European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2016:T184112.20160512 | ||||||||
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Date de la décision : | 12 Mai 2016 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1841/12 | ||||||||
Numéro de la demande : | 97400119.0 | ||||||||
Classe de la CIB : | C07C 17/278 C07C 17/20 C07C 19/08 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane et du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane | ||||||||
Nom du demandeur : | ARKEMA FRANCE | ||||||||
Nom de l'opposant : | Solvay (Société Anonyme) | ||||||||
Chambre : | 3.3.10 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Recevabilité du recours (oui) Modification occasionnée par un motif d'opposition - Modifications admises (oui) Activité inventive - (oui) Remboursement de la taxe de recours (non) Remboursement de la taxe de recours - décision attaquée suffisamment motivée (oui) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le requérant (propriétaire du brevet) a introduit un recours contre la décision de révocation du brevet européen n° 787707 datée du 9 août 2012.
II. Une opposition avait été formée par l'intimé en vue d'obtenir la révocation du brevet dans sa totalité pour manque de nouveauté et d'activité inventive (Article 100(a) CBE), pour insuffisance de l'exposé de l'invention (Article 100(b) CBE) et pour extension de l'objet des revendications au-delà de la demande telle que déposée (Article 100(c) CBE). Les documents suivants ont été cités dans la procédure d'opposition:
(1) R. Freidlina et al. "Telomerization of 2-chloropropene with carbon tetrachloride" Bull. Acad. Sci., USSR Div. Chem. Sci., vol. 28, no. 7, (1980), pages 1766-1769,
(2) US-A-3454657,
(4) EP-A-0 699 649,
(6) A. L. Henne et J.B. Hinkamp "The Synthesis and Directed Chlorination of 2,2-Difluorobutane", J. Am. Soc. Vol. 67, (1945), pages 1194- 1197, et
(7) WO-A-95 04021.
Lors d'un premier recours contre une première décision de la division d'opposition (décision T0519/07, non publié dans JO OEB), il avait été décidé entre autres que la revendication 1 de la requête subsidiaire 10 alors pendante satisfaisait aux exigences de l'article 123 (2) et (3) CBE et que l'invention était exposée dans le brevet européen de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier la puisse exécuter. L'affaire avait été renvoyée à la division d'opposition pour suite à donner sur la base de cette requête subsidiaire 10 afin de statuer sur la question de l'activité inventive.
III. Selon la division d'opposition le procédé de la revendication 1 la requête subsidiaire 10 alors pendante consistait en deux étapes. La première étape concernait la préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane. Cette étape avait été jugée dans la décision T0519/07 comme manquant d'activité inventive. La deuxième étape du procédé revendiqué, c'est-à-dire la fluoration du précurseur hydrocarboné chloré obtenu lors de la première étape, était connue en soi comme indiqué dans le paragraphe [0003] du brevet litigieux. Il découlait aussi des documents (6) et (7) que l'hydrofluoration de composés hydrocarbonés était facile à mettre en ½uvre. Par conséquent, l'homme du métier désirant mettre à disposition un procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentafluoropentane aurait juxtaposé le procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane à une étape de fluoration sans faire preuve d'activité inventive étant donné que le composé intermédiaire, c'est-à-dire le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane, pouvait être isolé et purifié. Aucune activité inventive ne pouvait résulter d'une telle juxtaposition d'étapes. L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 10 manquait donc d'activité inventive.
IV. Pendant la procédure orale devant la chambre tenue le 12 mai 2016, le requérant a défendu son brevet sur la base des revendications d'une requête principale et des requêtes subsidiaires 1 à 5, toutes les requêtes ayant été déposées avec le mémoire de recours datée du 3 décembre 2012. Le requérant a également retiré la page 2 modifiée du brevet qu'il avait également déposée avec ce mémoire.
La revendication 1 de la requête principale est identique à la revendication 1 de la requête subsidiaire 10 renvoyée à la division d'opposition par la décision T0519/07. Elle s'énonce comme suit:
"1. Procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane caractérisé en ce que l'on prépare du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane par addition du tétrachlorure de carbone sur le 2-chloropropène en opérant en présence de chlorure cuivreux et d'une mono, di- ou trialkylamine dont le radical alkyle ou les radicaux alkyles, linéaire(s) ou ramifié(s), peuvent contenir de 1 à 8 atomes de carbone, ou une amine cyclanique, dont la concentration molaire est comprise entre 2,5 et 6%, et l'on soumet le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane ainsi obtenu à une fluoration par l'acide fluorhydrique."
