European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2012:T039210.20120112 | ||||||||
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Date de la décision : | 12 Janvier 2012 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0392/10 | ||||||||
Numéro de la demande : | 02755079.7 | ||||||||
Classe de la CIB : | A23G 9/30 A23G 3/26 A23G 3/00 A23G 3/30 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé de dragéification dure amélioré | ||||||||
Nom du demandeur : | Roquette Frères | ||||||||
Nom de l'opposant : | Cargill, Incorporated | ||||||||
Chambre : | 3.3.09 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Nouveaux documents (admissibles) Activité inventive (oui) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le brevet européen nº 1 399 032 au nom de la société Roquette Frères, se fondant sur la demande européenne nº 02755079.7, déposée le 21 juin 2002 et revendiquant la priorité française du 25 juin 2001 (FR 0108362) a été délivré le 28 septembre 2005 (Bulletin 2005/39). Le brevet a été délivré sur la base de six revendications. Le libellé de la revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Procédé de dragéification dure comprenant une étape d'application sur la surface d'un produit à dragéifier d'un sirop de dragéification composé de maltitol ou d'isomalt et d'au moins un liant, caractérisé en ce que tout ou partie de la matière sèche dudit liant est substituée par un sirop ou une poudre de sorbitol de manière à réduire la fragilité des produits ainsi dragéifiés, ledit sirop de dragéification comprenant 1 à 5% en poids sec d'un sirop ou d'une poudre de sorbitol."
II. Une opposition a été formée contre le brevet par Cargill Incorporated. L'opposant a requis la révocation complète du brevet en application de l'Article 100(a) CBE, pour défaut de nouveauté et d'activité inventive et de l'Article 100(b) pour défaut de suffisance de description.
Le document suivant a été cité, entre autres, au cours de la procédure d'opposition :
D3 : US 5 571 547.
III. Pendant la procédure orale tenue devant la division d'opposition le 26 novembre 2009 le titulaire a déposé une nouvelle requête principale comprenant trois revendications. Le libellé de la revendication 1 s'énonce comme suit :
"1. Procédé de dragéification dure comprenant une étape d'application sur la surface d'un produit à dragéifier d'un sirop de dragéification composé de maltitol ou d'isomalt et d'au moins un liant,
le liant étant choisi dans le groupe constitué par la gomme arabique, la gomme talha, la gélatine, les celluloses et amidons modifiés, les dextrines, les maltodextrines et les maltodextrines branchées, seuls ou en mélanges entre eux,
ledit sirop de dragéification comprenant par rapport à sa matière sèche soluble au moins 80%, de préférence au moins 88% en poids de maltitol ou d'isomalt,
ledit procédé comprenant en outre une étape de répartition d'une poudre de maltitol ou d'isomalt de pureté supérieure à 90%, de préférence supérieure à 95% en poids,
lesdites étapes d'application et de répartition étant menées dans un ordre quelconque,
caractérisé en ce qu'une partie de la matière sèche dudit liant est substituée par un sirop ou une poudre de sorbitol, de manière à réduire la fragilité des produits dragéifiés,
ledit sirop de dragéification comprenant de 1 à 5% en poids sec d'un sirop ou d'une poudre de sorbitol."
Par décision prononcée à l'issue de la procédure orale, notifiée sous forme écrite par voie postale le 30 décembre 2009, la division d'opposition a maintenu le brevet dans sa forme modifiée. En ce qui concerne la question de l'activité inventive (seule question relative à la brevetabilité faisant l'objet du présent recours) la division d'opposition a considéré que le procédé revendiqué impliquait une activité inventive compte tenu des documents cités par l'opposant. Plus précisément, la division d'opposition a considéré, en accord avec le titulaire, que D3 représentait l'état de la technique le plus proche, que le problème à résoudre vis-à-vis de ce document était la réduction de la fragilité du revêtement dur des dragées qui était obtenue en améliorant leur résistance à la casse, et que la solution revendiquée n'était ni divulguée ni suggérée par les documents cités de l'état de la technique.
