European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2016:T251711.20161012 | ||||||||
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Date de la décision : | 12 Octobre 2016 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 2517/11 | ||||||||
Numéro de la demande : | 08865193.0 | ||||||||
Classe de la CIB : | G10L 19/02 H04N 7/30 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | B | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | CODAGE/DECODAGE PAR TRANSFORMEE, A FENETRES ADAPTATIVES | ||||||||
Nom du demandeur : | Orange | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.4.01 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Démonstration de l'existence d'une caractéristique technique cachée dans un procédé connu L'homme du métier doit avoir des raisons de rechercher l'existence de caractéristiques cachées (non) Activité inventive - nouvelle formulation du problème technique |
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Exergue : |
Le fait que l'existence d'une caractéristique technique "cachée" - à savoir une caractéristique implicitement présente dans un document de l'état de la technique dont l'existence ne saurait, cependant, être établie à la seule lecture du document considéré - d'un procédé connu de l'état de la technique ne puisse être établie qu'en ayant recours à une démonstration mathématique ne fait nullement obstacle à sa prise en compte en tant que caractéristique divulguée, la démonstration mathématique établissant le caractère accessible de la caractéristique "cachée". L'argument selon lequel il n'existe aucune raison objective de procéder à une telle démonstration n'affecte en rien ce constat (cf. points V et 5.2.1). |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le recours fait suite à la décision de la division d'examen de rejeter la demande de brevet européen
n° 08 865 193.0 au motif que l'objet des revendications indépendantes des requêtes principale et subsidiaire, sur lesquelles la division d'examen devait statuer, n'impliquait pas d'activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
La décision de rejet avait été notifiée à la déposante par courrier du 5 août 2011.
II. La division d'examen a fondé son objection d'absence d'activité inventive sur le document:
D1: B. Edler, "Codierung von Audiosignalen mit Überlappender Transformation und adaptiven
Fensterfunktionen", pages 252-256, (XP 52987),
considéré reproduire l'état de la technique le plus proche des procédés de codage et décodage revendiqués. Concrètement, le procédé de codage de la revendication 1 de la requête principale différait, selon la division d'examen, du procédé décrit dans D1 uniquement en ce que le front montant de la deuxième fenêtre était différent du front descendant de la première fenêtre retournée temporellement.
Bien que la propriété revendiquée ne se rapporte qu'à une portion seulement des fenêtres considérées, il sera fait référence, dans la suite de la présente décision, à la notion simplificatrice de "fenêtres symétriques".
En particulier, l'invention telle que définie dans la revendication 1 de la requête principale permettait d'accroître la flexibilité au niveau du procédé de codage. Ce problème aurait été résolu de façon évidente par l'homme du métier qui aurait trouvé, dans le document:
D2: G. Smart et al., "Filter Bank Design Based On Time Domain Aliasing Cancellation With Non-identical Windows", IEEE 1994, pages III-185 à III-188 (XP 10134248),
la solution recherchée.
En ce qui concerne la requête subsidiaire, la division d'examen a estimé que les modifications apportées aux revendications indépendantes, concernant l'ajout de la caractéristique relative à l'introduction de coefficients de pondération successifs de valeur nulle en fin de fenêtre, n'affectaient en rien le raisonnement retenu pour justifier du rejet de la requête principale.
III. Par courrier du 4 octobre 2011, la requérante (la déposante) a formé un recours contre cette décision. La taxe de recours a été acquittée le même jour. Le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 30 novembre 2011.
IV. La requérante a requis l'annulation de la décision de rejet et, à titre principal, la délivrance d'un brevet conformément à la requête principale du 27 mai 2011, c'est-à-dire sur la base du jeu de revendications initiales.
À titre subsidiaire, celle-ci a requis qu'un brevet lui soit accordé sur la base d'un jeu de revendications 1 à 18 joint au mémoire de recours et correspondant à la requête subsidiaire présentée le 27 mai 2011.
