European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2007:T090502.20070201 | ||||||||
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Date de la décision : | 01 Fevrier 2007 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0905/02 | ||||||||
Numéro de la demande : | 98400602.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | A61K 7/06 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Compositions cosmétiques détergentes et utilisation | ||||||||
Nom du demandeur : | L'ORÉAL | ||||||||
Nom de l'opposant : | 01) KPSS-Kao Professional Salon Services GmbH 02) HENKEL KGaA |
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Chambre : | 3.3.07 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Modifications - recevables (oui) (requête principale) Nouveauté - (oui) (requête principale) Activité inventive - (non) - solution évidente (requête principale) Requête subsidiaire 1 remise lors de la procédure orale - recevable (non) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le présent recours a été formé par l'opposante 02 (ci-après, la requérante) contre la décision de la division d'opposition, selon laquelle le brevet européen nº 0 878 186 modifiée sur la base d'un jeu de 10 revendications, soumis en tant que requête principale par lettre datée du 27 juin 2001, et d'une description adaptée déposée pendant la procédure orale, et l'invention qui en constitue l'objet satisfaisaient aux conditions de la CBE. Le libellé de la revendication 1 de ladite requête principale s´énonce ainsi :
"1. Composition détergente et conditionnante, caractérisée par le fait qu'elle comprend, dans un milieu cosmétiquement acceptable, (a) une base lavante comprenant au moins 5 à 20% en poids par rapport au poids total de la composition d'un tensioactif anionique choisi dans le groupe formé par les sels des alkyléther sulfates, alkylamidoéther sulfates, alkylaryléther sulfates, le radical alkyle ou acyle de tous ces différents composés comportant de préférence de 8 à 24 atomes de carbone et le radical aryle désignant de préférence un groupement phényle ou benzyle et (b) un système conditionneur comprenant au moins une silicone insoluble non aminée et au moins un polymère cationique choisi parmi les homopolymères comportant comme constituant principal de la chaîne des motifs répondant aux formules (i) et/ou (I'):
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
formules dans lesquelles k et t sont égaux à 0 ou 1, la somme k + t étant égale à 1 ; R3 désigne un atome d'hydrogène ou un radical méthyle ; R1 et R2, indépendamment l'un de l'autre, désignent un groupement alkyle ayant de 1 à 22 atomes de carbone, un groupement hydroxyalkyle dans lequel le groupement alkyle a de préférence 1 à 5 atomes de carbone, un groupement amidoalkyle inférieur (1 à 5 atomes de carbone) ou R1 et R2 peuvent désigner conjointement avec l'atome d'azote auquel ils sont rattachés, des groupement hétérocycliques, tels que pipéridinyle ou morpholinyle ; Y- est un anion tel que bromure, chlorure, acétate, borate, citrate, tartrate, bisulfate, bisulfite, sulfate, phosphate."
II. Deux oppositions avaient été formées en vue d'obtenir la révocation dudit brevet européen dans son intégralité sur le fondement des articles 100a) et 100b) CBE, à savoir défaut de nouveauté, manque d'activité inventive et insuffisance de l'exposé. Les allégations de défaut de nouveauté et de manque d'activité inventive se fondaient, entre autres, sur les documents suivants :
D1 : EP-A-0 531 650 ;
D4 : EP-A-0 400 976 ;
D6 : WO-A-96/32919 ;
D11 : WO-A-97/16168.
III. D'après la décision attaquée :
a) La requête principale satisfaisait aux exigences des articles 123(2) et 123(3) CBE.
b) L'exposé de l'invention était suffisamment clair et complet pour que l'homme du métier puisse l'exécuter.
c) L'objet de la requête principale était nouveau par rapport aux objets tels que divulgués dans l'une quelconque des antériorités D1, D4, D6 et D11.
d) Comme cet objet ne découlait pas de manière évidente de D1 ou de la combinaison de D2 et D12, il impliquait aussi une activité inventive.
IV. Dans son mémoire de recours, la requérante a détaillé les motifs de droit et de fait à l'appui de ses allégations : défaut de nouveauté au vu de l'un quelconque des documents D1, D6 et D11 ; manque d'activité inventive au vu de D1, ou de D4, en tant qu'état de la technique le plus proche.
V. La titulaire du brevet opposé (intimée) a maintenu que l'objet de la requête principale était nouveau au vu des objets divulgués par l'un quelconque des documents D1, D6 et D11, et aussi que cet objet impliquait une activité inventive au vu de D1 ou de D4.
