T 1114/05 () of 11.12.2007

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2007:T111405.20071211
Date de la décision : 11 Décembre 2007
Numéro de l'affaire : T 1114/05
Numéro de la demande : 00922703.4
Classe de la CIB : D01D 5/098
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : Dispositif permettant d'assurer l'ouverture et la répartition d'un faisceau de filaments lors de la réalisation d'une nappe textile non tissée
Nom du demandeur : Rieter Perfojet
Nom de l'opposant : Reifenhäuser GmbH & Co. Maschinenfabrik
Fiberweb Corovin GmbH
Chambre : 3.2.06
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 83
European Patent Convention 1973 Art 54(2)
European Patent Convention 1973 Art 56
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 10a(1)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 10a(2)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 10b
Mot-clé : Modifications (admissibles)
Suffisance de l'exposé (oui)
Nouveauté (oui)
Activité inventive (oui)
Objections et documents présentés tardivement dans la procédure de recours (non admis)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Par décision remise à la poste le 1 août 2005, la division d'opposition a rejeté l'opposition formée à l'encontre du brevet européen nº 1 177 336, délivré sur la base de la demande de brevet européen nº 00 922 703.4, car elle a considéré que les motifs d'opposition au titre de l'article 100(a) CBE (défaut de nouveauté et défaut d'activité inventive) ainsi qu'au titre de l'article 100(b) CBE (insuffisance de l'exposé de l'invention) ne s'opposaient pas au maintien du brevet.

II. Le libellé de la revendication 1 du brevet tel que délivré est le suivant:

« Dispositif permettant d'assurer l'ouverture et la répartition d'un faisceau de filaments lors de la réalisation d'une nappe textile non tissée, selon la technique qui consiste:

- à extruder un polymère organique fondu au travers d'une filière percée de trous, de manière à former un faisceau ou rideau de filaments;

- puis, à orienter les filaments extrudés par étirage au moyen d'un ou plusieurs dispositifs à jets de fluide (5);

- et enfin, à recevoir le faisceau de filaments sous la forme d'une nappe sur un tapis transporteur mobile en dessous duquel est disposée une source d'aspiration, caractérisé en ce qu'il est constitué par un ensemble (6) disposé en aval de la sortie de l'ensemble d'étirage (5) et dissocié de ce dernier, ledit ensemble comportant, à proximité de la sortie de la fente d'étirage (f), un diffuseur (10) comprenant une zone d'entrée (13) en forme de convergent s'étendant sur toute la largeur de l'installation au regard de la sortie de la fente d'étirage (f) de production de la nappe, prolongée par un divergent (15), ledit ensemble étant associé à une rampe (11) chargeant électrostatiquement les filaments avant réception sur le tapis récepteur (7).».

III. Les requérantes I et II (opposantes I et II) ont formé chacune un recours contre cette décision respectivement le 20 août 2005 et le 17 septembre 2005 et elles ont acquitté le jour même la taxe de recours. Les mémoires exposant les motifs des recours ont été déposés respectivement le 26 novembre 2005 et le 2 décembre 2005.

IV. Dans l'annexe à la convocation à la procédure orale, remise à la poste le 11 septembre 2007, la Chambre a exprimé un avis provisoire positif en ce qui concernait la suffisance de l'exposé et la nouveauté mais négatif en ce qui concernait l'activité inventive. En effet, la division d'opposition avait correctement considéré que le document

E3 : DE-A1-43 12 419

représentait l'état de la technique le plus proche, mais elle avait basé son raisonnement favorable à la présence d'une activité inventive sur l'association de la rampe électrostatique au niveau de l'ensemble comprenant le diffuseur. Cette association n'était pas reflétée par la définition de la revendication 1. Selon le texte de la revendication 1 ce n'était que l'ensemble comportant le diffuseur qui devait être disposé en aval de la sortie de l'ensemble d'étirage. L'association de la rampe avec le diffuseur pouvait être faite au niveau de l'installation, si la rampe était p.ex. disposée au niveau des dispositifs à jet de fluide, comme dans le document

E7 : DE-T2-69 303 711.

V. Par lettre datée du 6 décembre 2007, la requérante II a déposé des nouveaux documents et cité pour la première fois dans la procédure de recours le document

E6 : US-A-3 334 161,

qui avait déjà été considéré par la division d'opposition.

