European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2017:T165313.20171214 | ||||||||
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Date de la décision : | 14 Décembre 2017 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1653/13 | ||||||||
Numéro de la demande : | 02290444.5 | ||||||||
Classe de la CIB : | A01K 67/033 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé de culture d'acariens, préparation nutritive pour ce procédé, et préparation d'extraits allergéniques à partir de ces acariens | ||||||||
Nom du demandeur : | Stallergenes | ||||||||
Nom de l'opposant : | Alk-Abello A/S Citeq B.V. |
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Chambre : | 3.3.04 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Possibilité d'exécuter l'invention - requête principale (non) Activité inventive - requête subsidiaire (non) Requête produite tardivement - pendant la procédure orale |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La titulaire du brevet (requérante I) et l'opposante I (requérante II) ont chacune formé recours à l'encontre de la décision intermédiaire de la division d'opposition. Cette décision a considéré que le brevet européen n° 1 236 394 intitulé « Procédé de culture d'acariens, préparation nutritive pour ce procédé, et préparation d'extraits allergéniques à partir de ces acariens », dans une forme modifiée, répondait aux exigences de la CBE (article 101(3)a) CBE).
II. Les oppositions se fondaient sur l'article 100a) CBE (défaut de nouveauté, article 54 CBE, et défaut d'activité inventive, article 56 CBE), sur l'article 100b) CBE (exposé de l'invention) et sur l'article 100c) CBE (extension au-delà de la demande). La division d'opposition a considéré que le brevet, selon la requête principale, ne divulguait pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter, mais que l'objet de la requête subsidiaire 1 satisfaisait aux exigences de la CBE.
III. Les deux requérantes ont déposé des mémoires exposant les motifs des recours et ont répondu chacune au mémoire de l'autre. La requérante I a sollicité, dans son mémoire de recours, à titre principal l'annulation de la décision de la division d'opposition en ce qu'elle a rejeté sa requête principale (correspondant au jeu de revendications déposé le 20 mars 2008) et était d'avis que la décision de la division d'opposition prise sur la requête subsidiaire était bien fondée. Dans ses écritures ultérieures du 13 février 2014 la requérante I a renouvelé ses requêtes en précisant, qu'à titre principal, elle requérait le maintien du brevet selon la requête principale rejetée par la division d'opposition ou, à défaut, le maintien du brevet sur l'une des requêtes subsidiaires 2 à 8 telles que déposées le 8 février 2013. Elle a en outre demandé que soient admis à la procédure les documents D35 à D38.
IV. La requérante II a sollicité l'annulation de la décision objet du recours et la révocation du brevet dans son intégralité, ainsi que le rejet de la requête d'admettre les documents à la procédure. Elle a réfuté les arguments de la requérante I dans ses écritures en réponse.
V. La chambre a convoqué les parties à une procédure orale et leur a adressé une communication selon l'article 15(1) des Règles de Procédure devant les Chambres de Recours (RPCR), où elle a exprimé son avis provisoire, sans préjudice de la décision à venir. La requérante II et l' intimée ont annoncé respectivement par lettres en date du 17 octobre 2017 et du 30 octobre 2017 qu'elles n'assisteraient pas à la procédure orale et n'y seraient pas non plus représentées.
VI. La procédure orale devant la chambre a eu lieu le 14 décembre 2017 en l'absence de la requérante II et de l'intimée. Au cours de la procédure orale, la requérante I a soumis une nouvelle requête subsidiaire 2. Les précédentes requêtes subsidiaires 2 à 8 sont devenues les requêtes subsidiaires 3 à 9.
VII. La présente décision se réfère aux documents suivants :
D3 : Van Bronswijk J.E.M.H et Sinha R.N, 1971, J. Allergy, 47(1), 31-52.
D4 : Yi F.C. et al, 1999, Asian Pacific J. Allergy and Immunology, 17, 189-194.
D5 : Miyamoto J. et al., 1975, Japan J. Exp. Med., 45, 133-138.
D7 : « Artificial diets for insects, mites and spiders », Singh P. ed. 1977, 1-21, 23-35, 473-482.
D24 : Rodriguez J.G. et Blake D.F., 1979, Recent Advances in Acarology, Vol. II, 211-216.
D34 : Lang J.D. et Mulla M.S., 1978, Annals Entomol., Soc. Amer., 71(5), 785-787.
VIII. La revendication 1 de la requête principale s'énonce comme suit :
"1. Utilisation d'un milieu caractérisé en ce qu'il est dépourvu d'éléments ou de protéines humaines ou animales et qu'il comprend, en quantités efficaces, une pluralité d'acides aminés sous forme particulaire avec une granulométrie inférieure à 250 mym ou sous forme lyophilisée, où les acides aminés sous forme lyophilisée ont été obtenus par dissolution des acides aminés puis lyophilisation, pour la culture et la production d'acariens sélectionnés dans le groupe constitué de Dermatophagoides pteronyssinus, Dermatophagoides farinae, Blomia kulagini ou tropicalis, Pyroglyphus africanus, et Euroglyphus maynei".