V. La requérante a, en outre, présenté un ensemble d'arguments tendant à établir que le raisonnement retenu par la division d'examen pour conclure au manque d'activité inventive des revendications des requêtes principale et subsidiaire n'était pas correct.
Selon elle, la division d'examen a fondé son objection sur l'identification, dans les procédés de codage/décodage décrits dans le document D1, d'une caractéristique "cachée" que seule une analyse théorique du type de celle conduite dans la demande en instance permet de révéler. Le terme "caché" qualifie, dans le contexte de la présente décision, une caractéristique technique implicitement présente dans un document de l'état de la technique, dont l'existence ne saurait, cependant, être établie par la seule lecture du document considéré. Or, selon la requérante, qui n'a à aucun moment contesté l'existence de cette caractéristique implicite, rien dans D1 n'incitait l'homme du métier à rechercher l'existence de celle-ci.
Par ailleurs, la division d'examen a fait une interprétation erronée d'un passage du document D2 pour conclure à une adaptation du système de D1 à la lumière de cet enseignement. C'est en effet à tort que la division d'examen a conclu que la proposition "if the analysis window is restricted to be symmetrical...", dans D2, constitue une indication explicite pour l'homme du métier le conduisant à envisager chacune des deux branches de l'alternative possibles, à savoir, le recours à des fenêtres de codage symétriques ou, au contraire, à des fenêtres dissymétriques. Selon la requérante, le contexte dans lequel apparaît cette formulation établit qu'il s'agit seulement de définir une condition simplificatrice permettant de conduire la démonstration mathématique effectuée dans D2 à son terme.
VI. Le 25 avril 2016, une citation à comparaître à la procédure orale devant se tenir le 13 septembre 2016 a été adressée par la Chambre à la requérante.
VII. Dans une notification du 20 juillet 2016, établie conformément aux dispositions de l'article 15(1) RPCR, la requérante a été informée de certains défauts de clarté qui, de l'avis de la Chambre, affectaient la compréhension de plusieurs revendications indépendantes des deux requêtes présentées.
Dans ce même courrier, la Chambre a également informé la requérante qu'elle n'était pas convaincue par l'analyse de la division d'examen conduisant au constat de manque d'activité inventive des procédés et dispositifs revendiqués.
En particulier, la Chambre a souligné qu'elle ne voyait aucun obstacle à ce qu'une objection relative à un manque d'activité inventive puisse être formulée en prenant en compte une caractéristique cachée de l'état de la technique le plus proche. Cependant, elle a exprimé ses doutes sur l'approche développée par la division d'examen. En effet, même si la division d'examen semblait d'abord reprendre à son compte le problème technique tel qu'identifié par la déposante pour justifier de la prise en compte du document D2 (cf. décision attaquée, point 1.4), les développements ultérieurs semblaient également faire valoir, au titre d'un second problème technique à résoudre, la nécessité de relâcher la restriction résultant de la correspondance requise, selon l'état de la technique, entre fenêtres d'analyse et fenêtres de synthèse (cf. décision attaquée, point 1.5). A cet égard, la Chambre rappelait que s'il était effectivement permis de reformuler le problème technique tel que défini par la déposante, cela n'était en général possible que s'il était vraiment justifié de le faire. Or, en l'espèce, le problème identifié par la requérante n'était pas artificiel, mais au contraire tout à fait crédible.
Enfin, la Chambre faisait également part de ses réserves quant à l'interprétation du document D2 retenue par la division d'examen.
VIII. Par courrier du 26 août 2016, la requérante a déposé un jeu de revendications 1 à 17 modifiées de façon à tenir compte des objections de clarté soulevées par la Chambre dans l'avis préliminaire émis précédemment.
