T 0804/02 () of 23.6.2005

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2005:T080402.20050623
Date de la décision : 23 Juin 2005
Numéro de l'affaire : T 0804/02
Numéro de la demande : 98123582.3
Classe de la CIB : C22C 21/06
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : Produit pour construction soudée en alliage AlMgMn à résistance mécanique améliorée
Nom du demandeur : Pechiney Rhenalu
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.2.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
Mot-clé : Nouveauté (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Par décision rendue le 20 février 2002, la division d'examen a rejeté la demande de brevet européen N° 98 123 582.3, notamment pour manque de nouveauté de l'objet revendiqué par rapport à l'état de la technique.

II. Contre cette décision, le requérant (demandeur) a formé un recours le 2 avril 2002. La taxe de recours a été acquittée le même jour et le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 19 juin 2002.

III. Dans une notification, la Chambre a exprimé son opinion provisoire aussi bien sur la forme que sur le fond de l'objet revendiqué. Etant donné que la présente demande est une demande divisionnaire (la demande initiale N° 96 904 891.7, qui a donné lieu à la délivrance du brevet européen EP-B-0 804 626, fait objet du recours T 1182/03) et que l'objet des revendications est très proche, le requérant a été informé que tous les documents pris en compte lors du recours concernant la demande initiale étaient introduits dans la présente procédure.

IV. Des observations sur la brevetabilité de l'objet de la demande ont été présentées par des tiers au titre de l'article 115 CBE.

V. Les documents auxquels il est fait référence dans la présente décision sont les suivants :

D6 : C. A. Lavender et al., "Development of Superplasticity in 5083 aluminium with additions of Mn and Zr", Materials Science Forum, volumes 170 -172, (1994), pages 279 à 286

D13 : B. A. Cassie et al. : "Composition affects tensile strength of welded aluminium-magnesium alloy", Metal Construction and British Welding Journal, janvier 1973, pages 11 à 19

D28A : JP-A-06 212 373 (traduction en anglais) .

VI. Une procédure orale s'est tenue le 23 juin 2005, au cours de laquelle le requérant a modifié ses requêtes. À la fin de procédure orale, il a requis :

- l'annulation de la décision contestée et

- la délivrance d'un brevet européen sur la base du jeu de revendications 1 à 6 (requête principale) ou sur la base du jeu de revendications 1 à 5 (requête subsidiaire n° 1) déposées lors de la procédure orale.

VII. La revendication 1 selon les différentes requêtes se lit comme suit :

Requête principale :

"1) Tôle pour construction soudée en alliage AlMgMn de composition (% en poids) :

4,3 < Mg < 5,0

0,8 < Mn < 1,0

contenant Fe, Si et Zn en quantité telle que :

Fe < 0,20

Si < 0,25

Zn < 0,40

éventuellement un ou plusieurs des éléments Cr, Cu, Ti, Zr, tels que :

Cr < 0,15

Cu < 0,20

Ti < 0,20

Zr < 0,20

autres éléments < 0,05 chacun et < 0,15 au total, avec Mn + 2 Zn > 0,8,

ladite tôle présentant

a) une fraction volumique de dispersoïdes supérieure à 1,2 %,

b) une résistance à la fatigue, mesurée en flexion plane avec R = 0,1 dans le sens travers-long, supérieur à

10/5 cycles pour une contrainte maximale > 280 MPa

10/6 cycles pour une contrainte maximale > 220 MPa

10/7 cycles pour une contrainte maximale > 200 MPa."

Requête subsidiaire :

La revendication 1 selon la requête subsidiaire n° 1 diffère de la requête principale par l'adjonction : "1) Tôle d'épaisseur supérieure à 2,5 mm pour ... et de l'expression "...étant uniquement laminée à chaud et présentant..." après le terme "ladite tôle".

VIII. Les motifs invoqués par la division d'examen pour rejeter la requête principale peuvent être résumés comme suit :

Une tôle pour construction soudée en alliage AlMgMn du type revendiqué dans la demande est décrit par le document D13.