Les revendications 1, 13 et 14 de la requête subsidiaire 1 s'énoncent comme suit :
"1. Utilisation d'un milieu caractérisé en ce qu'il est dépourvu d'éléments ou de protéines humaines ou animales et qu'il comprend, en quantités efficaces, une pluralité d'acides aminés sous forme particulaire avec une granulométrie inférieure à 250 mym ou sous forme lyophilisée, où les acides aminés sous forme lyophilisée ont été obtenus par dissolution des acides aminés puis lyophilisation et sont sous forme de particules de taille inférieure à 250 mym, pour la culture et la production d'acariens sélectionnés dans le groupe constitué de Dermatophagoides pteronyssinus, Dermatophagoides farinae, Blomia kulagini ou tropicalis, Pyroglyphus africanus, et Euroglyphus maynei.
13. Utilisation selon l'une des revendications 1 à 12, caractérisée en ce que le milieu comporte au moins 50% des acides aminés suivants:
L-alanine
L-arginine
Acide L-aspartique
L-cystéine/cystine
Acide L-glutamique
glycine
L-histidine
L-isoleucine
L-leucine
L-Lysine
L-méthionine
L-phénylalanine
L-proline
L-sérine
L-thréonine
L-tryptophane
L-tyrosine
L-valine.
14. Utilisation selon la revendication 13, caractérisée en ce que le milieu comprend les acides aminés dans les proportions suivantes, pour un total de 93,711 g :
L-alanine 3,8 g
L-arginine 4,2 g
acide L-aspartique 5,2 g
L-cystéine chlorhydrate monohydratée exprimé en L-cystéine/L-cystine 1,7 g
acide L-glutamique 11,5 g
glycine 2,7 g
L-histidine 3,1 g
L-isoleucine 5,0 g
L-leucine 6,7 g
Chlorhydrate de L-lysine, exprimé en L-lysine 5,0 g
L-méthionine 2,4 g
L-phénylalanine 7,0 g
L-proline 10,3 g
L-sérine 9,6 g
L-thréonine 3,8 g
L-tryptophane 1,3 g
L-tyrosine 0,6 g
L-valine 5,5 g
Chlorure de calcium dihydraté 0,44 g
Sulfate de magnésium heptahydraté 0,493 g
Hydroxyde de sodium 2,6 g
Hydroxide de potassium 0,70 g
Chlorure de potassium 0,078 g".
La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 diffère de celle de la requête subsidiaire 1 par la suppression de Blomia kulagini, Pyroglyphus africanus et Euroglyphus maynei de la liste des espèces d'acariens domestiques et par l'incorporation dans la revendication 1 de l'objet des revendications 13 et 14 de la requête subsidiaire 1.
IX. Les arguments de la requérante I peuvent se résumer ainsi :
Arrière-plan de l'invention
Diverses espèces d'acariens étaient utilisées dans l'art antérieur pour préparer des extraits allergéniques destinés à des formulations pour servir, par exemple, de tests d'allergologie in vivo ou in vitro, ou encore de préparations désensibilisantes à administrer aux patients. Le milieu de culture traditionnellement utilisé pour cultiver ces acariens contenait des protéines humaines ou animales, notamment des squames humaines, qui présentaient le problème d'être susceptibles d'être allergéniques ou de provoquer des réactions croisées indésirables. L'invention portait sur la fourniture d'un procédé de culture d'acariens dans un milieu dépourvu de telles protéines humaines ou animales.
Requête principale - revendication 1
Exposé de l'invention - article 100b) et article 83 CBE
La division d'opposition, en considérant que l'invention n'était pas divulguée de façon suffisamment claire et complète pour que la personne du métier puisse l'exécuter, s'appuyait sur la divulgation, dans le document D34, de l'impossibilité de cultiver D. pteronyssinus dans un milieu défini chimiquement et ne contenant pas d'éléments humains ou animaux. Mais, on pouvait avoir des doutes quant à la réalisation correcte des cultures dans le document D34, parce que dans le même document, les auteurs signalaient n'avoir été en mesure de cultiver D. pteronyssinus dans aucun des milieux testés, y compris dans le milieu standard Tetramin® (aliment pour poissons) / agar / levure de bière avec lequel la personne du métier se serait attendu à de bons rendements. En revanche, le document D7 montrait que la culture de D. pteronyssinus dans des conditions similaires pouvait aboutir à de bons rendements d'acariens. Ainsi, la personne du métier aurait traité avec scepticisme les résultats indiqués dans le document D34; il n'existait donc aucune preuve fiable montrant que l'invention ne pouvait pas être réalisée telle que revendiquée. Pour ces raisons, la requête principale satisfaisait aux exigences de l'article 83 CBE.