IX. Au cours d'un entretien téléphonique avec le mandataire de la requérante, initié par le rapporteur de la Chambre le 6 septembre 2016, la requérante a été invitée à préciser ses requêtes, compte tenu du jeu de revendications produit le 26 août 2016. L'attention de la requérante a également été attirée sur certaines ambiguïtés résiduelles affectant la formulation de plusieurs revendications (article 84 CBE) et sur la fait que la description n'identifiait pas l'état de la technique pertinent.
X. Par courrier daté du 7 septembre 2016, la requérante a produit un nouveau jeu de revendications 1 à 17 au titre d'une nouvelle requête unique ainsi que de nouvelles pages 6, 7 et 7-bis de la description.
La requérante requiert l'annulation de la décision attaquée et la délivrance d'un brevet sur la base des documents suivants :
- Revendications :
1 à 17 telles que déposées le 7 septembre 2016 ;
- Description :
pages 1 à 5 et 8 à 22 telles que publiées ;
pages 6, 7 et 7-bis telles que déposées le
7 septembre 2016 ;
- Figures :
feuillets 1/6 à 6/6 tels que publiés.
XI. Par ordonnance du 8 septembre 2016 la procédure orale a été annulée.
XII. La revendication 1 selon la requête unique s'énonce comme suit :
"1. Procédé de codage d'un signal numérique, par transformée avec recouvrement utilisant des fenêtres de pondération, dans lequel deux blocs d'échantillons du signal, consécutifs et de même taille (2M), sont pondérés respectivement par une première (ha1) et une deuxième fenêtre {ha2) d'analyse, et lesdites première et deuxième fenêtres comportant chacune un front montant et un front descendant, le front montant de la deuxième fenêtre (ha2) est différent du front descendant de la première fenêtre (ha1) retournée temporellement."
Les revendications 2 à 5 dépendent de la revendication 1.
La revendication indépendante 6 concerne un procédé de décodage. Elle s'énonce comme suit :
"6. Procédé de décodage d'un signal numérique, par transformée avec recouvrement utilisant des fenêtres de pondération, dans lequel deux blocs d'échantillons du signal, consécutifs et de même taille (2M), sont pondérés respectivement par une première (hs1) et une deuxième fenêtre (hs2) de synthèse, dans lequel, lesdites première et deuxième fenêtres comportant chacune un front montant et un front descendant, le front montant de la deuxième fenêtre (hs2) est différent du front descendant de la première fenêtre (hs1) retournée temporellement, et dans lequel on reçoit d'un codeur des informations (cod(hai)) sur des fenêtres d'analyse utilisées successivement au codage, et lesdites première et deuxième fenêtres de synthèse (hs1, hs2) se déduisent de première et deuxième fenêtres d'analyse (ha1, ha2) utilisées successivement au codage, la première et respectivement la deuxième fenêtre de synthèse se déduisant de la deuxième et respectivement de la première fenêtre d'analyse par inversion de positions temporelles de coefficients de pondération de la deuxième et respectivement de la première fenêtre d'analyse, et par application d'un facteur correctif
(1/D(n)) à chaque coefficient de pondération de la deuxième et respectivement de la première fenêtre d'analyse."
Les revendications 7 à 14 dépendent de la revendication indépendante 6.
La revendication 15 s'énonce comme suit :
"15. Dispositif de codage d'un signal numérique, par transformée avec recouvrement utilisant des fenêtres de pondération, caractérisé en ce qu'il est configuré pour la mise en ½uvre du procédé selon l'une des revendications 1 à 5."
La revendication 16 s'énonce comme suit :
"16. Dispositif de décodage d'un signal numérique, par transformée avec recouvrement utilisant des fenêtres de pondération, caractérisé en ce qu'il est configuré pour la mise en ½uvre du procédé selon l'une des revendications 6 à 14."
La revendication 17 s'énonce comme suit :
"17. Programme informatique destiné à être stocké en mémoire d'un dispositif de codage ou de décodage, caractérisé en ce qu'il comporte des instructions pour la mise en ½uvre du procédé de codage selon l'une des revendications 1 à 5 ou du procédé de décodage selon l'une des revendications 6 à 14, lorsque les instructions sont exécutées par un processeur du dispositif."
