European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2012:T192309.20120327 | ||||||||
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Date de la décision : | 27 Mars 2012 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1923/09 | ||||||||
Numéro de la demande : | 01403287.4 | ||||||||
Classe de la CIB : | F25J 3/04 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé intégré de séparation d'air et de génération d'énergie et installation pour la mise en oeuvre d'un tel procédé | ||||||||
Nom du demandeur : | L'AIR LIQUIDE, Société Anonyme pour l'Etude et l'Exploitation des Procédés Georges Claude |
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Nom de l'opposant : | Praxair, Inc. LINDE AKTIENGESELLSCHAFT |
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Chambre : | 3.2.03 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | - | ||||||||
Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Les opposantes OI et OII ont respectivement formé sous paiement de la taxe correspondante, les 28 septembre 2009 et 18 septembre 2009, recours contre la décision en date du 22 juillet 2009 de la division d'opposition de maintenir en une forme modifiée le brevet Nº 1 223 396 délivré sur la base de la demande européenne EP 01403287.4.
Les motifs de recours ont été déposés le 27 novembre 2009 par l'opposante OI et le 19 novembre 2009 par l'opposante OII.
II. Divulgations et éléments probatoires cités:
a) Documents cités en phase d'opposition
Dl: EP-A- 0 538 118;
D2: "Next - Generation Integration Concepts for Air Separation Units and Gas Turbines", Smith et al., Transactions of the ASME, Vol. 119, April 1997, pages 298-304;
D3: US-A- 5 740 673;
D4: "Evaluation of 450 - MWe BGL GCC Power Plants Fueled With Pittsburg No. 8 coal" EPRI TR - 1 00376, project 2525 - 22, final report, November 1992;
D5: "Optimisation of the degree of integration of IGCC design", Farina et al., Power- Gen Europe '98: The Forum for changing power generating industry in Europe, June 9-11, 1998, Milan (IT), pages 343-349;
D8: Abrardo et al., "Oxygen Plants for IGCC", Proc. 7th Inter - Society Cryogenics Symp. 1991, pages 37-42
D20: US-A- 5 901 547 (déposé avec lettre en date du 04.02.2009 par opposante OII et introduit par la division d'opposition en vertu de l'article 114(1) CBE).
b) Document soumis en recours par les opposantes
D21: Article "The 800 MWe PIEMSA IGCC Project" by T.Ubis et al., pages 1 à 9, Gasification Technology Conference, San Francisco, October 8/11, 2000;
III. Requêtes
Les opposantes OI et OII (ci-après requérantes I et II) requièrent l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet Nº 1 223 396.
La titulaire du brevet (ci-après intimée) requiert l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet modifié sur la base des revendications 1 à 11, des colonnes 1 à 7 de la description modifiées et des figures 1 et 2 telles que soumises au cours de la procédure orale.
IV. La revendication 1 selon la requête de l'intimée s'articule comme suit:
"Procédé intégré de séparation d'air pour la production de fluide enrichi en oxygène et éventuellement de fluide enrichi en azote dans une installation comprenant au moins un premier appareil de séparation d'air (1) comprenant au moins deux colonnes de distillation, un premier compresseur d'air (13), une première chambre de combustion (17), une première turbine de détente (19), un deuxième compresseur d'air (15), une deuxième chambre de combustion (23) et une deuxième turbine de détente (25) et un troisième compresseur d'air (21), dans lequel de l'air comprimé est envoyé du premier compresseur d'air à la première chambre de combustion et au premier appareil de séparation d'air, de l'air comprimé est envoyé du deuxième compresseur d'air à la deuxième chambre de combustion et au premier appareil de séparation d'air, de l'air est envoyé du troisième compresseur d'air au premier appareil de séparation d'air, du gaz de combustion (27) est envoyé à la première turbine de détente à partir de la première chambre de combustion, du gaz de combustion (29) est envoyé à la deuxième turbine de détente à partir de la deuxième chambre de combustion et un gaz enrichi en azote (3), éventuellement pressurisé, est envoyé à partir du premier appareil de séparation d'air en amont de la première turbine de détente et/ou en amont de la deuxième turbine de détente et dans lequel au moins 20% du débit d'air traité par le premier appareil de séparation (1) en marche nominale provient du troisième compresseur (21) et en marche réduite par rapport à la marche nominale, le premier appareil de séparation d'air (1) reçoit au moins 80% de son air du troisième compresseur (21) et dans lequel le troisième compresseur (21) n'alimente pas de chambre de combustion et dans lequel de l'air comprimé est fourni à un deuxième appareil de séparation d'air (101), produisant au moins un fluide enrichi en oxygène et éventuellement au moins un fluide enrichi en azote, par au moins un des premiers et deuxième compresseur (13,15) et par le troisième compresseur (21), et un gaz enrichi en azote (103) est envoyé du deuxième appareil de séparation d'air en amont d'une au moins des première et deuxième turbines de détente (19,25)."
