir à la solution revendiquée.

De plus, comme indiqué par l'intimée, la solution revendiquée va à l'encontre de la divulgation de D2 dans laquelle le fil 7 a toujours une portion de chacune de ses faces recouverte par des fibres.

Pour ces raisons, l'homme du métier n'aboutirait pas à l'objet revendiqué de manière évidente sur la base de D2 seul.

La Chambre note aussi que, comme indiqué par l'intimée, dans l'hypothèse où l'homme du métier appliquerait la solution revendiquée au procédé de D2, celui-ci devrait tout d'abord modifier la divulgation de D2 afin de maintenir le fil en place, comme par exemple en appliquant un enduit ou en réalisant des zones crantées sur la périphérie du fil. Le simple fait d'appliquer le fil lorsque les jets sont encore humides, comme allégué par la requérante, ne semble à la Chambre pas convaincant pour un ancrage suffisant lorsque celui-ci est découvert sur toute sa longueur d'un côté du matériau.

D2 en combinaison avec les connaissances générales de l'homme du métier

La requérante fait appel aux connaissances générales de l'homme du métier mais, comme l'a mis en avant l'intimée, elle n'en fournit aucune preuve. Le document D4 n'est pas un manuel des connaissances générales dans le domaine technique de la fabrication des matériaux en feuille bi-jets mais un document brevet avec une divulgation spécifique de l'invention qui y est revendiquée. L'homme du métier qui s'y rapporterait ne verrait pas le masquage de la forme ronde comme une divulgation isolée et illustrative de ses connaissances générales. Une telle information ne se dérive pas de D4. En fait, l'homme du métier prendrait l'ensemble de la divulgation de D4 pour l'incorporer dans le procédé de D2, c'est-à-dire qu'il intégrerait l'élément dans le premier jet comme dans D4 et non pas entre les jets comme dans la revendication 1 (cf. aussi point 3.1.2 ci-après). Il n'aboutirait donc pas à l'objet revendiqué.

Par conséquent, la ligne d'attaque de manque d'activité inventive invoquée par la requérante au cours de la procédure orale à partir de D2 au vu des connaissances générales de l'homme du métier telles qu'illustrées par D4 n'est pas convaincante.

La Chambre note que le même argument s'applique pour le document D2 qui, comme D4, est un document brevet et n'illustre donc pas non plus les connaissances générales de l'homme du métier. De plus, comme discuté ci-avant D2 ne divulgue pas ni ne suggère la solution revendiquée.

2.8 D2 en combinaison avec l'enseignement d'un des documents D1, D3, D14 et D4

La requérante conteste dans ses écrits que l'objet de la revendication 1 présente une activité inventive sur la base de la divulgation du document D2 pris comme art antérieur le plus proche en combinaison avec l'enseignement d'un des documents D1, D3, D14 et D4. En ce qui concerne ces objections, la requérante a simplement fait référence à ses écrits à la procédure orale. Les raisons ci-après correspondent à l'opinion provisoire de la Chambre fournie aux parties dans l'annexe à la citation en procédure orale. Après reconsidération de l'ensemble des éléments en sa possession, y compris le courrier de la requérante en date du 17 septembre 2018, c'est-à-dire postérieur à la citation en procédure orale, la Chambre n'a pas trouvé de raisons pour changer d'avis.

2.8.1 Combinaison avec D1

La Chambre partage l'avis de l'intimée que l'homme du métier ne chercherait pas la solution dans le document D1 ni ne combinerait son enseignement avec le procédé de D2, puisque le procédé de D1 concerne la fabrication d'une feuille mono-jet à partir d'une seule forme ronde, cf. revendication 1 et figure 1 (voir décision contestée, page 7).

Dans le cas où il chercherait tout de même à le faire, il n'apparaît pas clairement comment il appliquerait les solutions techniques du procédé mono-jet de D1 au procédé bi-jets de D2.

2.8.2 Combinaison avec D3

Comme indiqué par l'intimée, le document D3 concerne la fabrication de feuilles à partir, soit du procédé divulgué dans D1 (D3, page 12, ligne 32 à page 13, ligne 2; figure 4), soit du procédé divulgué dans D2 (D3, page 11, ligne 32 à page 12, ligne 30; figure 6).

Au vu des points 2.8.1 et 2.7.2 (D2 seul) ci-dessus, la combinaison de l'enseignement de D3 avec le procédé connu de D2 ne permet donc pas de justifier un manque d'activité inventive de l'objet revendiqué.

2.8.3 Combinaison avec D14

Le billet de banque D14_0 divulgue les caractéristiques distinctives b), cf. références A et B dans D14_1.

