T 1931/10 () of 15.11.2012

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2012:T193110.20121115
Date de la décision : 15 Novembre 2012
Numéro de l'affaire : T 1931/10
Numéro de la demande : 03290971.5
Classe de la CIB : F21V 7/00
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : Projecteur d'éclairage de véhicule comprenant deux modules d'éclairage elliptique sans cache réalisant un faisceau d'éclairage à coupure
Nom du demandeur : VALEO VISION
Nom de l'opposant : Automotive Lighting Reutlingen GmbH
Chambre : 3.2.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 54(1)
European Patent Convention Art 54(3)
European Patent Convention Art 56
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 13(1)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 13(3)
Mot-clé : Requête principale : nouveauté (oui), activité inventive (non)
Requêtes auxiliaires 1 à 3 : non admises
Requête auxiliaire 4 : les deux jeux de revendication satisfont à la CBE
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. L'opposante a formé le 8 septembre 2010, sous paiement simultané de la taxe correspondante, recours contre la décision de la division d’opposition, signifiée le 6 juillet 2010, de maintenir en une forme modifiée le brevet Nº 1 357 334 délivré sur la base de la demande européenne EP 03290971.5. Les motifs de recours ont été déposés le 15 novembre 2010.

II. La décision intermédiaire de la division d'opposition avait conclu au maintien du brevet sous la forme modifiée basée sur deux versions différentes, à savoir :

- un premier jeu de revendications modifiées et valable pour les États désignés DE, FR et GB; l'objet ayant été jugé nouveau par rapport au document EP-A- 1 357 332 (D7) faisant partie de l'état de la technique selon l'article 54(3) CBE;

- et un deuxième jeu de revendications correspondant au jeu de revendications inchangées tel que délivré pour les cinq autres États désignés CZ, ES, IT, SI, SK.

La division d'opposition a par ailleurs considéré que l'objet de la revendication 1 de chacun des deux jeux de revendications impliquait une activité inventive par rapport aux documents cités, notamment D1 et D9.

III. Les documents considérés sont les suivants :

D1 : US-A- 4 914 747

D5 : FR-A- 1 319 105

D7 : EP-A- 1 357 332

D9 : US-A- 5 471 371.

IV. Requêtes

La requérante (opposante) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen nº 1 357 334.

L'intimée (titulaire) a demandé le rejet du recours et le maintien du brevet européen tel que modifié lors de la procédure d'opposition (requête principale) ou bien le maintien du brevet européen selon l'une des requêtes auxiliaires 1 à 3 déposées par courrier daté du 10 octobre 2012 ou de la requête auxiliaire 4 déposée lors de la procédure orale.

V. La revendication 1 du premier jeu de revendications pour les États DE, FR et GB selon l'une des requêtes de l'intimée contient toutes les caractéristiques de la revendication 1 du second jeu de revendications pour les autres États contractants désignés de la même requête invariablement augmentées de la seule caractéristique additionnelle 1.8a (soulignée dans le texte).

La revendication 1 du premier jeu de revendications selon les différentes requêtes s'articule comme suit :

a) Requête principale

(la numérotation ajoutée par la chambre correspond à celle utilisée dans la décision contestée)

1.1 " Module d'éclairage (10) pour un projecteur de véhicule automobile réalisant un faisceau d'éclairage du type à coupure, comportant,

1.5 agencés d'arrière en avant globalement suivant un axe optique horizontal longitudinal (A-A),

1.2 un réflecteur (12) du type elliptique qui délimite un volume de réflexion pour des rayons lumineux et qui comporte une surface sensiblement elliptique de réflexion (18,20),

1.3 au moins une source lumineuse (14) qui est agencée au voisinage d'un premier foyer (F1) du réflecteur (12), et

1.4 une lentille convergente (16) dont le plan focal est agencé au voisinage du second foyer (F2) du réflecteur (12),

1.6 le réflecteur comportant une surface plane horizontale de réflexion (22), dont la face supérieure (24) est réfléchissante, qui délimite verticalement vers le bas le volume de réflexion,

1.7 la surface plane (22) du réflecteur (12) comportant un bord d'extrémité avant (28), dit bord de coupure, qui est agencé au voisinage du second foyer (F2) du réflecteur (12), de manière à former la coupure dans le faisceau d'éclairage,

