T 2338/13 (Bille frittée/SAINT-GOBAIN) of 29.9.2016

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2016:T233813.20160929
Date de la décision : 29 Septembre 2016
Numéro de l'affaire : T 2338/13
Numéro de la demande : 06709384.9
Classe de la CIB : C04B 35/486
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : BILLE FRITTEE À BASE DE ZIRCONE ET D'OXYDE DE CERIUM
Nom du demandeur : Saint-Gobain Centre de Recherches et d'Etudes
Européen
Nom de l'opposant : Gassenhuber, Andreas
Jyoti Ceramic Industries Pvt. Ltd.
Zircoa Inc.
Chambre : 3.3.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 100(b)
European Patent Convention Art 100(a)
European Patent Convention Art 54(1)
European Patent Convention Art 54(2)
European Patent Convention Art 56
European Patent Convention Art 117(1)(d)
Mot-clé : Motifs d'opposition - exposé insuffisant (non)
Motifs d'opposition - nouveauté (oui)
Motifs d'opposition - activité inventive (oui)
Etat de la technique - présentation PowerPoint - accessibilité au public (non)
Procédure d'instruction - audition de témoins
Procédure d'instruction - affidavits
Procédure d'instruction - degré de conviction de l'instance
Procédure d'instruction - force probante suffisante (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0835/00
T 1210/05
T 2001/12
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0734/18

Exposé des faits et conclusions

I. Les présents recours des opposants 1 et 2 (respectivement requérants 1 et 2) visent à contester la décision de la division d'opposition de rejeter les oppositions formées à l'encontre du brevet européen 1 853 532.

II. Les documents suivants sont pertinents pour la présente décision :

A1 : US 4 820 667

A2 : US 2003/0126804

A3 : copie d'un diaporama PowerPoint intitulé "Effect of Fe2O3 and Al2O3 addition on Microstructure and Mechanical Properties of Ce-TZP Ceramics"

A4 : Hong, G.P., Lee, S.P. et Kang, J.B., Effect of Fe2O3 and Al2O3 on Microstructure and Mechanical Properties of Ce-TZP Ceramics; Austceram 2002 Proceedings

A5 : première attestation ("affidavit") de M. Hong datée du 1**(er) mars 2011

A6 : JP S58-215836 et sa traduction anglaise A6a

A13 : WO 01/70643 A2

A19: deuxième attestation ("affidavit 2") de M. Hong datée du 1**(er) janvier 2013

A20 : Hong, G.P., Lee, S.P. et Kang, J.B., Effect of Fe2O3 and Al2O3 on Microstructure and Mechanical Properties of Ce-TZP Ceramics in Austceram 2002 Proceedings (article similaire à A4).

III. Dans sa décision, la division d'opposition a conclu qu'il n'était pas possible d'établir si le contenu de A3 avait effectivement été rendu accessible au public faute d'éléments de preuve tels que des témoignages ou des notes écrites du public présent à la conférence.

IV. Avec son mémoire de recours, le requérant 1 a soumis le document suivant :

A6b : US 4 690 911.

Le requérant 1 a réitéré son offre d'auditionner en tant que témoin M. Hong, un des auteurs de A4/A20.

V. Avec son mémoire de recours, la requérante 2 a soumis les documents suivants :

A30 : US 5 061 665

A31 : extrait d'un catalogue de la compagnie Trowal

A32 : résultats de tests comparatifs.

VI. Au cours de la procédure écrite, la requérante 2 a soumis une version mise à jour de A32, soit le document

A32a : résultats de tests comparatifs

VII. Avec sa lettre en date du 21 septembre 2016, l'intimée a déposé six requêtes subsidiaires.

VIII. Lors de la procédure orale devant la chambre de recours, M. Hong a été auditionné en tant que témoin et le requérant 1 a soumis un exemplaire de

A33 : Austceram 2002 Proceedings

dont A20 est un extrait et dont un autre extrait est annexé en copie au procès verbal de cette procédure orale.

IX. Les revendications indépendantes du brevet tel que délivré s'énoncent comme suit :

"1. Bille frittée présentant l'analyse chimique suivante, en pourcentages en poids et pour un total de 100 %,

ZrO2 + HfO2 : 78 - 85 %,

CeO2 : >= 15 %,

Al2O3 : > 0,1 %,

Additif : > 0,1 %,

Impuretés: < 1 %,

l'additif étant choisi parmi MnO, MnO2, Fe2O3, CuO, TiO2, Y2O3, Sb2O3, ZnO et leurs mélanges.