IV. Le 16 février 2010 l'opposant (requérant) a formé recours et a requis l'annulation de la décision de la division d'opposition et la révocation du brevet opposé. La taxe de recours a été acquittée le même jour.
Avec le mémoire de recours du 30 avril 2010 le requérant a déposé trois nouveaux documents D11 à D13 et a soutenu que le procédé revendiqué n'impliquait pas d'activité inventive au vu de la divulgation de D3 ou D13, chacun considéré comme document de l'état de la technique le plus proche, en combinaison avec D11 ou D12.
D11 : EP 0 664 960;
D12 : EP 0 491 953;
D13 : US 5 478 593.
Dans ses observations sur le recours datées du 20 septembre 2010, le titulaire du brevet (intimé) a essentiellement défendu la décision attaquée. Il a considéré que le procédé revendiqué impliquait une activité inventive, indépendamment de celui des documents, D3 ou D13, considéré représentant l'état de la technique le plus proche et au vu de l'enseignement des nouveaux documents, D11 et D12.
V. Une procédure orale a eu lieu devant la présente chambre le 12 janvier 2012. Au cours de cette procédure orale l'intimé a requis que les documents D11 à D13, cités pour la première fois en phase de recours, ne soient pas admis dans la procédure.
VI. Les arguments du requérant (opposant) présentés oralement et/ou par écrit, considérés pertinents pour la présente décision, peuvent être résumés comme suit :
- Il est justifié d'admettre les documents D11 à D13 dans la procédure. D'une part, ils ont été déposés avec le mémoire de recours. D'autre part la raison de leur invocation est la reconnaissance par la division d'opposition de l'activité inventive du procédé de la requête principale du titulaire, déposée au cours de la procédure orale devant la division d'opposition. D11 et D12 démontrent que des poudres de polyols combinant un sorbitol et un maltitol aux teneurs de la revendication faisaient partie de l'état de la technique à la date de dépôt du brevet opposé. D13, dont l'enseignement est similaire à celui de D3 (D3 est une demande divisionnaire de D13), revendique explicitement (voir D13 : revendication 6) un procédé de dragéification dure alors que D3 ne revendique que la couche de revêtement dur. Il représente donc l'état de la technique le plus proche.
- Le procédé revendiqué diffère du procédé divulgué par D3 ou D13 quant à la composition du sirop de recouvrement de la surface des produits à dragéifier. D3 ou D13 divulgue qu'un tel sirop comprend au moins 90% en poids sec d'un polyol choisi parmi le maltitol, le sorbitol, le mannitol, l'érythritol, le xylitol et l'isomalt (D3 : colonne 3, lignes 32-35 et colonne 5, lignes 58-61; D13 : colonne 1, lignes 9-12) et 0.5 à 5% de gélatine, de gomme arabique ou de celluloses modifiées (D3 : colonne 5, lignes 53-55; D13 : colonne 5, lignes 46-50) et que le sirop peut être préparé en utilisant une poudre du même polyol dont la pureté est supérieure à 95% (D3 : colonne 4, lignes 28-44; D13 : colonne 4, lignes 23-37). Le sirop du procédé revendiqué comprend au moins 80% en poids sec du maltitol ou d'isomalt, un liant spécifique qui peut être la gélatine, la gomme arabique ou des celluloses modifiées et 1 à 5% de sorbitol. En outre, il est incorrect de considérer que le procédé revendiqué comporte le remplacement d'une partie du liant par le sorbitol car une telle étape ne fait pas partie du procédé revendiqué.
- La formulation du problème technique, que ce soit au regard de D3 ou de D13, est la même. Il s'agit de trouver un sirop de recouvrement pour particules à dragéifier qui contient du maltitol ou d'isomalt de pureté moins élevée et donc économiquement plus avantageux. A noter que D3 (colonne 4, lignes 45-99) et D13 (colonne 4, lignes 38-39) préconisent un sirop préparé en utilisant une poudre de polyol dont la pureté est préférablement supérieure à 98 voire 99%.
- Ainsi l'homme du métier qui est conscient du fait que la préparation d'une poudre de maltitol ou d'isomalt d'une extrême pureté implique des coûts élevés de purification, s'orienterait certainement vers des poudres moins purifiées afin de réduire les coûts du procédé. De telles poudres sont connues de D11 et D12.
