T 0024/11 () of 26.6.2014

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2014:T002411.20140626
Date de la décision : 26 Juin 2014
Numéro de l'affaire : T 0024/11
Numéro de la demande : 00401278.7
Classe de la CIB : F16L 11/08
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Conduite flexible à enroulement de fil ou de bande pour le maintien des armures
Nom du demandeur : Technip France
Nom de l'opposant : National Oilwell Varco Denmark I/S
Chambre : 3.2.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 100(a)
European Patent Convention 1973 Art 100(b)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 13(1)
Mot-clé : Exposé de l'invention - (exécutable)
Nouveauté - requête principale (non)
Nouveauté - requête subsidiaire 1 (non)
Requête subsidiaire 2 produite tardivement - recevable (oui)
Document produit tardivement - recevable (oui)
Nouveauté - requête subsidiaire 2 (oui)
Activité inventive - requête subsidiaire 2 (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Les deux recours ont été formés contre la décision intermédiaire de la division d'opposition visant à maintenir le brevet européen n°1 154 184 sous une forme modifiée selon la requête auxiliaire 1, la requête principale ne satisfaisant pas aux exigences de nouveauté de l'article 100(a) combiné avec l'article 54(2) CBE par rapport à l'enseignement du document D10.

Opposition avait été formée contre le brevet dans son ensemble et fondée sur l'article 100 (a) et (b) combiné avec les articles 54, 56 et 83 CBE.

Une procédure orale s'est tenue devant la chambre de recours le 26 juin 2014.

II. La requérante I (titulaire du brevet) a demandé l'annulation de la décision contestée et

à titre de requête principale, le maintien du brevet tel que délivré

ou

à titre subsidiaire, le maintien du brevet sous une forme modifiée sur la base de la requête subsidiaire 1 déposée par courrier du 14 Septembre 2010

ou

sur la base de la requête subsidiaire 2, déposée pendant la procédure orale.

La requérante II (opposante) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen n°1 154 184.

III. Le libellé de la revendication 1 telle que délivrée (requête principale) est le suivant (l'identification des caractéristiques correspond à celle proposée par la requérante II):

F1 "1. Conduite tubulaire flexible comprenant au moins, de l'intérieur vers l'extérieur :

F2 un ensemble structurel étanche résistant aux efforts radiaux composé

F2a d'une gaine d'étanchéité interne (4) réalisée en matière plastique, généralement polymère, résistant plus ou moins à l'action chimique du fluide à transporter, et

F2b d'un enroulement (3, 5) en hélice à pas court d'un élément métallique ;

F3 au moins une nappe d'armures de traction (6, 7) enroulées à pas long et

F4 une gaine de protection et d'étanchéité externe (8),

caractérisée en ce qu'

F5 au moins un élément allongé continu (9) résistant à enveloppe déformable est enroulé hélicoïdalement à pas court directement sur ladite nappe d'armure (7)

F6 de manière que l'enveloppe de l'élément allongé continu (9) s'insère partiellement dans les déjoints (12) entre les armures de ladite nappe (7)."

IV. Le libellé de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 diffère de celui de la revendication 1 selon la requête principale en ce que la caractéris­tique suivante est ajoutée à la fin de la revendica­tion :

F7 "l'élément allongé continu (9) comportant une âme résistante (10) entourée d'une gaine déformable (11)."

V. Le libellé de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 diffère de celui de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 en ce que les caractéristiques suivantes sont ajoutées à la fin de la revendication :

"et en ce que l'élément allongé continu est un fil, le fil (9) étant enroulé de manière non jointive ou en ce que l'élément allongé continu est une bande, la bande étant enroulé à chevauchement, l'enveloppe de l'élément allongé continu (9) s'imprimant partiellement dans la gaine externe."

VI. Documents cités :

D1 : US 4 402 346;

D2 : EP 1 975 492;

D9 : "API Specification 17B", deuxième édition, 1er juillet 1998;

D10: EP 0 431 142.