En réaction à une communication de la Chambre pour la préparation de la procédure orale, l'intimée a néanmoins déposé des résultats d'essais comparatifs supplémentaires par rapport à D1 ainsi que deux jeux de revendications modifiées en tant que requêtes subsidiaires 1 et 2 (lettre datée du 27 décembre 2006).
VI. L'opposante 01 (partie de droit selon l'article 107 CBE, deuxième phrase) ne s'est pas exprimée durant la procédure écrite.
VII. La procédure orale a eu lieu le 1**(er) février 2007.
La requérante a essentiellement utilisé l'antériorité D1 pour étayer ses allégations de défaut de nouveauté et de manque d'activité inventive. Elle n'a plus invoqué le défaut de nouveauté vis-à-vis de D6 et, concernant le défaut de nouveauté au vu de D11, elle s'est simplement limitée à renvoyer aux arguments déposés durant la procédure écrite.
L'intimée a remis un jeu de revendications modifiées 1 à 10 en tant que requête subsidiaire 1, remplaçant les requêtes subsidiaires 1 et 2 remises par lettre datée du 27 décembre 2006. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 s'énonce ainsi :
"1. Composition détergente et conditionnante, caractérisée par le fait qu'elle comprend, dans un milieu cosmétiquement acceptable, (a) une base lavante comprenant au moins 5 à 20% en poids par rapport au poids total de la composition d'un tensioactif anionique choisi dans le groupe formé par les sels des alkyléther sulfates, alkylamidoéther sulfates, alkylaryléther sulfates, le radical alkyle ou acyle de tous ces différents composés comportant de préférence de 8 à 24 atomes de carbone et le radical aryle désignant de préférence un groupement phényle ou benzyle et (b) un système conditionneur constitué par une silicone insoluble non aminée et par un polymère cationique choisi parmi les homopolymères comportant comme constituant principal de la chaîne des motifs répondant aux formules (i) et/ou (I'):
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
formules dans lesquelles k et t sont égaux à 0 ou 1, la somme k + t étant égale à 1 ; R3 désigne un atome d'hydrogène ou un radical méthyle ; R1 et R2, indépendamment l'un de l'autre, désignent un groupement alkyle ayant de 1 à 22 atomes de carbone, un groupement hydroxyalkyle dans lequel le groupement alkyle a de préférence 1 à 5 atomes de carbone, un groupement amidoalkyle inférieur (1 à 5 atomes de carbone) ou R1 et R2 peuvent désigner conjointement avec l'atome d'azote auquel ils sont rattachés, des groupement hétérocycliques, tels que pipéridinyle ou morpholinyle ; Y- est un anion tel que bromure, chlorure, acétate, borate, citrate, tartrate, bisulfate, bisulfite, sulfate, phosphate."
VIII. Pour exposer sa position à l'encontre de la requête principale et de la requête subsidiaire 1 déposée pendant la procédure orale, la requérante a essentiellement soutenu que :
Requête principale
a) Les revendications modifiées n'appelaient pas d'objections formelles.
b) L'allégation d'insuffisance de l'exposé n'était plus maintenue.
c) Quant à la nouveauté, la revendication 1 de D1 définissait de manière générale trois groupes de composants obligatoires du système conditionneur : un polymère cationique, une silicone et du collagène. Selon les revendications 6 à 8, la présence d'un tensioactif anionique du type alkyléther sulfate était obligatoire. En particulier, la description de D1 mentionnait cinq groupes de polymères cationiques et n'indiquait pas que la silicone obligatoire devait être aminée. Quand bien même un choix du polymère cationique s'avérerait nécessaire, ce choix se situait dans un cadre étroit n'allant pas au delà d'une dizaine de combinaisons possibles, qui ne pouvait donc représenter une sélection. Les exemples 1 et 2 de D1 montraient que le composant tensioactif et/ou le polymère cationique dans les compositions décrites étaient remplaçables. En particulier, l'exemple 1 comportait les composants les plus préférés de D1 et représentait donc le mode de réalisation préféré selon l'invention de D1. Ce mode se distinguait de l'objet du brevet en litige par le choix du polymère cationique. L'homme de l'art lisant D1 comprendrait néanmoins que chacun des cinq polymères cationiques mentionnés est apte à l'emploi, ce qui reviendrait à dire que ce choix est arbitraire. Par conséquent, l'objet tel que revendiqué ne saurait être nouveau.
d) Quant à l'activité inventive, les arguments développés à l'encontre de la nouveauté de la composition revendiquée pouvaient également étayer l'allégation selon laquelle la composition telle que revendiquée serait une alternative évidente par rapport aux compositions de D1. Cette alternative découlait premièrement du contenu du brevet en litige, qui incluait en tant que tensioactif anionique l'alkyléther sulfosuccinate, comme dans D1. Deuxièmement, aucun exemple du brevet ne montrait qu'une composition comprenant un seul tensioactif serait à même de résoudre le problème posé. Troisièmement, aucun essai comparatif ne démontrait qu'un gain de propriétés cosmétiques soit obtenu pour l'ensemble des compositions revendiquées. Toutes les variations possibles de compositions décrites par D1 aboutiraient aux mêmes effets que ceux invoqués par l'intimée. L'évidence de l'alternative découlerait donc du fait qu'une composition telle que revendiquée ne représenterait qu'une des compositions possibles dans le cadre enseigné par D1.