V. Dans l'annexe à la citation en procédure orale en date du 11 novembre 2011, la chambre a fait connaître son avis provisoire en ce qui concernait, d'une part, l'admissibilité des moyens de preuve soumis tardivement et, d'autre part, les objections tant d'ordre formel que liées au fond telles qu'avancées par les requérantes I et II.
VI. Les requérantes I et II s'appuient essentiellement sur les arguments suivants:
- Article 84 CBE
Le cas de jurisprudence T 1459/05 s'appliquerait dans la mesure où des caractéristiques, bien qu'issues du jeu de revendications telles que délivrées, seraient d'une part essentielles pour la définition de l'invention et d'autre part vagues et indéterminées. Une objection de défaut de clarté devrait dès lors pouvoir être soulevée du fait que le troisième compresseur ne serait pas suffisamment décrit mais aussi à l'encontre des caractéristiques relatives aux concepts de "marche nominale" et de "marche réduite" non-définis. Dans la description, la distinction entre les deux marches de fonctionnement ne serait établie qu'en termes de production maximale de produits fournis par l'installation, sans pour autant en préciser leur nature exacte ni le seuil quantitatif faisant basculer le mode de fonctionnement entre la marche dite nominale et celle dite réduite.
- Article 100b/83 CBE
En fonction de l'interprétation et du sens donnés aux concepts de "marche nominale" et "marche réduite", l'invention telle que définie dans la revendication 1 ne serait pas suffisamment divulguée au sens de l'article 100b)/83 CBE. Cette objection serait admissible puisque l'opposante OII aurait déjà fait valoir une insuffisance de description devant la première instance à l'encontre de certaines revendications dépendantes telles que délivrées, dont une subsisterait, à savoir la revendication 16 telle que délivrée correspondant à la revendication 9 de la requête de l'intimée.
- Article 123(3) CBE
Une extension du champ de protection serait due au fait que la revendication 1 modifiée couvrirait des modes de réalisation jusque-là non protégés, plus particulièrement un procédé dans lequel les deux ASU recevraient la totalité de leur air par le biais du seul troisième compresseur.
- Article 100a CBE
En guise de remarque préliminaire, l'adjectif "intégré" de la revendication 1 devrait être considéré dans sa signification généralement reconnue dans le domaine, savoir relatif à une installation où l'unité de séparation d'air (ASU) serait intégrée dans le système de production d'énergie électrique comprenant le groupe-turbine. Cette intégration représenterait la solution d'optimisation non seulement la moins couteuse comparée à une modification d'un groupe-turbine mais aussi la seule marche de manoeuvre puisque les groupes-turbines seraient systématiquement optimisés dès la phase de leur conception et jusqu'à leur réalisation. L'intégration indiquerait que soit la totalité de l'air alimentant l'ASU proviendrait du compresseur du groupe-turbine, on parlerait alors d'intégration totale, soit seule une partie de l'air arriverait de ce compresseur, le reste, notamment pour la phase de démarrage, proviendrait d'un autre compresseur, appelé troisième compresseur dans la revendication et en principe équivalent à un compresseur dit dédié dans le domaine, ce cas-ci correspondrait à une intégration partielle.