Requête subsidiaire 1 ? revendication 1
Activité inventive ? article 56 CBE
État de la technique le plus proche
La personne du métier n'aurait pas considéré le document D34 comme un bon point de départ pour l'invention revendiquée. Bien que portant sur la culture d'acariens dans des milieux dépourvus de protéines humaines ou animales, ce document utilisait des milieux très peu conventionnels parce qu'ils contenaient le détergent « tween » ainsi qu'une proportion inhabituellement élevée d'agar par comparaison avec d'autres milieux utilisés pour la culture des acariens, tels que ceux du document D24 (voir tableau II). De plus, le rendement des acariens obtenu à l'aide des milieux divulgués dans le document D34 était faible par rapport à celui obtenu dans des milieux conventionnels. Ainsi, la personne du métier n'aurait pas sérieusement envisagé de cultiver des acariens de la manière divulguée dans le document D34, mais, à la place, aurait pris comme point de départ un milieu conventionnel contenant des éléments humains ou animaux et n'aurait trouvé dans l'état de la technique aucun indice suggérant de l'adapter pour parvenir à l'invention revendiquée.
Même si le document D34 était pris comme état de la technique le plus proche, l'objet revendiqué n'aurait pas été évident pour la personne du métier. Alors que le milieu de culture utilisé dans le document D34 était un milieu défini chimiquement qui ne contenait pas d'éléments humains ou animaux, le document D34 ne divulguait pas la taille des particules d'acides aminés utilisés. La différence entre le procédé divulgué dans le document D34 et celui revendiqué tenait à ce que le milieu de culture utilisé dans la revendication spécifiait une taille de particules inférieure à 250 µm pour les acides aminés.
L'effet technique de cette différence était une amélioration du rendement des acariens. Cet effet était étayé par le paragraphe [0015] du brevet.
Ainsi, la division d'opposition avait eu raison de conclure qu'un milieu de culture comportant des acides aminés avec une taille de particules telle que définie dans la revendication 1 permettait de manière surprenante la culture d'acariens à des rendements comparables à ceux obtenus avec un milieu comportant des squames humaines. En fait, l'utilisation d'acides aminés d'une taille inférieure ou égale à 250 µm entraînait un meilleur rendement des acariens (par comparaison avec le rendement obtenu en utilisant des particules d'acides aminés plus grandes, comme l'illustre le brevet au paragraphe [0015]):
"L'invention repose sur la découverte que, si l'on utilise tels quels (sans broyage et/ou sans solubilisation-lyophilisation et/ou sans adjonction de sels) les acides aminés disponibles commercialement, les acariens se cultivent extrêmement mal et les rendements sont très faibles. De façon surprenante, les mélanges d'acides aminés ayant les caractéristiques définies dans l'invention aboutissent à des rendements comparables voire supérieurs aux rendements classiques utilisant des squames humaines".
Le problème technique objectif
Le problème technique objectif au vu de D34 était donc de fournir un milieu de culture dépourvu de protéines humaines ou animales, adapté à la culture des acariens domestiques à des rendements comparables à ceux obtenus avec un milieu contenant des squames humaines.
Évidence
Ni le document D34 ni aucun des autres documents cités dans la procédure ne comportaient d'incitations ou de motivations pour l'homme du métier à modifier la taille des particules des acides aminés dans le milieu divulgué dans le document D34 pour passer à celle spécifiée à la revendication 1 afin de résoudre le problème formulé plus haut. En particulier, ni le document D3 ni le document D4 ne contenaient une telle motivation. Dans le document D3, un milieu dérivé des squames humaines était tamisé à travers un tamis de 177 µm pour éliminer les grands poils et d'autres particules, mais ce tamisage n'aurait pas été nécessaire dans le cas d'espèce puisqu'il n'était pas nécessaire d'éliminer les poils ou d'autres éléments étrangers.
De même, le document D4 utilisait un milieu contenant des flocons d'aliments pour poisson Tetramin qui étaient traités par chauffage, broyage et tamisage à 125 µm afin d'éliminer les acariens et les insectes préexistants, mais pas pour améliorer l'efficacité du milieu.
Ainsi, ni le document D3 ni le document D4 n'enseignaient que la meilleure manière de cultiver les acariens était dans un milieu contenant des acides aminés ayant une taille de particules inférieure à 250 µm. En résumé, rien dans l'état de la technique n'incitait l'homme du métier à modifier le milieu de culture divulgué dans le document D34 en utilisant des acides aminés sous forme de particules inférieures à 250 µm afin de résoudre le problème technique.
Recevabilité de la requête subsidiaire 2
La requête devrait être admise dans la procédure. Elle a été déposée en réaction à l'avis de la chambre exprimé durant la procédure orale, selon lequel aucun effet technique prouvé n'était associé à la taille des particules d'acides aminés. En particulier, les modifications apportées visaient à aligner l'objet revendiqué sur les exemples 1 et 3 du brevet, qui démontraient clairement un effet technique (amélioration du rendement des acariens) pour les milieux utilisés.
Requêtes subsidiaires 3 à 9
Aucun argument n'a été avancé pour soutenir l'admission de ces requêtes dans la procédure.