1.8 la surface plane (22) du réflecteur (18) étant agencée dans un plan horizontal passant globalement par les foyers (F1, F2) du réflecteur (12),

caractérisé en ce que

1.8a la face interne de la partie elliptique (18) et la face supérieure de la surface plane (22) sont revêtues d’un matériau réfléchissant, en ce que

1.9 la surface plane du réflecteur s'étend longitudinalement vers l’arrière, depuis son bord de coupure, au moins jusqu'au voisinage du premier foyer (F1) du réflecteur (12),

1.10 en ce que la surface sensiblement elliptique (18, 20) du réflecteur (12) est formée par un secteur angulaire de pièce sensiblement de révolution, autour de l'axe optique longitudinal (A-A),

1.11 en ce que ce secteur angulaire s'étend verticalement au-dessus de la surface plane (22) du réflecteur (12),

1.12 et en ce que la source lumineuse (14) est une diode électroluminescente (44) ou est formée par l’extrémité libre d'un faisceau de fibres optiques,

1.13 et en ce que cette source est agencée dans le module (10) de manière que son axe de diffusion lumineuse (B-B) soit sensiblement perpendiculaire à la surface plane (22) du réflecteur (12)."

b) Requête auxiliaire 1

" Module d'éclairage (10) ... (selon les caractéristiques 1.1 à 1.13 de la revendication 1 de la requête principale ci-dessus),

1.RA1 en ce que la surface plane horizontale (22) du réflecteur (12) s’étend dans un premier demi-plan (52) délimité par l’axe optique longitudinal (A-A), en ce qu’une surface plane secondaire (54) du réflecteur s’étend dans un deuxième demi-plan délimité par l’axe optique longitudinal (A-A), et en ce que la surface plane secondaire (54) comporte un bord de coupure avant (28) qui est incliné, par rapport à un plan horizontal, d’un angle (alpha) déterminé, de manière à former une coupure inclinée dans le faisceau d’éclairage, en vue de réaliser un faisceau d’éclairage réglementaire de croisement."

c) Requête auxiliaire 2

" Module d'éclairage (10) ... (selon les caractéristiques 1.1 à 1.13 de la revendication 1 de la requête principale ci-dessus), et

1.RA2 en ce que le bord de coupure (28) de la surface plane (22) du réflecteur (12) a un profil courbe, dans le plan horizontal, de manière à suivre globalement la courbure du plan focal de la lentille (16)."

d) Requête auxiliaire 3

" Module d'éclairage (10) ... (selon les caractéristiques 1.1 à 1.13 de la revendication 1 de la requête principale ci-dessus), et

1.RA3 en ce qu’il comporte plusieurs sources lumineuses (14) voisines qui sont globalement alignées suivant une direction sensiblement horizontale et perpendiculaire à l’axe optique longitudinal (A-A), de manière à étaler en largeur le faisceau d’éclairage."

e) Requête auxiliaire 4

" Projecteur d'éclairage (46) de véhicule, comprenant un premier module d'éclairage (10) réalisant un faisceau d'éclairage du type à coupure, comportant:

1.5 agencés d'arrière en avant globalement suivant un axe optique horizontal longitudinal (A-A),

1.2 un réflecteur (12) du type elliptique qui délimite un volume de réflexion pour des rayons lumineux et qui comporte une surface sensiblement elliptique de réflexion (18,20),

1.3 au moins une source lumineuse (14) qui est agencée au voisinage d'un premier foyer (F1) du réflecteur (12), et

1.4 une lentille convergente (16) dont le plan focal est agencé au voisinage du second foyer (F2) du réflecteur (12),

1.6 le réflecteur comportant une surface plane horizontale de réflexion (22), dont la face supérieure (24) est réfléchissante, qui délimite verticalement vers le bas le volume de réflexion,

1.7 la surface plane (22) du réflecteur (12) comportant un bord d'extrémité avant (28), dit bord de coupure, qui est agencé au voisinage du second foyer (F2) du réflecteur (12), de manière à former la coupure dans le faisceau d'éclairage,

1.8 la surface plane (22) du réflecteur (18) étant agencée dans un plan horizontal passant globalement par les foyers (F1, F2) du réflecteur (12),

dans lequel

1.8a - la face interne de la partie elliptique (18) et la face supérieure de la surface plane (22) sont revêtues d’un matériau réfléchissant,

1.9 - la surface plane du réflecteur s'étend longitudinalement vers l’arrière, depuis son bord de coupure, au moins jusqu'au voisinage du premier foyer (F1) du réflecteur (12),

