European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2009:T112107.20090604 | ||||||||
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Date de la décision : | 04 Juin 2009 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1121/07 | ||||||||
Numéro de la demande : | 00420263.6 | ||||||||
Classe de la CIB : | C22C 21/16 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Elément de structure d'avion en alliage Al-Cu-Mg | ||||||||
Nom du demandeur : | ALCAN RHENALU | ||||||||
Nom de l'opposant : | Corus Aluminium Walzprodukte GmbH Alcoa Inc. |
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Chambre : | 3.2.08 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive (non) | ||||||||
Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le brevet européen nº1 114 877 avait été contesté dans sa totalité par les opposants OI Corus Aluminium Walzprodukte GmbH et OII Alcoa Inc. sur la base de l'Article 100 a) CBE (absence de nouveauté et d'activité inventive).
II. Par décision signifiée par voie postale le 15 juin 2007, la division d'opposition a révoqué le brevet. La division d'opposition a notamment estimé que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale et selon les 1**(ère) et 2**(ème)requêtes subsidiaires n'est pas nouveau (Article 100 a) CBE). Dans le cas où la nouveauté de l'objet revendiqué serait reconnue, la division d'opposition a indiqué que cet objet n'implique pas d'activité inventive.
III. Le titulaire a formé un recours contre cette décision et payé la taxe de recours le 11 juillet 2007. Le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 24 octobre 2007.
IV. Une procédure orale s'est tenue le 4 juin 2009, au cours de laquelle les parties ont cité les documents suivants :
D1: US-A-5 593 516 = E2 ;
D10: EP-B-0 829 552 (D10a: EP-A-0 829 552) ;
D12: List of Temper Descriptions EN 515, pages 1 à 5 ;
E4: W. A. Cassada and M. F. Bartholomeusz: "The Effect of Cu and Mg Content on Mechanical Properties of Al-Cu-Mg Alloys with and without Ag Additions", Materials Science Forum Vols. 217-222, (1996), pages 1765 à 1770 ;
E5: Aluminum standards and data 1997, The Aluminum Association, Table 3.1, page 3-2, October 1996 ;
E6: Military Handbook, Metallic Materials and Elements for Aerospace Vehicle Structures, MIL-HDBK-5H, 1. December-1998, pages 3-72, 3--56, 3-166, 3-168 ;
E7: Airframe Structural Design by M Chun-Yung Niu Conmilit Press Ltd., 1998, Fourth printing January 1990, ISBN No.: 962-7 128-04-X, pages 261, 262, 268 ;
X1-X3: Exemples complémentaires, soumis par le titulaire le 24 octobre 2007 ;
X5: Corrosion of Aluminum and Aluminum Alloys, Edited by J. R. Davis, ASM International, The Materials Information Society, Second printing November 2000, Chapter 4: Intergranular and Exfoliation Corrosion, pages 63 à 67; et
D13: Designation: E 399 - 90 (Reapproved 1997) Standard Test Method for Plane Strain Fracture Toughness of Metallic Materials, pages 431 à 440, soumis par l'opposante OII lors de la procédure orale.
V. A la fin de la procédure orale, les requêtes des parties étaient les suivantes :
Le requérant (titulaire) a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet
- sur base de la requête principale, déposée avec la lettre en date du 23 octobre 2007
ou, à titre subsidiaire,
- sur base de la requête auxiliaire nº 1, déposée à la même date, ou
- de la requête auxiliaire nº 2, déposée avec la lettre en date du 4 mai 2009, ou
- de la requête auxiliaire nº 3, déposée en date du 23 octobre 2007, ou
- de la requête auxiliaire nº 4, déposée en cours de la procédure orale le 4 juin 2009.
Les intimés (opposant OI et OII) ont demandé le rejet du recours.
VI. La revendication indépendante de la requête principale se lit comme suit:
"1. Elément de structure d'avion, notamment un élément d'intrados d'aile d'avion, réalisé à partir d'un produit laminé, filé ou forgé, en alliage de composition (% en poids) :
Cu: 4,6 - 5,3 Mg: 0,20 - 0,40 Mn: 0,25 - 0,45
Si < 0,10 Fe < 0,15 Zn < 0,20 Cr < 0,10
autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total,
reste Al, traité par mise en solution, trempe, détensionnement par traction contrôlée à plus de 1,5% de déformation permanente et revenu."