VI. Une procédure orale, à l'issue de laquelle la Chambre a rendu sa décision, a eu lieu le 11 décembre 2007.

Les requérantes ont demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen. La requérante I a demandé d'admettre les documents cités dans la lettre du 6 décembre 2007 ainsi que le document E6.

L'intimée (titulaire) a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base des revendications déposées pendant la procédure orale.

VII. La revendication 1 telle que modifiée par l'intimée lors de la procédure orale se distingue de la revendication 1 telle que délivrée en ce que l'expression « caractérisé en ce qu'il » est remplacée par « qui » et en ce que la dernière phrase (à partir de « ledit ensemble étant associé... ») est remplacée par :

« une rampe chargeant électrostatiquement les filaments avant réception sur le tapis récepteur (7) étant intégrée à l'intérieur du diffuseur (10) ou étant disposée immédiatement en aval du diffuseur (10). »

VIII. Au soutien de leurs requêtes, les requérantes ont développé pour l'essentiel les argumentations suivantes :

Selon une alternative de la revendication 1 telle que modifiée, la rampe électrostatique était intégrée à l'intérieur du diffuseur, c'est-à-dire à l'intérieur du divergent. Cette caractéristique n'était pas divulguée dans la demande telle que déposée. En particulier, dans le mode de réalisation selon la figure 3, la rampe électrostatique était prévue en amont du divergent.

L'homme du métier n'était pas capable de mettre en oeuvre l'invention dans tout le domaine couvert par la revendication 1. Cette dernière faisait référence à un faisceau ou rideau de filaments extrudés par étirage au moyen d'un ou plusieurs dispositifs à jets de fluide et couvrait donc plusieurs possibilités. Pour certaines de ces possibilités il n'y avait pas de divulgation suffisante pour qu'un homme du métier puisse les mettre en oeuvre. Il n'y avait en effet aucune divulgation en ce qui concernait la possibilité d'un faisceau s'étendant sur toute la largeur du dispositif, ni en ce qui concernait la possibilité d'avoir plusieurs dispositifs à jets de fluide. En outre, il n'était pas clair pour la personne du métier comment devait être disposée la rampe électrostatique dans le dispositif. La mise en oeuvre des caractéristiques additionnelles selon la revendication dépendante 4 requérait des connaissance d'aérodynamique que l'homme du métier expert des dispositifs pour la réalisation d'une nappe non tissée ne pouvait pas avoir. Cette revendication mentionnait d'ailleurs une valeur de pression sans spécifier s'il s'agissait d'une pression relative ou absolue.

Le dispositif selon la revendication 1 était connu du document D1, qui divulguait entre autres une fente d'étirage prolongée par un divergent.

De toute manière l'objet de la revendication 1 n'impliquait pas d'activité inventive. Le document E3, qui représentait l'état de la technique le plus proche, divulguait un dispositif comprenant toutes les caractéristiques de la revendication 1 à l'exclusion de la caractéristique relative à la rampe électrostatique. Le problème objectif résolu grâce à cette caractéristique consistait à améliorer l'ouverture du faisceau de filaments et à répartir les filaments de manière plus homogène sur le tapis récepteur. L'utilisation d'une rampe électrostatique pour résoudre ce problème était non seulement connue de E7 mais faisait aussi partie des connaissances générales de l'homme du métier. Ce dernier aurait donc considéré comme évident d'appliquer une rampe électrostatique au dispositif selon E3. Lors de la mise en oeuvre pratique de cette mesure, il aurait naturellement pensé à disposer la rampe là où les filaments s'ouvraient, notamment en correspondance du divergent du diffuseur, en arrivant ainsi à l'objet de la revendication 1 sans devoir faire preuve d'activité inventive.

IX. L'intimée a argumenté en substance comme suit :

La modification apportée à la revendication 1 servait à définir de manière plus précise l'emplacement de la rampe électrostatique, qui pouvait soit être intégrée à l'intérieur du diffuseur soit immédiatement en aval du diffuseur comme on le voyait dans les modes de réalisation divulgués dans la demande telle que déposée. Par « diffuseur » on devait entendre la combinaison de convergent et divergent telle que spécifiée par la revendication 1.