Requête subsidiaire 1
a) La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 ne possédait pas de fondement clair dans la demande telle que déposée.
b) Quant à la clarté, la revendication 1 définissait un système conditionneur qui, au vu de l'expression "constitué par", était limité à deux composants. Néanmoins, cette définition concernant un système fermé était utilisée dans un contexte qui, au vu de l'expression générale "comprenant ...", en fait concernait une formulation du type ouvert. Par conséquent, la composition faisant l'objet de la revendication 1 ne saurait exclure d'autres composants, en particulier un autre système conditionneur. Cela était par ailleurs confirmé par la description du brevet en litige. Comme les autres composants pouvant être présents dans la composition de la revendication 1 pourraient aussi avoir un effet conditionnant, le "système conditionneur" de la revendication 1 ne saurait être clairement défini. En outre, il ne serait plus clair quels sont parmi les exemples du brevet ceux tombant encore sous la revendication 1. Donc, la formulation choisie par l'intimée ne saurait en aucun cas apporter la limitation souhaitée.
c) Comme la composition de la revendication 1 n'excluait pas la présence de collagène tel qu'utilisé dans D1, la modification proposée ne saurait surmonter le motif d'opposition pour manque d'activité inventive par rapport à D1. Quand bien même la définition serait claire, il n'aurait pas été montré par des exemples comparatifs que l'absence de collagène permette de résoudre un problème technique particulier. Donc, D1 resterait en tous cas encore très pertinent.
d) Par conséquent, la requête subsidiaire 1 posait plusieurs questions qui ne pouvaient toutes être tranchées au cours de la procédure orale. Elle ne saurait donc être recevable.
IX. L'intimée, à l'appui de la requête principale et de la requête subsidiaire 1 déposée lors de la procédure orale le 1**(er) février 2007, a soutenu que :
Requête principale
a) Les modifications se fondaient sur la demande telle que déposée.
b) La suffisance de l'exposé de l'invention n'était plus contestée.
c) Quant à la nouveauté, les revendications 1 et 6 à 8 de D1 ne définissaient ni la proportion de tensioactif anionique, ni la nature du polymère cationique ou celle de la silicone. En particulier, la description de D1 se référant pour les polymères cationiques à d'autres documents montrerait la grande variété de polymères cationiques envisagée. Quant à la silicone, D1 mentionnait également des dérivés solubles. Aucun des six exemples de D1 ne divulguait l'association ternaire telle que revendiquée dans le brevet en litige. D1 ne saurait donc contenir une divulgation directe et non ambiguë d'une composition telle que revendiquée. Pour arriver à une telle composition, l'homme du métier devrait faire de multiples choix rétrospectifs parmi les exemples et les listes de composants de D1.
d) Quant à l'activité inventive, grâce à une combinaison particulière d'agents détergents anioniques et de polymères cationiques à densité de charge élevée, l'invention permettait de réduire les effets néfastes des tensioactifs anioniques sur les cheveux tout en permettant des gains de propriétés cosmétiques (coiffage, peignage, lissage, etc.). Le problème à résoudre consistait dans la formulation d'une composition possédant de bonnes propriétés nettoyantes et des propriétés cosmétiques améliorées. Les essais dans le brevet en litige et les essais comparatifs soumis successivement montraient que le choix des trois composants essentiels définis dans la revendication 1 conduisait à des effets surprenants, qui ne sauraient être enseignés par D1. Si dans des compositions telles que revendiquées on remplaçait le polymère cationique par un de ceux décrits dans D1, aucun gain de propriétés cosmétiques ne serait obtenu. Quant à l'évidence de la composition revendiquée, D2 évoquait à sa date de publication, c'est-à-dire quatre mois avant l'invention présente, les interactions néfastes entre le tensioactif anionique et les polymères cationiques à haute densité de charge. Afin de les réduire, D2 incitait à utiliser des sulfonates d'alpha oléfine. Donc, l'homme de l'art ne trouverait ni dans D1, ni dans D2, ni dans les autres documents cités, une indication à l'obtention de gains de propriétés cosmétiques tels que ceux atteints par l'invention. La solution telle que revendiquée ne saurait être évidente.