Motifs de la décision
1. Recevabilité du recours
Le recours est conforme aux exigences des articles 106 à 108 et de la règle 99 CBE et est donc, à ce titre, recevable.
2. Clarté et support (article 84 CBE)
2.1 La revendication 6 définit un procédé de décodage d'un signal numérique dans lequel les première et deuxième fenêtres de synthèse comportent chacune un front montant et un front descendant, le front montant de la deuxième fenêtre hs2 étant différent du front descendant de la première fenêtre hs1 retournée temporellement.
La revendication 6 établit également que le procédé de décodage comprend la réception en provenance d'un codeur des informations relatives aux fenêtres d'analyse utilisées au codage. La revendication précise en outre comment ces informations sont utilisées pour le décodage stricto sensu, comme cela est divulgué dans la description.
La Chambre estime donc que la présente revendication indépendante 6 reproduit, désormais, toutes les caractéristiques essentielles du procédé de décodage conformément aux exigences de clarté et de support de l'article 84 CBE.
2.2 La Chambre n'a aucune objection concernant les autres revendications.
3. Suffisance de la description (article 83 CBE)
3.1 Le procédé de décodage de la revendication 6 a été précisé de façon à reproduire fidèlement l'ensemble des caractéristiques techniques essentielles telles qu'elles résultent du mode de réalisation divulgué. L'objection initiale soulevée en vertu de l'article 83 CBE par la Chambre en raison de la portée large de la revendication initiale 6 de procédé est donc désormais caduque.
L'invention telle que définie dans la revendication 6 est exposée de manière suffisamment claire et complète pour être reproduite par l'homme du métier sur l'ensemble du domaine revendiqué conformément aux exigences qui résultent de l'article 83 CBE.
4. Nouveauté (article 54(1),(2) CBE)
4.1 Le document D1, retenu par la division d'examen au titre de l'état de la technique le plus proche, décrit des procédés de codage et de décodage de signaux numériques au moyen de transformées avec recouvrement (cf. D1, section "Einleitung"). En particulier, D1 fait explicitement référence aux cas de signaux présentant des variations brutales de type "impulsion" (cf. D1, page 253, colonne de gauche, lignes 4-10), c'est-à-dire, au sens de la présente demande, des signaux présentant un changement de comportement statistique ou pour lesquels on observe un saut important d'énergie.
4.2 Le procédé de codage de la revendication 1 se distingue de celui décrit dans D1 en ce que le front montant de la deuxième fenêtre de pondération ha2 est différent du front descendant de la première fenêtre de pondération ha1 retournée temporellement.
En d'autres termes, le procédé de codage revendiqué se distingue du procédé de codage de D1 en ce qu'il n'existe pas de symétrie de type miroir entre les fronts de deux fenêtres de pondération consécutives.
Le procédé de la revendication 1 selon la requête unique est donc nouveau au titre de l'article 54(1),(2) CBE.
4.3 Le procédé de décodage de la revendication 6 reflète les éléments essentiels du procédé de codage, tel que défini dans la revendication 1. Par conséquent, le procédé de la revendication 6 est lui-aussi nouveau au titre de l'article 54(1),(2) CBE.
Il en va de même des dispositifs correspondants des revendications 15 et 16 ainsi que du programme informatique de la revendication 17.
5. Activité inventive (article 56 CBE)
5.1 La Chambre reconnaît la pertinence de D1 au titre d'état de la technique le plus proche des procédés revendiqués pour les raisons développées au point 4.1 ci-dessus. D1, qui n'est pas identifié en tant que tel dans la description originale, correspond, en outre, à la description de l'art antérieur effectuée par la requérante dans la demande en instance.