10. Utilisation, dans un broyeur, d'un mélange de billes selon l'une quelconque des revendications précédentes."

X. Les arguments des requérants peuvent être résumés comme suit :

Sur la suffisance de description

La somme de la borne maximale de 85% de (ZrO2 + HfO2) et des bornes minimales des autres constituants de la composition selon la revendication 1 dépasse la valeur 100%. L'homme du métier ne saurait mettre en oeuvre l'invention du fait qu'il soit impossible d'atteindre un pourcentage total supérieur à 100% .

Sur l'accessibilité au public du contenu du document A3

Le témoignage par M. Hong est crédible. Contrairement à ce qui a été soumis par écrit par le requérant 1, le diaporama A3 avait effectivement été imprimé et affiché sous la forme d'un poster lors de la conférence Austceram 2002 et n'a pas été projeté lors de cette conférence. Ceci est confirmé par les extraits du compte-rendu de la conférence. Cette présentation était centrée sur les propriétés et non sur la forme des compositions céramiques, bien que celle-ci contienne aussi des informations concernant des billes. Les échantillons testés dans A3 comprenaient des pastilles et des billes. Il n'est pas contesté que la conclusion de A3 contient une erreur en la valeur 6,29g/cm**(3), qui était trop élevée par rapport aux autres valeurs de densité présentées dans A3. Toutefois, la conclusion de A4/A20 correspondant exactement à celle en dernière page de A3, celle-ci est une preuve supplémentaire que le contenu de A3 a effectivement été divulgué au public.

Sur la nouveauté

A6 divulgue tous les éléments de la revendication 1 à l'exception de la forme bille. Ce dernier élément n'étant pas un élément technique, celui-ci peut être ignoré lors de l'évaluation de la nouveauté. L'objet de la revendication 1 n'est donc pas nouveau.

Sur l'activité inventive

L'objet de la revendication 1 est évident pour l'homme du métier partant de A1, A4, A6b ou A13 comme état de la technique le plus proche pris en combinaison avec chacun de ces documents ou, alternativement, avec l'un parmi A2, A30 ou A31. En particulier, le problème d'améliorer le taux d'usure n'est pas résolu sur toute l'étendue de la revendication 1, ce qui est par ailleurs prouvé par les tests A32a.

XI. Les arguments de l'intimée peuvent être résumés comme suit:

Sur la suffisance de description

La somme de la borne maximale de (ZrO2 + HfO2) et des bornes minimales des autres constituants de la composition selon la revendication 1 dépasse effectivement la valeur de 100%. Ceci n'empêche toutefois pas l'homme du métier d'exécuter l'invention.

Sur l'accessibilité au public du contenu du document A3

Le témoin appartenant à la sphère d'influence du requérant 1, le standard de preuve est celui de la preuve incontestable de l'utilisation antérieure.

Concernant les circonstances de la divulgation de la présentation A3, celles-ci ne peuvent être établies au-delà de tout doute raisonnable. D'une part, selon les attestations A5 et A19, la présentation A3 aurait été projetée devant un public de plus de 100 personnes tandis que selon l'audition du témoin, la présentation de A3 se serait déroulée sous forme d'un affichage (poster). Le cas d'espèce est comparable à celui de la décision T 1210/05 pour ce qui concerne la divulgation d'information contenue dans un poster affiché lors d'une conférence.

Quant au contenu de la présentation, celui-ci ne peut être déterminé au-delà de tout doute raisonnable. Il est en effet peu probable que la présentation A3 n'ait pas subi d'altération durant le laps de temps qui s'est écoulé depuis la conférence Austceram 2002, soit 14 ans environ. Le document A3 contient plusieurs contradictions et/ou incohérences suscitant des doutes quant au contenu exact qui aurait été mis à disposition du public. Ainsi, A3 ne mentionne que le procédé de moulage par barbotine qui n'est pas apte à produire les billes mentionnées à la page 11 de A3. La diapositive 8 de A3 ne montre en outre pas de maximum de densité à 1300**(o)C pour les céramiques faisant intervenir Fe2O3 tandis que dans la section "Résultats et Discussion" de A4/A20, un tel maximum est mentionné.

Sur la nouveauté

A6 ne divulguant pas la forme bille, l'objet de la revendication 1 est nouveau.