Requête subsidiaire 1
a) L'expression "constitué par" utilisée pour limiter la composition du système conditionneur dans la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 se fondait sur la description d'origine.
b) Cette terminologie était également utilisée dans la revendication 1 de D1. Elle excluait que la composition comprenne d'autres conditionneurs que ceux spécifiquement énoncés dans la revendication. Donc, la revendication 1 était claire.
c) La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 visait en particulier à exclure la présence de collagène dans le système conditionneur, pour s'éloigner de D1, afin de surmonter le motif d'opposition de manque d'activité inventive.
d) Par conséquent la requête était recevable.
X. La requérante (opposante 02) a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen litigieux.
XI. L'intimée (titulaire du brevet) a demandé le rejet du recours, alternativement le maintien du brevet litigieux sous la forme modifiée selon la requête subsidiaire 1 soumise lors de la procédure orale le 1**(er) février 2007.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
Requête principale
2. Modifications
2.1 La revendication 1 de la requête principale se fonde sur les revendications 1, 2 et 8 telles que déposées. Les autres revendications, mis à part les changements de numérotation de celles-ci et les références aux revendications précédentes nécessités par l'inclusion des revendications 2 et 8 d'origine dans la revendication 1, n'ont pas été modifiées. Les revendications de la requête principale se fondent donc sur la demande telle que déposée.
2.2 Les revendications telles que délivrées étant identiques aux revendications de la demande telle que déposée, il découle de ce qui précède que la protection conférée par le brevet n'a pas été étendue.
2.3 Par conséquent, les revendications de la requête principale ne vont pas à l'encontre des articles 123(2) et 123(3) CBE.
2.4 Comme les modifications visent à surmonter un motif d'opposition, le défaut de nouveauté allégué, les exigences de la règle 57bis CBE sont satisfaites.
3. Insuffisance de l'exposé
Au cours de la procédure de recours, la requérante n'a plus invoqué le motif d'insuffisance de l'exposé au titre de l'article 100b) CBE. La Chambre n'a aucune raison d'adopter une position différente.
4. Nouveauté
4.1.1 D1 porte sur un produit de lavage des cheveux à base aqueuse, comprenant au moins un tensioactif anionique et un agent conditionnant, caractérisé en ce que le produit de lavage contient en tant qu'agent conditionnant un mélange de
a) 0,1 à 1,0 % en poids, par rapport à la composition totale, d'au moins un polymère cationique,
b) 0,1 à 1,0 % en poids, par rapport à la composition totale, d'au moins un collagène ou dérivé de collagène hydrosoluble, ainsi que
c) 0,5 à 8,0 % en poids, par rapport à la composition totale, d'au moins un polysiloxane (revendication 1).
4.1.2 En particulier, le produit de lavage selon D1 peut contenir, en tant que tensioactif anionique, un mélange d'un alkyléther sulfate en C12-C14 et d'un sulfonate d'oléfine dans un rapport pondéral allant de 5:1 à 3:2 (revendication 7).
4.1.3 D'après la description de D1 :
a) Parmi les tensioactifs anioniques aptes à l'invention, les alkyléther sulfates en C10-C18, plus particulièrement ceux en C12-C14, par exemple les lauryléther sulfates, sont préférés. Un tensioactif anionique particulièrement préféré est constitué par un mélange d'un alkyléther sulfate en C12-C14, par exemple contenant de 2 à 10 groupes d'oxyde d'éthylène, et d'un sulfonate d'alpha oléfine (page 2, lignes 20-25).
b) Un tensioactif anionique comprenant un sel alcalin d'un monoester d'un acide sulfosuccinique, en particulier en mélange avec des alkylpolyglucosides, est également préféré (revendication 8 ; page 2, ligne 27 ; page 3, lignes 2-4).
c) Les silicones aptes à l'emploi comprennent le diméthylsiloxane, le phényldiméthylsiloxane ainsi que les huiles de silicone volatiles, telles que l'hexaméthyldisiloxane ou les cyclométhicones, et aussi des polyéthersiloxanes (page 4, lignes 1-6).