X. Les arguments écrits du requérant II peuvent se résumer de la manière suivante.
Requête principale ? revendication 1
Exposé de l'invention ? article 100b) et article 83 CBE
Dans le mémoire du titulaire exposant les motifs du recours, le document D5 semblait avoir été incorrectement cité en tant que document D7. Les références au document D7 ont été interprétées comme relatives au document D5.
Dans la décision objet du recours, la division d'opposition a estimé que la requête principale ne répondait pas aux exigences de l'article 83 CBE au vu de la preuve d'un mode de réalisation qui ne fonctionne pas dans le document D34. La suggestion de la titulaire selon laquelle le document D5 jetait un doute sur la preuve du document D34 n'a pas été acceptée. Toute comparaison de nombres absolus en termes de rendement des acariens venant de deux études différentes devrait être traitée avec prudence parce que les conditions de culture sont susceptibles de ne pas avoir été identiques ni même comparables. En fin de compte, les auteurs de D34 concluaient que « D. pteronyssinus could not be maintained on either chemically-defined diet, but did well on the organic diet » [D. pteronyssinus ne pouvait pas être maintenu avec des aliments définis chimiquement, mais prospérait avec une alimentation organique] (voir l'abrégé).
Ainsi, la conclusion du titulaire du brevet selon laquelle l'étude rapportée dans le document D34 avait été menée dans des conditions tellement défavorables que la culture efficace d'acariens D. pteronyssinus dans un milieu défini de manière réellement chimique avait peu de chances d'être couronnée de succès était incorrecte. En fait, le document D34 divulguait la culture des acariens avec des alimentations assez différentes ? mais néanmoins définies de manière véritablement chimique ? (à savoir le régime alimentaire Rogers et Harper et le régime alimentaire Rodriguez-LaSheen). Ces deux régimes alimentaires, eu égard à leur composition chimique, relevaient de la définition du milieu de la revendication 1. Une comparaison entre les résultats divulgués dans le document D34 et ceux d'autres études ne permettait que de conclure que la constitution particulière en acides aminés d'un régime alimentaire défini de manière véritablement chimique jouait un rôle important pour le bien-être et la reproduction des acariens dans une culture. Ainsi, la conclusion à laquelle la division d'opposition était parvenue était correcte.
Requête subsidiaire 1 ? revendication 1
Activité inventive ? article 56 CBE
État de la technique le plus proche
Conformément à la position de la division d'opposition dans la décision attaquée, le document D34 représentait l'état de la technique le plus proche. La seule différence entre les procédés de culture des acariens divulgués dans le document D34 et l'objet de la revendication 1 tenait à ce que dans ce dernier, les acides aminés prenaient la forme de particules de taille inférieure à 250 µm.
Le problème technique objectif
Aucun effet technique clair n'était associé à la caractéristique distinctive. Le brevet ne contenait aucun exemple procédant à une comparaison entre les milieux pertinents. En particulier, on ne trouvait aucune comparaison entre l'utilisation d'un milieu ayant des acides aminés lyophilisés (par ex. comme dans D34) avec l'utilisation telle que revendiquée d'un milieu similaire se distinguant uniquement par le fait que les acides aminés lyophilisés étaient « sous forme de particules de taille inférieure à 250 µm ». Les milieux utilisés dans les exemples 1 et 3 du brevet litigieux étaient partiellement définis chimiquement et partiellement d'une nature complexe parce qu'ils contenaient un mélange de composants chimiques tels que les acides aminés et les vitamines (cyanocobalamine et D-biotine), mais aussi des ingrédients nutritionnels complexes traditionnels tels que le germe de blé et la levure (notamment sources d'acides aminés). En fait, ces ingrédients nutritionnels complexes constituaient 84% en poids des milieux des exemples 1 et 3 du brevet.
En résumé, le milieu utilisé dans D34 comportait des acides aminés libres comme seule source d'acides aminés alors que les milieux utilisés dans les exemples 1 et 2 du brevet opposé présentaient le germe de blé et la levure en tant que sources prédominantes d'acides aminés, les acides aminés libres ne constituant qu'une source d'acides aminés accessoire. Une comparaison entre les résultats obtenus dans le document D34 et ceux obtenus dans le brevet ne permettait donc de tirer aucune conclusion sur l'effet de la taille des particules des acides aminés en raison des autres différences existant dans la composition des milieux comparés.
Sur le sujet du taux de croissance des acariens, les auteurs du document D34 reconnaissaient que la croissance des acariens dans un milieu non allergénique, défini de manière véritablement chimique, serait plus lente que dans un milieu contenant des ingrédients organiques complexes. Le document D34 enseignait que (i) la présence ou l'absence d'ingrédients nutritionnels complexes, et (ii) la composition exacte en acides aminés d'un milieu non allergénique défini chimiquement influençaient considérablement le rendement des acariens obtenu.