- D11 divulgue deux compositions "poudre G" et "poudre H", qui contiennent du maltitol de pureté moindre, c'est-à-dire d'une pureté respective de 92,6 et 94%, en présence du sorbitol d'une teneur respective de 1,7 et 1,2%. D12 (page 4, lignes 43-45 et page 11, revendication 2) divulgue une composition qui comprend 80 à 98% en poids du maltitol et 0.5 à 15% en poids de sorbitol. Les compositions connues, de pureté en maltitol moindre que celles de D3/D13 (supérieures à 98%) pourraient donc être utilisées dans D3/D13 afin de préparer le sirop de polyol pour son utilisation dans le procédé de dragéification. La réduction de la fragilité des dragées ainsi préparées est une propriété découlant tout naturellement de cette utilisation et ne fait pas partie du problème objective.
- Par conséquent le procédé revendiqué n'implique pas d'activité inventive au vu de la combinaison évidente de D13/D3 avec D11 ou D12.
VII. Les arguments de l'intimé (titulaire du brevet) présentés oralement et/ou par écrit, considérés pertinents pour la présente décision, peuvent être résumés comme suit :
- Les documents D11 à D13 déposés avec le mémoire de recours ne devraient pas être admis dans la procédure. Non seulement ils sont tardifs mais ils sont aussi non pertinents. D11, bien qu'il divulgue une composition de maltitol et de sorbitol, ne concerne pas la dragéification dure et appartient par conséquent à un domaine technique très éloigné du domaine technique du brevet opposé. La même observation s'applique à D12 qui divulgue des mélasses, c'est-à-dire, des compositions qui ne donnent pas des couches dures cristallines, qui, par conséquent ne sont pas utiles pour un procédé de dragéification dure. D13, dont D3 est une demande divisionnaire avec un enseignement très similaire, est superflu car il n'ajoute rien vis-à-vis de ce document.
- Le procédé revendiqué implique une activité inventive contrairement à ce que prétend le requérant par des arguments basés sur une analyse ex post facto. En effet, le requérant n'a pas pris en considération ni le problème technique identifié dans le brevet opposé ni les résultats expérimentaux fournis dans ce brevet.
- D3, dont l'équivalent US est cité dans le brevet opposé (paragraphe [0008]), peut être considéré comme l'état de la technique le plus proche, en particulier l'exemple II. Comparé au procédé divulgué, le procédé revendiqué concerne une composition de sirop de dragéification qui comprend, outre le maltitol ou l'isomalt et outre un liant spécifique, du sorbitol sous forme soit de poudre ou de sirop en substitution d'une partie du liant. L'effet technique de cette différence est une bien meilleure résistance au phénomène de casse des coins des dragées.
- Le requérant ne reconnaît pas que le problème technique à résoudre est celui cité dans le brevet opposé, c'est-à-dire de surmonter la fragilité élevée des produits dragéifiés de l'état de la technique. Il refuse aussi de reconnaitre que sa solution est indubitablement illustrée dans la partie expérimentale de ce brevet. De plus, l'intimé soutient que le problème cité dans le brevet est tout à fait différent du problème technique que D3 envisage de résoudre.
- Quant à la question de l'évidence, selon l'intimé aucun des documents cités ne divulgue le problème technique posé dans le brevet opposé et ne donne à l'homme du métier la moindre indication en direction de la solution revendiquée. Les arguments du requérant, au vu des nouveaux documents D11 et D12, sont tout simplement basés sur une analyse ex post facto. D11 divulgue une pâte à mâcher et ne concerne pas un procédé de dragéification dure. Quant aux compositions "poudre G" et "poudre H", auxquelles se réfère le requérant, elles sont des compositions excessivement dures et par conséquent plus susceptibles à la casse quand elles sont utilisées pour la dragéification dure des produits. L'homme du métier ne les auraient pas prises en considération. Mais même si l'homme du métier prenait D11 en considération, il n'y trouverait pas d'incitation particulière pour le choix des poudres G ou H plutôt que la poudre I qui est une autre alternative comparable eu égard à sa teneur en maltitol. Ce choix est donc arbitraire. Quant à D12, il divulgue des mélasses, que l'homme du métier ne prendrait pas en considération puisque une dragéification dure selon D3/D13 conduit à la formation d'une couche cristalline que les mélasses ne pourront pas fournir.
