T 1212/03 () of 5.5.2006

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2006:T121203.20060505
Date de la décision : 05 Mai 2006
Numéro de l'affaire : T 1212/03
Numéro de la demande : 97901012.1
Classe de la CIB : E02D 5/04
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 77 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Palplanche en forme de "Z" à module de résistance élevée
Nom du demandeur : ProfilARBED S.A.
Nom de l'opposant : HSP Hoesch Spundwand und Profil GmbH
Chambre : 3.2.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive : oui
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. L'opposante a formé sous paiement de la taxe correspondante, le 5 décembre 2003, recours contre la décision en date du 27 octobre 2003 de la division d'opposition de rejeter l'opposition et de maintenir le brevet Nº 0 895 556 tel que délivré.

Les motifs de recours ont été déposés le 4 mars 2004.

II. La décision était fondée sur la revendication 1 telle que délivrée et libellée comme suit :

"Palplanche en forme de "Z" laminée à chaud comprenant deux ailes (12', 12") ayant des faces extérieures (14', 14") sensiblement parallèles, et une âme (10) oblique raccordée aux deux ailes (12', 12") de façon à définir un angle aigu alpha <= 75º avec un plan parallèle (16) aux faces extérieures (14', 14") des ailes (12', 12"), ladite âme étant délimitée entre les raccords avec les ailes (12', 12") par deux faces (18', 18") sensiblement planes,

caractérisée en ce que

chacune des deux ailes (12', 12") présente un prolongement (22', 22") qui est en saillie par rapport au plan fictif (24', 24") prolongeant la face plane (18', 18") de l'âme située du même côté que la face extérieure (14', 14") de l'aile respective."

La division d'opposition a estimé que l'objection de défaut d'activité inventive, soulevée au titre des articles 100a), 52(1) et 56 CBE et basée sur l'état de la technique cité (D0, D1, D2 et D3 cités ci-dessous), ne s'opposait pas au maintien du brevet tel que délivré.

III. Les documents suivants ont été considérés lors des débats :

- D0 : état de la technique connu sous l'appellation générale : palplanche en forme de "Z" dénommée "AZ36", commercialisée par ProfilARBED S.A. (Titulaire)", et décrite dans le paragraphe [0004] du brevet en cause,

- D1 : US-A- 1 831 427,

- D2 : FR-A- 0 686 816,

- D3 : Firmenprospekt der Firma Hoesch, Dortmund, "Profiltafeln für Hoesch Stahlspundwände", Nachtrag 8, Stand 1/92, Seite 36 ("3.2.1 Profil Hoesch 215") und begleitendes Datenblatt für verschiedene Hoesch-Profile.

IV. Une procédure orale a eu lieu le 5 mai 2006.

V. Requêtes.

L'intimée (Titulaire) demande au principal le rejet du recours et le maintien du brevet tel que délivré, et auxiliairement que la décision attaquée soit annulée et que le brevet soit maintenu sur le fondement de l'une des deux revendications 1 amendées et déposées avec lettre du 4 avril 2006.

La requérante (Opposante) demande l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet pour défaut d'activité inventive et donc de brevetabilité (articles 52(1) et 56 CBE) de son objet.

VI. Les principaux arguments de la requérante, relatifs au défaut d'activité inventive sont les suivants :

L'objet de la revendication 1 serait dérivable de manière évidente de la combinaison D0 et D2 ou D3 et D2, D0 et D3 étant jugés techniquement équivalents dans la mesure où ces deux documents décrivent une palplanche selon le préambule de la revendication 1 du brevet.

La seule différence concerne le prolongement des ailes, ce qui serait de fait synonyme de surépaisseurs locales de matière. A cet égard, la requérante insiste sur la définition du problème technique qui découle objectivement de la partie caractérisante de la revendication 1, et réfute toute obligation de s'en tenir au problème technique subjectif présenté dans le brevet (augmenter le module de résistance, cf. [0007]) et retenu par la division d'opposition (voir par exemple paragraphe 3.1, page 4 de la décision contestée). Au contraire, le problème technique consiste, de manière générale et objective, à augmenter la rigidité d'une palplanche (problème 2) connue de D0 ou D3 et plus précisément d'éviter des fissures dans les coins ou zones de raccord aile-âme (problème 1); ces effets techniques étant d'ailleurs également décrits et présentés comme avantageux dans le brevet, cf. page 3, [0011], lignes 36-37.

Sur ces bases, l'objet revendiqué serait alors évident, la solution proposée dans le brevet étant déjà enseignée dans D2, qui prévoit des renforts de coin par apport de matière supplémentaire, cf. Fig. 3 et page 2, lignes 17-24.

VII. L'intimée a réfuté les arguments avancés par la requérante et invoqué à l'essentiel pour sa part les arguments suivants :

La définition du problème technique à considérer doit s'inscrire dans celle donnée dans le brevet, à savoir l'augmentation du module de résistance d'une palplanche en Z du type connu de D0 ou D3.