VII. Les arguments de la requérante I, présentés par écrit et au cours de la procédure orale, peuvent en substance être résumés comme suit :

Requête principale

Le paragraphe [0017] du brevet en cause décrit un mode de réalisation de l'invention. L'homme du métier sait déterminer le degré de serrage nécessaire en fonction des matériaux de l'élément allongé continu à enrouler. L'invention est donc exposée dans le brevet en cause de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter.

Puisque dans leurs sens usuels, les termes "court" et "long" sont antonymes, la revendication 1 requiert de façon implicite que le pas "court" soit strictement inférieur au pas "long". Selon la figure 1 du document D1, la couche 14 la plus externe est enroulée avec le même pas que les couches 14 plus internes. L'élément allongé continu de cette couche 14 la plus externe n'est donc pas enroulé hélicoïdalement à pas court par rapport aux armures 14 plus internes (voir la caractéristique F5 de la revendication 1 selon la requête principale).

Le document D1 ne mentionne pas non plus explicitement que l'élément allongé continu de la couche 14 la plus externe pénètre partiellement dans les déjoints entre les armures de la nappe 14 sous-jacente (voir la caractéristique F6 de la revendication 1 selon la requête principale). De plus, une telle pénétration serait contraire au but exposé dans le document D1 de ne pas gêner le passage des gaz à travers les couches 14 (colonne 4, lignes 58 à 61).

Puisque le document D1 ne décrit pas les caractéris­tiques F5 et F6, l'objet de la revendication 1 selon la requête principale est donc nouveau par rapport à l'enseignement du document D1.

Requête subsidiaire 1

Les arguments avancés dans le contexte de la requête principale s'appliquent aussi à l'objet selon la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1.

Requête subsidiaire 2

La requête subsidiaire 2 a été déposée en réaction à l'opinion préliminaire de la chambre et ne fait qu'incorporer les revendications dépendantes 2 et 6 à 10 telles que délivrées dans la revendication 1. La requête subsidiaire 2 est à admettre dans la procédure.

L'homme du métier sait comment enrouler des bandes avec chevauchement, de telle façon que l'enveloppe de l'élément allongé continu s'imprime partiellement dans la gaine externe. L'invention est exposée dans le brevet en cause de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter.

Il n'y a pas d'objection à ce que le document D2 présenté tardivement par la requérante II soit introduit dans la procédure, puisqu'il n'est pas pertinent.

Le document D2 ne décrit pas de façon directe et sans ambiguïté la caractéristique F6 que l'enveloppe de l'élément allongé continu - c'est à dire la bande 18 - s'insère partiellement dans les déjoints entre les armures de la nappe sous-jacente 16b. Déjà pour cette raison, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 est nouveau par rapport à l'enseignement du document D2.

Le fil ou la bande selon l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 augmente le coefficient de frottement à l'interface armure/couche surjacente, partiellement par accrochage positif (complémentarité de formes) et cisaillement au niveau du fil qui pénètre à la fois dans la nappe d'armures et dans la couche surjacente. Un tel effet n'est ni décrit ni suggéré dans l'état de l'art. L'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 est donc basé sur une activité inventive.

VIII. Les arguments de la requérante II, présentés par écrit et au cours de la procédure orale, peuvent en substance être résumés comme suit :

Requête principale

L'homme du métier ne sait pas calculer la force de serrage requise pour que l'élément allongé continu 9 s'insère partiellement dans les déjoints 12 entre les armures de ladite nappe, parce que le degré de pénétration requis n'est pas spécifié.

Selon le brevet en cause, l'invention se pratique aussi avec un fil en aluminium qui est un matériau plus résistant que celui d'une gaine déformable en matière thermoplastique (paragraphe [0013]). Or le seul exemple de mode réalisation du brevet (décrit au paragraphe [0017]) concerne un fil avec une gaine souple. L'homme du métier n'a donc pas d'indications comment exécuter l'invention avec un fil - ou un fil avec une gaine - en matériau plus dur, tel l'aluminium.