VIII. Le requérant (opposant) a demandé lannulation de la décision contestée et la révocation du brevet opposé.
IX. L'intimé (titulaire) a demandé le rejet du recours.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Admissibilité des nouveaux documents
L'intimé a contesté l'admissibilité des documents D11 à D13 déposés par le requérant avec son mémoire de recours. Toutefois, le document D13 est une version plus récente de D3, et D11 et D12 sont des documents dont l'enseignement est utilisé par le requérant afin de développer davantage son argumentation présentée initialement concernant la question de l'activité inventive. Par conséquent, la chambre n'a pas de raisons pour ne pas admettre ces documents.
3. Activité inventive
3.1 La question de défaut d'activité inventive est le seul motif développé par le requérant au niveau du recours. Le requérant a précisé au cours de la procédure orale devant la chambre qu'il se limitait à cette question. Concernant les autres questions soulevées devant la division d'opposition, la chambre, en accord avec la décision attaquée, considère qu'aucune de ces questions, qui, par ailleurs, ont été traitées dans la décision attaquée, ne font obstacle au maintien du brevet opposé.
3.2 L'invention revendiquée a pour objet un procédé de dragéification dure au maltitol ou à l'isomalt permettant de réduire la fragilité des produits dragéifiés (paragraphe [0002]).
3.3 De tous les documents cités devant la division d'opposition, D3, équivalent US du brevet EP 0 625 311 cité dans le paragraphe [0008] du brevet opposé, est indubitablement le document qui représente l'état de la technique le plus proche. Ceci était le point de vue de la division d'opposition dans la décision attaquée, qui est basé sur l'argumentation de l'intimé présentée tout au long de la procédure devant la division d'opposition. Le requérant dans son mémoire de recours ne réfute pas cette conclusion, laquelle est partagée par la chambre. La raison pour laquelle le requérant préfère, au soutien de son allégation de défaut d'activité inventive, s'appuyer sur le document D13, plutôt que sur D3, est que D13 divulgue dans les revendications, en particulier dans la revendication 6, un procédé de dragéification dure, similaire au procédé revendiqué. D3, au contraire, divulgue ce procédé dans la description (colonne 1, lignes 6-9; colonne 4, lignes 28-44; colonne 5, lignes 1-31 et 51-62; exemple II). Il est à noter toutefois que le requérant lui même reconnait que la divulgation de D13 est équivalente à celle de D3, D3 étant une demande divisionnaire de D13 (voir D3, page de couverture, point [62]).
La chambre souligne que ce qui importe dans l'appréciation d'un document de l'état de la technique est son contenu indépendamment de la partie du document qui contient la divulgation pertinente. Autrement dit, en principe, la pertinence de ce qui est divulgué ne s'apprécie pas différemment selon que cet enseignement divulgué se trouve dans la description ou dans les revendications. Dans le cas présent, tant D3 que D13 sont techniquement équivalents pour ce qui concerne le procédé de dragéification dure connue dans l'art à la date de dépôt du brevet opposé. Ils peuvent donc être indifféremment utilisés pour l'analyse de la question de l'activité inventive selon l'approche standard de problème-solution. Le requérant n'a pas été en mesure d'indiquer une quelconque différence technique dans ce contexte entre ces deux documents. Toutefois, bien qu'on puisse raisonner indifféremment dans la suite de la décision sur l'un des documents D3 ou D13, la chambre, afin d'écarter tout doute éventuel et de couvrir tout aspect possible, fera référence ci-après aux deux documents (équivalents) de façon parallèle.