Sur l'activité inventive

L'état de la technique le plus proche est représenté par A13, et non pas par les documents cités par les requérants qui n'évoquent pas le problème d'usure de billes dans un broyeur. Par ailleurs, dans A4 les objets frittés sont obtenus par coulage à barbotine tandis que des billes frittées sont normalement obtenues par un procédé sol-gel. L'objet de la revendication 1 se distingue de A13 par la combinaison des plages des différents constituants du composé céramique et par la présence d'alumine.

XII. A la clôture des débats, les requêtes des parties ont été établies comme suit:

Les requérantes 1 et 2 ont demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet.

L'intimée a demandé le rejet des recours et à titre subsidiaire le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base de l'une des requêtes subsidiaires 1 à 6 déposées avec sa lettre en date du 21 septembre 2016.

Motifs de la décision

1. Suffisance de description

1.1 Il n'est pas contesté que la somme de la borne maximale de (ZrO2 + HfO2) et des bornes minimales des autres constituants de la composition selon la revendication 1 puisse légèrement dépasser la valeur de 100%.

1.2 Pour la chambre, cette imprécision n'est toutefois pas d'une nature telle qu'elle remette en cause la suffisance de description de l'invention. En particulier, l'homme du métier qui souhaiterait réaliser l'invention consulterait la description et mettrait en oeuvre des compositions ne dépassant pas 100%. Il apprend en particulier de la description que les billes revendiquées sont "à base de zircone et d'oxyde de cérium" (paragraphe [0001]) et que dans les exemples (voir Tableau 1), les oxydes ZrO2 et HfO2 sont ajoutés afin de compléter la composition à 100% (voir paragraphe [0033]). Il n'aura par conséquent aucune difficulté à mettre en oeuvre l'invention en utilisant des taux de ZrO2 et HfO2 légèrement en-dessous de la borne maximale définie à la revendication 1 tout en respectant les limites des plages requises.

1.3 Selon les requérants, une insuffisance de description résulterait aussi du fait que les billes revendiquées ne posséderaient pas une résistance à l'usure améliorée.

1.4 Pour la chambre, cet argument ne peut mettre en doute la suffisance de description puisque l'effet de résistance à l'usure n'est pas revendiqué (cf. T 2001/12, point 4.4 des motifs). Par contre, l'absence d'un tel effet pourrait avoir une influence sur l'appréciation de l'activité inventive (voir ci-dessous).

1.5 La chambre en conclut que le brevet répond aux exigences de suffisance de description requises par les articles 100b) et 83 CBE.

2. Mise à disposition du public du contenu de A3

2.1 Selon les écrits du requérant 1, le document A3 aurait été rendu accessible au public, son contenu ayant été présenté sous forme d'un diaporama projeté publiquement. Cependant, selon le témoin (voir infra), le document A3 aurait été présenté sous la forme d'un affichage (poster). Dans les deux cas, le niveau de preuve à appliquer pour établir les circonstances et le contenu de la mise à disposition du public dudit document est le même que celui d'un usage antérieur public (cf. T 1210/05, point 2.4.2 des motifs).

2.2 Selon la jurisprudence des chambres de recours, lorsque toutes les preuves d'un usage antérieur public se trouvent en la possession de l'opposant qui est seul à en avoir connaissance, si bien que le titulaire du brevet ne peut que difficilement ou même ne peut absolument pas se les procurer, il revient à l'opposant de produire la preuve au-delà de tout doute raisonnable de l'utilisation antérieure alléguée (La Jurisprudence des Chambres de recours de l'Office européen des brevet, ci-après "Jurisprudence", 8ème éd., III.G.4.3.2).

Dans le cas d'espèce, la preuve principale A3 de l'usage antérieur allégué se trouve en la possession du témoin M. Hong, ce dernier ayant été contacté par une tierce personne qui n'est pas celle qui à formé l'opposition du requérant 1, soit M. Gassenhuber. Cette tierce personne est désignée par le témoin M. Hong comme "mon ami" (voir le procès verbal de l'audition du témoin, page 9) et comme "tierce partie" par M. Gassenhuber (voir procès verbal, page 12). Etant donné que le requérant 1 s'appuie sur la preuve A3 et sur le témoignage de M. Hong et que le requérant 1 se voit dans l'impossibilité d'identifier le lien entre le témoin, la tierce personne et lui-même, la chambre considère que ce manque d'information lui est imputable et que, par conséquent, la preuve principale A3 doit être considérée comme étant en possession du requérant 1. Parallèlement, le témoin M. Hong est considéré comme appartenant à la sphère du requérant 1. Il s'ensuit qu'il revient au requérant 1 de produire la preuve au-delà de tout doute raisonnable de mise à disposition du public du contenu de A3.