L'invention n'est donc pas exposée dans le brevet en cause de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter.

Sur la figure 1 du document D1, la couche 14 la plus externe est celle qui correspond à l'élément allongé continu de la caractéristique F5. Cet élément allongé continu est un fil constitué d'une âme en acier entouré d'une gaine déformable (colonne 4, lignes 7 à 14 - voir la première partie de la caractéristique F5).

Même si la couche 14 la plus externe est enroulée avec sensiblement le même pas que les couches 14 plus internes (correspondant, elles, à la caractéristique F3 "au moins une nappe d'armures de traction (6, 7) enroulées à pas long"), des termes vagues tel "pas court" et "pas long" ne peuvent pas délimiter l'objet revendiqué de l'état de l'art. De plus, le brevet en cause envisage que ces pas puissent être identiques (colonne 3, lignes 25 à 27 et 56 à 58, paragraphe [0004]).

De ce fait, le document D1 décrit la caractéristique F5 de l'objet de la revendication 1 selon la requête principale.

Selon l'exposé du brevet en cause (paragraphe [0017]), il suffit d'enrouler avec un "certain serrage" un fil entouré d'une gaine déformable pour que celui-ci vienne pénétrer partiellement dans les déjoints subsistant entre deux armures de la nappe sous-jacente. Or il est directement et sans ambiguïté évident pour l'homme du métier que, conformément à l'enseignement du document D1, l'enroulement requiert un "certain serrage", parce que l'enroulement d'un fil avec un âme en acier ne peut pas être réalisé sinon. Étant donné que les lois de la physique s'appliquent de la même manière à l'état de l'art qu'à l'invention du brevet en cause, les mêmes causes vont inévitablement produire les mêmes effets.

De ce fait, le document D1 décrit aussi directement et sans ambiguïté, de façon implicite, la caractéris­tique F6 de l'objet de la revendication 1 selon la requête principale.

Le document D1 divulgue toutes les caractéristiques de l'objet de la revendication 1 selon la requête principale. Celui-ci ne satisfait donc pas le critère de la nouveauté.

Requête subsidiaire 1

Les arguments avancés dans le contexte de la requête principale s'appliquent aussi à l'objet selon la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1.

Requête subsidiaire 2

La requête subsidiaire 2 a été déposée tardivement, et la revendication selon cette requête n'est pas claire, parce que, premièrement, le degré de chevauchement n'est pas indiqué et, secondement, il n'est pas clair si la dernière caractéristique s'applique aux deux alternatives. La requête subsidiaire 2 n'est donc pas à admettre dans la procédure.

Puisque le degré de chevauchement n'est pas indiqué dans la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2, il peut y avoir un recouvrement de 50% d'un enroulement à l'autre de la bande. Dans ce cas, la surface de l'enveloppe de la bande enroulée est plane et l'homme du métier ne sait donc pas comment celle-ci pourrait s'imprimer partiellement dans la gaine externe pour pratiquer l'invention. L'invention n'est donc pas exposée dans le brevet en cause de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter.

Le document D2, qui fut déjà cité pendant la procédure d'opposition, est présenté pour la première fois dans la procédure de recours pendant la procédure orale, parce qu'il est pertinent pour la nouveauté et l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2. Ce document est à admettre dans la procédure parce qu'il constitue une réaction légitime à la requête subsidiaire 2, elle-même déposée tardivement.

Bien que ce ne soit pas montré en détail dans la figure 1 du document D2, la bande 18 est enroulée en une ou plusieurs couches sur les nappes d'armures de traction à fils 16a et 16b de section circulaire (paragraphe [0020], figure 1). Il est implicite que cette bande 18 s'insère partiellement dans les déjoints entre les armures 16b de la nappe sous-jacente. Si la bande 18 est enroulée en plusieurs couches, alors il y a nécessairement des chevauchements. Une gaine extérieure 20 est extrudée de manière conventionnelle par-dessus la bande 18 (paragraphe [0022]). Il est implicite que l'enveloppe de l'élément allongé continu, c'est à dire la bande 18 s'imprime partiellement dans la gaine externe 20. L'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 n'est donc pas nouveau par rapport à l'enseignement du document D2.