Un procédé opérant une installation du type à intégration partielle serait connu de D21; on y trouverait non seulement le diagramme de fonctionnement à la dernière page mais aussi l'indication expresse de dédoubler l'unité de séparation d'air ("oxygen plant" dans le texte de D21) et le groupe-turbine ("Power Island / Gas Turbines") aux pages 2 et 4. Chaque ASU serait par ailleurs implicitement également du type à double colonne.
Ainsi D21 divulguerait l'état de la technique le plus proche, puisque dans le cas du dédoublement des ASU et des groupes-turbines, chacun des compresseurs des deux groupes-turbines alimenterait, au vu de la représentation du diagramme (dernière page de D21), chacun des deux ASU.
En outre, l'apport en air pour l'ASU dû aux compresseurs des groupes-turbines étant de 30% (cf. page 4, paragraphe 2.1.4) celui issu des compresseurs dédiés serait par déduction de l'ordre de 70%.
L'unique différence, tant est qu'elle fût réellement distinctive en raison des termes non-définis "marche nominale" et "marche réduite", résiderait alors dans la part supérieure à 80% de l'air arrivant au premier ASU (ASU1) et issu du compresseur dédié en marche réduite du système.
Or, il serait d'usage, notamment lors de la mise en route d'un groupe-turbine et pour insuffisance d'air comprimé produit par son compresseur, d'alimenter l'ASU correspondante par de l'air issu du seul compresseur dédié, c'est-à-dire quasiment 100% de l'air apporté. Une telle phase de démarrage se produirait également dans D21 et satisferait pleinement à la notion de marche réduite. L'homme du métier aboutirait ainsi de manière évidente au procédé revendiqué.
Sinon, l'homme du métier serait également incité par chacun des documents D2, D4 et D5 à procéder au démarrage de l'installation, donc en marche réduite, en alimentant l'ASU par de l'air uniquement issu du compresseur dédié jusqu'au passage à un mode de fonctionnement normal (marche nominale), où l'apport en air issu du compresseur dédié ne représenterait plus qu'un pourcentage réduit d'air issu du compresseur dédié en fonction du degré d'intégration prévu à l'origine.
La quantité d'air provenant du compresseur dédié passerait ainsi nécessairement par la valeur-pallier revendiquée de 80%.
Le procédé revendiqué serait donc dérivable à l'évidence de D21, notamment en considération de l'enseignement contenu dans D2, D4 ou D5.
Selon les écrits, d'autres lignes d'attaque, non-discutées lors de la procédure orale, auraient abouti à la constatation d'un défaut d'activité inventive du procédé selon la revendication 1 telle que maintenue dans la décision contestée par la division d'opposition au vu des combinaisons suivantes (cf. page 4 du mémoire de recours de la requérante I en date du 27 novembre 2009):
- D5 combiné avec les connaissances générales de l'homme du métier;
- l'un des documents D1 à D3 combiné avec les connaissances générales de l'homme du métier ou avec D4;
- D4 combiné avec l'un des documents D1 à D3, D5 ou D8;
- D20 combiné avec D4 ou D5.
VII. L'intimée a présenté pour l'essentiel les arguments suivants:
La définition du procédé revendiqué serait suffisante, claire et n'étendrait pas le champ de protection.
Le procédé satisferait également aux exigences de l'article 56 CBE, puisqu'aucun des documents cités par les requérantes ne divulguerait un procédé pour opérer une installation, dans laquelle la première ASU recevrait, en sus de l'apport d'air fourni par le compresseur du premier groupe-turbine associé et par le compresseur dédié, aussi une quantité d'air issu du compresseur du deuxième groupe-turbine associé à la deuxième ASU. Une telle interconnexion permettrait une souplesse accrue dans le fonctionnement de l'installation; elle ne relèverait d'ailleurs pas non plus d'une démarche normale ou banale pour l'homme du métier.