4.1.4 D1 illustre par ses exemples 1 à 6 la manière de formuler les compositions décrites, en particulier la combinaison de tensioactif anionique et d'agent conditionnant, à savoir :
a) L'exemple 1 (page 4) porte sur une composition de shampooing contenant 20% en poids, par rapport au poids total de la composition, de lauryléthersulfate de sodium (contenant de 1 à 4 unités d'oxyde d'éthylène, à 30% en poids), un dérivé cationique de cellulose (Polyquaternium-10) et un diméthylpolysiloxane (Dimethicone).
b) L'exemple 2 (page 5) concerne une composition de shampooing contenant du lauryléthersulfosuccinate de disodium (20% en poids), du chlorure de polydiméthyldiallylammonium (Polyquaternium-6) et une diméthylpolysiloxane (Dimethicone).
c) L'exemple 3 (page 5) a trait à une composition de shampooing contenant 18 % en poids, par rapport au poids total de la composition, de lauryléthersulfate de sodium (contenant 2 unités d'oxyde d'éthylène, à 30% en poids), 12% en poids, par rapport au poids total de la composition, de lauryléthersulfosuccinate de disodium (à 30% en poids), un copolymère de vinylpyrrolidone et de diméthylaminoéthylméthacrylate (Polyquaternium-11), et un mélange de diméthylpolysiloxanes linéaires et cycliques (Dimethicone/Cyclomethicone).
d) L'exemple 4 (page 6) décrit une composition de shampooing contenant 27,5% en poids, par rapport au poids total de la composition, de lauryléthersulfate de sodium (contenant de 2 à 4 unités d'oxyde d'éthylène, à 30% en poids), un dérivé cationique de cellulose (Polyquaternium-10) et une huile de silicone.
e) L'exemple 5 (page 6) illustre une composition de shampooing contenant 30% en poids, par rapport au poids total de la composition, de laurylsulfate de monoéthanolamine (à 30% en poids), un dérivé cationique de cellulose (Polyquaternium-10) et une huile de silicone.
f) L'exemple 6 (page 6) divulgue un shampooing contenant 25% en poids, par rapport au poids total de la composition, de lauryléthersulfate de sodium (contenant de 2 à 4 unités d'oxyde d'éthylène, à 30% en poids), un dérivé cationique de cellulose (Polyquaternium-10) et une huile de silicone.
4.1.5 De ces exemples de D1 l'on peut tirer les conclusions suivantes :
a) Les tensioactifs anioniques préférés à base de lauryléthersulfate de sodium sont employés dans des formulations de shampooing comprenant un dérivé de cellulose cationique (Polyquaternium-10) ou un copolymère de vinylpyrrolidone et de diméthylaminoéthylméthacrylate (Polyquaternium-11) (exemples 1, 3 à 4 et 6 de D1).
b) Les tensioactifs à base de lauryléthersulfosuccinate de disodium ou contenant ce succinate, sont employés dans des formulations de shampooing comprenant soit du chlorure de polydiméthyldiallylammonium (Polyquaternium-6) soit un copolymère de vinylpyrrolidone et de diméthylaminoéthylméthacrylate (Polyquaternium-11) (exemples 2 et 3 de D1).
c) Concernant les silicones exemplifiées par D1, il n'est pas contesté qu'elles ne soient ni solubles ni aminées.
4.1.6 A part ses exemples, D1 ne contient aucun autre enseignement divulguant la manière dont les tensioactifs anioniques, les polymères cationiques et les silicones définis dans la revendication 1 doivent être utilisés en combinaison.
4.1.7 Par conséquent, D1 ne divulgue pas de manière directe et non ambiguë une composition contenant l'association ternaire alkyle éther sulfate en tant que tensioactif anionique, homopolymère cationique tel que revendiqué et une silicone insoluble non aminée.
4.1.8 L'argument de la requérante, d'après lequel en partant d'un quelconque exemple de D1 qui se distingue de la composition telle que revendiquée par un seul composant, le tensioactif anionique ou le polymère cationique, il ne faut, pour arriver à l'objet revendiqué, choisir le composant manquant que dans une seule liste, revêt un caractère rétrospectif. En fait, D1 divulgue soit des listes générales de composants possibles telles quelles, soit des exemples. Ces exemples représentent néanmoins des choix délibérés parmi les composants mentionnés dans lesdites liste générales décrites dans D1. Le remplacement d'un composant par un autre dans un tel choix délibéré (exemple), comme le fait la requérante, signifie qu'une composition telle que présentement revendiquée est déduite de la divulgation de D1 par la requérante sur la base, premièrement, du choix d'un exemple ne comportant qu'une seule différence par rapport aux compositions revendiquées et, deuxièmement, d'un choix au sein d'une liste du composant manquant. Ce raisonnement de la requérante se fonde sur l'assomption que tous les composants d'une même liste soient interchangeables dans toute formulation exemplifiée comprenant un composant d'une telle liste sans modification ultérieure de la formulation. Cela revient à dire que D1 divulguerait pour l'homme de l'art, même si aucune indication pour ce faire n'est donnée par D1, toute composition résultant du simple remplacement dans une composition exemplifiée d'un composant particulier de cette composition par un autre composant mentionné dans une liste générale définissant un groupe de composants pouvant être utilisés auquel appartient le composant particulier. Cette double sélection effectuée par la requérante au sein de D1 pour arriver à l'objet revendiqué n'est pas en conformité avec la jurisprudence des chambres de recours de l'OEB (4ème édition, 2001, I.C.4.1.1(b)). Les compositions résultants de telles modifications des exemples ne sont donc pas divulguées dans D1 de manière directe et non ambiguë. L'argument utilisé par la requérante pour attaquer la nouveauté de la composition faisant l'objet de la revendication 1 n'est donc pas convaincant.