2.3 Concernant les circonstances dans lequel cette mise à disposition du public alléguée s'est déroulée, la chambre note que dans toutes les écritures du requérant 1 et les attestations du témoin, le diaporama A3 a été présenté comme projeté devant un public comprenant un grand nombre de personnes. Ceci n'est pas contesté par le requérant 1 qui, selon lui, a été lui-même "surpris" d'apprendre peu avant la procédure orale devant la chambre de recours que le document A3 avait été présenté en fait sous la forme d'un affichage (poster). La chambre note en outre que selon l'attestation "Affidavit 2" de M. Hong (A19), le diaporama A3 aurait été projeté (voir point 4: "the time used for projecting each of the slides was sufficiently long...") et ni A5 ni A19 ne mentionnent que le diaporama A3 avait été présenté sous la forme d'un affichage. Cependant, selon le témoin, A3 avait été présenté sous forme d'un affichage, les diapositives ayant été imprimées et affichés sur un mur (voir pages 5 et 38 du procès-verbal de l'audition). Selon le compte-rendu de la conférence, il est confirmé que la contribution de Messieurs Hong, Lee et Kang a été présentée sous la forme d'un affichage (voir A33, section "Posters", P21).

La chambre en conclut que, pour ce qui concerne les circonstances de la présentation du contenu de A3, il est avéré que celle-ci a bien eu lieu sous la forme d'un affichage. Néanmoins, les différences entre le contenu des attestations et les explications orales du témoin jettent un doute sur la fiabilité du témoignage.

2.4 Quant au contenu de la présentation alléguée, la conclusion de A3 contient d'une part une erreur : la valeur de 6,29g/cm**(3)pour la densité étant trop élevée tel que cela a été confirmé par le requérant 1 et le témoin (cf. procès-verbal de l'audition du témoin, page 37). D'autre part, dans la section intitulée "Experimental" de A3, il est fait référence au procédé de moulage par barbotine et non pas au procédé sol-gel. C'est ce dernier qui est pourtant incontestablement utilisé pour produire des céramiques sous forme de billes (cf. page 23 du procès verbal) et non pas le procédé de moulage par barbotine, seul mentionné dans A3. Il existe donc un doute sérieux sur le fait que la présentation ait compris une partie relative à des billes, ce doute ne pouvant être levé par l'allégation du requérant 1 selon lequel la présentation A3 n'était pas focalisée sur la forme physique du matériau céramique, à savoir des pastilles ou des billes mais sur sa composition. Un autre doute résulte des incohérences entre d'une part le document A4/A20 et d'autre part le document A3. Ainsi, selon la section "Result and Discussion" de A4/A20, il y aurait un maximum de densité à 1300**(o)C en présence de Fe2O3 et un maximum de densité à 1250**(o)C lors de l'addition de Al2O3 et la densité ne diminuant qu'au-delà de 1400**(o)C, alors que la diapositive 8 de A3 ("Change of Properties by Fe2O3 (16Ce-TZP)") ne montre pas de maximum de densité à 1300**(o)C et que la diapositive 9 de A3 ("Change of Properties by Al2O3 (16Ce-TZP, 0.6 Fe2O3)") ne montre ni maximum de densité à 1250**(o)C ni diminution de densité seulement au-delà de 1400**(o)C.

2.5 En conclusion et au vu de ces incohérences, la chambre estime que le requérant 1 n'a pas produit la preuve incontestable de la mise à la disposition du public du contenu de A3. Par conséquent, la chambre ne prendra pas en compte ce document lors de l'appréciation de la brevetabilité.

3. Nouveauté

3.1 Selon la requérante 2, le document A6 divulgue l'objet de la revendication 1, à l'exception de la forme "bille" qui, selon elle, ne constitue pas un élément technique. La chambre ne partage pas cet avis, car la forme d'une bille confère indéniablement un élément technique à l'objet de la revendication 1 qui ne peut être omis lors de l'appréciation de la nouveauté (voir en particulier les points 4.1 et 4.2 ci-dessous). L'objet de la revendication 1 est donc nouveau par rapport à ce document.

3.2 La chambre en conclut que le brevet répond aux exigences de nouveauté (article 100a) en combinaison avec l'article 54(1),(2) CBE).

4. Activité inventive

4.1 Invention

L'invention concerne une bille frittée à base de zircone et d'oxyde de cérium.