L'homme du métier sait que les flexions de la conduite vont endommager une bande enroulée de manière jointive. Un enroulement à chevauchement correspond à la pratique usuelle de l'homme du métier, parce qu'elle résiste mieux aux flexions de la conduite et qu'elle est plus facile à réaliser lors de la production tout en ayant une enveloppe suffisamment lisse pour permettre d'extruder la gaine extérieure par-dessus. Un enroulement à chevauchement est donc évident pour l'homme du métier. De telles bandes sont couramment utilisées pour éviter les déformations en cage d'oiseau (Document D9, page 30, tableau 3) tout comme dans le brevet en cause (colonne 3, lignes 51 et 52).

La seule caractéristique qui distingue l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 de l'état de l'art le plus proche, c'est à dire du document D2, est que l'enveloppe de l'élément allongé continu s'imprime partiellement dans la gaine externe. L'étendue de cette impression n'étant pas spécifiée, elle ne peut donner lieu à aucun effet autre que la déformation de la gaine extérieure, ce qui n'apporte aucun avantage.

L'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 n'est donc pas basé sur une activité inventive.

Motifs de la décision

Requête principale

1. Exposé de l'invention

Le paragraphe [0017] du brevet en cause décrit un mode de réalisation, selon lequel on enroule sur la nappe d'armures la plus extérieure 7, avec un certain serrage, un jonc ou fil 9 constitué d'une âme résistante 10 et d'une gaine souple 11 qui rencontre sensiblement transversalement les armures de la nappe 7 et vient pénétrer partiellement dans les déjoints ou jeux hélicoïdaux 12 subsistant entre deux armures.

Ce paragraphe est écrit de telle manière qu'il n'impose pas explicitement une relation de cause à effet entre l'étendue de l'effort avec lequel est effectué le "certain serrage" et l'étendue de la pénétration partielle du fil dans les jeux hélicoïdaux 12 subsistant entre deux armures. L'homme du métier s'attend de ce fait à ce que l'effort de serrage requis juste pour enrouler sur la nappe d'armures la plus extérieure 7 un fil constitué d'une âme résistante 10 et d'une gaine souple 11 suffise à lui seul pour obtenir l'effet de pénétration partielle du fil dans les jeux hélicoïdaux 12 subsistant entre deux armures.

Cependant la chambre considère que l'homme du métier sait calculer, si il y a lieu, l'effort de serrage nécessaire pour obtenir une étendue particulière de la pénétration partielle du fil dans les jeux hélicoïdaux 12 subsistant entre deux armures pour un fil en un matériau donné. Si on tente d'utiliser un fil dont le matériau est trop résistant pour permettre la pénétration partielle dans les déjoints ou jeux hélicoïdaux 12 subsistant entre deux armures sous l'effet d'un effort de serrage même puissant, alors une conduite avec ce type de fil ne tombe pas sous l'étendue de la protection de la revendication 1 selon la requête principale. Il est évident pour l'homme du métier que l'invention est naturellement sujette à une borne supérieure de réalisabilité, par exemple, par rapport à la résistance des matériaux du fil employé. Ceci ne rend pas l'exposé de l'invention insuffisant pour autant, puisque l'invention reste réalisable avec des fils en matériaux appropriés, par exemple, avec un fil 9 constitué d'une âme résistante 10 en acier et d'une gaine 11 souple en matière thermoplastique (paragraphe [0013]).

La requérante II a argumenté que l'homme du métier ne saurait pas calculer la force de serrage requise, parce que le degré de pénétration n'est pas spécifié. Cet argument relève plutôt d'une objection de clarté que d'une objection d'insuffisance de l'exposé, puisque, si le degré de pénétration n'est pas spécifié explicite­ment, cela signifie qu'un degré de pénétration même minime satisfait à l'énoncé de la revendication. Cela n'explique pas pour autant pourquoi l'homme du métier ne serait pas capable de calculer la force de serrage nécessaire pour un fil et un degré de pénétration donnés.