La conclusion du titulaire du brevet selon laquelle la simple lyophilisation des acides aminés pour obtenir des particules de taille inférieure à 250 µm était seule responsable d'une amélioration du rendement en termes de production et de culture des espèces d'acariens citées en comparaison avec l'utilisation d'acides aminés lyophilisés ayant une taille de particules non divulguée, figurant dans le document D34, ne tenait absolument pas compte du fait que l'amélioration du rendement s'expliquait de façon plus plausible par l'inclusion de composants organiques complexes tels que la levure et le germe de blé et par l'équilibre spécifique entre les acides aminés libres du milieu. Sur la base de ces arguments, aucun effet technique ne pouvait raisonnablement être attribué à la caractéristique d'une taille des acides aminés maintenue à moins de 250 µm.
Au vu de l'absence de cet effet technique, le problème objectif résolu par le procédé revendiqué était « d'améliorer une formulation d'acides aminés déjà existante d'origine non humaine et non animale eu égard à l'accessibilité du milieu pour les espèces d'acariens citées afin d'améliorer le rendement de la production et de la culture des espèces d'acariens (par rapport aux rendements obtenus dans D34). »
Évidence
De par ses connaissances générales communes, l'homme du métier savait que la cohérence et la structure d'un régime alimentaire convenable pour insectes étaient largement tributaires de ses habitudes alimentaires et de la structure de sa partie buccale.
Le document D4 enseignait à l'homme du métier qu'il pouvait être utile et même bénéfique de prévoir un milieu sous forme de particules d'une taille inférieure à 125 µm afin de maximiser la superficie (et donc l'accessibilité) du régime alimentaire (milieu) pour l'acarien domestique Blomia tropicalis.
Il aurait donc été évident pour l'homme du métier d'adapter la taille des particules aux milieux divulgués dans le document D34 conformément à la divulgation du document D4 pour parvenir à la solution revendiquée. L'objet revendiqué présentait donc un défaut d'activité inventive.
Les requêtes finales des parties
XI. La requérante I a demandé que la décision de la division d'opposition soit annulée et que le brevet soit maintenu sur la base de la requête principale rejetée par la division d'opposition ou, à défaut sur la base de la requête subsidiaire 1, ou plus subsidiairement sur la base de la requête subsidiaire 2 déposée durant la procédure orale devant la chambre ou encore plus subsidiairement sur l'une des requêtes subsidiaires 3 à 9 (précédemment 2 à 8) déposées le 8 février 2013. La requérante a demandé par ailleurs que les documents D35 à D38 soient admis dans la procédure.
XII. La requérante II a demandé l'annulation de la décision de la division d'opposition et la révocation du brevet.
XIII. L'intimé n'a fait valoir aucune prétention.
Motifs de la décision
1. Les recours sont conformes aux articles 106 à 108 et à la règle 99 CBE et sont donc recevables.
2. La procédure orale a été tenue en l'absence de la requérante II et de l'intimée conformément à la règle 115(2) CBE et, comme prévu à l'article 15 RPCR, les délibérations ont aussi considéré les moyens écrits de la requérante II.
Admission de documents
3. La requérante I a demandé que les documents D35 à D38 soient admis dans la procédure de recours. Or, il est apparu à la chambre que ces documents ne jouaient aucun rôle dans les moyens de la requérante, de nature à être pris en compte pour la décision et la chambre ne s'est appuyée sur aucun de ces documents pour parvenir à sa décision. Il n'y a donc pas eu lieu de statuer sur l'admission de ces documents.
Requête principale ? revendication 1
Exposé de l'invention ? article 100b) et article 83 CBE
4. L'article 83 CBE requiert que la demande de brevet européen divulgue l'invention de façon suffisamment claire et complète pour que l'homme du métier puisse l'exécuter.
5. Dans la décision objet du recours, la division d'opposition a considéré que le document D34 divulguait un mode de réalisation du procédé revendiqué qui ne fonctionne pas. Spécifiquement, le document D34 divulguait l'incapacité à réussir à cultiver D. pteronyssinus dans un milieu tel que défini dans la revendication, de sorte que l'invention revendiquée ne répondait pas aux exigences de l'article 83 CBE.
6. La requérante I a fait valoir que l'échec signalé dans le document D34 n'était pas dû au milieu utilisé, mais plutôt à des problèmes liés à la méthodologie appliquée par les auteurs du document D34. Cette thèse était étayée par les rendements étonnamment faibles obtenus même dans les exemples employant des milieux standard, y compris des protéines animales. Si les conditions de culture avaient été correctes, des rendements tels que ceux rapportés dans le document D5 auraient été escomptés. La chambre relève ici qu'étant donné que la numérotation des pages et le contenu indiqués correspondent à ceux du document D5, les références au document D7 dans le mémoire de la titulaire exposant les motifs du recours sont à interpréter comme devant se rapporter au document D5.
7. La chambre est d'avis que la divulgation dans le document D5 de rendements comparativement bons d'acariens obtenus dans un milieu donné n'est pas la preuve de ce que les résultats indiqués dans le document D34 aient été affectés de problèmes de méthodologie. En raison des différences de milieux et de conditions de culture utilisées dans le document D5 et dans le document D34, aucune comparaison directe probante entre les résultats obtenus à l'aide des protocoles respectifs utilisés n'est possible. La chambre doit donc considérer la divulgation de modes de réalisation qui ne fonctionnent pas dans le document D34 comme exacte et estime que la revendication, dans la mesure où elle couvre de tels modes de réalisation, porte sur une invention qui ne peut pas être réalisée par l'homme du métier.