3.4 Les documents D3 (colonne 1, lignes 6-9; colonne 4, lignes 28-44; colonne 5, lignes 51-57; exemple II) et D13 (colonne 1, lignes 4-12; colonne 4, lignes 23-44; colonne 5, lignes 44-50; exemple II) décrivent chacun indépendamment un procédé de dragéification dure qui permet la création d'un revêtement dur à la surface d'un produit à dragéifier et comporte au moins un cycle qui comprend :
- une étape de dragéification d'un sirop composé, par rapport à sa matière sèche soluble, d'au moins 90% en poids d'un polyol choisi parmi une liste de 7 polyols (sorbitol, maltitol, mannitol, xylitol, erythritol, lactitol and isomalt) et, pour être idéal, ce sirop comprend entre 0,5 et 5% de gélatine, de gomme arabique ou des celluloses modifiées;
- au moins une étape d'application sous forme pulvérulente d'une poudre d'une pureté supérieure à 95% en poids de ce même polyol; lesdites étapes d'application étant menées dans un ordre quelconque;
- puis une étape de répartition du sirop et de la poudre appliqués.
3.5 Partant de cet état de la technique l'intimé fait valoir que l'effet technique du procédé revendiqué consiste en ce que les produits obtenus par ce procédé présentent une bien meilleure résistance au phénomène de casse des coins pendant leur manipulation grâce à la réduction de la fragilité de la couche externe (voir brevet : paragraphe [0010]). Ainsi le problème technique à résoudre au vu de l'état de la technique le plus proche se résume à proposer un procédé de dragéification dure permettant de réduire la fragilité de la couche externe des produits dragéifiés pendant leur manipulation (voir brevet : paragraphes [0002] et [0011]).
3.6 La solution proposée par le brevet en litige est le procédé selon la revendication 1 qui est essentiellement caractérisé par le fait que le sirop de dragéification - composé de maltitol ou d'isomalt et d'un liant choisi dans le groupe constitué par la gomme arabique, la gomme talha, la gélatine, les celluloses et amidons modifiés, les dextrines, les maltodextrines et les maltodextrines branchées, seuls ou en mélanges entre eux - comprend en plus 1 à 5% en poids sec d'un sirop ou d'une poudre de sorbitol.
Comme l'a correctement constaté le requérant au cours la procédure orale devant la chambre, le texte de la revendication 1 selon lequel ladite quantité de sorbitol vient en substitution d'une partie de la matière sèche du liant ne constitue pas une caractéristique technique du procédé revendiqué et ne fait donc pas partie de ce procédé; ce texte correspond au chemin intellectuel à suivre pour arriver à la composition du sirop du procédé revendiqué en partant du sirop de l'état de la technique.
3.7 Le brevet contient des preuves techniques démontrant que le problème technique est effectivement résolu (voir brevet : paragraphes [0026] à [0036]). Ces résultats sont corroborés par les résultats expérimentaux additionnels déposés par l'intimé avec sa lettre du 25 septembre 2009 dont le but était de démontrer la solution du problème technique dans toute l'étendue de l'objet revendiqué. Toutefois, ceci n'a pas été contesté par le requérant.
3.8 Il reste à déterminer si la solution proposée par le brevet litigieux découle d'une façon évidente de l'état de la technique.
3.8.1 Partant du document D3 ou D13, l'homme du métier, qui est un spécialiste de la dragéification, ne trouverait aucun enseignement qui lui aurait permis d'arriver, de manière évidente, au procédé de dragéification dure revendiqué.
3.8.2 Premièrement, le problème technique à surmonter par le procédé de D3 (colonne 3, lignes 55-67) ou D13 (colonne 3, lignes 50-61) est tout autre que celui qui sous-tend le procédé revendiqué. Plus particulièrement D3/D13 se donne comme objectif, par l'utilisation d'un polyol choisi parmi le sorbitol, le maltitol, le mannitol, le xylitol, l'érythritol, le lactitol et l'isomalt - en tant qu'agent de remplacement du sucre - la mise au point d'un procédé :
- qui serait très rapide et permettrait ainsi des gains de temps considérables et donc des gains de capacités importantes,
- qui serait simple à mettre en place industriellement, et
- qui permettrait la préparation des produits dragéifiés de très haute qualité, non collant et n'évoluant pas en aspect ou en texture de manière significative au cours du temps.