L'invention est donc exposée de façon suffisamment claire et complète pour que l'homme du métier puisse l'exécuter (articles 100(b) et 83 CBE 1973).

2. Nouveauté

2.1 Le fait que le document D1 décrive de façon directe et sans ambiguïté les caractéristiques F1 à F4 de la revendication 1 selon la requête principale n'est pas contesté par les parties. Il n'y a pas lieu de s'y attarder dans cette décision.

2.2 L'homme du métier sait que les fils des armures de traction sont enroulés avec un pas long ("c'est-à-dire dont l'angle d'armage mesuré sur l'axe longitudinal de la conduite est inférieur à 60°") et que ceux des voûtes de pression sont enroulés avec un pas court ("c'est-à-dire avec un angle d'enroulement voisin de 90°")(brevet tel que publié, colonne 1, lignes 44 à 48; colonne 2, lignes 2 à 8). Cependant, il existe aussi des armures qui offrent une résistance et à la traction et à la pression et dont les fils sont enroulées avec un pas intermédiaire tel que représenté dans la figure 1 du document D1 (voir les couches 14). Un tel pas peut être considéré comme un pas court, puisque l'armure présente une résistance à la pression, mais peut tout aussi bien être considéré comme un pas long, puisque l'armure présente une résistance à la traction.

L'homme du métier cherchant à comprendre le terme relatif "pas court" tel qu'utilisé dans la caractéris­tique F5 de la revendication 1 selon la requête principale se voit donc obligé de prendre en considération la description du brevet en cause pour obtenir l'interprétation correcte.

Concernant l'élément allongé continu, la description indique que "l'angle d'enroulement mesuré sur l'axe longitudinal n'est pas critique et est par exemple compris entre environ 50° et 85°" (colonne 3, lignes 56 à 58) et que l'élément allongé continu peut être non-croisé par rapport à la nappe (colonne 3, lignes 22 à 29). Dans ce dernier cas, l'angle d'enroulement doit être le même que celui de la nappe sous-jacente - sinon il y aurait croisement. L'homme du métier conclut donc que la résolution du flou associé aux termes "pas long" et "pas court" n'est pas critique et qu'il n'est pas exclu que le pas de l'enroulement de l'élément allongé continu puisse aussi être égal à celui de la nappe d'armure sous-jacente. Ceci est en accord avec les valeurs numériques ("entre environ 50° et 85°") fournies à titre d'exemple pour le pas de l'élément allongé continu et qui se recoupent avec celles données pour le pas long d'une armure de traction ("dont l'angle d'armage mesuré sur l'axe longitudinal de la conduite est inférieur à 60°").

Ainsi la chambre ne peut pas suivre l'argument de la requérante I, comme quoi le sens usuel des adjectifs "court" et "long" impliquerait que le "pas court" de l'élément allongé continu soit nécessairement strictement inférieur au "pas long" de la nappe sous-jacente. Une telle interprétation non seulement ne découle pas du brevet en cause mais est contraire au sens qui y est donné à ces termes.

Pour ces raisons, les expressions vagues "pas court" et "pas long" utilisées sans explications additionnelles dans la revendication 1 selon la requête principale ne sont pas aptes à distinguer l'objet de cette revendica­tion de l'enseignement du document D1, dont la figure 1 montre la couche 14 la plus externe (c'est à dire celle qui correspond à l'élément allongé continu de la caractéristique F5 "au moins un élément allongé continu (9) résistant à enveloppe déformable est enroulé hélicoïdalement à pas court directement sur ladite nappe d'armure (7)") comme étant enroulée avec sensiblement le même pas que les couches 14 plus internes qui, elles, correspondent à la caractéristique F3 ("au moins une nappe d'armures de traction (6, 7) enroulées à pas long").