Le procédé de fabrication du billet de banque D14_0 est, d'après l'intimée, celui divulgué dans D1, intégrant ainsi le produit Optiks**(TM) (cf. D14_3 et D14_5). D'après la requérante cela n'est pas nécessairement le cas, le procédé étant ainsi (au moins partiellement) inconnu. Dans le premier cas, comme déjà indiqué au point 2.8.1 ci-avant, l'homme du métier ne penserait pas à combiner le procédé mono-jet de D14/D1 avec celui bi-jets de D2. Dans le deuxième cas, il n'apparaît pas clairement à la Chambre quelles caractéristiques d'un procédé (partiellement) inconnu l'homme du métier pourrait prendre en compte pour l'appliquer au procédé de D2 et arriver ainsi à l'objet revendiqué.

Contrairement à l'avis de la requérante, et comme déjà indiqué au point 2.6.1 ci-dessus, le problème technique à résoudre ne consiste pas simplement à changer le design de D2, figures 6 et 7. Même si le document D14 semble divulguer les caractéristiques distinctives b), il est nécessaire de modifier techniquement le procédé de fabrication de D2 d'un matériau en feuille bi-jets de telle manière à avoir l'élément disposé entre les jets découvert sur toute sa longueur d'un côté. Les solutions techniques pour un tel procédé ne sont pas dérivables des procédés mono-jets de D1 ou D14.

2.8.4 Combinaison avec D4

Le document D4 divulgue un procédé selon lequel l'élément de sécurité ("Sicherheitsband" 54) est intégré préalablement dans un premier jet ("erste Papierlage" 52). Un deuxième jet ("zweite Papierlage" 56) comprend des évidements ("Unterbrechung" 58). Les deux jets ainsi formés sont alors réunis, cf. page 25, ligne 12 à page 27, ligne 19 et figures 1 à 4c.

Comme indiqué dans la décision contestée, page 5, troisième paragraphe, D4 ne concerne pas un procédé de fabrication tel que revendiqué selon lequel l'élément est disposé "entre les deux jets" (cf. aussi point 3.1.2 ci-après).

En fait, le procédé divulgué par D4 n'est pas adapté au mode préféré de D2 du fil comme élément entre les jets, cf. point 2.3 ci-avant, et donc l'homme du métier ne serait pas incité à utiliser l'enseignement de D4 pour l'appliquer au procédé de D2 (cf. aussi point 2.7.2 ci-avant, D2 en combinaison avec les connaissances générales de l'homme du métier).

2.8.5 Au vu de ce qui précède, il apparaît qu'aucun des documents D1, D3, D14 et D4 n'apporte de solution de telle manière à aboutir à partir du procédé de D2 à l'objet revendiqué de manière évidente.

2.9 Au vu des raisons ci-dessus, l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 de la requête principale est reconnue.

3. Revendication 15 - requête principale

3.1 A partir de D4

3.1.1 A la procédure orale et aussi dans son courrier du 17 septembre 2018, point 4, la requérante a soulevé une nouvelle attaque de manque d'activité inventive de l'objet de la revendication 15 à partir de D4 pris comme art antérieur le plus proche.

La requérante considère dans un premier temps que le document D4, figures 4a et 9, divulgue toutes les caractéristiques de la revendication 15, y compris que l'élément est situé "entre les deux jets". D'après la requérante cette dernière caractéristique de la revendication 15 serait large et engloberait la configuration divulguée aux figures 4a et 9 de D4 où l'élément 54, 86 se trouverait aussi entre les jets 52, 56; 82, 84.

D'après la requérante, la figure 4 du brevet contesté ne représenterait qu'un mode de réalisation particulier du brevet. Elle serait schématique avec des dimensions exagérées. Selon elle, il apparaîtrait en fait du paragraphe 22 du brevet contesté que la surface de l'objet revendiqué devrait être plane, ce qui indiquerait bien que la configuration de D4 où la surface obtenue est plane (l'élément 54, 86 et la bande 52, 84, respectivement, sont dans un même plan) tomberait dans celle revendiquée.

Dans le cas où la caractéristique selon laquelle l'élément se trouve "entre les deux jets" serait considérée comme distinctive par rapport à D4, elle serait si proche de la divulgation de D4 qu'elle ne pourrait justifier en elle-même une activité inventive. Il suffirait simplement de faire "glisser" l'élément 10 dans le premier jet 2 à la figure 4 du brevet contesté pour aboutir à la configuration des figures 4a et 9 de D4.