Comme correctement énoncé par la division d'opposition, le terme faisceau était utilisé dans la revendication 1 du brevet en cause comme synonyme de rideau. En effet la revendication 1 mentionnait « un faisceau ou rideau » et non pas « un faisceau ou un rideau ». L'homme du métier connaissait bien les dispositifs d'étirage ayant une fente d'étirage et savait qu'ils pouvaient comprendre plusieurs dispositifs à jets de fluide. L'utilisation des rampes électrostatiques était aussi bien connue par l'homme du métier. Même en admettant qu'un seul homme du métier n'avait pas toutes les connaissances requises pour réaliser, d'un côté, un dispositif d'étirage pour former un faisceau de filaments, et, d'un autre côté, les connaissances requises pour réaliser une rampe électrostatique adaptée au dispositif d'étirage, on pouvait quand même considérer que l'homme du métier était représenté par un groupe d'experts, chacun ayant des compétences différentes, notamment dans les domaines du textile, de l'aéraulique, et de l'électricité. La mise en oeuvre du mode de réalisation selon la revendication dépendante 4 ne présentait pas non plus de difficultés pour l'homme du métier car il était clair que la valeur de pression à laquelle l'air était injecté était, comme toujours lorsqu'on se référait à de l'air sous pression, une pression relative.

Dans le dispositif connu de E1 il n'y avait ni un ensemble d'étirage comprenant une fente ni un diffuseur comprenant un divergent. L'objet de la revendication 1 était donc nouveau par rapport à ce document.

L'objet de la revendication 1 impliquait aussi une activité inventive. Il n'y avait aucune indication dans l'état de la technique qui aurait suggéré à l'homme du métier de disposer une rampe électrostatique à l'intérieur ou immédiatement en aval du diffuseur du dispositif selon le document E3, qui représentait l'état de la technique le plus proche. Le document E7 décrivait l'utilisation d'une rampe électrostatique, mais pas celle d'un diffuseur. Selon l'enseignement de E7, la rampe électrostatique était disposée au voisinage de la fente d'étirage, donc en amont du diffuseur. L'homme du métier voulant combiner E3 et E7 aurait directement appliqué cet enseignement au dispositif de E3 et ne serait donc pas arrivé au dispositif revendiqué.

Motifs de la décision

1. Les recours sont recevables.

2. Modifications

2.1 La revendication 1 a été substantiellement modifiée par rapport à la revendication 1 telle que délivrée (qui est identique à la revendication 1 de la demande telle que déposée) uniquement par l'introduction de la caractéristique : « une rampe chargeant électrostatiquement les filaments avant réception sur le tapis récepteur (7) étant intégrée à l'intérieur du diffuseur (10) ou étant disposée immédiatement en aval du diffuseur (10) ». Cette caractéristique sert à définir de manière plus précise l'emplacement de la rampe électrostatique, laquelle, selon le texte de la revendication 1 délivrée, n'était qu' « associée » à l'ensemble (6) disposé en aval de la sortie de l'ensemble d'étirage.

2.2 La demande telle que déposée divulgue (voir page 8, 3**(ème) paragraphe), en relation avec le premier mode de réalisation selon l'invention, que la rampe est disposée immédiatement en aval de l'ensemble diffuseur ou éventuellement intégrée à l'intérieur de ce dernier, et, en relation avec le deuxième mode de réalisation (voir page 8, dernier paragraphe), que la rampe est intégrée à l'intérieur du diffuseur immédiatement en aval de la zone divergente. De l'avis de la Chambre, l'homme du métier déduit clairement et sans ambiguïtés de la demande telle que déposée que ces emplacements de la rampe sont indépendants des autres caractéristiques des dispositifs selon les modes de réalisation spécifiques, et que la rampe peut en général soit être disposée immédiatement en aval de l'ensemble diffuseur soit être intégrée à l'intérieur de ce dernier. La modification de la revendication 1 consistant à préciser de cette manière l' « association » entre la rampe électrostatique et l'ensemble disposé en aval de la sortie de l'ensemble d'étirage dont il est question à la revendication 1 originale, n'est donc pas telle qu'elle étende l'objet du brevet européen au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée.