La revendication 1 respective des requêtes auxiliaires 1 à 3 se distingue de la revendication 1 selon la requête principale en ce que le libellé respectif (imprimé en caractères gras - ajout par la chambre) est rédigé comme suit:
Revendication 1 de la requête auxiliaire nº 1 :
"1. Elément de structure d'avion...à partir d'un tôle à l'état T851... et revenu."
Revendication 1 de la requête auxiliaire nº 2:
"1. Elément de structure ... revenu, caractérisé en ce qu' il fait partie d'un intrados d'aile d'avion, et caractérisé en ce que la peau et les raidisseurs sont obtenus par usinage d'un même produit de départ."
Revendication 1 de la requête auxiliaire nº 3:
"1. Elément de structure d'avion, ...Cu: > 4,9 - 5,3 Mg: 0,20 - 0,40 ... et revenu."
Revendication 1 de la requête auxiliaire nº 4 :
"1. Elément de structure d'avion, ... à partir d'une tôle à l'état T851, en alliage de composition (% en poids) : Cu: >4,9 - 5,3 Mg: 0,20 - 0,40 ....et revenu, caractérisé en ce qu' il fait partie d'un intrados d'aile d'avion, et caractérisé en ce que la peau et les raidisseurs sont obtenus par l'usinage d'un même produit de départ."
VII. A l'appui de ses requêtes, le requérant a développé pour l'essentiel l'argumentation suivante:
Concernant la requête principale:
Les documents D1 et E4, en tant qu'état de la technique le plus proche, concernent tous deux la fabrication de composants destinés à l'industrie aéronautique, en alliage AlCuMg, par laminage à chaud, mise en solution, trempe, étirage permanent et vieillissement. Par rapport aux larges plages de l'alliage connu par D1, la composition de l'alliage AlCuMgMn revendiqué représente un choix restreint qui, face à l'alliage AA2024 à l'état T351, présente un meilleur profil de propriétés pour les composants qui en sont issus et qui sont destinés à l'industrie aéronautique.
Dans D1, tableau 1, on constate que les plages "A", "B" et "C" de l'alliage Al-Cu-Mg connu, qui sont qualifiées de préférées dans D1, figure 1, contiennent encore toutes de 0,10 à 1,00 % d'Ag. C'est déjà en cela que l'objet de la revendication se distingue, en particulier, de la plage "A", à laquelle appartiennent les teneurs en Cu-Mg de la composition d'alliage revendiquée. De plus, les alliages préférés "A", "B" et "C" selon D1, tableau 1, contiennent encore tous obligatoirement des teneurs en V et Zr, qui sont cependant exclues de l'alliage revendiqué. En revanche, l'alliage revendiqué ne contient que Mn comme agent contrôlant la croissance du grain et comme élément anti-recristallisant.
Aucun des exemples cités au tableau 2 ne recoupe la plage revendiquée pour l'alliage. Les composants fabriqués avec l'alliage AlCuMgMn revendiqué se caractérisent par une ténacité supérieure et une résistance plus élevée à la corrosion intercristalline. Les documents D1 et E4 n'évoquent aucunement la résistance - à la corrosion en général et à la corrosion intercristalline en particulier - des alliages qu'ils citent.
Partant de l'enseignement de D1, le but de l'invention selon le brevet est de fournir une composition d'alliage présentant, de façon optimale, les propriétés physiques et chimiques citées aux paragraphes [0015], [0016] et [0018] du fascicule. Ce but est atteint avec succès grâce à l'alliage AlCuMgMn cité à la revendication 1. Comme le prouvent les exemples du brevet, ainsi que les exemples complémentaires cités dans les documents X1 et X2, les composants revendiqués présentent un meilleur compromis ténacité/résistance mécanique, ainsi qu'une résistance plus élevée à la corrosion intercristalline de type I+P. Rien n'indique, dans D1 ou E4, qu'il convienne de choisir l'alliage AlCuMgMn revendiqué pour résoudre le problème posé.