4.2 Etat de la technique le plus proche

4.2.1 Les requérants proposent A1, A4/A20, A6/A6b ou A13 comme représentant l'état de la technique le plus proche. Selon la chambre, celui-ci est représenté par A13 pour les raisons suivantes.

4.2.2 Selon la jurisprudence des chambres de recours, l'état de la technique le plus proche est normalement un document de l'état de la technique qui divulgue un objet conçu dans le même but ou visant à atteindre le même objectif que l'invention revendiquée et présentant pour l'essentiel des caractéristiques techniques semblables, à savoir qui appellent le moins de modifications structurelles (Jurisprudence, op.cit., I.D.3.1).

4.2.3 Dans le cas d'espèce, le brevet concerne des billes frittées et leur utilisation dans des broyeurs ainsi que leur résistance à l'usure (voir les paragraphes [0001] et [0005]). La chambre constate que A13 est non seulement le seul document à divulguer une céramique frittée sous forme de bille (voir page 7, première ligne/tableau), mais celui-ci vise également le même but que l'invention, à savoir la résistance à l'usure (voir page 7, ligne 1/tableau à la ligne 12). A13 divulgue en particulier (voir tableau 1 : échantillons I et II ; et tableau 2 : "Bead Wear Rate") une bille fritée comprenant 77,0% de ZrO2, 22,4% de CeO2 et 0,2% de MnO en pourcentages massiques.

4.2.4 Les documents A1, A4/A20 et A6/A6b ne divulguent pour leur part ni bille frittée, ni le problème lié à leur usure.

Il n'est pas contesté que les documents A4/A20 et A6/A6b concernent des objets frittés ayant une composition couverte par les plages définies par la revendication 1 du brevet contesté. Toutefois, en choisissant un de ces documents comme état de la technique le plus proche, on ne prendrait pas le recul nécessaire pour pouvoir formuler un problème technique pertinent et, par conséquent, on adopterait une démarche vouée à l'échec en ce sens que, sans ce recul, toute tentative d'établir un enchaînement logique d'idées pouvant conduire à l'invention revendiquée s'enlise dès le départ par manque de but ou d'objet clairement identifiable (voir T 835/00, point 4.4.5 des motifs). Ainsi, les problèmes à résoudre proposés par les requérants ("trouver une autre forme de matériau de broyage", "mettre la composition en forme de bille") relèvent d'une telle démarche.

Il en va de même pour le document A1 qui concerne des céramiques à base de zirconium mais ne divulgue ni la forme bille ni le problème d'usure.

4.2.5 Par conséquent, la chambre en conclut que l'état de la technique le plus proche est représenté par le document A13.

4.2.6 Il n'est pas contesté que l'objet de la revendication 1 se distingue de A13 (Tableaux 1 et 2, échantillon 1) par la présence de plus de 0,1 % d'Al2O3.

4.3 Problème

Selon le brevet, le problème à résoudre est la mise à disposition d'une bille frittée présentant une résistance améliorée à l'usure lors de son utilisation dans un broyeur (cf. paragraphes [0005], [0031] et [0035] du brevet).

4.4 Solution

Pour résoudre se problème, le brevet propose une bille frittée selon la revendication 1 caractérisée en particulier en ce qu'elle contient > 0,1 % d'Al2O3.

4.5 Succès de la solution

4.5.1 A la question de savoir si la solution proposée résout le problème mentionné dans le brevet, le tableau 1 du brevet montre que la présence d'Al2O3 mène à un taux d'usure amélioré (essais 3 à 5 et 9 à 11) par rapport à l'essai ne faisant pas intervenir l'Al2O3 (essai 8 faisant intervenir du MnO2 et non MnO tel que dans les essais 3 à 5 et 9 à 11). Ces essais ont été conduits à densité sensiblement constante (voir paragraphe [0030], colonne "Densité des billes frittées" au Tableau 1). Ces résultats sont confirmés par les tests supplémentaires fournis avec la lettre de l'intimée en date du 3 juillet 2014 (voir page 7).

4.5.2 les tests fournis par la requérante 2 (document A32a), le taux d'usure en terme de pourcentage de poids perdu ("Pourcentage wt. loss") augmenterait avec l'addition d'Al2O3 (voir les échantillons T2.5, T3, T4 et T5 ayant une teneur en Al2O3 selon la revendication 1 du brevet en litige, par comparaison aux échantillons T1 et T2).