1.10 - la surface sensiblement elliptique (18, 20) du réflecteur (12) est formée par un secteur angulaire de pièce sensiblement de révolution, autour de l'axe optique longitudinal (A-A),

1.11 - ce secteur angulaire s'étend verticalement au-dessus de la surface plane (22) du réflecteur (12),

1.12 - la source lumineuse (14) est une diode électroluminescente (44) ou est formée par l’extrémité libre d'un faisceau de fibres optiques,

1.13 - cette source est agencée dans le module (10) de manière que son axe de diffusion lumineuse (B-B) soit sensiblement perpendiculaire à la surface plane (22) du réflecteur (12),

1.RA4 - ledit projecteur d'éclairage (46) est prévu pour réaliser un faisceau d'éclairage réglementaire de croisement, le bord de coupure (28) du premier module d'éclairage (50) étant sensiblement horizontal,

- ledit projecteur comprend un deuxième module d'éclairage (50), les deux modules d'éclairage (10) étant de structures sensiblement identiques et étant agencés sensiblement parallèlement,

- le deuxième module d'éclairage (48), étant tourné d'un angle déterminé autour de son axe optique (A-A), par rapport au premier module (50), de manière que son bord de coupure (28) soit incliné par rapport à un plan horizontal, de manière que les faisceaux d'éclairage produits par les deux modules (48,50) se superposent et forment le faisceau d'éclairage réglementaire de croisement."

VI. La requérante s'appuie essentiellement sur les arguments suivants :

- Le module selon la revendication 1 du premier jeu de la requête principale serait anticipé par le document D7 constituant un état de la technique aux termes de l'article 54(3) CBE; la caractéristique 1.8a serait implicitement divulgué par D7, car il serait d'usage courant dans le cadre de projecteurs pour véhicules, notamment pour des raisons de coût de fabrication, de réaliser les surfaces réfléchissantes au moyen d'un revêtement des surfaces en question par un film de matériau réfléchissant.

- Par ailleurs, le projecteur selon la requête principale découlerait à l'évidence de la combinaison des documents D1 ou D8 avec D9, car il suffirait à l'homme du métier de substituer le filament incandescent de la lampe utilisée dans D1 ou D8 par une diode électroluminescente comme suggéré par D9 afin de réduire le dégagement de chaleur dû à la source lumineuse.

- Les requêtes auxiliaires, tardives et traitant de détails du module d'éclairage très spécifiques et très différents entre eux, ne devraient pas être admises à la procédure, d'autant que les caractéristiques y ajoutées seraient connues en soi, notamment par D1 et ne sauraient impliquer une quelconque activité inventive.

- L'homme du métier arriverait au projecteur défini à la revendication 1 de la requête auxiliaire 4 en combinant de manière évidente D1 avec D9 et avec l'enseignement contenu dans D5, qui rendrait évident en soi la juxtaposition de deux modules inclinés entre eux afin de superposer deux faisceaux lumineux réalisant un éclairage de croisement.

VII. L'intimée a présenté pour l'essentiel les arguments suivants :

Le module selon la revendication 1 du premier jeu de la requête principale se distinguerait de D7 par la caractéristique 1.8a, car le revêtement par une couche réfléchissante ne serait qu'une technique parmi d'autres envisageables et aptes à rendre une surface réfléchissante.

Le projecteur selon la requête principale impliquerait une activité inventive aux motifs qu'il n'aurait pas été évident de combiner D1 avec D9 plus de dix ans après leur publication, que l'objet revendiqué se distinguerait de D1 (ou D8) non seulement par la caractéristique 1.12 mais aussi par 1.13, dans la mesure où la lumière produite par les lampes des dispositifs selon D1 ou D8 n'aurait pas d'axe de diffusion, et que l'homme du métier n'aurait pas eu d'incitation à combiner, ni même à considérer D9 puisque :

- la diode décrite dans D9 ne serait utilisée que pour un feu de signalisation de puissance nettement plus faible que celle requise pour un projecteur;

- le dispositif de D9 comprendrait un réflecteur parabolique et point de système imageant, c'est-à-dire d'un ensemble réflecteur-lentille coupant le faisceau de lumière;

- quand bien même l'homme du métier aurait envisagé de remplacer le filament 9 du dispositif illustré dans D1 par une diode conformément à l'enseignement de D9, il lui aurait encore fallu transformer en profondeur le système de D1 mais surtout se soustraire à l'obligation d'incliner l'axe de diffusion de la diode tel qu'enseigné au principal par D9, puisque fonctionnellement incompatible avec les propriétés optiques du système imageant de D1.