Concernant les 1**(ère) et 3**(ième) requêtes auxiliaires :
La limitation supplémentaire de la teneur en Cu, de > 4,9 permet d'améliorer encore le compromis ténacité/résistance mécanique, comme l'illustrent les exemples G et H de X2. Par ailleurs, aucun des documents D1 et E4 n'évoque l'état T851, qui permet une meilleure mise en forme du galbe de l'intrados (voir paragraphe [0029] du brevet).
Concernant les 2**(ième) et 4**(ième) requêtes auxiliaires :
A partir de l'alliage Al revendiqué, on peut fabriquer des tôles épaisses présentant des propriétés homogènes sur toute leur épaisseur, ce qui permet de mettre en oeuvre des techniques de fabrication modernes, telles que l'usinage intégral dans la masse de l'ensemble peau-raidisseur. Dans D1 et E4, en revanche, seules des tôles fines sont produites, ce qui ne permet aucun usinage intégral.
Aucun des documents D1 et E4 n'indique clairement quelle composition particulière d'alliage et quel traitement thermique permettent d'obtenir avec succès la combinaison de propriétés optimales indiquée. Il existe donc une activité inventive.
VIII. Les intimés ont réfuté l'argumentation du requérant en faisant valoir pour l'essentiel ce qui suit :
La fabrication de composants en alliages AlCuMg du type revendiqué, destinés à l'industrie aéronautique, est connue graçe aux documents D1 et E4. Ces deux documents indiquent sans équivoque que l'alliage connu, outre l'enseignement général, peut également être produit avec et sans teneur en argent, dans les plages préférées "A", "B" et "C". Les plages de l'alliage revendiqué recoupent la gamme de valeurs désignée dans D1 comme la plage préférée "A". De plus, le tableau 2 indique, comme exemples d'alliages 3 et 4, des mélanges contenant ou non de l'argent et justifie l'ajout facultatif d'Ag. Le traitement thermique cité dans le brevet est ordinaire, pour les composants en alliage d'aluminium utilisés dans l'industrie aéronautique, tout comme l'usinage intégral dans la masse, qui représente une technique de fabrication moderne et habituelle. Aucune des revendications selon la requête principale ou l'une des requêtes auxiliaires nsº 1 à 3 ne contient de caractéristiques techniques impliquant une activité inventive.
La requête auxiliaire nº 4 a été présentée trop tard et ne contient aucune caractéristique technique allant au-delà de celles des revendications des requêtes auxiliaires nsº 1 à 3. Il convient donc de rejeter la requête auxiliaire nº 4.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Le brevet en cause
Le problème posé dans le brevet en cause au paragraphe [0018] est de fournir des éléments de structure d'avion, notamment des éléments d'intrados. Les éléments doivent présenter des propriétés au moins équivalentes à celles des mêmes éléments réalisés en alliage AA2024 à l'état T351 en ce qui concerne les caractéristiques mécaniques statiques, la ténacité, la vitesse de propagation de fissures et la résistance à la corrosion. Selon le paragraphe [0020] du brevet, l'une au moins des propriétés suivantes doit être satisfaite:
- limite élastique R02(sens TL) > 350 MPa,
de préférence > 370 MPa ;
- ténacité K1c(sens L-T) > 42 MPa?m
- résistance à la corrosion intercristalline de type P selon la norme ASTM G110.
Ce problème est résolu par des éléments de structure d'avion, objets de la revendication 1 de la requête principale, réalisés à partir d'un produit laminé, filé ou forgé en alliage 4,6-5,3% Cu, 0,2-0,4% Mg, 0,25-0,45% Mn, <0,10% Si, < 0,15% Fe, < 0,20% Zn, < 0,10% Cr, autres éléments < 0,05% chacun et < 0,15% au total, reste Al à l'état traité par mise en solution, trempe, détensionnement par traction contrôlée à plus de 1,5% de déformation permanente et revenu.