8. Au vu de ce qui précède, la chambre conclut que l'invention selon la revendication 1 ne satisfait pas aux exigences de l'article 83 CBE.
Requête subsidiaire 1 ? revendication 1
Activité inventive ? article 56 CBE
9. Pour évaluer si une invention revendiquée satisfait ou non aux exigences de l'article 56 CBE, la chambre applique l'approche « problème-solution » établie de longue date par la jurisprudence des chambres de recours (voir Jurisprudence des chambres de recours de l'Office européen des brevets, 8e édition, 2016, I.D.2). La première étape consiste à déterminer l'état de la technique le plus proche.
10. La revendication porte sur l'utilisation d'un milieu pour la culture d'acariens sélectionnés dans le groupe composé de Dermatophagoides pteronyssinus, Dermatophagoides farinae, Blomia kulagini ou tropiculis, Pyroglyphus africanus, et Euroglyphus maynei. Le milieu est caractérisé en ce qu'il ne contient pas d'éléments humains ou animaux, mais comporte une pluralité d'acides aminés ayant une granulométrie inférieure à 250 mym ou sous forme lyophilisée ayant également une taille de particules inférieure à 250 µm. Pour la facilité de lecture, l'« utilisation » revendiquée sera également appelée « méthode » ou « procédé » dans la présente décision.
État de la technique le plus proche
11. L'état de la technique le plus proche pris en considération pour apprécier l'activité inventive est normalement un document de l'état de la technique divulguant l'objet conçu dans le même but ou visant à atteindre le même objectif que l'invention revendiquée et présentant pour l'essentiel des caractéristiques techniques semblables, à savoir qui appellent peu de modifications structurelles (ibid. I.D.3.1).
12. Le document D34 divulgue des tentatives de cultiver des espèces d'acariens domestiques, D. farinae et D. pteronyssinus, avec deux régimes alimentaires dépourvus de protéines humaines et animales (allergéniques) et définis chimiquement et un régime alimentaire organique complexe. Il indique que D. pteronyssinus n'a pas pu être maintenu avec l'un ou l'autre des régimes alimentaires définis chimiquement, mais a prospéré avec le régime alimentaire organique. D. farinae s'est développé avec chacun des trois régimes alimentaires, mais des nombres considérablement plus élevés ont été produits avec le régime alimentaire organique au bout de 6 mois par rapport aux nombres obtenus avec les régimes alimentaires définis chimiquement. Les composants des deux régimes alimentaires définis chimiquement sont décrits aux tableaux 1 et 2. Les ingrédients étaient dissous, puis lyophilisés (voir page 785, colonne de droite). Le document ne mentionne pas la taille des particules obtenues après le processus de lyophilisation. Un gramme de chaque régime alimentaire était ajouté à chaque flacon d'échantillon, après quoi les acariens à cultiver étaient ajoutés. Les auteurs concluent que « D. farinae can be reared on a non-allergenic chemically-defined diet, although growth on this diet was significantly slower as compared to numbers reared on a complex diet containing allergenic substances » [D. farinae peut être cultivé avec un régime alimentaire non allergénique défini chimiquement, même si l'on observe avec ce régime alimentaire une croissance considérablement plus lente que les nombres cultivés avec un régime alimentaire complexe contenant des substances allergéniques] (voir paragraphe chevauchant les pages 786 et 787).
13. Ainsi, le document D34 porte sur le même but que l'objet revendiqué et divulgue l'utilisation de milieux de culture présentant une structure similaire. La chambre considère donc qu'il représente l'état de la technique le plus proche pour l'appréciation de l'activité inventive.
14. Étant donné que le document D34 s'intéresse directement à la culture d'acariens domestiques avec un régime alimentaire dépourvu d'allergènes humains ou animaux et que le document signale que « D. farinae can be reared on a non-allergenic chemically-defined diet ? » [D. farinae peut être cultivé avec un régime alimentaire non allergénique défini chimiquement](supra), l'argument du requérant selon lequel la personne du métier n'aurait pas sérieusement envisagé de cultiver des acariens domestiques en utilisant le milieu divulgué dans le document D34 ne saurait prospérer.
Le problème technique objectif
15. Les parties sont convenues que la seule différence entre le procédé revendiqué et celui divulgué dans le document D34 était la taille des particules d'acides aminés. Pour préparer les milieux dans le document D34, les acides aminés sont dissous, puis lyophilisés. Le même procédé est mentionné dans la revendication, mais avec l'indication supplémentaire que les particules ainsi obtenues sont d'une taille inférieure à 250 µm
16. Les requérants divergent sur la question de l'effet technique exercé sur la méthode de culture par cette différence de taille. Le requérant I soutenait que l'utilisation d'acides aminés d'une taille inférieure ou égale à 250 µm entraînait un meilleur rendement des acariens, comme affirmé dans le brevet au paragraphe [0015].