V. Selon le requérant, le recours était recevable et la requête principale devait être admise dans la procédure de recours. En effet, la revendication dépendante 6 n'avait été modifiée que pour la mettre en conformité avec la revendication 1 car il était clair de la demande telle que déposée que les caractéristiques présentes dans la revendication 6 s'appliquaient uniquement à la première étape du procédé revendiqué. L'exemple comparatif en page 14 du document (7) représentait l'état de la technique le plus proche de l'invention. Le problème technique à résoudre était la mise à disposition d'un procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane à partir de produits de départ facilement accessibles et donnant des sous-produits aisément convertibles en produit final. Les exemples 1 à 4 du brevet litigieux montraient que le problème était résolu par le procédé revendiqué. Le raisonnement de la division d'opposition prétendant que ce procédé n'était qu'une juxtaposition de moyens dépourvue d'effet technique n'était pas correct, puisque les deux étapes du procédé étaient reliées entre elles par un intermédiaire de synthèse, à savoir le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane. Le document (7) divulguait la préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane à partir d'un composé contenant déjà du fluor et enseignait que la fluoration de composés chlorés ayant deux groupes terminaux perhalogénés devait s'effectuer en présence d'un catalyseur pour obtenir un rendement convenable. Le document (7) enseignait aussi que les composés contenant uniquement du chlore étaient beaucoup plus difficiles à fluorer que les composés fluorochlorés. Le document (6) n'enseignait la préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane qu'à partir d'un composé contenant déjà du fluor. Le paragraphe [0003] du brevet litigieux qui mentionnait que le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane était un précurseur connu du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane reflétait uniquement les connaissances internes du requérant et non l'état de la technique. Le document (4) publié après la date de priorité du brevet litigieux ne faisait pas partie de l'état de la technique visé à l'article 52(1) CBE. Le procédé selon la revendication 1 de la requête principale ne découlait pas de l'état de la technique et, par conséquent, l'objet des revendications de la requête principale impliquait une activité inventive.
La décision attaquée était insuffisamment motivée, ce qui justifiait le remboursement de la taxe de recours pour violation substantielle de procédure conformément à la jurisprudence des chambres de recours illustrée par la décision T0087/08 (non publié dans JO OEB).
VI. Selon l'intimé (opposant), le dispositif de la décision T0519/07 fixait clairement le cadre de la poursuite de la procédure en le limitant aux revendications 1 à 8 de la requête subsidiaire 10 alors pendante. Le requérant avait modifié cette requête ce qui avait pour conséquence que la chambre de recours n'avait pas été saisi dans le délai imparti par l'Article 108 CBE d'une requête pour laquelle elle était compétente. Le recours n'était donc pas recevable. Par ailleurs, la requête principale n'était pas admissible dans la procédure de recours car, d'une part elle était modifiée par rapport à la requête mentionnée dans le dispositif de la décision de renvoi T0519/07, et, d'autre part, la modification du libellé de la revendication 6 ne visait pas à répondre à un motif d'opposition. Le procédé selon la revendication 1 de la requête principale ne requérait pas que le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane produit lors de la première étape soit utilisé tel quel dans l'étape de fluoration car la description du brevet litigieux prévoyait explicitement une purification ou un isolement préalable. Dès lors, l'analyse de l'activité inventive par la division d'opposition dans la décision contestée basée sur la résolution de problèmes partiels était correcte. Par ailleurs, le document (4) identifiait le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane comme précurseur du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Le document (7) divulguait la préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane par fluoration à l'aide de l'acide fluorhydrique du FCl2CH2CCl2CH3. Les exemples 3 à 5 de ce document montraient que la fluoration de composés uniquement chlorés à l'aide de l'acide fluorhydrique produisait les composés fluorés correspondants avec de bons rendements suggérant ainsi à l'homme du métier de partir du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane pour obtenir le 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Le document (7) enseignait que le précurseur chloré pouvait être obtenu par réaction du tétrachlorure de carbone avec un halogénure de vinyle par analogie avec la première étape du procédé de la revendication 1 de la requête principale. Le document (6) divulguait une fluoration aisée de précurseurs chlorés en 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête principale manquait d'activité inventive.