4.1.9 Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête principale est nouveau.
5. Activité inventive
5.1 Le brevet en litige porte sur des compositions cosmétiques détergentes et leur utilisation.
Etat de la technique le plus proche
5.2 De telles compositions sont connues, entre autres, de D1 (voir point 4, supra), qui a été considéré par les opposantes comme l'état de la technique le plus proche.
5.2.1 D1 concerne le même domaine technique que le brevet en litige et divulgue des compositions cosmétiques détergentes conçues pour atteindre, en même temps, un nettoyage non agressif ainsi que d'excellentes propriétés cosmétiques telles que toucher, peignage, volume et brillance des cheveux (page 2, lignes 11-13). Ces effets correspondent ou se chevauchent avec ceux du brevet en litige (paragraphe [0008]). Le brevet en litige et D1 adressent donc des objectifs et/ou des problèmes communs. En outre, les compositions de D1 sont, du point de vue de leur composition, voisines de celles faisant l'objet du brevet en litige.
5.3 Par conséquent, conformément à l'approche problème-solution (Jurisprudence, supra, I.D.3), l'état de la technique le plus proche est constitué par l'une quelconque des compositions telles que décrites par D1.
Problème et solution
6. Sur la base des résultats de l'exemple comparatif 1B du brevet en litige, d'une part, et des essais comparatifs soumis successivement, d'autre part, l'intimée a invoqué que le problème résolu par les compositions faisant l'objet du brevet en litige, par rapport à celles décrites dans D1, soit formulé en termes d'une amélioration des propriétés de conditionnement des compositions décrites dans D1, notamment souplesse, démêlage, lissage et légèreté.
6.1 Les résultats des essais comparatifs en question, outre l'exemple comparatif 1B du brevet en litige, sont ceux qui ont été déposés par lettres datées, respectivement, du 29 mai 2002 (en procédure d'opposition) et du 27 décembre 2006 (en procédure de recours). En particulier :
a) La composition B selon l'exemple 1 du brevet en litige diffère de la composition A (conforme à l'invention) du même exemple 1 par le fait que l'homopolymère de chlorure de diméthyldiallylammonium (MERQUAT 100, P.M. 400 000, CALGON) conformément à la revendication 1 du brevet en litige a été remplacé par une cellulose quaternisée (JR 400, UNION CARBIDE). D'après les experts de l'intimée, la composition A permettrait d'atteindre une amélioration nette de propriétés telles que démêlage, douceur et lissage des cheveux.
b) La composition B selon le rapport d'essais soumis par lettre datée du 29 mai 2002 diffère de la composition de l'exemple 3 du brevet en litige (nommée composition A dans ce rapport) par le fait que le lauryléthersulfate de sodium a été remplacé par du monosulfosuccinate d'alcool laurique oxyéthyléné. Les compositions C et D de ces essais diffèrent respectivement desdites compositions A et B par l'absence de système conditionneur (c'est-à-dire par l'absence d'homopolymère de diallyldiméthylammonium et d'une silicone non aminée). D'après les résultats de ces essais, la composition A ne serait pas seulement plus stable que la composition B, mais elle apporterait un toucher nettement plus naturel (moins chargé sur cheveux mouillés). En outre, la comparaison avec les compositions C et D montrerait l'effet synergique résultant de la combinaison de l'agent lavant et du système conditionneur dans les compositions selon l'invention.
c) La composition B selon les essais comparatifs soumis par lettre datée du 27 décembre 2006 diffère de la composition A (conforme à l'invention) des mêmes essais par le fait que l'homopolymère de chlorure de diméthyldiallylammonium (MERQUAT 100 de NALCO) conformément à la revendication 1 du brevet en litige a été remplacé par un Polyquaternium-11 (Gafquat 755 de ISP). D'après les résultats des essais, la composition A permettrait d'atteindre une amélioration de propriétés telles que souplesse au rinçage, démêlage, légèreté et lissage au toucher.
