European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2005:T054904.20051214 | ||||||||
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Date de la décision : | 14 Décembre 2005 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0549/04 | ||||||||
Numéro de la demande : | 96943193.1 | ||||||||
Classe de la CIB : | F16L 11/08 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Utilisation d'une conduite flexible ensouillée | ||||||||
Nom du demandeur : | Technip France | ||||||||
Nom de l'opposant : | NKT Flexibles I/S | ||||||||
Chambre : | 3.2.01 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Modifications - extension de l'objet de la demande : requête principale - (oui) ; requête subsidiaire 1 - (oui) Extension de la protection - requête subsidiaire 2 - (oui) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le présent recours est dirigé contre la décision de la Division d'Opposition de révoquer le brevet européen nº 0 870 144.
La Division d'Opposition a notamment estimé que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale s'étendait au delà du contenu de la demande telle que déposée (Article 100 c) CBE) et que la revendication 1 selon la requête auxiliaire ne remplissait pas les exigences de clarté requises par l'Article 84 de la CBE.
II. Au cours de la procédure orale devant la Chambre requise à titre auxiliaire par la requérante, celle-ci a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet européen en cause sur la base de la revendication 1 de la requête principale, ou, à titre subsidiaire, sur la base de la revendication 1 de l'une des trois requêtes subsidiaires déposées par lettre reçue avec les motifs du recours le 2 juillet 2004.
L'intimée a requis le rejet du recours.
III. La revendication 1 selon la requête principale se lit comme suit :
"Utilisation d'une conduite flexible au transport d'un fluide et destinée à être ensouillée dans une tranchée creusée dans le fond sous-marin, ladite conduite flexible comprenant de l'intérieur vers l'extérieur une carcasse métallique, une gaine d'étanchéité interne disposée autour de la carcasse métallique, des armures de résistance aux efforts mécaniques constituées par au moins deux nappes d'armures croisées, sans interposition d'une voûte de pression entre ladite gaine d'étanchéité interne et lesdites armures de résistance qui sont constituées chacune par un fil enroulé en hélice avec des angles d'enroulement respectifs ai par rapport à la direction longitudinale de la conduite flexible vérifiant les relations suivantes : pour i = 1, 2 ... 52º <= ai <= 58º, et la valeur moyenne arithmétique am desdits angles d'enroulement ai vérifiant la relation 53º <= am <= 57º;
caractérisée en ce que ladite conduite flexible présente à l'état non ensouillé une complaisance élastique longitudinale lorsqu'elle est soumise à des variations de pression et/ou de température du fluide transporté, de telle sorte qu'après ensouillage à faible profondeur dans la tranchée, les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale."
La revendication 1 respective des requêtes subsidiaires 1 à 3 se distingue de la revendication 1 selon la requête principale en ce le libellé respectif de leur partie caractérisante se lit comme suit :
Revendication 1 de la requête subsidiaire 1 :
"caractérisée en ce que ladite conduite flexible présente à l'état non ensouillé une complaisance élastique longitudinale lorsqu'elle est soumise à des variations de pression et/ou de température du fluide transporté, de telle sorte qu'après ensouillage à faible profondeur dans la tranchée, les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale et sont suffisantes pour empêcher la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage."
Revendication 1 de la requête subsidiaire 2 :
"caractérisée en ce que ladite conduite flexible présente à l'état non ensouillé des variations de longueur lorsqu'elle est soumise à des variations de pression et/ou de température du fluide transporté, de telle sorte qu'après ensouillage à faible profondeur dans la tranchée, les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent auxdites variations de longueur et sont suffisantes pour empêcher la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage."
Revendication 1 de la requête subsidiaire 3 :
"caractérisée en ce que ladite conduite flexible présente à l'état non ensouillé des variations de longueur lorsqu'elle est soumise à des variations de pression et/ou de température du fluide transporté, de telle sorte qu'après ensouillage à faible profondeur dans la tranchée, la hauteur de recouvrement étant comprise entre quasi-nulle et 0,5 m, les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent auxdites variations de longueur et sont suffisantes pour empêcher la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage."