VII. Le requérant (propriétaire du brevet) a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sous la forme des revendications 1 à 8 selon les requêtes principal ou subsidiairement selon l'une des requêtes subsidiaire 1 à 5, toutes les requêtes étant déposées avec le mémoire de recours daté du 3 décembre 2012.
Le requérant a également demandé le remboursement de la taxe de recours.
L'intimé (opposant) a demandé que le recours soit déclaré irrecevable, ou subsidiairement, le rejet du recours et la révocation du brevet.
VIII. La Chambre a rendu sa décision à la fin de la procédure orale.
Motifs de la décision
1. Recevabilité du recours et admissibilité de la requête principale dans la procédure de recours
Ce recours est le deuxième concernant le brevet litigieux. En effet, après un premier recours faisant suite à une décision de la division d'opposition de maintenir le brevet sous une forme modifiée, l'affaire avait été renvoyée à la division d'opposition pour suite à donner sur la base des revendications 1 à 8 de la requête subsidiaire 10 alors pendante (voir décision T0519/07). Lors de la poursuite de la procédure, la division d'opposition a révoqué le brevet pour manque d'activité inventive de l'objet de la revendication 1 de cette requête. Cette décision de révocation du brevet litigieux est contestée par le requérant et fait l'objet du présent recours.
Selon l'intimé, la requête principale sortait du cadre fixé par le dispositif de la décision T0509/07, le requérant ayant modifié la revendication dépendante 6. Par conséquent, le recours devait être déclaré irrecevable.
Cependant, selon la Règle 101 CBE, un recours n'est irrecevable que lorsqu'il n'est pas conforme aux Articles 106 à 108 CBE et aux règles 97 et 99 CBE. La conformité du recours avec ces dispositions n'a cependant pas été contestée. L'objection de l'intimé quant à l'irrecevabilité du recours doit donc être rejetée comme manquant manifestement de fondement.
Le recours est donc recevable.
En fait, l'objection de l'intimé concerne plutôt l'admissibilité de la requête principale dans la procédure de recours. En effet, selon l'intimé la requête principale ne devait pas être admise dans la procédure puisqu'elle elle sortait du cadre juridique fixé par le dispositif de la décision T0519/07, la revendication dépendante 6 ayant été modifiée par rapport à la revendication 6 de la requête subsidiaire 10 mentionnée dans ledit dispositif.
Cependant, un ordre donné à l'instance du premier degré de poursuivre la procédure d'opposition sur la base de revendications n'exclut pas une modification ultérieure de ces revendications. Par conséquent, cet argument du requérant doit être rejeté. En outre dans le cas d'espèce, la revendication 1 de la requête principale reste identique à celle remise à la division d'opposition, seule la revendication dépendante 6 ayant été adaptée à la revendication 1. L'objet revendiqué reste donc le même que celui examiné par la division d'opposition lors du renvoi ordonné par la décision T0519/07. La requête principale est donc admise dans la procédure.
2. Modification (Règle 80 CBE)
Selon l'intimé la modification apportée à la revendication dépendante 6 de la requête principale n'était pas conforme à l'exigence de la Règle 80 CBE car il s'agissait d'une clarification qui n'était donc pas nécessaire pour répondre à un motif d'opposition.
La revendication 6 de la requête principale s'énonce comme suit: "Procédé selon les revendications 1 à 5, dans lequel on opère à une température comprise entre 80 et 130°C, de préférence entre 90 et 110°C, pour la préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane", la modification contestée par l'intimé étant mise en gras.
La revendication 6 de la requête principale est basée sur la revendication 7 du brevet tel que délivré qui dépendait des revendications 1 à 6 ayant pour objet un procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane.
La revendication 1 de la requête principale a été modifiée par rapport à la revendication 1 du brevet litigieux par l'addition d'une étape supplémentaire et a donc pour objet un procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Cette modification a été occasionnée par un motif d'opposition, à savoir un manque d'activité inventive.
Dans la demande telle que déposée, les caractéristiques de la revendication 6 sont divulguées uniquement pour l'étape de préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane. La revendication dépendante 6 ne pouvait donc pas être maintenue sans préciser que les caractéristiques de cette revendication s'appliquent uniquement à la première étape, c'est-à-dire à la préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane, et non pas à la deuxième étape présente dans la revendication 1 modifiée.
Par conséquent l'argument de l'intimé visant à écarter la requête principale pour non-conformité à la règle 80 CBE doit être écarté.