Ce document est une étude sur le soudage de tôles A à J selon la norme NS8 dont la composition est donnée dans le Tableau 1. La composition de l'alliage AlMgMn utilisé selon la revendication a une partie commune à la plage de composition de l'alliage NS8 et, par conséquent, peut être considérée comme sélection à l'intérieur de la plage connue. Cependant, la composition de l'alliage mis en oeuvre selon la revendication 1 ne remplit aucune des trois conditions requises pour reconnaître la nouveauté à l'intérieur de la plage définie par la norme NS8. Bien que la caractéristique selon laquelle la tôle revendiquée présente une fraction volumique de dispersoïdes supérieure à 1,2 % ne soit pas divulguée par D13, elle dépend, comme il est constaté dans la demande, essentiellement de la composition de l'alliage. Etant donné que les tôles selon le document D13 ont été fabriquées "de manière conventionnelle", la fraction volumique des dispersoïdes est implicite dans les tôles ayant un domaine de composition commun à la revendication 1 et à la norme NS8. L'objet de la revendication ne remplit pas les conditions de nouveauté par rapport au document D13.

IX. Les arguments du requérant présentés par écrit et au cours de la procédure orale peuvent, dans la mesure ou ils sont pertinents pour la présente décision, être résumés comme suit :

Les propriétés de soudage, en particulier la dureté du joint soudé, la faible zone affectée thermiquement et la résistance à la fatigue, jouent un rôle de premier plan dans les tôles revendiquées. En outre, les tôles ont été transformées à l'état laminé à chaud (et non pas à l'état laminé à froid) en des constructions soudées. Les plages de composition plus étroites tirées de AA5083 et de NS8 constituent certes une condition sine qua non pour l'obtention des propriétés souhaitées. Néanmoins, il ne suffit pas seulement de respecter des plages de composition plus étroites. Le traitement thermique opéré avant le laminage à chaud s'avère lui aussi déterminant pour obtenir la fraction volumique de dispersoïdes au manganèse revendiquée supérieure à 1,2 %, lesquels dispersoïdes se forment seulement à partir d'une température d'homogénéisation supérieure à 500°C. Ceci a été confirmé par des essais comparatifs.

Le document D13 représente l'état de la technique le plus proche puisque ce document étudie également les propriétés de soudage de tôles réalisées à partir du type d'alliage utilisé selon la revendication. Or, le document D13 n'enseigne rien sur la température d'homogénéisation appliquée en amont du laminage à chaud. Bien que l'influence des différents composants de l'alliage, tels que le magnésium et le manganèse, sur les propriétés de soudage ait été examinée dans le détail, on ne discerne pas dans D13 l'importance que revêt la teneur en fer en association avec la teneur en manganèse de l'alliage d'aluminium pour la formation des dispersoïdes. Ainsi, l'alliage C figurant au tableau 1 comprend 0,26 % de fer, soit une teneur nettement supérieure à la teneur en fer maximale de 0,20 % définie dans la revendication 1. C'est grâce à la présente invention qu'il a été possible de mettre en évidence un tel lien. L'avis de la division d'examen exposé dans la décision attaquée, selon lequel la formation des dispersoïdes est uniquement la conséquence de la composition retenue et est de ce fait implicitement présente dans les tôles mentionnées dans le document D13, n'est par conséquent pas correct. L'objet de la revendication 1 est, à ce titre, nouveau par rapport à l'enseignement de D13.

Le document D6 se concentre sur l'amélioration des propriétés superplastiques des tôles fabriquées à partir de l'alliage AA5083. Ainsi, la température d'homogénéisation de 510°C/8h vise la formation de dispersoïdes "fins" de nature à favoriser les propriétés de déformation. Or, les dispersoïdes contenus dans la tôle revendiquée sont de nature différente, à savoir de nature beaucoup plus grossière. Le document D6 ne montre pas non plus que la fraction volumique de dispersoïdes revendiquée a été atteinte. En outre, les tôles laminées à chaud n'ont pas, dans cet état, comme cela est le cas dans l'invention, été transformées en des constructions soudées mais ont bien plus été laminées à froid à une épaisseur finale de 2 mm après avoir subi un laminage à froid suivi d'un recuit intermédiaire. Il y a donc bien nouveauté par rapport à l'enseignement du document D6.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Modifications

La revendication 1 de la requête principale découle de la combinaison des revendications 1 à 4, 6 et 8 de la demande de brevet publiée sous le numéro WO 96/26299. La revendication 1 de la requête subsidiaire contient en outre l'objet de la revendication dépendante 7. Les autres revendications de la requête principale et de la requête subsidiaire ont également un fondement dans la demande publiée. Les revendications ne sauraient par conséquent être contestées d'un point de vue formel au regard de l'article 123 CBE.