17. Le requérant II contestait que les différences entre le rendement indiqué dans les exemples 1 et 3 du brevet et celui indiqué dans le document D34 puissent être attribuées à la taille des particules d'acides aminés.
18. Il est de jurisprudence constante des chambres de recours que « les prétendus avantages qui sont invoqués par le titulaire du brevet/demandeur par rapport à l'état de la technique le plus proche, mais qui ne sont pas étayés par des preuves suffisantes, ne peuvent pas être pris en considération pour déterminer le problème à la base de l'invention et donc pour apprécier l'activité inventive » (voir Jurisprudence des chambres de recours de l'Office européen des brevets, 8e édition, I.D.4.2).
19. Il n'existe aucun moyen de preuve versé au dossier selon lequel des acariens domestiques sont cultivés dans un milieu tel que revendiqué, par une méthode différant seulement de celui divulgué dans le document D34 par la taille des particules d'acides aminés. Ainsi, il n'existe aucune preuve directe que l'effet de l'amélioration du rendement, allégué dans le brevet, soit dû à la différence de taille des particules d'acides aminés. Reste à apprécier l'existence dans le brevet de preuves indirectes appropriées à cet égard. Les exemples 1 et 3 concernent des modes de réalisation de l'invention revendiquée qui obtiennent de bons rendements de D. pteronyssinus (voir tableaux 1 et 2). Le paragraphe [0054] du brevet indique : « [?] la culture sur acides aminés suivant l'exemple 1 semble bien adaptée, puisque non seulement les résultats sont satisfaisants après deux cycles de culture, mais encore ils sont très proches des résultats obtenus avec les squames humaines, qui constituent l'alimentation naturelle des acariens dont il est ici question. »
20. Cependant, outre les acides aminés, le milieu utilisé dans l'exemple 1 contient également du germe de blé, de la cyanocobalamine, de la levure de boulangerie et de la biotine (voir paragraphe [0029]), les deux premiers représentant une source de nutriments complexe non présente dans les milieux du document D34. La chambre considère que la personne du métier estimerait tout à fait possible qu'une différence quelconque de rendement obtenu puisse être due à la présence de ces sources de nutriments supplémentaires. Ainsi, la chambre n'est pas d'avis que le brevet démontre que l'utilisation d'un milieu de culture qui se distingue de celui divulgué dans le document D34 uniquement par la taille des particules des acides aminés aboutisse à elle seule à l'effet technique d'une amélioration (surprenante) du rendement des acariens.
21. L'argument de la requérante selon lequel le paragraphe 15 de la description du brevet en cause suffit à établir que la taille des particules est bien à l'origine des effets revendiqués, puisque ce sont les inventeurs eux-mêmes qui l'ont déclaré après l'avoir constaté, ne peut être retenu. En effet, cette déclaration établit une présomption qui ne peut avoir valeur de preuve suffisante dès lors qu'elle est contestée et que les raisons avancées pour la contester sont, elles, suffisantes pour la remettre en question et lui retirer toute force probante suffisante. Dans un tel cas, des éléments de preuve tels que des tests sont nécessaires pour conforter cette présomption.
22. Selon la jurisprudence des chambres, s'il est constaté qu'un problème formulé initialement n'est pas résolu, le problème est reformulé en un problème pouvant être considéré comme résolu. Dans ce cas, le caractère évident de l'objet revendiqué est apprécié sur cette nouvelle base (voir, par exemple, la décision T 188/09, motif 18).
23. En l'espèce, le problème pouvant être dérivé de la demande telle que déposée consiste à fournir une méthode alternative pour cultiver des acariens domestiques sélectionnés parmi le groupe composé de Dermatophagoides pteronyssinus, Dermatophagoides farinae, Blomia kulagini ou tropiculis, Pyroglyphus africanus, et Euroglyphus maynei dans des milieux dépourvus d'éléments humains ou animaux ou de protéines. Le brevet établit que l'objet revendiqué résout ce problème, puisque les exemples 1 et 3 fournissent les résultats d'une culture réussie de D. pteronyssinus sur deux différents modes de réalisation du milieu définis dans la revendication.
Évidence
24. La question à laquelle il convient de répondre est donc de savoir si la personne du métier, confrontée au problème technique formulé plus haut et prenant comme point de départ les méthodes divulguées dans le document D34, représentant l'état de la technique le plus proche, aurait jugé évident de recourir à la méthode revendiquée.