3. Etat de la technique le plus proche ; activité inventive :
3.1 Tout comme le brevet en cause, le document D1 concerne la fabrication de produits laminés, forgés ou extrudés (forgings, plates, sheets, extrusions) à partir d'un alliage AlCuMg traité thermiquement présentant une résistance élevée, une bonne tolérance aux dommages et une ténacité améliorée, et qui est donc adapté à la fabrication de composants destinés à l'industrie aéronautique (voir D1, colonne 1, lignes 38 à 45 ; colonne 2, lignes 34 à 48 ; colonne 6, lignes 32 à 46 ; colonne 8, lignes 27 à 29). Les informations techniques sensiblement identiques de D1 ont également été publiées par les auteurs de D1 dans le document E4, dans lequel les propriétés mécaniques d'un alliage Al-5Cu-0,5Mg-0,5Mn, respectivement avec et sans addition d'argent, ont été examinées et décrites (voir p.ex. abrégé d'E4). Chacun de ces deux documents, dont le contenu est complémentaire, peut donc être considéré comme l'état de la technique le plus proche.
Le tableau suivant montre une comparaison des compositions de l'alliage AlMgCu selon le brevet et de celui selon D1 (voir revendications 1, 4, 5, 6, 12, colonne 3, lignes 20 à 51, colonne 6, lignes 3 à 31) :
Elément Brevet en cause D1 D1,
rev. 1 (% en poids) (rev. 12) exemple 3
| Cu | 4,6 - 5,3 | 3,85 - 5,5 | 5,06 |
| | | | |
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| Mg | 0,2 - 0,4 | 0,1 - 0.8 | 0,53 |
| | | | |
| | | | |
|Mn préf. Zr V |0,25- 0,45 max|<= 0,8 (*)|0,49 0,14 0,13|
|Ti |. 0,05 max. 0,0|(**) 0,001-0,4|- |
| |5 max. 0,05 |5 (**) 0,001| |
| | |-0,12 (*)(**) 0| |
| | |,001-0,12 (*)(*| |
| | |*) <= 0,05 | |
| | | (**) | |
| | | | |
| Si | < 0,10 |<= 0,06 | 0,04 |
| | |(**) | |
| | | | |
| Fe | < 0,15 |<= 0,08 | 0,05 |
| | |(**) | |
| | | | |
| Zn | < 0,20 | | |
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| | | | |
| Cr | < 0,10 | | |
| | | | |
| | | | |
| autres | < 0,05 | | |
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| total | < 0,15 | | |
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| Ag | - |0,10-1,0 | - |
| | |(**) | |
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| Al | reste | reste | reste |
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(*) un ou plusieurs; (**) version préférée; voir D1, col. 3, l. 26 à 42; col. 6, l. 23 à 31
Selon un mode de réalisation préféré, l'alliage connu par D1 peut contenir, en outre, de 0,10 à 1,0 % d'argent. On recourt à cette possibilité lorsqu'un écrouissage à froid de 4 à 8% avant le revenu n'est pas possible, par exemple pour des raisons liées aux techniques de fabrication, ou doit être évité. Cependant, l'addition d'argent n'a pratiquement aucune incidence sur les propriétés mécaniques de l'alliage. Contrairement à ce qu'estime le requérant, le caractère optionnel de l'ajout de l'argent peut être déduit de nombreux passages de la description et notamment, également, du fait que les revendications 1 à 14 de D1 visent exclusivement des alliages sans argent (cf. également D1, colonne 2, lignes 25, 26, 34 à 37 et 52 à 59; colonne 3, lignes 26 à 28; colonne 5, lignes 31 à 41, colonne 8, lignes 19 à 22). Il en est de même pour l'enseignement de E4, qui examine des alliages AlCuMgMn avec et sans argent.
3.2 La comparaison ci-dessus permet de constater que la composition de l'alliage Al revendiqué se situe à l'intérieur de la plage de l'alliage connu par D1. Outre les indications concernant la plage, dans l'alliage de D1, les teneurs en Cu et Mg sont mesurées de telle sorte qu'elles soient aussi proches que possible de la limite de solubilité, sans toutefois la franchir (cf. D1, colonne 4, lignes 19 à 20). On obtient ainsi une ténacité plus élevée et il ne se forme qu'un très faible pourcentage volumique de phases secondaires (VPSP) insolubles, qui peuvent affecter les propriétés du produit (voir D1, colonne 3, lignes 51 à 57 ; colonne 5, lignes 16 à 22). Afin de ne franchir en aucun cas la limite de solubilité et pour tenir compte des variations de température qui interviennent lors de la fabrication et dans le four de traitement thermique, D1 recommande par conséquent un ajustement précis des teneurs en Cu et Mg les unes par rapport aux autres, conformément à la formule (2)
Cupréféré = 0.91(Mg) + 5.2
et à ce qui est décrit, à la figure 1, comme la "composition préférée d'alliage" (voir D1, figure 1 ; revendication 7 ; colonne 3, lignes 51 à 57 ; colonne 4, lignes 38 à 48). Comme on le constate dans la représentation comparée X3, page 2/2, déposée par le requérant, cet ajustement préféré des teneurs en Cu-Mg de l'alliage connu par D1, pour la plage "A", qui présente les valeurs de ténacité les plus élevées, se situe en plein milieu de la plage revendiquée pour Cu et Mg. Pour ce qui est de la mesure des teneurs en Cu et Mg de la composition d'alliage revendiquée, il n'existe donc pas de différence, justifiant l'existence d'une activité inventive, avec l'enseignement de D1.