IV. Au soutien de son action, la requérante a développé pour l'essentiel l'argumentation suivante :
Concernant la requête principale :
Bien que le terme "complaisance élastique longitudinale" n'ait pas d'antécédent explicite dans la demande déposée à l'origine, les caractéristiques de la seconde partie de la revendication 1 ne s'étendent pas au-delà du contenu de la demande. Cette dernière stipule que les conduites flexibles du type décrites dans le préambule de la revendication 1 présentent à l'état non ensouillé une variation de longueur lorsqu'elles sont soumises à des variations de pression et/ou de température du fluide transporté (voir page 5, ligne 15 à 37). L'homme du métier peut donc interpréter librement le terme "complaisance élastique longitudinale à l'état non ensouillé" sur la base de ce passage. En conformité avec la définition usuelle de ce terme (voir extrait du dictionnaire McGraw-Hill Annexe B), il en dérivera que la "complaisance élastique longitudinale" se définit comme une variation de longueur, en l'occurrence la déformation longitudinale de la conduite, sous l'effet d'une contrainte unitaire créée ici par les forces de pression et de dilation, l'adjectif "élastique" n'étant qu'une précision supplémentaire relative à la propriété de la conduite de reprendre sa forme initiale quand les contraintes qui la déforment ont cessé d'exister. La "complaisance élastique longitudinale" est donc une caractéristique intrinsèque de la conduite représentant son aptitude à s'allonger ou se raccourcir sous les contraintes. Il serait aussi acceptable de la définir comme l'inverse de la raideur axiale, rien n'exigeant cependant que cette caractéristique présente une certaine linéarité comme le soutient l'intimée. La Division d'Opposition était dans l'erreur quand elle a estimé que l'expression de la revendication 1 "les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale" n'a pas la même signification technique que le passage de la page 6, lignes 3-13 de la demande initiale "les forces de contact exercées par les sédiments ou le matériau de remblai sur la conduite flexible étant suffisantes pour empêcher la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage". Il ressort clairement de la demande initiale que les boucles de flambage sont induites par les variations de longueur de la conduite flexible (voir page 1, lignes 27-36; page 2, lignes 30-32; page 4, lignes 9-10;...). Si les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement empêchent la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage, l'homme du métier en déduit que ces forces s'opposent également à toute déformation longitudinale de la conduite sous l'effet des forces de pression et/ou de dilatation ou, en d'autres termes, les forces de contact empêchent à faible profondeur toute variation de longueur de la conduite qui serait dues à sa complaisance élastique longitudinale si elle n'avait pas été ensouillée. Le terme "s'opposent" dans l'expression de la revendication n'est donc pas à interpréter comme une simple vérité de La Palisse sans signification technique particulière mais définit l'invention en stipulant que les forces de contact s'opposent complètement à toute variation de longueur de la conduite.
Concernant la requête subsidiaire 1 :
Dans la revendication 1 de cette requête, l'expression "et sont suffisantes pour empêcher la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage" a été rajoutée pour répondre à la division d'opposition qui a estimé que la formulation selon la requête principale représentait une généralisation de l'expression divulguée dans la demande telle que déposée.
Concernant la requête subsidiaire 2 :
La partie caractérisante de la revendication 1 a été reformulée en remplaçant la "complaisance élastique longitudinale" par "des variations de longueur". La signification technique de ces expressions étant équivalente, la protection conférée par le brevet n'a pas été étendue (Art. 123 (3) de la CBE).
Concernant la requête subsidiaire 3 :
Pour répondre à l'objection de défaut de clarté avancé par la division d'opposition, le terme "faible profondeur" a été précisé plus avant par la formulation "la hauteur de recouvrement étant comprise entre quasi-nulle et 0,5 m".