3.8.3 Deuxièmement, aucun des autres documents de l'état de la technique cité, pris seul ou en combinaison avec D3/D13 ne pourrait davantage conduire l'homme du métier à résoudre le problème technique à la base du procédé revendiqué.
Le requérant a cité D11 et D12 en tant qu'exemples d'un domaine de l'état de la technique plus large afin de démontrer que des compositions comprenant du maltitol et du sorbitol étaient connues dans l'art à la date de dépôt du brevet opposé. Néanmoins en l'absence d'une indication explicite ou implicite dans ces documents, l'homme du métier ne serait pas incité à utiliser ces compositions afin de préparer le sirop de dragéification du procédé de D3/D13.
D11 (exergue; page 2, lignes 1-3; page 5, lignes 35-49; page 11, lignes 12-27, "poudre G" et "poudre H") concerne une composition de chewing-gum présentant une qualité organoleptique améliorée (amélioration du gout et de l'aromatisation en termes d'impact et de durée). Il concerne également un procédé de préparation d'une telle composition par emploi d'une poudre de maltitol présentant des caractéristiques très particulières en termes de distribution granulométrique. Il ne concerne absolument pas le domaine technique de dragéification dure et ne peut donc pas être considéré comme pertinent et susceptible d'être pris en considération par l'homme du métier. Il est vrai que les poudres G et H combinent du maltitol avec du sorbitol, mais, contrairement à ce que soutient le requérant, elles ne présentent aucun avantage pour que l'homme du métier les privilégie. En effet, D11 (page 11, lignes 38-39; page 12, ligne 20) incite l'homme du métier à les éviter car au vu de leurs propriétés (mauvaise liaison, mauvaise homogénéité, dureté excessive un jour après leur fabrication), elles sont inacceptables et inappropriées pour la fabrication des produits dragéifiés selon D3/D13.
D12 (exergue, page 1, lignes 3-5; page 4, ligne 30 - page 5, ligne 43; page 6, lignes 7-12; page 8, lignes 12-13 et 42-47; page 9, lignes 8-13 et 35-38) concerne des mélasses comprenant du maltitol et du sorbitol. D12 ne concerne pas davantage le domaine technique de la dragéification dure et ne peut donc pas non plus être considéré comme pertinent. La chambre est convaincu par l'intimé qui a soutenu, sans être contredit par le requérant, que l'homme du métier n'utiliserait pas les compositions de D12 car il les considèrerait incapables de fournir un recouvrement cristallin si elles devaient être utilisées dans le procédé de dragéification de D3/D13.
Comme aucun des documents cités n'inciterait l'homme du métier à utiliser des compositions connues combinant le maltitol et le sorbitol dans le procédé de dragéification dure de D3/D13, le procédé revendiqué n'est pas évident sur la base des documents cités et implique donc une activité inventive.
3.9 Le requérant a soutenu que le procédé revendiqué était évident sur la base d'un autre problème technique. Selon le requérant, l'homme du métier qui partirait de D3 ou de D13 se fixerait comme objectif la mise en oeuvre d'un procédé utilisant un maltitol de pureté moins élevée, et donc économiquement plus avantageux. Il serait donc incité par la divulgation de D11 (page 11, lignes 12-27, poudre G et poudre H) à utiliser une composition comprenant non seulement ce maltitol de pureté de 92,6 et 94,0% respectivement mais également du sorbitol en teneur de 1,7 et 1,2 % respectivement. Il arriverait par conséquent au procédé revendiqué sans faire preuve d'activité inventive.
Toutefois la chambre ne peut pas suivre l'approche du requérant qui ignore sciemment (i) le problème technique tel qu'établi objectivement au vu de l'enseignement de l'équivalent US de D3, (ii) les résultats expérimentaux du brevet et (iii) l'enseignement technique des documents D11 et D12. En raisonnant ainsi le requérant n'applique pas l'approche problème-solution de la façon établie et suivie par les chambres de recours de l'OEB quant il s'agit d'évaluer l'activité inventive d'un objet revendiqué. L'approche du requérant est clairement basée sur un raisonnement ex post facto.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.