3.3 Il pourrait être considéré qu'il existe une différence avec l'état de la technique D1 en ce que l'alliage revendiqué se limite à l'ajout de manganèse, en tant qu'unique addition de dispersoïde (élément anti-recristallisant), dans la plage de 0,25 à 0,45%, et en ce qu'il ne contient pas de teneur importante en Zr et/ou vanadium (< 0,05%) (cf. également à ce sujet le paragraphe [0025] du fascicule de brevet). Par contre, les modes de réalisation préférés de l'alliage connu, cités dans D1, tableau 1, ainsi que les exemples relatifs aux plages préférées A, B et C contiennent tous au moins de 0,05 à 0,15 % Zr et de 0,05 à 0,15% V, comme agents contrôlant la croissance du grain.
Le brevet lui-même ne contient aucune donnée comparative pouvant prouver que l'effet du Mn est supérieur à celui du Zr et/ou du V. Les essais comparatifs des documents X1 et X2, présentés par le titulaire du brevet, n' apportent rien à ce sujet. Les alliages Q et R de X1, contiennent 0.34% Ag et 0.35% Ag, respectivement, un composant qui est exclu de la composition d'alliage définie par la revendication 1. Par conséquent, les alliage Q et R ne tombent pas dans la portée de protection de la revendication 1. De plus on observe la formation de corrosion intercristalline pour les deux alliages Q et R. Quant aux alliages complémentaires G et H de X2, les contenus en manganèse (0,342% et 0,345%) sont presque identiques, et les effets sur les caractéristiques mécaniques et la ténacité observés des alliages G et H ne sont attribués qu'aux différences des teneurs en cuivre et en magnésium.
Le document D1 mentionne l'addition d'au moins une des éléments Zr, V et Mn permettant de limiter la croissance du grain et leur effet sur l'écrouissage à chaud, et en traite d'une façon générale qui laisse penser à l'homme du métier que ces trois éléments peuvent être considérés comme sensiblement équivalents (cf. D1, colonne 5, lignes 42 à 49). Il est cependant précisé, à la colonne 5, lignes 57 à 64 et à la colonne 6, lignes 3 à 6, que du manganèse peut être ajouté à l'alliage AlCuMg pour servir d'agent affinateur du grain, en plus de Zr et/ou V ou à la place de ceux-ci. Il est cependant signalé que Mn améliore certes la structure du grain, mais qu'il peut également favoriser la formation de phases secondaires, ce qui peut affecter négativement la ténacité. C'est pour cette raison que D1 recommande de prévoir une teneur en manganèse de préférence comprise entre 0,001 et 0,45%, la limite supérieure de 0,45% correspondant à celle de la plage de Mn revendiquée. Il ne saurait donc être considéré que, à partir de l'enseignement de D1, l'ajout à l'alliage AlCuMg connu, dans la quantité revendiquée, soit de Mn, de V ou de Zr, pris isolément ou ensemble, soit - comme pour l'alliage du brevet en cause - exclusivement de Mn en remplacement de Zr et/ou de V, pour servir d'agent recristallisant et contrôlant la croissance du grain, implique une activité inventive. En définitive, la composition d'alliage revendiquée ne fait que matérialiser une possibilité déjà évoquée dans D1 ainsi que dans l'abrégé de E4.