V. L'intimée a réfuté l'argumentation de la requérante en faisant valoir pour l'essentiel ce qui suit :
Les caractéristiques de la seconde partie de la revendication 1 s'étendent au-delà du contenu de la demande telle que déposée. Le terme "complaisance élastique longitudinale" est très spécifique et utilisé en mécanique des milieux continus dans le contexte des matériaux élastiques qui suivent des loi de déformation linéaire. Ceci implique que la conduite flexible suivrait la loi de Hooke à l'état non ensouillé et qu'il existe une corrélation linéaire entre les variations de pression et/ou de température du fluide transporté et l'élongation longitudinale de la conduite. Ceci n'est, en l'occurrence, absolument pas le cas pour la conduite flexible revendiquée qui est soumise à des variations "considérables et aléatoires" (voir page 5, lignes 30-31 de la demande). Une telle limitation n'a donc absolument aucune base dans la demande initiale. De plus, comme l'a justement reconnu la Division d'Opposition, la formulation de la revendication "les forces de contact ... s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale" n'a également aucune base dans la demande initiale.
Motifs de la décision
1. Requête principale
1.1 Dans sa décision, la Division d'Opposition a estimé que les caractéristiques de la seconde partie de la revendication 1 s'étendaient au delà du contenu de la demande telle que déposée (Article 100 c) de la CBE). Ni le concept d'une "complaisance élastique longitudinale", ni l'expression "les forces de contact ... s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale" n'ont été divulgués de manière explicite dans la demande telle que déposée à l'origine. Il n'est cependant pas déraisonnable d'estimer qu'une revendication réécrite en se détachant des formulations explicitement divulguées dans la demande initiale puisse néanmoins ne pas enfreindre les exigences de l'Article 123(2) de la CBE, si l'objet défini par le nouveau libellé de la revendication dérive directement et sans ambiguïté du contenu de la demande initiale. Dans un tel cas, les termes et expressions n'étant pas mentionnés explicitement dans la demande initiale sont à interpréter dans le contexte de l'invention telle que divulguée dans les documents originaux. La question qui se pose est donc de savoir ce que l'homme du métier pourrait entendre par le terme "complaisance élastique longitudinale" et si les autres caractéristiques litigieuses sont dérivables directement et de façon non ambiguë de la demande telle que déposée.
1.2 La demande initiale stipule bien que les conduites flexibles présentent à l'état non ensouillé une variation de longueur lorsqu'elles sont soumises à des variations de pression et/ou de température du fluide transporté (voir page 5, ligne 15 à 37). La conduite présente donc à l'état libre et non ensouillée une aptitude à s'allonger sous des contraintes liées aux variations de pression et/ou de température du fluide transporté. Compte-tenu de la définition du terme "complaisance" dans le domaine de la résistance des matériaux et de leur déformation sous contraintes (voir en particulier la définition du dictionnaire McGraw-Hill cité par la requérante : variation linéaire de longueur sous l'effet d'une contrainte unitaire), la "complaisance élastique longitudinale" pourrait être interpréter comme une caractéristique intrinsèque de la conduite représentative de sa capacité à varier de longueur sous l'effet d'une contrainte (au même titre que la raideur axiale est représentative du rapport entre la contrainte et la déformation). De même, l'adjectif "élastique" utilisé dans cette expression pourrait être interprété comme étant relatif à la propriété de la conduite de reprendre sa forme initiale quand les contraintes qui la déforment ont cessé d'exister. Bien que la Chambre estime que l'utilisation de tels termes dans le contexte technique des conduites flexibles décrites dans la demande puisse être pour le moins incorrecte pour les raisons invoquées par la requérante, le raisonnement qui va suivre part de l'interprétation faite ci-dessus du terme "complaisance élastique longitudinale".
1.3 La partie caractérisante de la revendication 1 exige que la conduite présente une complaisance élastique longitudinale particulière, à savoir qu'elle soit "de telle sorte que après ensouillage à faibles profondeurs dans la tranchée les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale".