Par ailleurs, l'effet technique associé serait d'améliorer l'ancrage de l'élément dans la feuille bi-jets.

L'homme du métier au vu du problème technique objectif d'améliorer l'ancrage de l'élément penserait immédiatement à appliquer le procédé de D2 dans celui de D4 pour y introduire l'élément de la manière ainsi divulguée c'est-à-dire après la formation du premier jet. Il ne rencontrerait aucune difficulté technique à cela. Ce faisant, il aboutirait à l'objet revendiqué de manière évidente.

3.1.2 La Chambre ne partage pas l'avis de la requérante pour les raisons ci-après discutées à la procédure orale.

Le paragraphe 22 du brevet contesté divulgue que la surface extérieure du premier jet du matériau en feuille obtenu par le procédé divulgué et objet de la revendication 15 est "quasiment plane et ne représente pas de surépaisseur notable". Par conséquent a contrario et contrairement à l'affirmation de la requérante ce passage indique bien que la surface n'est pas plane. Il est donc conforme au mode de réalisation de la figure 4 même si cette dernière comprend effectivement des dimensions exagérées et non représentatives de la réalité. En fait, rien dans le brevet contesté ne permet de déduire que la caractéristique "entre les deux jets" pourrait avoir une autre signification que celle représentée à la figure 4. Cette caractéristique ne se retrouve pas dans les configurations des figures 4a et 9 de D4, ni ailleurs dans D4. Elle est donc bien une caractéristique distinctive par rapport à la divulgation de D4.

Une simple allégation comme l'affirme la requérante que cette caractéristique serait en soi évidente n'est pas convaincante en l'absence d'élément de preuve et/ou de chaîne d'argumentation étayée.

Cette caractéristique distinctive a pour effet d'obtenir un meilleur ancrage de l'élément entre les deux jets dans le matériau en feuille bi-jets.

Comme indiqué par l'intimée et incontestée par la requérante des solutions sont déjà proposées dans D4 pour résoudre le problème d'ancrage de l'élément dans le jet, cf. par exemple page 25, lignes 27-29. L'homme du métier ne serait donc pas incité à modifier le procédé ainsi que le dispositif de D4 de telle manière à effectuer l'introduction de l'élément après la fabrication du premier jet comme dans le brevet contesté pour obtenir l'élément entre les jets et résoudre ce problème, qui est en fait déjà résolu de façon alternative et plus simple dans D4.

Pour cela, l'homme du métier devrait en effet modifier et reconcevoir complètement le dispositif des figures 1 et 2 de D4 de telle manière à pouvoir introduire l'élément 22 ("Sicherheitsband") de façon différée entre les jets, comme dans D2 ou le brevet contesté, tout en conservant l'élément découvert sur toute sa longueur d'un côté. Un tel dispositif n'est divulgué ni dans D2 ni dans D4, laissant ainsi l'homme du métier sans indication sur la manière de procéder à la modification du dispositif de D4.

Finalement, comme déjà discuté ci-avant pour le procédé de la revendication 1, l'homme du métier ne serait pas incité à combiner les enseignements des documents D2 et D4. En l'occurrence, dans D2 le fil n'est pas découvert sur toute sa longueur et se trouve entre les jets, contrairement au procédé connu de D4.

Donc, pour ces raisons les arguments de la requérante relatifs à la combinaison des enseignements de D4 et D2 pour aboutir à l'objet de la revendication 15 ne sont pas convaincants.

3.2 A partir de D2

Avec ses écrits la requérante conteste que l'objet de la revendication 1 présente une activité inventive sur la base de la divulgation du document D2 pris comme art antérieur le plus proche pour les mêmes raisons que celles fournies à l'encontre de la revendication 1. A la procédure orale la requérante y a simplement fait référence.

Après reconsidération de l'ensemble des éléments en sa possession, y compris le courrier de la requérante en date du 17 septembre 2018, c'est-à-dire postérieur à la citation en procédure orale, la Chambre n'a pas trouvé d'éléments pour changer son avis fourni dans l'annexe à la citation en procédure orale selon lequel l'objet de la revendication 15 est inventif vis-à-vis de D2 pris comme art antérieur le plus proche pour les mêmes raisons que celles déjà fournies pour la revendication 1 (cf. point 2.8 ci-dessus et décision contestée, page 8).

3.3 L'activité inventive de l'objet de la revendication 15 de la requête principale est donc reconnue.

4. Requêtes subsidiaires 1 à 7

Etant donné les conclusions ci-avant sur la requête principale, il est inutile de traiter dans la présente décision les requêtes subsidiaires 1 à 7.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté.

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