De plus, il est connu par D1, colonne 6, lignes 18 à 31, que les impuretés causées par la fabrication, dans l'alliage connu, doivent être respectivement inférieures à 0,05% et que leur quantité totale ne doit pas dépasser 0,15%. Pour le fer et le Si, en particulier, les valeurs maximales préférées sont 0,08% Fe et 0,06% Si, afin d'éviter toute incidence négative sur la ténacité. De ce point de vue également, l'alliage du brevet en cause correspond à l'enseignement de D1.
Il en est de même pour le traitement thermique revendiqué, qui comprend une mise en solution, une trempe, un étirage permanent de plus de 1,5% et un vieillissement (revenu). A la colonne 7, lignes 9 à 30, D1 décrit ces étapes, et D1 établit une différence entre une déformation permanente de 1% à l'état T651 et une déformation de 7% à l'état T87.
3.4 Les propriétés mécaniques des deux alliages ne sauraient être directement comparées les unes aux autres, car aucun des exemples donnés au tableau 2 de D1 n'est complètement couvert par la plage d'alliage revendiquée. Il convient cependant de constater que la composition de l'exemple 3 du tableau 2 de D1, même si elle présente des teneurs en Mn (0,49%) et Mg (0,53%) légèrement supérieures à celles de l'alliage revendiqué, ainsi que 0,13% V et 0,14% Zr comme affinateur du grain, autorise malgré tout une certaine comparaison avec les propriétés mécaniques de l'alliage selon le brevet (cf. à ce sujet D1, tableau 3). L'exemple 3 de D1 se trouve également dans E4, tableau 1 sous la forme de l'"alliage 2" (la teneur en Cu de 5,26% semble être une erreur d'impression ; normalement, elle devrait être de 5,06%, tous autres éléments de la composition étant semblables). Comme on peut le lire dans E4, tableau 2, l'alliage 2 (état T87 correspondant à 7% de déformation permanente avant revenu) permet d'obtenir une limite d'élasticité R02(sens TL) de 461,4 MPa, qui est nettement supérieure à la valeur minimale préférée de 370 MPa citée au paragraphe [0020] du fascicule de brevet.
En ce qui concerne la ténacité, le document E4 signale, page 1766 dernier paragraphe, qu'aucune valeur fiable de ténacité n'a pu être mesurée, en raison des dimensions inadaptées des éprouvettes. Pour autant, les indications fournies dans E4, tableau 3, pour l'alliage 2 état T87 (correspondant à l'exemple 3 de D1) avec des valeurs de K1c(sens L-T) = 46,9 MPa?m, donnent lieu de supposer que les valeurs de ténacité que vise le brevet (K1c(sens L-T) > 42 MPa?m) pourraient tout autant être atteintes avec les alliages connus par D1 et/ou E4. Il convient de noter, dans ce contexte, que la pertinence des valeurs de ténacité mesurées selon le fascicule du brevet est discutable, car les dimensions d'éprouvettes choisies ne correspondent manifestement pas à la norme ASTM E399 (cf. D13, page 435, point 7.1.1). Le titulaire du brevet, lors de la procédure orale, n'a pas été en mesure de réfuter de façon crédible cet état de fait, signalé par l'intimé OII. D13 a été admis dans la procédure par la Chambre car il explique la norme E 399 citée dans le brevet, et ne représente donc pas un nouvel état de la technique.
Ni D1 ni E4 ne fournissent d'indications sur la résistance à la corrosion intercristalline de type P selon la norme ASTM G110. Il y aurait néanmoins lieu de supposer que des composants en alliages se situant dans la plage "A" de D1 présentent d'aussi bonnes propriétés de résistance à la corrosion que les composants revendiqués. Etant donné que la composition et le traitement thermique des alliages connus par D1 et tels que revendiqués sont en grande partie identiques, ou sont extrêmement proches, on peut s'attendre à une résistance comparable à la corrosion intercristalline. Trouver, par des essais comparatifs, quelle composition d'alliage en Al permet d'aboutir à terme, p.ex. à l'intérieur de la plage "A" connue par D1, à une amélioration de la résistance à la corrosion intercristalline, venant s'ajouter à une meilleure ténacité, doit être considéré comme une opération de routine pour l'homme du métier, d'autant plus que ce dernier sait, par le document X5, page 64, colonne de droite (Prevention of IGC), que certains éléments d'alliage, comme Cu et Mg, ainsi qu'une augmentation des parts de phases secondaires insolubles (VSPS) peuvent affecter négativement la tenue à la corrosion et doivent donc être évités, comme le signalent déjà D1 et/ou E4.