La Chambre partage l'avis de la requérante sur le terme "s'opposent" utilisé dans cette partie de la revendication. Il n'est pas à interpréter comme exprimant une simple vérité de La Palisse sans aucune signification technique, ce qui viderait la revendication de tout sens technique, mais bien comme stipulant que les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent complètement et totalement à toute variation de longueur de la conduite présentant ladite complaisance élastique, afin d'en empêcher le flambage. Il s'agit donc d'examiner si un tel enseignement a été divulgué dans la demande telle que déposée.
1.4 La requérante a cité le passage de la page 6, lignes 3 à 13 de la demande telle que déposée comme servant de base aux modifications effectuées dans la revendication 1. Ce passage mentionne que "c'est la souplesse particulière,... présentée par ce type de conduite flexible qui lui permettrait de ne pas flamber sous l'effet de la pression interne et/ou des variations de température, les forces de contact exercées par les sédiments ou le matériau de remblai sur la conduite flexible étant suffisantes pour empêcher la formation d'une ou plusieurs boucles de flambage".
L'expression "souplesse particulière" de ce passage n'est pas, comme l'a prétendu la requérante, équivalente à la complaisance élastique longitudinale revendiquée. En effet, dans le contexte des conduites flexibles de la demande et dont il vient juste d'être précisé qu'elles sont dépourvues de toute voûte de pression, une armure de résistance à composante circonférentielle de la pression interne (voir page 5, ligne 7-8; page 2, lignes 11-13), le terme "souplesse particulière" ne peut se rapporter qu'à la souplesse en flexion. Il est inusuel d'utiliser le terme "souplesse" pour une aptitude à se déformer selon la seule direction longitudinale. A la lecture du passage cité ci-avant, l'homme du métier pourrait très bien imaginer, qu'en raison de sa souplesse particulière, c'est-à-dire sa faible raideur en flexion, la conduite se déforme en une série de courtes ondulations successives de faible amplitudes et distribuées de manière régulière dans le matériau de recouvrement, sans causer de boucle de flambage proprement dite, mais tout en subissant de faibles variations de longueur. Ce passage ne permet donc pas à l'homme du métier d'en déduire que c'est parce que la conduite flexible présente une certaine complaisance élastique longitudinale que les forces de contact engendré par le matériau de recouvrement empêchent toute variation de longueur et par là-même la formation de boucles de flambage.
Les variations de la pression interne et/ou de température du fluide transporté génèrent des déformations, éventuellement le flambage de la conduite, selon des composantes ne sont pas uniquement longitudinales. Force est de constater que la requérante introduit le concept de "complaisance élastique longitudinale" en liaison avec la prévention du flambage d'une manière spécifique et arbitraire qui n'a pas de base directe dans la demande telle que déposée. L'homme du métier ne peut déduire de manière directe et sans la moindre ambiguïté que c'est exclusivement parce que toute variation de longueur de la conduite est empêchée par les forces de contact du matériau de recouvrement que le flambage est prévenu.
1.5 La Chambre en conclut que l'introduction, dans la revendication 1, des caractéristiques litigieuses relatives à la complaisance élastique longitudinale de la conduite, n'est pas dérivable directement et de manière non ambiguë de la demande initiale et est donc contraire aux exigences de l'Article 100 c) de la CBE.
2. Requête subsidiaire 1
La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 contient les caractéristiques relatives à la complaisance élastique longitudinale particulière que doit présenter la conduite flexible. Or, comme on l'a vu plus haut, ces caractéristiques s'étendent au delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée à l'origine. La revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 n'est donc pas admissible.
3. Requêtes subsidiaires 2 à 3
La revendication 1 du brevet exige dans sa partie caractérisante que la conduite présente à l'état non ensouillé une complaisance élastique longitudinale qui soit de telle sorte qu'après ensouillage, les forces de contact engendrées par le matériau de recouvrement s'opposent à ladite complaisance élastique longitudinale.
Les revendications 1 respectives des jeux subsidiaires 2 à 3 ne contiennent plus cette exigence et, par conséquent, ont été modifiées de manière à étendre la protection conférée par le brevet tel que délivré. Elle ne sont donc pas admissibles en vertu des dispositions de l'Article 123(3) de la CBE (cas de l'embûche inextricable).
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.