25. Comme indiqué plus haut au point 12, le document D34 divulgue un procédé de culture de D. farinae dans un milieu qui se distingue de celui défini dans la revendication uniquement par la taille des particules d'acides aminés inférieure ou égale à 250 µm. Le document D4 porte sur la culture de l'acarien domestique, B. tropicalis, et relève donc du même domaine technique que l'invention. Le milieu utilisé pour cultiver des acariens selon les méthodes décrites dans le document D4 est celui contenant des protéines humaines ou animales, puisqu'il contient des aliments pour poissons Tetramin à titre de source nutritive. Pour la préparation de ce milieu, avant l'introduction dans les flacons de culture, les flocons de Tetramin sont broyés et passés à travers un tamis de 125 µm. Il est déclaré : « in order to provide a maximum surface area, a thin layer of < 125µm particles were introduced in to Erlenmeyer flasks [?] » [afin de fournir une superficie maximale, une fine couche de particules < 125 µm a été introduite dans des flacons Erlenmeyer [?] (voir page 190, paragraphe chevauchant la colonne de gauche et la colonne du milieu).
26. Ainsi, la personne du métier sait grâce au document D4 que le tamisage d'un matériau nutritif à travers un tamis de 125 mym permet de distribuer l'élément nutritif de manière à fournir une superficie maximale. De l'avis de la chambre, la personne du métier en quête d'une alternative à la méthode de culture divulguée dans le document D34 aurait jugé évident de passer le milieu défini chimiquement divulgué dans le document D34 à travers un tamis de 125 µm avant de l'utiliser pour cultiver des acariens domestiques dans le même but que celui indiqué dans le document D4. La chambre conclut donc que l'adaptation des milieux divulgués dans le document D34 en passant les ingrédients solides à travers un tamis ayant une taille de mailles de 125 µm aurait été évidente pour la personne du métier à titre de solution au problème formulé plus haut. Ce tamisage aurait abouti à un milieu contenant des acides aminés ayant des particules d'une taille inférieure à 250 µm et tombant donc dans le champ d'application de la revendication. L'objet revendiqué présente donc un défaut d'activité inventive.
Admission de la requête subsidiaire 2 dans la procédure ? article 13(1) RPCR
27. Les revendications de cette requête ont été déposées lors de la procédure orale devant la chambre et comportent un certain nombre de modifications de fond. Par exemple à la revendication 1, sont supprimées deux espèces d'acariens domestiques et est inclus l'objet des revendications 13 et 14 de la requête subsidiaire 1, qui est une liste de quelques-uns des composants du milieu de culture.
28. En vertu de l'article 13(1) RPCR, toute modification aux moyens invoqués par une partie après que celle-ci a déposé ses motifs de recours ou sa réponse peut être admise et examinée à l'appréciation de la chambre. La chambre doit exercer son appréciation en tenant compte notamment de la complexité du nouvel objet, de l'état d'avancement de la procédure et de l'économie de la procédure. De plus, il est de jurisprudence établie des chambres de recours que les requêtes présentées très tardivement (notamment peu avant la procédure orale, voire au cours de celle-ci) ne sont admises que si elles semblent de prime abord surmonter les objections jusque là débattues et que les revendications modifiées n'engendrent pas, quant à l'appréciation de la brevetabilité, une situation si nouvelle que l'autre partie ne puisse raisonnablement pas la prendre en considération sans que la procédure soit rallongée de façon indue (voir Jurisprudence des chambres de recours de l'Office européen des brevets, IV.E.4.2.2).
29. Dans la présente affaire, une appréciation de la question de savoir si l'objet revendiqué implique ou non une activité inventive exigerait, dans un premier temps, de réévaluer le document qui représente l'état de la technique le plus proche. Ainsi, la chambre est dans l'impossibilité de dire si les revendications de la requête de prime abord surmontent les objections jusque là débattues. Elles ne sont donc pas recevables. De plus, la requérante II et l'intimée pouvaient raisonnablement s'attendre à ce que toute requête subsidiaire destinée à répondre aux objections avancées dans le mémoire exposant les motifs du recours de la requérante II soit déposée par la requérante I avec ses écritures en réponse. C'est pourquoi, en l'espèce, l'admission de cette requête à ce stade aussi tardif de la procédure aurait pour conséquence de priver la requérante II et l'intimée de leur droit d'être entendu, en violation de l'article 113(1) CBE. Au vu de ces considérations, la chambre décide de ne pas admettre la requête subsidiaire 2 dans la procédure.
Requêtes subsidiaires 3 à 9
30. En vertu de l'article 12(2) RPCR, le mémoire exposant les motifs du recours et la réponse doivent contenir l'ensemble des moyens invoqués par une partie. En particulier, ils doivent présenter les motifs pour lesquels il est demandé de modifier ou de confirmer la décision attaquée. La requérante I a requis le maintien du brevet sur la base des requêtes subsidiaires 3 à 9 mais n'a avancé aucun raisonnement pour expliquer pourquoi ces requêtes devraient être admises, laissant ainsi à la chambre le soin de deviner les raisons sous-tendant le dépôt de ces requêtes, pourquoi elles devraient être admises et quelles objections elles visaient à surmonter. À cet égard, elles ne sont pas motivées et la chambre ne peut donc pas les examiner (voir Jurisprudence des chambres de recours de l'Office européen des brevets, 8e édition, IV.E.4.2.4).
31. En l'absence de requête recevable, le brevet doit être révoqué.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision objet du recours est annulée.
2. Le brevet est révoqué.