VIII. La chambre de recours a annoncé sa décision à la fin de la procédure orale qui s'est tenue le 27 mars 2012.
Motifs de la décision
1. Les recours des opposantes OI et OII sont recevables.
2. Objections formelles
2.1 Article 100b)/83 CBE
2.1.1 L'objection soulevée à l'encontre de la revendication dépendante 9 est une tentative de mettre en cause la clarté, puisque l'argument de la requérante repose sur l'existence alléguée d'un exemple particulier de procédé remplissant les critères de la revendication 9 mais qui serait en contradiction avec certaines caractéristiques de la revendication 1. Un défaut de clarté n'étant pas un motif d'opposition selon l'article 100 CBE, il n'y a pas lieu d'examiner le point soulevé ici.
La chambre estime utile de rappeler la distinction entre les exigences des articles 83 et 84 CBE, distinction d'autant plus décisive que le premier article, contrairement au second, est un motif d'opposition. Ainsi, pour corroborer une insuffisance de description au titre de l'article 83 CBE un élément probant consisterait à prouver que le brevet ne contient aucun mode détaillé d'exécution de l'invention, et non point son contraire. Si, dans le cas d'une définition de portée large, un exemple hypothétique et unique de réalisation de l'invention tombait dans le domaine de définition mais était néanmoins contraire à l'invention revendiquée, il serait à l'évidence considéré comme étant à exclure du domaine revendiqué. Une telle situation serait tout au plus à examiner sous l'aspect d'un possible défaut de clarté ou de défaut de support par la description au sens le l'article 84 CBE.
2.1.2 Quant à l'objection à l'encontre de la revendication 1 elle a été nouvellement soulevée en phase de recours. L'admission de cette objection soumise à un stade aussi avancé dans la procédure est laissée à l'appréciation de la chambre par application de l'article 114(2) CBE et de l'article 13(1) RPCR. La chambre estime à cet endroit que les concepts de "marche nominale" et de "marche réduite" sont définis dans le brevet (voir colonne 2, lignes 35 à 50) de manière à permettre l'exécution de l'invention par l'homme du métier. Ainsi, l'insuffisance de description alléguée et basée pour l'essentiel sur ces qualificatifs "marche nominale" et "marche réduite" n'est prima facie ni fondée ni pertinente. En conséquence, cette ligne d'attaque soumise tardivement n'est pas introduite dans la procédure.
2.2 Article 123(3) CBE
La revendication 1 actuelle se compose des revendications 1, 2, 3, 9 et 7 telles que délivrées et dont la combinaison était déjà contenue par référence ou renvoi dans le jeu de revendications du brevet.
Ainsi la revendication 1 de la requête du 10 juin 2010 satisfait aux exigences de l'article 123(3) CBE.
2.3 Article 84 CBE
L'article 84 CBE n'est pas un motif d'opposition et ne trouve de ce fait pas de considération comme établi dans la jurisprudence constante des chambres de recours.
Les requérantes I et II ont fait valoir que le principe établi dans la décision T 1459/05 s'appliquait dans le cas à juger pour justifier ainsi leur objection relative à un défaut de clarté à l'encontre de la revendication 1 et plus précisément de certaines caractéristiques nouvellement intégrées dans la revendication 1.
Les caractéristiques incriminées sont celles, qui ont introduit les concepts de marche nominale et de marche réduite déjà contenues dans les revendications dépendantes 2 et 3 telles que délivrées.
La chambre ne peut suivre les requérantes sur cette voie dans la mesure où le cas d'exception décrit dans T 1459/05 ne s'applique pas dans le cas d'espèce, tout d'abord, parce que les deux modes de fonctionnement (marche nominale, marche réduite) sont - même si très sommairement - définis dans la description, voir paragraphe [0014]. Ensuite, comme il apparaitra dans la suite de la présente décision, le procédé revendiqué se distingue encore de l'état de la technique le plus proche par d'autres caractéristiques, à savoir celles de la revendication dépendante 7 introduisant la deuxième ASU et son interconnexion avec le groupe-turbine associé à la première ASU.
3. Article 100a CBE
3.1 Définition du procédé revendication
Le procédé revendiqué concerne une installation comprenant deux unités intégrées de séparation d'air, - appelées ci-après ASU1 et ASU2 -, et au moins deux trains de turbines ou encore groupes-turbines destinés à la production d'électricité, - appelés ci-après GT1 et GT2. Chaque groupe-turbine comprend au moins un compresseur d'air délivrant de l'air comprimé à une chambre de combustion ainsi qu'à l'ASU respective, la chambre de combustion et une turbine de détente productrice d'électricité.