Le document D1 décrit en outre que les couches 14 sont formées d'éléments 15 constitués d'une âme résistante en acier entourée d'une enveloppe protectrice, par exemple en caoutchouc butyle, nylon ou Teflon ou en matériaux ayant une perméabilité similaire ou plus faible encore (colonne 3, lignes 42 à 45; colonne 4, lignes 7 à 14). Il est à noter que les exemples des matériaux polymères donnés pour l'enveloppe sont tous déformables, voir souples.

Ainsi le document D1 décrit directement et sans ambiguïté la caractéristique F5 ("au moins un élément allongé continu (9) résistant à enveloppe déformable est enroulé hélicoïdalement à pas court directement sur ladite nappe d'armure (7)") de la revendication 1 selon la requête principale.

2.3 Selon le mode de réalisation décrit à la colonne 4, lignes 52 à 61 du document D1, les éléments des couches 14 sont enroulés de façon à être légèrement espacés les uns des autres, c'est-à-dire de façon non-jointive. Ceci implique la présence de jeux ou déjoints entre les armures desdites nappes 14.

Selon l'exposé du brevet en cause, le simple fait d'enrouler sur la nappe d'armure la plus extérieure 7 avec un certain serrage un fil constitué d'une âme résistante 10 et d'une gaine souple 11 (par exemple en matière thermoplastique) qui rencontre sensiblement transversalement les armures de la nappe 7 suffit à ce que ce fil vienne à pénétrer partiellement dans les déjoints ou jeux hélicoïdaux 12 subsistant entre deux armures (paragraphes [0017] et [0013]).

Il est évident pour l'homme du métier que pour enrouler un élément allongé continu sur une nappe, il est nécessaire de lui appliquer un "certain serrage", parce que l'enroulement d'un tel fil, par exemple avec une âme en acier (document D1, colonne 4, lignes 7 à 14), ne peut pas être réalisé sinon.

Étant donné que les lois de la physique s'appliquent de la même manière à l'état de l'art qu'à l'invention du brevet en cause, les mêmes causes vont inévitablement produire les mêmes effets. Il est donc aussi inévitable lors de la réalisation de la nappe 14 la plus extérieure de la conduite selon la figure 1 du document D1 que lorsque le fil 15 constitué d'une âme résistante en acier entourée d'une enveloppe protectrice en caoutchouc butyle, nylon ou Teflon (document D1, colonne 4, lignes 7 à 14) rencontre sensiblement transversalement les armures de la nappe 14 sous-jacente avec un certain serrage, ce fil vienne aussi à pénétrer partiellement dans les déjoints ou jeux hélicoïdaux subsistant entre deux armures.

L'argument avancé par la requérante I, comme quoi la pénétration partielle du fil dans les déjoints serait contraire au but du document D1 de ne pas gêner le passage des gaz à travers les couches 14, omet de prendre en considération la direction du passage des gaz. Celle-ci doit se faire à travers l'épaisseur des parois de la conduite. Selon le document D1, les gaz peuvent passer quasiment sans gêne par les espaces laissés entre les tours successifs du fil (colonne 4, lignes 58 à 61). Le fait que le fil pénètre de façon partielle dans les déjoints de la nappe sous-jacente ne gêne donc en aucune façon le gaz, qui peut passer par les espaces laissés entre les tours successifs du fil.

De ce fait, le document D1 décrit de façon implicite, directement et sans ambiguïté la caractéristique F6 ("de manière que l'enveloppe de l'élément allongé continu (9) s'insère partiellement dans les déjoints (12) entre les armures de ladite nappe (7)") de la revendication 1 selon la requête principale.

Pour résumer, le document D1 divulgue les caractéris­tiques F5 et F6 de la revendication 1 selon la requête principale. L'objet de la revendication 1 selon la requête principale ne se distingue donc pas de l'ensei­gnement du document D1 et n'est donc pas nouveau par rapport à ce document (article 100(a) en combinaison avec l'article 54(1),(2) CBE 1973).