L'invention vise à se libérer de la contrainte qui pèse sur la forme des fenêtres consécutives requises au codage pour permettre, après décodage, la reconstruction parfaite du signal initial. Elle vise également à se libérer de la nécessité, qui résultait de la symétrie requise, de recourir à des fenêtres intercalaires pour tenir compte de changements affectant le signal à coder (cf. page 7, ligne 29 - page 8, ligne 8; page 9, ligne 1-6).
La division d'examen, tout en reconnaissant la pertinence du problème technique identifié dans la demande en instance (cf. décision attaquée, Motifs, point 1.4), a néanmoins estimé, dans son raisonnement, que l'homme du métier aurait également tenté de résoudre un autre problème. C'est en effet sur la base d'une "hypothèse de travail", c'est-à-dire l'équivalence constatée entre les fenêtres de pondération utilisées lors de l'analyse et celles qui le sont lors de la synthèse dans le procédé de codage/décodage de D1, que la division d'examen a estimé qu'il était souhaitable de "relâcher la restriction posée par ladite hypothèse" (cf. décision attaquée, Motifs, point 1.5).
5.2 L'approche retenue par la division d'examen est contestée par la requérante. Cette approche soulève, en effet, plusieurs questions auxquelles la Chambre s'est efforcée de répondre.
Le raisonnement adopté par la Chambre peut être résumé de la façon suivante. Après avoir rejeté l'argument de la requérante selon lequel il n'est pas justifié dans l'approche problème-solution de prendre en compte une caractéristique cachée de l'état de la technique (cf. point 5.2.1) et écarté la motivation retenue par la division d'opposition pour justifier la prise en compte du document D2 (cf. point 5.2.2), la Chambre reconnaît la pertinence du problème technique subsidiaire retenu par la division d'opposition (cf. point 5.2.3). Cependant, si la reformulation du problème technique semble effectivement justifier la prise en compte de D2, la Chambre ne partage pas l'interprétation qui fut faite par la division d'examen du contenu de ce document (cf. point 5.2.4). En outre, même si cette interprétation avait été permise, elle n'aurait pas suffit à établir l'évidence de la solution revendiquée (cf. point 5.2.5).
5.2.1 La requérante conteste, en premier lieu, la manière de procéder de la division d'examen consistant à rechercher dans D1 une caractéristique technique cachée que seule une analyse mathématique aurait permis de révéler. L'homme du métier n'avait, en effet, aucune raison objective d'établir, à partir du constat relatif à la symétrie de type miroir des fenêtres de pondération mises en ½uvre dans D1, l'équivalence des fenêtres d'analyse et de synthèse. Seule la connaissance de l'invention permet de justifier une telle approche qui relève donc d'une analyse a posteriori des faits de la cause.
La Chambre ne peut cependant souscrire à ce point de vue de la requérante. La démonstration mathématique effectuée par la division d'examen a en effet permis d'établir que la caractéristique d'équivalence des fenêtres d'analyse et de synthèse était bel et bien présente dans le procédé de D1, et qu'elle était donc accessible. D1 ayant été retenu au titre d'état de la technique le plus proche, cette caractéristique peut dès lors servir de base à la définition du problème technique, sans que ne se pose la question de savoir si l'homme du métier aurait effectivement eu des raisons de rechercher dans D1 cette information.
La Grande Chambre de recours a souligné dans l'avis G 1/92 (JO 1993, 277; Motifs, point 2) que "Rien, dans la CBE, ne vient étayer la condition supplémentaire évoquée par la chambre 3.3.3 dans l'affaire T 93/89 (cf. point II supra), selon laquelle il faut que le public ait une raison suffisante pour analyser un produit mis sur le marché, afin d'en déterminer la composition ou la structure interne. Conformément à l'article 54(2) CBE, l'état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public. C'est le fait qu'il est possible d'accéder directement et clairement à une information donnée qui rend celle-ci accessible, qu'il y ait ou non des raisons conduisant à la rechercher."