Les requêtes auxiliaires devraient être admises, car :

- déposées à temps avant la procédure orale,

- convergentes, du moins pour ce qui est des requêtes

auxiliaires 1 et 2, et

- non-surprenantes pour la requérante-opposante car déjà débattues dans le cadre des revendications dépendantes telles que délivrées,

- susceptibles d'assoir le caractère inventif de l'objet du brevet, puisque les caractéristiques y ajoutées ne seraient connues en soi d'aucun des documents cités.

Le projecteur défini à la revendication 1 de la requête auxiliaire 4 ne découlerait pas à l'évidence de l'état de la technique. Il faudrait tout d'abord combiner trois documents, à savoir D1 (ou D8) avec D9 et D5. Ensuite, la structure très particulière du projecteur à faisceaux de lumière superposés de D5, notamment la forme complexe de son réflecteur et les différentes surfaces lisses ou striées du verre de projecteur conformant les différents faisceaux de lumière, ne saurait pas être appliquée au système connu de D1, ni en totalité ni en partie, pour aboutir au dispositif revendiqué, à moins de s'écarter de l'approche problème-solution et de suivre une démarche ex post facto basée sur la connaissance préalable de l'invention.

VIII. La chambre de recours a annoncé sa décision à la fin de la procédure orale qui s'est tenue le 15 novembre 2012.

Motifs de la décision

1. Le recours est admissible.

2. Dédoublement des jeux de revendications

En raison de la citation du document D7, qui constitue un état de la technique au sens de l'article 54(3) CBE pour les États contractants DE, FR et GB, chacune des requêtes de l'intimée-titulaire comprend deux jeux (1 et 2) de revendications distincts, le premier valable pour les États DE, FR et GB et le second pour les cinq autres États CZ, ES, IT, SI, SK; la revendication 1 du premier jeu se distinguant de celle du second jeu par l'ajout de la caractéristique 1.8a sensée rétablir la nouveauté par rapport à la divulgation de D7 et s'articulant comme suit :

"la face interne de la partie elliptique (18) et la face supérieure de la surface plane (22) sont revêtues d’un matériau réfléchissant".

Cette caractéristique 1.8a n'a, comme développé dans la suite, aucune influence sur l'analyse de l'activité inventive dans la mesure où elle est connue du document D1 reflétant l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE le plus proche et ceci pour la revendication 1 des deux jeux de revendications de chacune des requêtes.

3. Requête principale

3.1 Nouveauté

L'argumentaire de la requérante étayant un défaut de nouveauté repose sur le seul document D7, compris dans l'état de la technique au titre de l'article 54(3) CBE, puisque déposé le 23 avril 2003 sous priorité japonaise en date du 23 avril 2002, publié le 29 octobre 2003 et désignant, en commun avec le brevet attaqué, les États contractants DE, FR et GB.

Les parties convenant du fait que le document D7 divulgue les caractéristiques 1.1 à 1.8 et 1.9 à 1.13, il reste à déterminer, si la caractéristique restante, à savoir la caractéristique 1.8a ajoutée au libellé de la revendication 1 telle que délivrée, est également contenue dans le document D7.

L'unique passage de la description faisant référence de près ou de loin à la formation d'une surface réfléchissante du dispositif imageant se trouve à la colonne 7, lignes 25 à 28 de D7. Ce texte concerne exclusivement la surface réfléchissante 16c de la face plane 16a de la plaquette de contrôle de lumière 16 et ne précise en rien par quel traitement ce résultat est obtenu. Par ailleurs, force est de constater qu'il ne s'adresse aucunement à la surface réfléchissante de la surface interne 14a,14b du réflecteur elliptique 14 (voir notamment figures 3, 5 et 8).

Certes, la chambre peut convenir, en accord avec l'argumentaire de la requérante, qu'il serait assurément judicieux d'utiliser la même technique pour apporter la propriété réfléchissante aux surfaces de la plaquette 16 et du réflecteur 14, et que l'une des techniques les plus usitées consisterait certainement à revêtir les parois en regard de ces deux pièces par un matériau réfléchissant la lumière.