Il est ainsi satisfait à l'exigence, formulée au paragraphe [0020] du brevet, selon laquelle les éléments de construction revendiqués doivent présenter au moins l'une des trois propriétés citées, exigence qui ne constitue pas une caractéristique technique de la revendication 1 de la requête principale.
3.5 Il découle de ce qui précède que l'objet de la revendication 1 de la requête principale ne contient pas de caractéristiques techniques pouvant justifier une activité inventive par rapport à l'enseignement de D1.
4. Requêtes auxiliaires nsº 1 à 3 :
4.1 La caractéristique supplémentaire contenue dans la revendication 1 de la 1**(ère)requête auxiliaire "d'une tôle à l'état T851", pour laquelle est prévu un détensionnement par traction contrôlée de 1,5 à 3 % de déformation permanente n'implique pas d'activité inventive. D'une part, il s'agit d'un traitement standard pour la fabrication de tôles en alliage AA2XXX et/ou AA2024 (cf. E5, tableau 3.1) ; d'autre part, cette opération est même expressément prescrite, dans l'industrie aéronautique, pour les composants qui sont fabriqués dans ce matériau (cf. E6, tableau 3.2.3.0: AA2024 plate; 3.2.6.0b; 3.2.7.0b1).
4.2 La caractéristique supplémentaire, dans la revendication 1 de la 2**(ième) requête auxiliaire, concerne l'usinage intégral dans la masse de l'ensemble peau-raidisseur, partie d'un intrados d'aile. Comme l'énonce le brevet lui-même, au paragraphe [0015], ce mode de fabrication représente une technique habituellement utilisée, à la date de priorité, dans l'industrie aéronautique. Dans ce contexte, il est également fait référence au document E7 "Airframe Structural Design", p.ex. figure 8.3.10 a) et b): 1.1 Integral blade section (widely used), Integral Z-section, Figure 8.3.11: Integrally stiffened panels; Figure 8.3.25: BAC 111 Integral 2024-T4 rib web; 23 inches.
Les caractéristiques additionnelles selon la revendication 1 des 1**(ière) et 2**(ième) requêtes auxiliaires sont donc usuelles dans l'industrie aéronautique, et n'impliquent pas d'activité inventive.
4.3 Selon la revendication 1 de la 3**(ième) requête auxiliaire, les plages de Cu et Mg sont encore rétrécies. Comme on le constate cependant dans la représentation comparée du document X3, page 2/2, l'alliage de base AlCuMg préféré décrit dans D1, sur la ligne Cupreferred = 0.91(Mg) + 5.2 se situe encore dans la plage Cu/Mg revendiquée. Dans cette partie au moins, les plages de Cu et Mg restreintes ne décrivent rien d'autre que ce qui est déjà connu par D1.
4.4 Pour cette raison, la revendication 1 des requêtes auxiliaires nsº 1, 2 et 3 n'est pas non plus acceptable faute d'activité inventive de son objet.
5. La revendication 1 de la 4**(ième) requête auxiliaire a été présentée par le requérant au cours de la procédure orale. Le seul fait que la requête a été déposée à un stade aussi avancé autorise la Chambre à la rejeter pour présentation tardive. En ce qui concerne les caractéristiques techniques, la revendication 1 de la 4**(ième) requête auxiliaire constitue la somme de tous les éléments de la revendication 1 des requêtes auxiliaires nsº 1 à 3 et ne contient donc aucun objet nouveau. Comme exposé ci-dessus, aucune des caractéristiques citées dans les requêtes auxiliaires nsº 1 à 3 n'est toutefois susceptible d'impliquer une activité inventive. Pour ces deux motifs, la Chambre a décidé de ne pas admettre la 4**(ième) requête auxiliaire dans la procédure.
6. Au vu de cette analyse, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur la nouveauté des objets de la requête principale et des requêtes auxiliaires nsº 1 à 4, ni de s'interroger pour savoir s'il est satisfait aux exigences des articles 84, 123(2) et (3) CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.