Pour la Chambre, ce constat est directement transposable au cas d'un procédé. Aussi, le fait que l'existence d'une caractéristique technique cachée d'un procédé connu de l'état de la technique ne puisse être établie qu'en ayant recours à une démonstration mathématique ne fait nullement obstacle à sa prise en compte en tant que caractéristique divulguée, la démonstration mathématique établissant le caractère accessible de la caractéristique cachée. L'argument selon lequel il n'existe aucune raison objective de procéder à une telle démonstration n'affecte en rien ce constat. Appliqué à un procédé, considéré illustrer l'état de la technique le plus proche, la caractéristique cachée ainsi identifiée peut alors, à l'instar des autres caractéristiques techniques du procédé connu, servir l'argumentation avancée par une partie et, notamment, servir de base à la définition du problème technique objectif résolu par l'invention.
La Chambre estime, en outre, que cette approche résulte du caractère objectif de l'approche problème-solution, telle que développée par la jurisprudence des chambres de recours, approche qui conduit à prendre en compte toutes les caractéristiques techniques de l'état de la technique le plus proche, que celles-ci soient directement identifiables, ou bien cachées, dès lors que ces dernières sont néanmoins accessibles.
5.2.2 En l'occurrence, le problème technique défini dans la demande telle que publiée (cf page 7, ligne 29 - page 8, ligne 8; page 9, lignes 1-6) est tout à fait crédible et ne saurait donc être écarté pour son caractère artificiel.
La définition du problème technique retenue par la division d'examen consistant à "augmenter la flexibilité du procédé de codage" est donc conforme à celle évoquée dans la demande en instance.
Cependant, le passage de D2 (cf. page III-186, colonne de gauche, lignes 7 à 12), retenu pour justifier la prise en compte de ce document, ne permet pas d'établir que l'homme du métier aurait trouvé dans celui-ci la solution au problème posé comme l'a estimé la division d'examen. En effet, dans le contexte général de D2, le passage retenu ne fait pas référence aux contraintes liées au seul codage, mais à celles qui résultent de l'identité entres fenêtres d'analyse et de synthèse (cf. D2, titre et résumé).
5.2.3 L'analyse développée par la division d'examen fait néanmoins référence à un autre problème technique en liaison avec le procédé de D1 (cf. décision attaquée, Motifs, point 1.5), lié à la contrainte résultant de l'égalité entre fenêtres d'analyse et fenêtre de synthèse.
Après avoir exprimé un avis contraire, la Chambre estime que rien ne s'oppose à une reformulation du problème technique à résoudre. En effet, le problème technique relatif à la correspondance entre fenêtres d'analyse et fenêtres de synthèse dans D1 est tout aussi crédible que le problème initial retenu par la déposante.
Par conséquent, c'est à juste titre que la division d'examen a introduit cet aspect dans son analyse et considéré que la demande visait à relâcher la contrainte pesant sur "l'hypothèse de travail", c'est-à-dire sur la nécessaire correspondance entre fenêtres d'analyse et fenêtres de synthèse. Dès lors que la reformulation du problème technique est admise, la prise en compte de D2 s'impose puisque son objet consiste précisément à se libérer de cette contrainte (cf. D2, Titre et résumé).
5.2.4 La Chambre n'est cependant pas convaincue par l'interprétation de D2 faite par la division d'examen.
En particulier, l'interprétation de la proposition en page III-186, colonne de droite, précédant l'évocation des équations 2.6 et 2.7 "If the analysis window is restricted to be symmetrical" n'est pas partagée par la Chambre. Le contexte général de D2 établit, en effet, que cette proposition ne fait pas référence à un choix particulier quant aux fenêtres à mettre en ½uvre (cf. Procès-verbal de la procédure orale devant la division d'examen, point 2.4), mais relève plutôt d'une hypothèse de calcul introduite par les auteurs de D2 afin de simplifier l'analyse théorique effectuée. Rien dans D2 ne semble, en effet, suggérer le recours à des fenêtres non symétriques. Le commentaire en page III-185, colonne de droite, lignes 30-33, dans D2 ("The only constraints on the analysis window for this filter bank are that it must be of length K/2<h(r)<K for a K band system and it must be symmetrical"), reproduit à plusieurs reprises dans D2 (cf. page III-186, colonne de droite, lignes 23-26; page III-188, colonne de gauche, lignes 42-45) semble, à cet égard, dépourvu d'ambiguïté.