Requête subsidiaire 1

3. Le document D1 décrit que les fils 15 dont sont constituées les nappes 14 ont une âme résistante en acier entourée d'une enveloppe protectrice en caoutchouc butyle, nylon ou Teflon (document D1, colonne 4, lignes 7 à 14).

La caractéristique supplémentaire F7 de l'objet selon la requête subsidiaire 1 ("l'élément allongé continu (9) comportant une âme résistante (10) entourée d'une gaine déformable (11)") est donc déjà décrite dans le document D1.

L'objection de manque de nouveauté argumentée ci-dessus dans le contexte de la revendication 1 selon la requête principale s'applique donc de façon identique à l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 (article 100(a) en combinaison avec l'article 54(1),(2) CBE 1973).

Requête subsidiaire 2

4. Recevabilité

La requête subsidiaire 2 a été déposée en réaction à l'opinion préliminaire de la chambre et ne fait qu'incorporer les revendications dépendantes 2 et 6 à 10 telles que délivrées dans la revendication 1.

La clarté n'étant pas un motif d'opposition (article 100 CBE), elle n'est pas à décider dans le cadre actuel du simple regroupement de revendications dépendantes dans la revendication principale. Si le degré de chevauchement des bandes enroulées n'est pas spécifié, alors cette caractéristique peut être interprétée de façon très large, mais ceci ne remet pas en question la clarté de la revendication 1. La dernière caractéristique de la revendication 1 selon la requête auxiliaire 2 reprend le vocabulaire générique de l'"élément allongé continu" et s'applique aux deux alternatives, le fil et la bande, ce qui est conforme avec l'exposé de l'invention dans la description du brevet (colonne 3, lignes 43 à 50; colonne 4, lignes 49 à 53).

La chambre exerce donc son pouvoir discrétionnaire sous l'article 13(1) du règlement de procédure des chambres de recours pour admettre la requête subsidiaire 2 dans la procédure.

5. Article 123(2) CBE

Les modifications apportées à la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 correspondent aux revendi­cations dépendantes 2 et 6 à 10 telles que déposées. Les exigences de l'article 123(2) CBE sont donc satisfaites.

6. Exposé de l'invention

La requérante II considère qu'un chevauchement des enroulements de la bande correspondant à un recou­vrement de 50% d'un enroulement à l'autre pourrait résulter en une enveloppe de la bande enroulée qui, poussée à l'extrême, serait alors plane et de ce fait ne peut s'imprimer partiellement dans la gaine externe.

Pour la Chambre, la seule conséquence est qu'un tel arrangement de la bande ne fait pas partie de l'objet de la protection demandée. Cela ne prouve pas que l'homme du métier ne sache pas exécuter l'invention. Au contraire, le savoir-faire pour enrouler une bande avec des chevauchements fait partie de la pratique usuelle de l'homme du métier spécialiste dans la fabrication de conduites flexibles. Ainsi, des chevauchements des enroulements de la bande correspondant, par exemple, à un recouvrement de moins de 50% d'un enroulement à l'autre résultent en une enveloppe de la bande qui n'est pas plane et dont, en particulier, les chevauchements sont aptes à s'imprimer partiellement dans la gaine externe.

L'invention n'est donc pas exposée dans le brevet en cause de façon insuffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier, prenant en compte sa pratique usuelle, ne puisse pas l'exécuter (article 100(b) CBE).

7. Document D2

Bien que produit tardivement dans la procédure orale, le document D2 est déjà connu de la procédure d'opposition et est présenté comme une réaction de la requérante II à l'introduction de la requête subsidiaire 2. La chambre n'a pas d'objection à admettre ce document, d'autant plus que la requérante I ne conteste pas son admission.

7.1 Nouveauté

Selon le document D2, la bande 18 peut être constituée de matière plastique renforcée par du verre, du métal ou une matière plastique plus résistante (paragraphe [0021]). Le document D2 décrit donc la caractéristique F7, c'est à dire que l'élément allongé continu comporte une âme résistante entourée d'une gaine déformable.