6.2 Néanmoins, aucune des compositions B de ces essais comparatifs n'est conforme aux compositions décrites par D1, qui doivent comprendre un système conditionneur constitué obligatoirement par trois éléments essentiels (polymère cationique, silicone et collagène ou dérivé de collagène hydrosoluble).
6.3 En vertu de la jurisprudence des chambres de recours (supra, I.D.4.4), les prétendus avantages qui ont été invoqués par l'intimée (titulaire du brevet) par rapport à l'état de la technique le plus proche, mais qui ne sont pas étayés par des preuves suffisantes, ne peuvent être pris en considération pour déterminer le problème à la base de l'invention et donc pour apprécier l'activité inventive.
6.4 Tel est le cas dans la présente affaire, où les éléments de preuve ne permettent pas de démontrer qu'un gain de propriétés cosmétiques est également obtenu par rapport à des compositions selon D1, c'est-à-dire des compositions qui comprennent également un collagène ou dérivé de collagène hydrosoluble, un des éléments essentiels du système conditionneur de D1.
6.5 Comme, dans le cas présent, l´intimée n'a pas démontré que l'objet des revendications du brevet litigieux apporte une amélioration quelconque par rapport à l'état de la technique le plus proche, le problème objectivement résolu par l'objet des revendications présentes doit être reformulé de manière moins ambitieuse, à savoir la mise à disposition d'une autre composition cosmétique (Jurisprudence, supra, I.D.4.5 et 4.6).
Caractère de la solution
6.6 Il reste à déterminer si l´homme de l´art partant de D1 et souhaitant résoudre le problème moins ambitieux posé serait arrivé de manière évidente à l´objet des revendications en litige.
6.7 D1, qui divulgue de manière générale, dans plusieurs listes, les composants tels que définis dans la revendication 1 en litige, mentionne le fait que les tensioactifs anioniques à base d'alkyléther sulfates ou à base de lauryléthersulfosuccinate sont tous deux préférés (point 4.1.3(b), supra). Aussi, D1 met sur le même plan le chlorure de polydiméthyldiallylammonium et les autres polymères cationiques décrits. Les compositions exemplifiées par D1 en majorité ne se distinguent de celles faisant l'objet de la revendication 1 en appel que par un seul composant, le tensioactif anionique ou le polymère cationique. De plus, l'exemple 3 de D1 divulgue une composition cosmétique qui contient un mélange des deux tensioactifs anioniques préférés (alkyléther sulfate et lauryléther sulfosuccinate) en combinaison avec un polymère cationique autre que celui employé avec chacun desdits tensioactifs utilisés séparemment (exemples 1 et 2). Un de ces tensioactifs préférés, le lauryléther sulfosuccinate, est susceptible d'être combiné avec le chlorure de diméthyldiallylammonium, tel que défini dans la revendication 1 en recours (exemple 2 de D1). Une incompatibilité spécifique entre l'alkyléther sulfate et le chlorure de polydiméthyldiallylammonium n'est pas mentionnée par D1. Cela revient à dire que, au moins quand les composants préférés du système tensioactif anionique sont utilisés en mélange, les polymères cationiques sont relativement interchangeables l'un avec l'autre. En d'autres termes, D1 n'aurait pas dissuadé l'homme de l'art d'employer un chlorure de polydiméthyl-diallylammonium dans une composition cosmétique, telle que décrites, notamment dans l'exemple 3, comprenant un lauryléther sulfosuccinate et aussi un alkyléther sulfate.
6.8 L'intimée a soutenu qu'il n'y avait aucune incitation pour cette autre composition dans D1. Tout au contraire, les choix multiples qu'il était nécessaire d'opérer dans D1 pour obtenir les compositions présentement revendiquées qui permettent de résoudre le problème indiqué étaient, en l'absence d'une incitation à formuler précisément une composition telle que revendiquée, indicative de la non évidence des compositions revendiquées.
6.9 Cet argument n'est pas convaincant. La réponse à la question de savoir ce que l'homme de l'art aurait fait dépend du résultat qu'il voulait obtenir. Si, comme dans le présent cas, l'homme de l'art voulait simplement formuler une autre composition dans le cadre de D1, tous les exemples de D1 convenaient comme point de départ et chacun des composants listés dans D1 était apte pour simplement obtenir une modification compositionnelle des exemples de D1. Cela n'impliquait donc pas nécessairement une activité inventive (T 0939/92, JO 1996, 309, Point 2.5.3 des motifs).