3. L'objet de la revendication

3.1 La tôle selon la revendication 1 de la requête principale est déterminée par la composition de l'alliage, par sa fraction volumique de dispersoïdes et par sa résistance à la fatigue. Contrairement à l'opinion du demandeur, le terme "tôle pour construction soudée" ne constitue pas en droit européen des brevets une limitation à cette application car cette expression ne fait qu'attirer l'attention sur le fait que la tôle revendiquée se prête à l'usage indiqué de manière nullement limitative.

3.2 La composition de l'alliage d'aluminium utilisé pour la tôle revendiquée tombe pour l'essentiel dans les plages de composition du matériau AA5083 (selon la nomenclature internationale des alliages : Al, Mg: 4,0 - 4,9 %, Mn: 0,4 - 1,0 %, Cr: 0,05 - 0,25 %, Fe < 0,40 %, Si < 0,4 %, Cu < 0,10 %, Zn < 0,25 %, Ti < 0,15 %). Un tel matériau est par exemple utilisé pour la fabrication de tôles selon le document D6 (voir page 279, avant- dernier alinéa) ou selon le document D13 (voir tableau 1 : Spécification NS8). Le document D28A mentionné dans la description fait état au tableau 1, exemple n° 10, d'une tôle obtenue à partir d'un alliage AA5083 et de son traitement typique comprenant un chauffage à 530°C ainsi qu'un laminage à chaud à 430°C.

L'alliage d'aluminium utilisé dans la revendication 1 de la demande présente cependant des plages de composition plus étroites par rapport à l'alliage AA5083 pour ses différents composants. Ainsi, la teneur en manganèse définie dans la revendication 1 doit se situer entre 0,8 et 1,0 % Mn, ce qui rend redondante la caractéristique indiquée dans la revendication 1 (Mn + 2Zn) > 0,8 %.

En outre, les teneurs en fer de l'alliage utilisé selon la revendication sont limitées à Fe < 0,20 %. Comme l'enseigne la description, page 3, lignes 34 à 36, la grandeur de la fraction volumique de dispersoïdes supérieure à 1,2 % notamment est étroitement liée à la teneur en fer réduite et à la teneur en manganèse rehaussée ( > 0,8 %). La teneur en magnésium doit de plus être supérieure à 4,3 % et la teneur en chrome limitée à Cr < 0,15 % pour pouvoir obtenir une bonne résistance à la fatigue (voir page 3, lignes 30 à 33).

La description expose à l'alinéa [0004] dans le détail que les valeurs limites sélectionnées pour les éléments Mg, Mn, (Zn), Fe et Cr selon des plages de composition plus restreintes par rapport à l'alliage AA5083 (= NS8) conduisent à un ensemble de propriétés où notamment la résistance mécanique statique, la ténacité, la résistance à la corrosion, la résistance à la fatigue et la déformation à la découpe des tôles sont améliorées. A la lecture de la demande, l'homme du métier voit clairement que la fraction volumique de dispersoïdes, la résistance mécanique améliorée, le comportement au soudage et la résistance à la fatigue sont une conséquence directe de la composition retenue.

3.3 Toutefois, eu égard à cette conclusion, le requérant a également fait valoir et cherché à prouver à l'aide d'essais comparatifs qu'en plus de la nécessité de respecter à la lettre une composition d'alliage déterminée, il est indispensable de porter les lingots à une température supérieure à 500°C avant leur laminage à chaud, sans quoi il n'est pas possible d'atteindre la fraction volumique de dispersoïdes requise supérieure à 1,2 %. Il renvoie dans ce contexte à l'exemple donné aux pages 4 et 5 de la demande.