2.3 Les objections des requérantes sont basées sur une interprétation des termes de la revendication 1 selon laquelle le « diffuseur » ne comprend que le divergent. La revendication 1 spécifie toutefois clairement que le diffuseur comprend une zone d'entrée en forme de convergent qui est prolongée par un divergent. La caractéristique selon laquelle la rampe électrostatique est intégrée à l'intérieur du diffuseur ne peut donc pas être vue comme impliquant nécessairement que la rampe est intégrée à l'intérieur du divergent. L'ajout de la définition susmentionnée à la revendication 1 n'apporte donc pas un nouveau enseignement technique spécifique qui n'est pas divulgué dans la demande originale (aliud).

2.4 Les revendications dépendantes 2 à 4 sont les mêmes que celles du brevet tel que délivré.

2.5 La description a été modifiée pour tenir compte de la différente portée des la revendication 1 telle que modifiée ainsi que de l'état de la technique selon le document E3.

2.6 Par conséquent les modifications de la revendication 1 remplissent les conditions de l'article 123(2) CBE.

2.7 Étant donné que l'objet de la revendication 1 est plus limité par rapport à celui de la revendication 1 du brevet tel que délivré, les modifications n'appellent pas d'objections au titre de l'article 123(3) CBE.

3. Suffisance de l'exposé

3.1 La Chambre partage l'avis de la division d'opposition (point 3 des motifs de la décision faisant l'objet du recours) selon lequel dans l'expression de la revendication 1: « former un faisceau ou rideau de filaments », le mot faisceau est à considérer comme étant synonyme de rideau. En effet, la revendication 1 définit que les filaments du faisceau ou rideau sont orientés par étirage au moyen d'un ensemble d'étirage comprenant une fente d'étirage, ce qui laisse sous-entendre que les filaments sont extrudés de manière à former un rideau de filaments qui est apte à passer par ladite fente. La manière de former un rideau de filaments qui s'étend sur toute la largeur d'une fente d'étirage fait partie des connaissances générales de l'homme du métier et ne présente en soi aucune difficulté technique particulière.

3.2 La réalisation d'un ensemble d'étirage qui comprend un ou plusieurs dispositifs à jets de fluide ne présente pas non plus de difficulté technique. Il n'était d'ailleurs pas contesté par les requérantes qu'un ensemble d'étirage avec un dispositif à jets de fluide ne puisse pas être réalisé, mais seulement qu'il n'y avait pas de divulgation dans le brevet en cause permettant à un homme du métier de comprendre comment disposer plusieurs dispositifs à jets de fluide. Ceci ne peut être accepté car la figure 1 montre clairement plusieurs dispositifs (5) de ce type disposés l'un après l'autre transversalement par rapport à la direction d'avancement du tapis récepteur (7).

3.3 L'homme du métier n'aurait pas de difficultés techniques à prévoir un diffuseur dissocié de l'ensemble d'étirage. En particulier, il n'aurait pas de difficultés à trouver une distance appropriée entre la sortie de la fente d'étirage et le diffuseur. Cette distance ne joue pas de rôle particulier dans le mode de réalisation selon la Fig. 2 ; elle sert pour l'appel d'air dans le mode de réalisation selon la Fig. 3. Une distance appropriée pourrait être déterminée par exemple au moyen de simples essais de routine.

3.4 En ce qui concerne la rampe électrostatique, il s'agit d'une caractéristique connue en général par l'homme du métier dans le domaine technique des dispositifs pour la production de nappes textiles non tissées constituées de filaments de polymères organiques obtenus par extrusion. Ceci n'a pas été contesté par les requérantes. Etant donné que l'utilisation de rampes électrostatique dans lesdits dispositifs est connue en soi, l'homme du métier serait capable, par l'application de ses connaissances générales et de ses capacités normales, de déterminer comment effectivement associer en pratique une rampe électrostatique à l'ensemble diffuseur dont il est question à la revendication 1 du brevet en cause. Il est aussi vrai, comme l'a fait remarquer l'intimée, qu'un seul homme du métier n'a pas toutes les connaissances requises pour effectuer un projet constructif de toutes les composantes du dispositif. Il est néanmoins usuel lors de la construction de dispositifs complexes, que plusieurs spécialistes travaillent ensemble avec des responsabilités différentes selon leur domaine de compétence. Par exemple, la partie électrique relative à la rampe électrostatique sera de compétence d'un expert en électricité tandis que la partie relative à l'extrusion du polymère au travers de la filière sera de la compétence d'un autre expert.