Aucun des documents cités n'apporte, ne serait-ce qu'une amorce de solution à ce problème, et très certainement pas D2. D2 est un document très ancien (1929) et concerne des palplanches en forme de U de faible hauteur, donc de type très différent de celui divulgué dans D0 ou D3. En outre, les surépaisseurs 7 illustrées dans les figures de D2 sont agencées au niveau des crochets; la surépaisseur 7 d'une palplanche a pour unique but de coopérer avec un crochet correspondant de la palplanche adjacente de manière à améliorer l'enclanchement des deux palplanches. Certes, D2 indique de manière générale que les coins ou toute autre partie de la palplanche peuvent être renforcés ou pourvus de surépaisseurs suivant les besoins. Cette information ne serait, d'une part, d'aucune utilité pour l'homme du métier désireux d'augmenter le module de résistance d'une palplanche selon D0 ou D3, et, d'autre part, pas de nature suffisante à inciter celui-ci à former des prolongements des ailes selon la manière revendiquée.

La combinaison des documents D0 et D2 ne satisfait donc pas à l'approche problème-solution mais repose purement sur une analyse ex-post facto de l'invention.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Nouveauté

La nouveauté de l'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'a pas été attaquée par la Requérante.

Par ailleurs, la Chambre s'est assurée qu'aucun des documents cités ne divulguait à l'identique l'invention revendiquée.

Le critère de nouveauté exigé aux articles 52(1) et 54(1),(2) CBE est satisfait.

3. Activité inventive

3.1 L'état de la technique le plus proche est indéniablement divulgué par D0 (ou D3 qui lui est techniquement équivalent au regard de l'objet revendiqué).

Il s'agit de palplanches en "Z" laminées à chaud comprenant deux ailes et une âme oblique raccordée aux deux ailes par des coins formant un angle aigu inférieur à 75º.

Comme décrit dans le paragraphe [0004] du brevet, il est possible par optimisation de la géométrie d'atteindre pour ce type de palplanches des valeurs importantes du module de résistance linéique ainsi que du module de résistance spécifique.

3.2 L'objet revendiqué se distingue de cet état de la technique par la partie caractérisante de la revendication 1 :

"chacune des deux ailes (12', 12") présente un prolongement (22', 22") qui est en saillie par rapport au plan fictif (24', 24") prolongeant la face plane (18', 18") de l'âme située du même côté que la face extérieure (14', 14") de l'aile respective."

Il est important de noter que cette partie caractérisante ne définit pas simplement un renforcement des coins externes des palplanches en Z par un apport supplémentaire et local de matière, mais exige de façon précise un prolongement en saillie des ailes au-delà de l'âme.

De l'avis de la requérante, chacun de ces prolongements (22´, 22") ne constituerait ni plus ni moins qu'une surépaisseur locale, dont la fonction primaire et principale consiste à renforcer ou rigidifier globalement la palplanche.

La chambre ne partage pas ce point de vue, car l'invention définit l'endroit précis où la matière ajoutée doit être apportée à la palplanche, ainsi que la limitation géométrique de cette matière ajoutée. Ces informations relatives à la forme d'un "prolongement de l'aile" confèrent à cet apport local de matière le caractère distinctif supplémentaire suivant. En termes de fonction technique, bien que l'on puisse concéder que tout apport local de matière notamment au niveau des angles, y compris un apport réalisé sous forme de prolongement, a intrinsèquement pour effet de rigidifier la palplanche, la précision supplémentaire apportée à la conformation particulière de la surépaisseur (sous la forme de prolongement des ailes au-delà des coins de raccords ailes/âme) procure l'avantage technique additionnel de faire augmenter sensiblement le module de résistance d'une palplanche en "Z" sans pour autant faire baisser son module de résistance spécifique.

En outre, cet apport de matière sous la forme de prolongement présente l'avantage supplémentaire de garder inchangées les installations de laminage à chaud.

3.3 Il en résulte que les effets techniques directement obtenus par les caractéristiques distinctives de l'invention conduisent à la définition du problème technique tel que défini dans le brevet (cf. [0007], page 3), à savoir :

d'augmenter le module de résistance d'une palplanche en "Z" laminée à chaud sans pour autant faire baisser son module de résistance spécifique sans nécessiter une augmentation de la largeur des cages de laminage;

et non pas simplement renforcer ou rigidifier de manière globale la palplanche.

3.4 La Chambre, constatant qu'aucun des documents cités n'aborde explicitement le problème technique tel que défini ci-avant, ne peut conclure qu'au caractère non-évident de la solution apportée par l'invention.

3.5 Dans son unique ligne d'argumentation, la requérante a objecté le défaut d'activité inventive de la palplanche revendiquée sur la base de la combinaison de D0 (ou D3) avec D2.