3. Activité inventive
3.1 Le document (7) divulgue un procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Dans l'exemple comparatif 1, en page 14, ce composé est préparé à partir du 1-fluoro, 1,1,3,3-tétrachlorobutane à l'aide de l'acide fluorhydrique.
En accord avec les parties, la chambre considère que le document (7) représente l'état de la technique le plus proche de l'invention.
3.2 Le requérant a fait valoir que le problème technique à résoudre vis-à-vis du document (7) était la mise à disposition d'un procédé de préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane à partir de produits de départ facilement accessibles et donnant des sous-produits aisément convertibles en produit final.
3.3 La solution proposée par le brevet en litige est le procédé en deux étapes selon la revendication 1 est caractérisé par le procédé selon la revendication 1 dans lequel le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane préparé au cours de la première étape est soumis à une fluoration par l'acide fluorhydrique.
3.4 Il n'a pas été contesté que les produits de départ, à savoir le tétrachlorure de carbone et le 2-chloropropène, soient facilement accessibles. Au vu de l'exemple 4 du brevet litigieux où il est montré que l'étape de fluoration s'effectue avec un taux de transformation de 98% et une sélectivité de 61 % en 1,1,1,3,3-pentafluorobutane et de 33,6% en produit sous fluorés aisément converti en produit final par recyclage, la Chambre est satisfaite que le problème technique formulé par le requérant a bien été résolu par le procédé revendiqué.
3.5 La seule question en suspens reste, par conséquent, de déterminer si la solution proposée par le brevet litigieux au problème posé découle de façon évidente de l'état de la technique.
Les deux étapes du procédé de la revendication 1 ont été considérées par la division d'opposition et l'intimé comme étant indépendantes l'une de l'autre. Or la question qui se pose en l'espèce n'est pas uniquement si les étapes du procédé prises individuellement sont évidentes au vu de l'état de la technique, mais encore si l'état de la technique conduirait l'homme du métier à cette combinaison particulière. En effet, la solution proposée consiste en une nouvelle voie de synthèse du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane en deux étapes, dont la première est la préparation du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane et la deuxième sa fluoration en 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Le choix du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane comme produit intermédiaire constitue le lien entre les deux étapes du procédé revendiqué et ne peut pas être occulté dans l'analyse de l'évidence de la solution.
L'intimé avait avancé que le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane était connu du document (4) comme précurseur du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. Cependant le document (4) a été publié après la date de priorité du brevet litigieux et n'est donc pas un état de la technique au sens de l'Article 52(1) EPC.
L'exemple comparatif 1 du document (7) divulgue la préparation du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane à partir du FCl2CH2CCl2CH3, mais ne suggère aucun autre précurseur à sa préparation. Selon l'intimé, les exemples 3 à 5 montraient que la fluoration par l'acide fluorhydrique de composés chlorés produisait les composés fluorés correspondants avec de bons rendements suggérant ainsi à l'homme du métier de partir du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane. Cependant, ces exemples décrivent uniquement la préparation de l'hexafluoropropane qui est structurellement différent du 1,1,1,3,3-pentafluorobutane. D'autre part, le document (7) indique que de façon inattendue la fluoration de télomères de CCl3(CH2CCl2)Cl s'effectue avec de faibles rendements (voir page 3, lignes 28 à 30 ; exemple comparatif 1). Ainsi, non seulement le document (7) n'incite pas l'homme du métier à utiliser le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane comme précurseur, mais même l'en dissuade.
L'intimé s'est aussi référé au document (6) pour fonder l'évidence du procédé revendiqué. Ce document concerne principalement la chloration du 2,2-difluorobutane. Il décrit que la plupart des composés chlorofluorés obtenus sont ensuite fluorés à l'aide de l'acide fluorydrique et de l'oxyde mercurique pour être identifiés. Ainsi l'intimé s'est plus particulièrement référé au passage du document où il est rapporté que le CH3CF2CH2CCl3 obtenu par chloration du CH3CF2CH2CCl2 possède un groupe CCl3 puisque sa fluoration donne le 1,1,1,3,3-pentafluorobutane et que ce composé est aussi obtenu par fluoration du CF3CH2CCl2CH3 (voir page 1195, colonne de droite, avant dernier paragraphe avant la section «reactivity tests»).