3.5 Etant donné que l'objection de la requérante II au sens de l'article 83 CBE à l'égard de la revendication 4 a été soulevée uniquement au cours de la procédure orale devant la Chambre, cette objection représente une modification des moyens invoqués par la requérante II au support de son recours, voir article 10bis(1) et (2) du règlement de procédure des chambres de recours (JO 3/2003). Suivant l'article 10ter(1) dudit règlement, l'admission et l'examen de toute modification présentée par une partie après que celle-ci a déposé son mémoire exposant les motifs du recours ou sa réponse sont laissés à la discrétion de la chambre. Etant donné que l'objection de la requérante II ne parait pas de prime abord fondée, parce que effectivement il n'y a pas de raisons de considérer que la pression mentionnée ne soit pas une pression relative et que la requérante n'a pas donné de justifications détaillées relativement aux prétendues difficultés de réalisation d'une injection d'air comme défini par la revendication 4, la chambre exerçant son pouvoir discrétionnaire décide de ne pas accepter cette modification tardive.

3.6 L'invention étant exposée de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter, le brevet en cause satisfait aux exigences de l'article 83 CBE.

4. Nouveauté

4.1 Le document E1 divulgue un dispositif permettant d'assurer l'ouverture et la répartition d'un faisceau de filaments lors de la réalisation d'une nappe textile non tissée, selon une technique qui consiste à étirer des faisceaux séparés par des tubes 12 circulaires (voir col. 5, lignes 5 - 14). Etant donné qu'il est constitué par des tubes, l'ensemble d'étirage n'a pas de fente. Une fente, telle que requise par la revendication 1 du brevet en cause, est, selon l'interprétation correcte de la division d'opposition (voir page 5 de la décision faisant l'objet du recours) une ouverture plus longue que large. À la sortie de ces tubes (voir Fig. 1) il est prévu un ensemble comportant, à proximité de la sortie du tube d'étirage (12), une zone d'entrée (22) en forme de convergent s'étendant sur toute la largeur de l'installation au regard de la sortie du tube d'étirage (col. 5, dernière ligne - col. 6, ligne 5), ledit ensemble étant associé à une rampe (42) chargeant électrostatiquement les filaments avant réception sur le tapis récepteur (col. 7, lignes 7-10). Contrairement à l'avis des requérantes, cet ensemble ne comprend pas de divergent. Comme correctement affirmé par la division d'opposition (voir page 5 de la décision faisant l'objet du recours), un divergent implique une tuyère avec un écartement progressif des parois destiné à détendre les gaz. Dans le dispositif selon D1 il y a une augmentation brusque de l'espace à la sortie de la zone convergente, en vis-à-vis de la rampe électrostatique (42), qui ne constitue donc pas un divergent.

L'objet de la revendication 1 est donc nouveau par rapport au document E1.

4.2 La chambre étant persuadée que les autres documents cités ne divulguent pas l'objet de la revendication 1 non plus et les requérantes n'ayant pas opposé d'autres antériorités à la nouveauté de la revendication 1 telle que modifiée, il est conclu que l'objet de la revendication 1 est nouveau. Par conséquent le brevet tel que modifié satisfait aux conditions de l'article 54(2) CBE.

5. Activité inventive

5.1 Le problème technique à la base du brevet attaqué (voir col. 3, lignes 28 à 41) est d'obtenir son seulement une ouverture parfaite du faisceau de filaments extrudés en sortie de la fente d'étirage, mais également une répartition très homogène sur le tapis récepteur.

5.2 L'état de la technique le plus proche est incontestablement représenté par le document E3, qui (en utilisant les termes de la revendication 1 du brevet en cause) divulgue un dispositif permettant d'assurer l'ouverture et la répartition d'un faisceau de filaments lors de la réalisation d'une nappe textile non tissée, selon la technique qui consiste à extruder un polymère organique fondu au travers d'une filière (2) percée de trous, de manière à former un faisceau ou rideau de filaments; puis, à orienter les filaments extrudés par étirage au moyen d'un ou plusieurs dispositifs à jets de fluide (3,4); et enfin, à recevoir le faisceau de filaments sous la forme d'une nappe sur un tapis transporteur mobile en dessous duquel est disposée une source d'aspiration (7 ; voir col. 3, lignes 29 à 37), le dispositif étant constitué par un ensemble (5) disposé en aval de la sortie de l'ensemble d'étirage (4) et dissocié de ce dernier, ledit ensemble comportant, à proximité de la sortie de la fente d'étirage, un diffuseur (5) comprenant une zone d'entrée (10) en forme de convergent s'étendant sur toute la largeur de l'installation au regard de la sortie de la fente d'étirage de production de la nappe (col. 2, l. 65, 66), prolongée par un divergent (11 ; voir col. 3, lignes 30 à 57). E3 ne divulgue pas la caractéristique de la revendication 1 selon laquelle une rampe chargeant électrostatiquement les filaments avant réception sur le tapis récepteur est intégrée à l'intérieur du diffuseur ou est disposée immédiatement en aval du diffuseur.