4.5.3 La chambre note que les échantillons T3 à T5 possèdent une densité de 1,1% à 8,31% inférieure à celle de l'échantillon de référence (T1). La densité des billes ayant une influence significative sur le taux d'usure, ces tests sont moins probants que ceux fournis par l'intimée avec la lettre en date du 3 juillet 2014, dans lesquels la variation de la densité est inférieure à environ 0,5%.

4.5.4 La chambre note que l'échantillon T2.5 selon A32a contient un taux d'Al2O3 de 0.25%, à savoir un taux d'Al2O3 légèrement supérieur à la borne inférieure de 0,1% selon la revendication 1, et que celui-ci a été obtenu avec une variation de densité inférieure à 0,5%. Pour cet échantillon, le taux d'usure reste sensiblement inchangé (0,2727 comparé à 0,2701) mais le taux en CeO2 n'y est pas le même pour les échantillons T1 (échantillon de référence) et T2.5.

4.5.5 La chambre en conclut que les tests selon A32a ne peuvent mettre en cause la crédibilité des tests fournis par l'intimée.

4.5.6 Selon les requérants, le problème ne serait pas résolu par la solution proposée puisque, d'une part, il n'y avait pas de preuve que l'effet obtenu pour le MnO soit aussi obtenu pour le MnO2 et, d'autre part, le problème de fournir des billes frittées ayant une bonne résistance à l'usure à des températures de frittage basses n'était pas résolu.

Concernant l'objection relative au MnO2 comme additif, la chambre remarque que les requérants n'ont fourni aucune preuve à l'appui de leur allégation selon laquelle ce composé ne mènerait pas à une diminution du taux d'usure. Concernant l'objection relative à la température de frittage (cf. le tableau en page 4 du mémoire de recours de la requérante 2), la chambre note que le problème à résoudre consiste à diminuer le taux d'usure à température de frittage sensiblement constante (cf. Tableau 1 du brevet litigieux) et non pas à maintenir constant le taux d'usure à température de frittage réduite.

4.5.7 Par conséquent, l'amélioration invoquée par l'intimée peut être reconnue. Il n'est donc pas nécessaire de reformuler le problème.

4.6 Evidence de la solution

4.6.1 A la question de savoir si la solution découle de manière évidente de l'état de la technique, aucun document autre qu'A13 ne traite du problème de l'usure de céramiques sous forme de billes.

4.6.2 Le document A6b s'intéresse essentiellement à l'expansion thermique (tableau 1) et à la résistance à la flexion (tableaux 1 et 2). Par ailleurs, la présence d'Al2O3 dans les céramiques selon A6b a pour seul but d'ajuster la température de frittage (colonne 5, lignes 23 et suivantes). Il est vrai que A6b mentionne que les céramiques décrites possèdent une "excellente" résistance à l'usure (colonne 1, lignes 51 à 53 ; colonne 4, lignes 36 à 41). Les propriétés examinées dans A6b ne comprennent toutefois pas le taux d'usure (voir en particulier les tableaux 1 et 2). Par conséquent, A6b ne peut enseigner que l'ajout d'Al2O3 mènerait à une amélioration du taux d'usure.

4.6.3 Quant au document A4, celui-ci enseigne que l'ajout d'Al2O3 mène à une amélioration de la résistance aux chocs (voir conclusion, point 3 : "higher impact strength"), mais il ne se prononce pas sur le taux d'usure, et encore moins sur le taux d'usure dans un broyeur à billes. En ce qui concerne l'aspect de la densité, A4 discute l'influence de l'ajout d'Al2O3 à la température de frittage à laquelle la densité maximale est obtenue (voir "Results and Discussion, Density changes"), mais ce document ne contient aucune information quant à la dureté ou au taux d'usure à densité constante. Par conséquent, A4 ne contient pas plus un enseignement pouvant diriger l'homme du métier vers la solution proposée dans le brevet en cause.

4.6.4 Les autres documents cités par les requérants, à savoir A30, A31 et A2, montrent que des céramiques peuvent être utilisées pour des applications d'abrasion, notamment sous forme de billes. Ces documents ne contiennent toutefois pas d'indication pouvant mener l'homme du métier à ajouter de l'alumine afin d'améliorer le taux d'usure des billes dans un broyeur.

4.6.5 Il découle de ce qui précède que l'objet de la revendication 1 n'est pas évident au vu de l'enseignement des documents accessibles au public avant la date de dépôt. Il en va de même pour l'objet de la revendication 10 (utilisation).

4.7 Le brevet répond donc à l'exigence d'activité inventive (article 100a) en combinaison avec l'article 56 CBE).

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Les recours sont rejetés.

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