Il n'en reste cependant pas moins que le traitement de surfaces réfléchissantes par revêtement ne représente qu'un procédé envisageable parmi d'autres, comme par exemple celui consistant à polir une surface métallique jusqu'à l'obtention d'une surface présentant des qualités de miroir. N'étant en principe pas l'unique procédé applicable aux surfaces du dispositif de D7, le revêtement réfléchissant des deux surfaces en question ne peut, par conséquent, pas être considéré comme divulgué implicitement dans D7.

Le critère de nouveauté s'appliquant de manière stricte dans le droit européen, la chambre conclut des considérations ci-dessus que la caractéristique 1.8a ajoutée afin de rétablir la nouveauté constitue l'élément distinctif de l'objet de la revendication 1 du premier jeu de revendications de la requête principale par rapport au document D7.

L'objection de défaut de nouveauté au titre de l'article 54(1),(3) CBE n'est ainsi pas justifiée.

3.2 Activité inventive

3.2.1 Le document D1 représente l'état de la technique le plus proche au sens de l'article 54(2) CBE dans la mesure où il divulgue, hormis la caractéristique 1.12 définissant un certain type de source lumineuse, l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1.

En effet, le dispositif décrit dans D1, voir notamment les figures 2 et 4, concerne un module d'éclairage (1) pour un projecteur de véhicule automobile (cf. titre) réalisant un faisceau d'éclairage du type à coupure, voir ligne 18 de la figure 3, colonne 4, lignes 49 à 53. Ce module comporte, agencés d'arrière en avant globalement suivant un axe optique horizontal longitudinal (X-X) :

- un réflecteur (2) du type elliptique (cf. colonne 3, lignes 61 à 64) qui délimite un volume de réflexion pour des rayons lumineux et qui comporte une surface sensiblement elliptique de réflexion (3) formée par un secteur angulaire de pièce sensiblement de révolution autour de l'axe optique (X-X) longitudinal (colonne 3, lignes 64 à 68) et s'étendant verticalement au-dessus de la surface plane (14) du réflecteur,

- au moins une source lumineuse (filament 6 de la lampe 5) qui est agencée au voisinage d'un premier foyer (f1) du réflecteur (2), cf. colonne 4, lignes 7 à 11,

- et une lentille convergente (16) dont le plan focal (fc) est agencé au voisinage du second foyer (f2) du réflecteur (2), cf. figure 6, colonne 4, lignes 33 à 37 et 42 à 45.

Le réflecteur quant à lui comporte une surface plane horizontale de réflexion (14), dont la face supérieure (23) est réfléchissante (colonne 5, lignes 13 à 15) et dont le bord d'extrémité avant (15,15a) est agencé au voisinage du second foyer (f2) du réflecteur de manière à former un bord de coupure et à délimiter verticalement vers le bas le volume de réflexion (colonne 4, lignes 37 à 41 et 51 à 53). La face interne de la partie elliptique (2,3) ainsi que la face supérieure (23) de la surface plane (14) du réflecteur sont revêtues d’un matériau réfléchissant (colonne 3, lignes 61 à 64 et colonne 5, lignes 13 à 15). La surface plane (14) du réflecteur est agencée dans un plan horizontal passant globalement par les foyers (f1,f2) du réflecteur elliptique (2) et s'étend longitudinalement vers l’arrière depuis son bord de coupure.

Quant à la caractéristique 1.13 de la revendication 1, elle est, pour les considérations suivantes et contrairement à la position exprimée par l'intimée, également divulguée dans D1.

Le filament (6) de la lampe (5) constituant la source lumineuse en question est logé dans une sorte de bac ("cover" 7) afin de bloquer la diffusion des rayons lumineux dirigés vers le bas et vers les côtés et de ne laisser diffuser qu'un faisceau dirigé vers le haut, créant ainsi un axe de diffusion lumineuse sensiblement perpendiculaire à la surface plane (14) du réflecteur. Cet objectif est d'ailleurs confirmé expressément dans la description de D1, cf. colonne 4, lignes 11 à 16 ("light rays 8 produced by the filament 6 are directed only upward").

3.3 L'objet revendiqué se distingue ainsi de D1 par la seule caractéristique 1.12 limitant la source lumineuse à une diode électroluminescente ou à l’extrémité libre d'un faisceau de fibres optiques. Ces deux types de source lumineuse ont la propriété principale de ne générer qu'une faible dissipation thermique par rapport aux lampes à incandescence, cf. colonne 8, paragraphe [0072] du brevet.