4. Nouveauté ; requête principale

4.1 On peut constater que des tôles obtenues à partir de la composition de l'alliage utilisé selon la revendication sont connues par l'art antérieur. Par exemple le document D6 divulgue dans le tableau 1 les alliages 1 à 4. dont tous les composants, excepté les teneurs en chrome de 0,19 % (alliages 1, 2), de 0,18 % (alliage 3) et de 0,16 % (alliage 4), tombent dans la plage revendiquée, la teneur en chrome de 0,16 % de l'alliage 4 étant très proche de la limite supérieure revendiquée de Cr < 0,15 %. Avant la passe de laminage à chaud, les lingots ont été homogénéisés pendant 8 heures à 510°C dans le but d'obtenir une fine dispersion de Al6Mn, puis laminés à chaud à une épaisseur de 25 mm (voir D6, page 280, Experimental). Partant d'une composition d'alliage et d'un traitement avant laminage à chaud identiques (THomogénéisation = 510°C), on est en droit de conclure que pour le moins la tôle connue du document D6 et obtenue à partir de l'alliage 4 doit présenter toutes les caractéristiques techniques de la tôle revendiquée, y compris ses propriétés statiques, dynamiques et anticorrosives, même si celles-ci ne sont pas explicitement énoncées dans le document D6. La résistance à la fatigue de la tôle revendiquée ne saurait, à cet égard, constituer une caractéristique indépendante. Il s'agit bien plus d'une caractéristique dépendante résultant implicitement de la composition de l'alliage et du procédé utilisé pour la fabrication de la tôle. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 selon la requête principale ne se distingue pas de l'enseignement du document D6.

4.2 D'après le requérant, la formation de dispersoïdes très fins dans les tôles connues du document D6 vise l'amélioration du comportement superplastique de l'alliage lors de la déformation. Enfin, c'est la déformation superplastique, et non pas les propriétés de soudage de la tôle revendiquée, qui se trouve au premier plan dans le document D6. Les dispersoïdes contenus dans la tôle revendiquée sont cependant plus grossiers que ceux énoncés dans le document D6.

Il n'est toutefois fourni aucune démonstration ou précision susceptible de confirmer ce point de vue. Il ne ressort à aucun endroit de la description que la taille des dispersoïdes Al6Mn puisse jouer un rôle ou avoir quelque influence sur les propriétés de la tôle revendiquée. Les objections soulevées par le requérant ne sauraient par conséquent remettre en question la conclusion émise.

4.3 La revendication 1 de la requête principale n'est donc pas admissible pour manque de nouveauté.

5. Nouveauté, revendication 1 de la requête subsidiaire

5.1 Par rapport à la requête principale, la revendication de la requête subsidiaire définit en outre qu'il s'agit d'une tôle uniquement laminée à chaud d'une épaisseur supérieure à 2,5 mm. D'après le requérant, il n'est pas question dans le document D6 d'une tôle laminée à chaud transformée en une construction soudée. Dans le document D6, les tôles sont tout d'abord laminées à chaud à 25 mm puis laminées à froid à 10 mm et traitées thermiquement à 500°C/10 min avant d'être finalement laminées à froid à 2 mm.

Même s'il convient de donner raison au requérant sur le fait que le document D6 met l'accent sur les propriétés superplastiques de transformation et que les tôles sont de ce fait laminées à froid à une épaisseur finale de 2. mm après avoir été laminées à chaud, il est néanmoins incontestable que d'après l'enseignement du document D6 également, une tôle laminée à chaud à 25 mm est fabriquée en tant que produit intermédiaire, ladite tôle étant ensuite transformée par laminage à froid. La tôle laminée à chaud doit toutefois présenter toutes les caractéristiques de la tôle revendiquée pour les raisons exposées précédemment de manière détaillée au point 4. Ainsi, l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire ne présente pas non plus de caractéristiques techniques susceptibles de constituer une différence et d'établir une nouveauté par rapport à l'enseignement de D6.

Il s'ensuit qu'aucune des requêtes ne contient de revendication admissible. Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le recours.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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