5.3 Cette caractéristique distinctive permet de résoudre le problème posé, car elle ajoute les avantages de la technique de charge électrostatique des filaments aux avantages de la technique d'ouverture du faisceau par ralentissement de la vitesse d'air en sortie de la fente d'étirage divulguée par E3 (voir colonne 3, par. [0020] du brevet en cause).

5.4 Le document E7 décrit (voir Fig. 2) l'utilisation d'une rampe électrostatique (18) disposée au voisinage de la fente de sortie de l'ensemble d'étirage (17 ; voir revendication 1) afin d'assurer un éclatement et une répartition uniforme des filaments (voir page 6, avant-dernier paragraphe). Selon l'enseignement de E3, cette fonction est assurée par le diffuseur (voir colonne 2, lignes 39 à 44). Au vu des divulgations de E3 et E7 il n'y a aucune motivation apparente pour l'homme du métier de combiner deux moyens différents ayant la même fonction. En supposant toutefois que l'homme du métier aurait pensé combiner ces deux moyens différents pour obtenir un effet amélioré d'éclatement et répartition des filaments, il n'y a aucune indication dans E7 qui l'incite à prévoir la rampe électrostatique dans une position différente de celle divulguée par E7, donc non pas au voisinage de la sortie de la fente d'étirage, mais spécifiquement intégrée dans le diffuseur ou immédiatement en aval de celui-ci.

5.5 Les requérantes ont fait valoir que l'homme du métier aurait pensé à disposer la rampe là où les filaments s'ouvraient, c'est-à-dire vis-à-vis du divergent du diffuseur du dispositif selon E3. De l'avis de la chambre cet argument est basé sur un raisonnement a posteriori puisque le document E7 ne suggère nullement de dissocier la rampe électrostatique de l'ensemble d'étirage. En outre, le raisonnement inverse à celui des requérantes est valide, en principe : l'homme du métier aurait pensé que le diffuseur, ayant la même fonction que la rampe électrostatique, devait être disposé là où les filaments s'ouvraient, notamment à proximité de la fente de sortie de l'ensemble d'étirage comprenant une rampe électrostatique comme divulgué par E7.

5.6 Les autres documents cités ne suggèrent pas non plus d'intégrer une rampe électrostatique à l'intérieur du diffuseur ou de la disposer immédiatement en aval de celui-ci.

5.7 Le document E6 ainsi que les documents déposés par la requérante I avec la lettre du 6 décembre 2007, tous cités tardivement dans la procédure de recours (article 10bis (1) et (2) du règlement de procédure des chambres de recours), ne sont pas de nature à changer cette conclusion. En effet le document E6, contrairement à l'enseignement du brevet en cause, divulgue de faire passer des filaments préalablement chargés électriquement à travers un diffuseur (voir la revendication 5). Les autres documents ne contiennent aucune indication suggérant la disposition de la rampe électrostatique suivant la définition de la revendication 1 du brevet en cause. Par conséquent, la Chambre décide en vertu de son pouvoir discrétionnaire dont elle dispose aux termes de l'article 10ter(1) du règlement de procédure des chambres de recours de ne pas admettre ces documents dans la procédure.

5.8 Il est donc conclu que l'objet de la revendication 1 implique une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

6. Les motifs invoqués par les requérantes ne s'opposent donc pas au maintien du brevet européen tel que modifié au cours de la procédure orale du 11 décembre 2007.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet européen sur la base des documents suivants :

a) revendications 1 à 4 comme déposées pendant la procédure orale ;

b) description, colonnes 3 et 4 comme déposées pendant la procédure orale et colonnes 1, 2, 5 à 7 comme délivrées ;

c) figures 1 à 3 comme délivrées.

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