3.4 Le problème objectivement dérivable de cette caractéristique distinctive consiste alors à choisir une source lumineuse qui dégage une quantité de chaleur réduite par rapport à celle dissipée par une lampe à incandescence du type décrit dans D1.

3.5 Le document D9 présente deux grandes lignes de divulgation :

- d'une part un exposé général à la colonne 1, lignes 29 à 42, portant sur les inconvénients des lampes à incandescence, dont notamment la forte dissipation thermique, et, à l'inverse, les avantages liés à l'utilisation de diode électroluminescente ou d'un faisceau de fibres optiques en lieu et place desdites lampes;

- d'autre part le mode très détaillé de réalisation d'un système d'éclairage pour feu de signalisation arrière d'une automobile (description détaillée et figures).

La chambre estime que l'homme du métier aurait considéré le premier enseignement de D9, celui de la partie introductive de la description à caractère plus général, d'autant qu'on y aborde exactement la même problématique de la forte diffusion thermique des lampes à filaments.

Soucieux de réduire l'émission de chaleur issue de la lampe (5) du dispositif selon D1, et plus particulièrement de la chaleur émise par le filament (6), l'homme du métier est guidé par les propos d'ordre général tenus dans D9. Ce faisant, il envisage comme une solution immédiate au problème de diffusion thermique le remplacement du filament (6), voire de la lampe (5), par au moins une diode électroluminescente ou par les extrémités de fibres optiques. Cette démarche, hormis à l'évidence le choix d'un support adapté à ces types de source lumineuse, ne nécessite d'ailleurs aucune modification substantielle ou profonde du système divulgué par D1.

Pour cette étape de substitution, l'homme du métier est tenu de positionner la diode (ou le faisceau de fibres optiques) de sorte à en diriger son axe de diffusion perpendiculairement à la surface plane (14) du système imageant de D1, ceci afin de rester en parfaite conformité avec l'exigence affirmée dans D1 d'une diffusion vers le haut du faisceau de lumière généré par la source lumineuse, en l'occurrence le filament (6), cf. colonne 4, lignes 11 à 15.

L'homme du métier faisant le pas évident de substituer la lampe à incandescence de D1 par une source de lumière à basse diffusion thermique (diode, fibres optiques) arrive à la structure du module tel que revendiqué sans pour autant avoir exercé une activité inventive.

Les arguments de l'intimée, principalement dirigés vers une incompatibilité, ou pour le moins une difficulté accrue entre le module de D1 comprenant un système imageant et le projecteur décrit dans D9 dénué de tout système imageant, ne sont dès lors ni appropriés ni convaincants.

3.6 L'objet revendiqué dans les jeux de revendications de la requête principale ne satisfait pas aux exigences de l'article 100(a), ou 52(1) CBE en combinaison avec l'article 56 CBE.

4. Requêtes auxiliaires

4.1 Remarque préliminaire

A l'identique de la requête principale, la revendication indépendante 1 du premier jeu de revendications (pour les États DE, FR, GB) de chacune des requêtes auxiliaires est basée sur la combinaison des caractéristiques de la revendication indépendante 1 du second jeu de revendications (pour les autres États contractants désignés) de ladite requête auxiliaire avec la caractéristique 1.8a définissant un revêtement réfléchissant.

Ainsi les considérations et les conclusions trouvées pour le premier jeu de revendications s'appliquent par analogie au second jeu de revendications de chaque requête auxiliaire.

4.2 Non-admission des requêtes auxiliaires 1 à 3

Pour décider de la recevabilité des requêtes auxiliaires soumises à un stade tardif de la procédure de recours, la chambre exerce son pouvoir d'appréciation sur la base notamment de circonstances ayant pu justifier le retard et de critères tels que la pertinence apparente ou prima facie des modifications apportées par rapport au défaut d'activité inventive constaté pour la requête principale ou encore le critère de convergence des requêtes.

4.2.1 Défaut de justification

Le dépôt tardif des requêtes auxiliaires n'est pas justifié par un fait ou motif surprenant ou inattendu dans l'argumentaire de la requérante; les moyens de preuve pertinents ont été versés au dossier et largement débattus lors de la procédure devant la division d'opposition.