Cependant, ce passage concerne uniquement la fluoration de deux chlorofluorobutanes particuliers. Le document (6) n'aborde pas la fluoration de butanes uniquement substitués par des atomes de chlore, et donc ne suggère pas que le 1,1,1,3,3-pentachlorobutane puisse être fluoré à l'aide de l'acide fluorhydrique avec de bons rendements.
L'intimé a de plus invoqué les connaissances générales de l'homme du métier. Cependant, conformément à la jurisprudence constante des chambres de recours de l'OEB, chaque partie à la procédure supporte la charge de la preuve des faits qu'elle allègue, en l'espèce l'intimé qui prétend qu'il était évident pour l'homme du métier que la fluoration du 1,1,1,3,3-pentachlorobutane à l'aide de l'acide fluorhydrique en 1,1,1,3,3-pentafluorobutane s'effectue avec de bons rendements. Or, cette affirmation sur laquelle l'intimé se fonde pour contester la présence d'une activité inventive n'est supportée, ni par document (7), ni par document (6), ni par un extrait de littérature technique générale représentative des connaissances générales de l'homme du métier, et ne peut donc qu'être le résultat d'une analyse ex post facto, c'est à dire une analyse construite en connaissance de l'invention.
Par conséquent, les arguments de l'intimé pour démontrer l'évidence de la solution proposée doivent être rejetés.
Il s'ensuit que l'objet de la revendication 1, et, pour les mêmes raisons, celui des revendications dépendantes 2 à 8 de la requête principale ne découle pas de manière évidente de l'état de la technique et implique une activité inventive (Article 56 CBE).
4. La Chambre faisant droit à la requête principale, il n'y a pas lieu de statuer sur les requêtes subsidiaires
5. Remboursement de la taxe de recours
5.1 Le requérant a demandé le remboursement de la taxe de recours invoquant un vice substantiel de procédure par la division d'opposition puisque celle-ci n'avait selon lui pas motivé la décision de révocation du brevet.
5.2 Dans une notification datée du 29 juillet 2009, la division d'opposition avait invité les parties à exprimer leur opinion au sujet de l'activité inventive de l'objet des revendications. Les arguments de l'intimé quant au manque d'activité inventive exprimés dans une lettre datée du 4 février 2010 ont été communiqués au requérant dans une notification datée du 11 février 2010.
Le requérant n'a pas pris alors position, ni répondu aux arguments de l'intimé concernant l'activité inventive. La division d'opposition a alors suivi les arguments et les conclusions de l'intimé qui n'avaient pas été contestés par le requérant. Ainsi, la division d'opposition a considéré que l'objet de la revendication 1 était une simple juxtaposition de deux étapes de synthèse, que la première étape manquait d'activité inventive comme énoncé dans la décision T0509/07 et que la deuxième étape manquait d'activité inventive à la lumière des documents (6) et (7) et des connaissances générales de l'homme du métier telles qu'exposées dans le paragraphe [003] du brevet litigieux. Force est donc de constater que les motifs pour lesquels la division d'opposition est arrivée à la conclusion que l'objet de la revendication 1 manquait d'activité inventive sont clairement exprimés dans la décision contestée. Par conséquent, la décision est motivée au sens de la Règle 111(2) CBE.
Le requérant a mentionné la décision T0087/08. Selon cette décision une conclusion d'absence d'activité inventive sans aucune référence à un état de la technique n'est pas motivée (voir point 6.3 des motifs). Les motifs qui ont conduit à cette conclusion dans l'affaire T0087/08 sont donc différent du cas d'espèce puisque la division d'opposition est arrivée à la conclusion que l'objet de la revendication 1 découlait de façon évidente des documents (1), (2), (6) et (7). En effet, elle a indiqué que la première étape du procédé était évidente pour les raisons exposées dans la décision T0519/07, donc à la lumière des documents (1) et (2) et que la deuxième étape découlait de façon évidente des documents (6) et (7). Cet argument du requérant doit donc être rejeté.
La Chambre conclut donc que l'objection soulevée par le requérant quant au vice substantiel de procédure n'est pas fondée.
5.3 En absence d'un vice substantiel de procédure la requête en remboursement de la taxe de recours doit être refusée (Règle 103(1) (a) CBE).
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition avec l'ordre de maintenir le brevet sur la base des revendications 1 à 8 de la requête principale déposée avec la lettre datée du 3 décembre 2012 et une description à y adapter.
3. La requête en remboursement de la taxe de recours est rejetée.