Le document D2 ne décrit pas de façon directe et sans ambiguïté que les chevauchements de la bande 18 sont tels que l'enveloppe de l'élément allongé continu, c'est à dire la bande 18, s'imprime partiellement dans la gaine externe 20. Le document D2 ne donne aucune indication sur ce point et ne décrit pas non plus le détail de l'agencement des couches de la bande 18.

L'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 est donc nouveau par rapport à l'enseignement du document D2.

7.2 Activité inventive

7.2.1 L'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 se distingue de la conduite tubulaire flexible présentée dans le document D2 en ce que l'enveloppe de l'élément allongé continu s'imprime partiellement dans la gaine externe.

L'effet technique obtenu par cette différence résulte d'une synergie avec la caractéristique comme quoi l'enveloppe de l'élément allongé continu s'insère partiellement dans les déjoints entre les armures de la nappe sous-jacente. Ainsi le "fil (ou la bande) augmente le coefficient de frottement à l'interface armure/couche surjacente, [?] partiellement par accrochage positif (complémentarité de formes) et cisaillement au niveau du fil qui pénètre à la fois dans la nappe d'armures et dans la couche surjacente" (colonne 3, lignes 40 à 50 et colonne 4, lignes 49 à 53 du brevet en cause).

Le problème technique à résoudre est d'éviter de devoir comprimer fortement le flexible afin de pouvoir transmettre des efforts de retenue tangentiels raisonnables, l'objectif étant de transmettre l'effort de serrage sur la nappe d'armures extérieures (paragraphe [0009] du brevet en cause).

Bien que l'homme du métier connaisse ce problème (document D9, section 11.4.1.2), aucun des documents de l'état de l'art disponible ne mentionne ce problème, ni ne propose ou suggère cette solution.

7.2.2 La requérante II considère qu'une bande utilisée pour éviter les déformations en cage d'oiseau et enroulée de manière jointive risque de se faire endommager lors des flexions de la conduite.

Cependant, un enroulement à chevauchement n'est pas la seule possibilité pour éviter ce problème, puisque, par exemple, un enroulement de manière non jointive offrirait des jeux entre les enroulements de la bande pour absorber les flexions de la conduite.

De même, une bande utilisée uniquement pour éviter les déformations en cage d'oiseau et enroulée à chevauchement ne présente pas nécessairement une enveloppe apte à s'imprimer partiellement dans la gaine externe. En fait, selon le document D2, l'enveloppe de la bande présente une surface lisse pour l'extrusion de la gaine externe (colonne 4, ligne 23 à 26, "the tape providing a smooth surface for the extrusion").

L'homme du métier cherchant uniquement à mettre en place une bande utilisée pour éviter les déformations en cage d'oiseau n'arrive donc pas directement à l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2.

7.2.3 La requérante II objecte aussi que l'étendue de l'impression de l'enveloppe de la bande n'est pas spécifiée dans la revendication et que donc l'objet revendiqué ne produit pas d'effet technique. La chambre ne peut pas suivre cet argument, parce que dès que le fil ou la bande pénètre à la fois dans la nappe d'armures sous-jacente et dans la gaine extérieure surjacente, il est inévitable que ceci "augmente le coefficient de frottement à l'interface armure/couche surjacente, [?] partiellement par accrochage positif (complémentarité de formes) et cisaillement au niveau du fil" ou de la bande (colonne 2, lignes 40 à 50 et colonne 4, lignes 49 à 53 du brevet en cause).

7.2.4 Donc l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 est basé sur une activité inventive (article 100(a) et 56 CBE 1973).

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

1. La décision contestée est annulée.

2. Le cas est renvoyé au département de la première instance avec l'ordre de maintenir le brevet sur la base des documents suivants:

- revendications 1 à 5,

- description, pages 2 à 3 et

- figures 1 et 2,

tous déposés pendant la procédure orale comme requête subsidiaire 2.

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