De même, la chambre rappelle à cet endroit que le règlement de procédure des chambres de recours définit principalement par ses articles 12 et 13 RPCR le domaine de discrétion laissée à l'appréciation des chambres en matière de dépôt de pièces en phase de recours. Un dépôt subséquent à la notification de l'avis provisoire de la chambre, qu'importe sa date ou le laps de temps restant avant la procédure orale, ne déroge pas à ce règlement de procédure.

Dans le cas présent, la chambre estime donc que le dépôt de requêtes ne se justifie pas par des motifs imputables à certains aspects du déroulement de la procédure.

4.2.2 Défaut de convergence

Dans la revendication indépendante de chacune des requêtes auxiliaires 1 à 3 ont été ajoutées des caractéristiques, certes issues de revendications dépendantes délivrées, mais dirigées vers des détails de réalisation distincts et non reliés, à savoir :

- une surface plane avec deux parties inclinées l'une par rapport à l'autre (requête auxiliaire 1);

- un bord de coupe arrondi de la surface plane (requête auxiliaire 2); et

- la pluralité de sources lumineuses dans un même module (requête auxiliaire 3).

Ces limitations définissent ainsi des orientations très différentes de l'invention et constituent autant de cas nouveaux à examiner; les requêtes auxiliaires 1 à 3 ne sont dès lors pas convergentes.

4.2.3 Défaut prima facie de brevetabilité

La chambre considère que les caractéristiques ajoutées dans ces requêtes semblent être connues en soi de D1 (cf. figures 9 et 10, respectivement figure 8) dans le cas des requêtes auxiliaires 1 et 2, voire faire partie des connaissances générales de l'homme du métier dans le cas de la requête auxiliaire 3.

Les amendements opérés ne semblent ainsi pas être de nature à impliquer à eux seuls une activité inventive, dont fait défaut l'objet de la requête principale par rapport à la combinaison des documents D1 et D9.

4.2.4 Tous ces aspects et considérations conduisent la chambre à ne pas admettre à la procédure les requêtes auxiliaires 1 à 3 déposées par télécopie le 12 octobre 2012 dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation selon les termes de l'article 13(1),(3) RPCR.

4.3 Requête auxiliaire 4

4.3.1 Recevabilité

La revendication 1 de cette requête auxiliaire se fonde sur la combinaison de la revendication 1 selon la requête principale et des revendications dépendantes 8 et 9 telles que délivrées, au sujet desquelles la requérante-opposante avait de fait pris position quant aux critères de brevetabilité de leur objet.

Elle définit en outre une application du module revendiqué au principal puisqu'elle a pour objet un projecteur de véhicule comprenant au moins deux modules d'éclairage agencés côte-à-côte et inclinés l'un par rapport à l'autre afin de réaliser un faisceau d'éclairage de feu de croisement. Par ailleurs, la limitation apportée notamment par le dédoublement des modules n'étant divulguée ni dans D1 ni dans D9 semblerait prima facie de nature à apporter une distinction significative par rapport à la combinaison D1 et D9.

Au vu de ces considérations, la chambre décide d'admettre la requête auxiliaire 4 à la procédure.

4.3.2 Activité inventive

L'état de la technique le plus proche reste le document D1 qui décrit également un projecteur de véhicule comprenant un module d'éclairage doté d'un système imageant produisant un faisceau d'éclairage du type à coupure comme vu précédemment.

En fait, le projecteur selon D1 est constitué par un module unique comprenant une lampe (5) avec deux filaments incandescents (6,9). Le premier (6) coopère avec le réflecteur du haut (3) et le bord (15) de coupure de la surface plane (14) sensiblement horizontal afin de produire un éclairage de croisement du type à coupure, alors que le second (9) coopère, outre avec le réflecteur du haut (4), également avec le réflecteur du bas (3), diffusant ainsi un flux lumineux supérieur (10) correspondant à un éclairage du type feu de route (20), cf. figure 3B et colonne 4, lignes 54 à 60.

L'objet revendiqué selon la requête auxiliaire 4 se distingue ainsi en plus de la caractéristique 1.12 (considérée ci-avant comme évidente au regard de D9) par les caractéristiques importées de la revendication 9 (bloc 1.RA4) telle que délivrée caractérisant un dédoublement de modules, à savoir en substance :

- que le projecteur, réalisé pour produire un faisceau d'éclairage réglementaire de croisement, comprend un deuxième module d'éclairage de structure sensiblement identique à celle du premier module et agencé sensiblement parallèlement avec celui-ci, et

- que le deuxième module d'éclairage est tourné d'un angle déterminé autour de son axe optique par rapport au premier module de manière à incliner son bord de coupure par rapport à un plan horizontal afin de superposer les deux faisceaux d'éclairage pour former le faisceau d'éclairage réglementaire de croisement.