6.10 Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête principale était une alternative évidente dans le cadre du seul document D1. Elle ne peut donc impliquer l'activité inventive requise par l'article 56 de la CBE.
6.11 Il suit de ce qui précède qu'un motif d'opposition s'oppose au maintien du brevet litigieux en la forme de la requête principale.
6.12 La requête principale n'est donc pas acceptable.
7. Au vu de cette conclusion, la Chambre n'a plus besoin de décider sur le défaut de nouveauté allégué au vu de la composition exemplifiée par D11.
Requête subsidiaire 1
8. Modifications
8.1 Par rapport à la requête principale, la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 comporte la modification suivante : "(b) un système conditionneur constitué par une silicone insoluble non aminée et un polymère cationique choisi parmi ...".
8.2 Le but déclaré de cette modification est de limiter le contenu du système conditionneur aux deux composants définis, afin de le distinguer de celui divulgué par D1, qui en sus comprend obligatoirement un collagène ou un dérivé de collagène.
8.3 La formulation choisie par l'intimée est contestée par les opposantes qui ont soulevé toute une série d'objections au titre des articles 84 et 123(2) CBE.
8.4 La formulation choisie par l'intimée appelle, en particulier, les remarques suivantes :
8.4.1 Premièrement, la revendication 1 porte sur une composition détergente et conditionnante qui, au vu de l'expression "qu'elle comprend, dans un milieu cosmétiquement acceptable", est ouverte quant à ses possibles composants et quant aux possibles milieux cosmétiquement acceptables.
8.4.2 Deuxièmement, la fonction "un système conditionneur" attribuée à deux des composants de la composition revendiquée, qui par ailleurs est ouverte quant à la présence d'autres composants, ne saurait limiter le nombre total de composants conditionneurs contenu dans la composition selon la revendication 1.
8.4.3 Troisièmement, le nombre d'autres composants possibles de la composition telle que revendiquée est selon la description du brevet en litige très grand. La liste telle que donnée au paragraphe [0063] du brevet en litige (qui se fonde sur la demande d'origine) comprend entre autres les familles de polymères cationiques, protéines et leurs hydrolysats. D'après la requérante et la partie de droit, ces autres composants possibles pourraient eux aussi exercer une fonction conditionnante. Donc, plusieurs parmi les autres composants possibles, même si utilisés pour exercer d'autres fonctions, pourraient exercer également une fonction conditionnante. La question d'une éventuelle contradiction entre les revendications et la description se poserait donc, si la revendication 1 était interprétée d'une manière différente de celle exposée au point 8.4.2.
8.4.4 De plus, il ne serait plus clair quels exemples de composition du brevet en litige seraient encore conformes à la limitation et à l'interprétation recherchées.
8.4.5 En d'autres termes, les limites de la revendication 1 quant au composant conditionnant ne seraient plus certaines.
8.4.6 Il découle de ce qui précède que la modification apportée soit engendre une contradiction entre les revendications et la description contrevenant aux exigences de l'article 84 CBE, soit ne saurait nullement limiter la présence possible de tout autre composant ou de tout autre système conditionneur dans la composition revendiquée.
8.4.7 Sans limiter le nombre de composants conditionneurs de la composition revendiquée, la modification apportée ne peut changer le problème résolu par rapport à D1.
8.4.8 Cela revient à dire que la rédaction de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 ne saurait apporter la limitation souhaitée pour écarter D1 du débat.
8.4.9 L'argument de l'intimée selon lequel la formulation choisie serait la même que celle de la revendication 1 de D1, et par conséquent devrait être acceptée, ne peut être convaincant, car rien ne permet de penser que la Chambre dans un cas similaire à celui de la demande selon D1 aurait adopté une position divergente de celle soutenue dans l'affaire en instance.
8.5 Outre le fait que les modifications apportées nécessiterait, comme soutenu par les opposantes, un examen approfondi quant aux exigences de l'article 123(2) CBE, la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 pose toute une série de nouvelles questions concernant les exigences de l'article 84, et également celles de l'article 56 CBE. La Chambre décide donc de ne pas exercer sa discrétion d'accepter cette requête tardive. Par conséquent, la requête subsidiaire 1 soumise pendant la procédure orale par l'intimée n'est pas recevable.
9. L'intimée n'ayant pas produit d'autres requêtes, la Chambre ne peut que constater que le motif d'opposition au titre de l'article 100a) CBE s'oppose au maintien du brevet.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. Le brevet est révoqué.