Le document D2 décrit des palplanches en "U" présentant des aspects particuliers selon deux enseignements distincts.

3.5.1 Tout d'abord, l'invention selon D2 (voir par exemple page 2, point 2º du résumé) porte essentiellement sur la géométrie aux abords des crochets d'enclenchement des palplanches en "U". La palplanche présente en un point convenable, voisin de l'ouverture du crochet, un épanouissement 7 se prolongeant de l'âme 5 et au-delà de la face extérieure des ailes 6 (Fig. 1) et destiné à venir en prise avec l'élément qui doit être pris dans le crochet. La fonction attribuée par D2 à la surépaisseur 7 consiste à créer, à un emplacement adéquat de la palplanche, une forme capable de coopérer avec la partie extérieure du crochet d'une palplanche adjacente et ainsi à améliorer l'interconnexion des palplanches.

Ces surépaisseurs 7, explicitement destinées à parfaire la connection des palplanches au niveau de leurs crochets de connexion, sont par nécessité prévues aux endroits appropriés, en l'occurrence dans la zone des crochets, et ceci indépendamment de la proximité des coins de la palplanche.

Dans le mode de réalisation de la Fig. 3, partie de droite, il apparaît d'ailleurs que les surépaisseurs 7 restent dans la zone des crochets alors que les coins en sont très éloignés (voir allongement des ailes en pointillés sur la figure).

L'homme du métier n'aurait ainsi pas considéré l'enseignement de D2 relatif aux surépaisseurs 7 comme une source possible d'inspiration pour rigidifier les palplanches de D0 par ajout de matière dans les coins ailes-âme.

3.5.2 Par ailleurs, le document D2 contient plusieurs citations indiquant la présence éventuelle d'éléments de renforcement de la palplanche, soit sous la forme de surépaisseurs au niveau des angles (page 1, lignes 19-22; page 2, lignes 17-24 et point 3º du Résumé), soit par apport de matière sur la face extérieure de l'âme (page 1, lignes 7-9 et Fig. 2 et 3, éléments 15 et 16).

D2 aborde à ce titre la présence de surépaisseurs dans les angles de la palplanche, mais ceci de manière très évasive et sans plus de détails de réalisation pratique.

3.5.3 Même à poser, sur la base de l'argumentation de la requérante, l'hypothèse suivante :

- que le problème objectif consiste à rigidifier la palplanche et éviter la formation de fissures dans les coins,

- que l'homme du métier puisse déduire de l'enseignement de D2 que des surépaisseurs de renfort de coins permettent à l'évidence d'y prévenir la formation de fissures, et

- que l'homme du métier considère enfin l'inclusion de telles surépaisseurs dans les palplanches de D0 ou D3 comme une solution évidente au problème,

le produit final ainsi obtenu ne serait toujours pas identique à la palplanche selon l'invention pour les raisons suivantes.

3.5.4 La partie caractérisante de la revendication 1 ne définit pas simplement des surépaisseurs locales de renfort mais bien un prolongement des ailes.

Or, le terme "surépaisseurs" n'est pas synonyme de "prolongement" dans le contexte de l'invention. Un prolongement en saillie qui s'étend de l'aile au-delà de l'âme est considéré, certes, comme de la matière supplémentaire venant en bout d'aile mais sous une forme confinée géométriquement et plus précisément de section aux dimensions inscrites dans celles de l'épaisseur de l'aile.

Dans ce contexte, il convient de noter que la matière de raccord 26' entre le prolongement 22' et l'âme telle que définie aux revendications dépendantes 2 à 4 du brevet ne fait pas partie du prolongement en tant que tel, mais relève des contraintes de fabrication par laminage à chaud des palplanches en "Z" munies du prolongement selon la revendication 1.

Toujours est-il que la matière ajoutée par ledit prolongement exclut, par définition du terme "prolongement" toute présence de surépaisseur dépassant le plan extérieur passant par la surface extérieure 14' de l'aile. Un tel enseignement ne peut être d'aucune matière déduit à l'évidence du document D2, qui, s'il suggère implicitement un prolongement, le suggèrerait comme une extension en saillie de l'âme 5 et non pas des ailes 6 (voir par exemple Fig. 2).

3.5.5 En conclusion, D2 ne contient aucun enseignement, susceptible d'inciter l'homme du métier à prévoir au niveau des coins externes d'une palplanche en "Z" laminée à chaud des prolongements correspondant aux surépaisseurs 7 illustrées dans les figures de D2, et encore moins à réaliser ces surépaisseurs sous forme de prolongements des ailes et non pas de l'âme.

4. Le brevet tel que délivré satisfait aux exigences de la CBE. Il n'y a ainsi pas lieu d'examiner les requêtes auxiliaires de l'intimée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

Quick Navigation