Le document D5 cité par la requérante pour justifier du manque de caractère inventif de ces caractéristiques additionnelles divulgue certes un projecteur diffusant un éclairage de croisement produit par la superposition de deux faisceaux (A',B') illustrés à la figure 5 de D5, mais force est de constater que sa structure est foncièrement différente de celle formant le projecteur de D1.

Pour apporter la démonstration du caractère évident du bloc de caractéristiques 1.RA4 il ne saurait suffire de renvoyer à D5 et en extraire un enseignement général et quasi-théorique de l'obtention d'un éclairage de croisement par superposition de deux faisceaux lumineux inclinés entre eux. L'homme du métier, devra, bien au contraire, s'attacher dans un premier temps à identifier les composants du projecteur de D5 nécessaires et indispensables pour atteindre ce résultat.

Or, ces composants essentiels consistent d'une part dans la conformation complexe de trois zones de réflexion (réflecteurs 8, 9 et 10) quasi-paraboliques dans un corps (20) unique (cf. page 3, colonne de gauche, deuxième paragraphe et point 1º du Résumé) et d'autre part dans une vitre de fermeture (5) présentant localement des propriétés de coupure de faisceaux dues à la présence de zones striées en regard des zones réfléchissantes (8 et 10), les stries différant d'une zone à l'autre, ainsi qu'une zone lisse en regard de la zone réfléchissante 9 (voir page 3, colonne de droite, deuxième paragraphe). Pour passer en mode d'éclairage de croisement dans D5, il convient d'alimenter le filament horizontal (11) de la zone (8) et le filament (12) incliné de la zone (9) située pratiquement en-dessous de la première zone pour obtenir deux faisceaux inclinés superposés (A',B'), voir notamment les figures 1 et 5.

Si l'homme du métier voulait s'inspirer de la technologie de D5, il ne trouverait aucun enseignement lui indiquant comment transformer le projecteur à un seul module comportant deux lampes et un système imageant incluant un réflecteur elliptique, une face plane avec un bord de coupure et une lentille convergente. En d'autres termes, ces deux structures reposent sur des bases foncièrement si différentes l'une par rapport à l'autre qu'il n'est pas possible d'extraire certains éléments du projecteur divulgué dans D5 pour les introduire en lieu et place de certains composants essentiels de la structure formant le projecteur de D1.

Toute autre conclusion relèverait assurément d'une démarche en connaissance préalable de l'invention et basée sur une analyse ex post facto.

4.3.3 Les autres documents cités ne sont pas plus pertinents que les documents considérés ci-dessus.

De même, l'argumentaire, qui fut soumis à l'encontre de la requête principale pour la première fois avec le mémoire de recours et qui était fondé sur des combinaisons de documents autres que D1 et D9, n'a, au final et suite à l'avis provisoire émis par la chambre, pas été poursuivi par la requérante.

4.3.4 Conclusion

L'objet de la revendication 1 des deux jeux de revendications selon la requête auxiliaire 4 implique ainsi une activité inventive requise par les articles 100(a)/52(1) et 56 CBE.

5. Maintien du brevet - Description

Étant donné que la revendication 1 des deux jeux de revendications de la requête auxiliaire 4 tels que déposés lors de la procédure orale est rédigée en une seule partie en raison de la pertinence de D7, état de la technique au sens de l'article 54(3) CBE, il conviendra à la division d'opposition, dans le cadre de l'exercice d'harmonisation de la description avec les revendications à maintenir, de décrire, dans sa partie introductive, l'état de la technique pertinent tel que divulgué par chacun des documents D7, D1 et D9

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition afin qu'elle maintienne le brevet sous forme modifiée sur la base des documents suivants :

a) Revendications :

- pour les États DE, FR et GB :

jeu 1 de revendications comprenant les revendications 1 et 2 telles que déposées lors de la procédure orale en tant que requête auxiliaire 4;

- pour les États CZ, ES, IT, SI, SK :

jeu 2 de revendications comprenant les revendications 1 à 5 telles que déposées lors de la procédure orale en tant que requête auxiliaire 4;

b) description et figures : restant à adapter aux jeux de revendications.

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