L'équation f(2N-1-n) = g(n), 0 <= n <= N-1, traduisant la condition de symétrie reste donc valable dans le cadre de D2, malgré la non-équivalence entre fenêtres d'analyse et de synthèse, contrairement à ce que suggère la décision attaquée en page 6, lignes 21 - 23. En l'occurrence, la démonstration que la correspondance entre fenêtres d'analyse et de synthèse implique la symétrie des fronts des fenêtres d'analyse consécutives ne saurait être utilisée pour établir la relation selon laquelle cette non-équivalence entre fenêtres d'analyse et de synthèse entraînerait la dissymétrie des fenêtres d'analyse, ce que D2, d'ailleurs dément. En d'autres termes, la relation réciproque de celle établie par la division d'examen selon laquelle la symétrie des fenêtres d'analyse impliquerait la correspondance entre fenêtres d'analyse et de synthèse n'a à aucun moment été établie. D2 établit au contraire qu'une telle relation n'existe pas.
Par conséquent, rien dans D2 n'aurait incité l'homme du métier à recourir à des fenêtres d'analyse dissymétriques.
5.2.5 À titre surabondant, la Chambre observe que même si D2 avait effectivement proposé, comme l'a estimé la division d'examen, de recourir aux deux branches de l'alternative, à savoir de recourir à des fenêtres symétriques ou, au contraire, dissymétriques, ce constat n'aurait pas suffit en tant que tel à établir l'évidence de la solution retenue. Ce n'est, en effet, que si les deux branches de l'alternative avaient été considérées équivalentes, dans le contexte de la demande en instance, qu'il eut alors été possible de conclure à l'évidence de la solution retenue au titre d'un choix, arbitraire, entre deux possibilités techniquement équivalentes. Or, la demande en instance démontre amplement, en soulignant les avantages de recourir à des fenêtres dissymétriques, que ce n'est pas le cas. Ainsi, l'effet technique à la base du problème identifié par la déposante, et initialement écarté par la division d'examen, aurait alors retrouvé toute sa pertinence et démontré le bénéfice que la solution revendiquée permet d'obtenir par rapport au recours à des "fenêtres symétriques".
Aussi, la sélection dans D2 de l'option "fenêtres dissymétriques", au détriment de la variante symétrique, en l'absence d'indication dans D2 des avantages résultant de cette sélection, n'aurait rien eu d'évident, quand bien même ce document aurait été interprété comme le fit la division d'examen.
5.3 Pour les raisons développées ci-dessus, la Chambre considère que le procédé de codage selon la revendication 1 ne découle pas de manière évidente de l'état de la technique et qu'il présente donc une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.
Il en va de même du procédé de décodage de la revendication indépendante 6, dans lequel se reflètent les mérites inventifs du procédé de codage.
L'objet des revendications 15, 16 et 17 est lui aussi considéré remplir les conditions de l'article 56 CBE dans la mesure où l'analyse qui précède est applicable, mutatis mutandis, aux dispositifs de codage et de décodage ainsi qu'au programme informatique comportant les instructions de mise en ½uvre des procédés de codage et décodage.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'examen afin de délivrer un brevet sur la base des documents suivants :
- Revendications :
1 à 17 telles que déposées par courrier daté du 7 septembre 2016 ;
- Description :
pages 1 à 5 et 8 à 22 telles que publiées ;
pages 6, 7 et 7-bis telles que déposées par courrier daté du 7 septembre 2016 ;
- Figures :
feuillets 1/6 à 6/6 tels que publiés.