Le procédé selon la revendication 1 définit par ailleurs un lien matériel et fonctionnel entre les deux groupes ASU-GT puisque de l'air comprimé est envoyé au premier appareil de séparation d'air du premier compresseur d'air, du deuxième compresseur d'air et du troisième compresseur (appelé compresseur dédié dans cette décision).
3.2 Document D21
Le document D21 a été soumis pour la première fois avec le mémoire de recours de l'opposante OII.
Au vu de sa pertinence évidente pour l'objet revendiqué dans la revendication 1 telle que modifiée par l'intimée, la chambre a décidé d'intégrer cet état de la technique dans la procédure et de prendre dûment compte de son contenu technique (article 114(1) CBE).
Dans le diagramme en dernière page de D21 représentant schématiquement l'agencement des différents composants industriels d'un projet de centrale électrique ("800 MWe Piemsa IGCC"), sont indiquées des lignes d'alimentation en fluide. Ces lignes, également schématisées, n'ont pour fonction que de signaler la direction des flux de fluides d'un poste de travail à l'autre mais ne sauraient être comprises comme des illustrations d'éléments matériels de tuyauterie ou de conduites.
Par ailleurs, D21 expose un mode de réalisation, cf. page 2, point 2, et page 4, points 2.1.4 et 2.2, sous la forme d'une installation comprenant deux unités de séparation d'air ("oxygen plant") jumelées avec deux groupes-turbines (partie du "power island" dans le texte ou "combined cycle plant" dans le schéma).
Ainsi, les considérations faites pour le diagramme en dernière page de D21 s'appliquant aussi au cas particulier d'un dédoublement des unités ASU et des groupes-turbines, aucun enseignement ne peut être déduit de la ligne unique signalant le transfert d'air comprimé ("Compressed Air" sur le schéma) du bloc "combined cycle plant" vers le bloc "oxygen plant".
Du moins, l'homme du métier n'aurait eu aucune raison d'en déduire la présence d'une seule conduite de tuyauterie pour alimenter chacune des ASU par les deux compresseurs des deux groupes-turbines.
Ainsi, la chambre est arrivée à la conclusion que D21 ne divulgue que deux trains ASU-GT agencés strictement en parallèle, c'est-à-dire sans aucune interrelation fonctionnelle et sans la mise en commun d'un produit quelconque présent sur le site.
Ces conclusions s'appliquent à l'identique aux deux lignes représentant schématiquement la fourniture d'air par le compresseur de la turbine d'une part et par un compresseur auxiliaire d'autre part.
Par conséquent, la caractéristique de la revendication 1 définissant la relation en pourcentage des flux d'air envoyés du compresseur d'un groupe-turbine vers l'unité ASU associée constitue une différence supplémentaire par rapport au procédé dérivable de D21.
3.3 L'interaction fonctionnelle définie par ces caractéristiques distinctives apporte une souplesse de fonctionnement du premier dispositif ASU1-GT1 en termes de variabilité de son degré d'intégration, et donc, en finalité, une flexibilité du mode opératoire pour l'installation dans son ensemble, cf. paragraphe [0006] du brevet. Cette souplesse peut notamment se traduire par le maintien voire l'augmentation de la charge appliquée à la première unité ASU1 par le biais du flux d'air additionnel provenant du compresseur du deuxième groupe-turbine GT2, et ceci en réduisant/modulant simultanément la quantité d'air comprimé fourni par le compresseur dédié à l'ASU1.
3.4 Ni D21 ni les autres documents cités ne divulguent un procédé intégré dans lequel une unité de séparation d'air reçoit trois flux d'air comprimé, deux provenant des compresseurs de deux groupes-turbines et le troisième d'un compresseur dédié.
Les procédés divulgués dans D4 (voir page 2-1 en combinaison avec la figure 3-1) et D5 (voir page 345) concernent tous les deux une installation comprenant deux groupes-turbines dont les compresseurs alimentent une seule unité de séparation d'air associée. Si l'homme du métier appliquait cet enseignement à l'installation connue de D21, il dédoublerait l'ensemble-turbine en prévoyant deux groupes-turbines dédiés à chaque ASU. Par cet amendement, ne serait néanmoins pas obtenue une alimentation d'une première ASU en air comprimé en provenance du compresseur d'un groupe-turbine associé à une deuxième ASU. Aucune interconnexion entre les deux installations agencées en parallèle ne serait de fait réalisée et le procédé obtenu par la combinaison de D21 avec D4 ou D5 n'aboutirait donc pas à l'objet de la revendication 1.
Par ailleurs, le document D2 traite pour le modèle intégré illustré à la figure 7, page 301, de la fluctuation en pourcentage de la part d'air comprimé apportée à l'ASU par le compresseur du groupe-turbine et par le compresseur dédié, voir page 304, partie intitulée "Partial Air Integration Operation for High Efficiency". On y aborde les avantages d'une variabilité du degré d'intégration d'une ASU qui s'illustre pour la phase de démarrage ("ramp up") ou de mise à l'arrêt ("ramp down") par l'alimentation de l'ASU en air comprimé uniquement issu du compresseur dédié, - situation d'intégration quasi-nulle-, et pour un mode de fonctionnement régulier ou nominal par un apport très largement majoritaire d'air en provenance du compresseur du groupe-turbine associé à l'ASU, - situation d'intégration partielle -.
Mais même si D2 pouvait inciter l'homme du métier à appliquer ces mesures à l'installation connue de D21, le rapport des pourcentages revendiqué par la marche nominale et réduite n'en serait pas pour autant dérivable puisqu'il manquerait encore l'interconnexion entre le compresseur du deuxième groupe-turbine avec l'ASU1.
En conclusion, le procédé selon la revendication 1 ne découle pas à l'évidence sur la base de l'état de la technique le plus proche représenté par D21.
3.5 Autres lignes d'argumentaire
Dans les écrits, les autres combinaisons ont été en grande partie simplement citées, sans développement détaillé sur la base de l'approche problème-solution, et si elles l'ont été, alors de façon très succincte.
En fait, ces lignes d'argumentaire en matière d'activité inventive avaient été dirigées vers la revendication 1 telle que maintenue par la décision de la première instance. Elles n'ont pas été expressément réitérées à l'encontre de la revendication 1 modifiée par l'intimée en recours et n'ont par ailleurs pas fait l'objet de discussion lors de la procédure orale devant la chambre.
Dans les faits, aucune de ces attaques n'est convaincante, d'autant que la revendication modifiée comprend de nouvelles caractéristiques introduisant la notion d'une deuxième ASU.
Ainsi, comme vu précédemment, D5 divulgue une installation ne comprenant qu'une seule ASU. Quant aux connaissances générales de l'homme du métier, elles ne sauraient le conduire, du moins sans connaissance préalable de l'invention, à planifier une deuxième ASU associée à un groupe-turbine dédié, dont le compresseur alimenterait également la première ASU.
Les documents D1 à D3 traitent d'un procédé intégré pour des installations comprenant une ASU et sont ainsi nettement moins pertinents que D21 pour définir l'état de la technique le plus proche. Ni l'application des connaissances générales de l'homme du métier ni une hypothétique combinaison de l'un de ces documents avec D4 ne saurait donc conduire de manière évidente au procédé revendiqué.
Quant à l'attaque basée sur le document D4 pris en combinaison avec l'un des documents D1 à D3, D5 ou D8, elle n'est point pertinente dans la mesure où aucune installation connues de ces documents ne présente deux ASU interconnectées.
La même conclusion s'impose par analogie à la combinaison du document D20 avec l'un des documents D4 et D5.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré avec l'ordre de maintenir le brevet modifié sur la base des documents modifiés suivants déposés pendant la procédure orale:
Description: colonnes 1 à 7
Revendications: 1 à 11
Figures: 1 et 2