T 0298/01 (Dérivés oxysulfurés et fluorés/RHODIA CHIMIE) of 7.10.2004

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2004:T029801.20041007
Date de la décision : 07 Octobre 2004
Numéro de l'affaire : T 0298/01
Numéro de la demande : 96400624.1
Classe de la CIB : C07C 313/04
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 36 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Réactif et procédé pour la synthèse de dérivés organiques oxysulfurés et fluorés
Nom du demandeur : RHODIA CHIMIE
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 111(1)
European Patent Convention 1973 Art 54(1)
European Patent Convention 1973 Art 54(2)
Mot-clé : Requête unique : disclaimer - admissibilité (oui) - divulgation fortuite
Nouveauté (oui) - renvoi pour poursuite de la procédure
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0001/03
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La requérante a formé recours contre la décision de la Division d'examen de rejeter la demande de brevet n° 96 400 624.1 (publiée sous le n° 0 735 023) au motif que l'objet de la revendication 1 de la requête devant la Division d'examen ne satisfaisait pas aux dispositions de l'article 54(1), (2) CBE au vu de la divulgation constituée par le document

(2) G. P. Stahly, Journal of Fluorine Chemistry, 45, 431- 433 (1989).

II. Le jeu de revendications de cette requête contenait vingt et une revendications. La revendication 1 s'énonçait comme suit :

"1. Réactif pour la synthèse de dérivés organiques oxysulfurés et fluorés par réaction avec un oxyde de soufre, notamment du bioxyde de soufre, caractérisé en ce qu'il comprend :

a) un acide fluorocarboxylique de formule Ea - CF2- COOH, où Ea représente un atome ou un groupe électroattracteur, au moins partiellement salifié par un cation choisi parmi les cations de métaux alcalins de rang supérieur à celui du sodium et les oniums,

b) un solvant aprotique ; et en ce que la teneur en protons libérables portés par ses divers composants, y compris leurs impuretés, est au plus égale à la moitié de la concentration molaire initiale dudit acide fluorocarboxylique."

III. Dans sa décision, la Division d'examen a considéré que l'objet de la revendication 1 n'était pas nouveau au vu du document (2) qui décrivait un procédé de trifluorométhylation du 1,3,5-trinitrobenzene (TNB) impliquant le chauffage d'un mélange contenant du trifluoroacétate de potassium dans du diméthyl sulfoxyde (DMSO) ou du diméthylformamide (DMF).

IV. Lors de la procédure orale qui eut lieu le 7 octobre 2004, la requérante a déposé comme requête unique un jeu de quarante revendications. La revendication indépendante 22 relative au réactif s'énonce comme suit :

"22. Réactif caractérisé :

- en ce qu'il est susceptible de former des dérivés organiques oxysulfurés et fluorés par réaction avec un oxyde de soufre, notamment du bioxyde de soufre, caractérisé en ce qu'il comprend:

a) un acide fluorocarboxylique de formule Ea - CF2- COOH, au moins partiellement salifié par un cation choisi parmi les cations de métaux alcalins de rang supérieur à celui du sodium et les ammoniums ou phosphoniums quaternaires, où Ea représente un atome ou un groupe électroattracteur,

b) un solvant aprotique ; et

- en ce que la teneur en protons libérables portés par ses divers composants, y compris leurs impuretés, est au plus égale à la moitié de la concentration molaire initiale dudit acide fluorocarboxylique ; pour autant que le réactif ne consiste pas en un mélange de trifluroacétate de potassium et de 1,3,5-trinitrobenzene dans le DMF ou le DMSO."

La requérante a, en outre, fait valoir que le disclaimer introduit dans la revendication 22 restaurait la nouveauté de cette revendication vis-à-vis du document (2) et que ce disclaimer était admissible en raison du fait que ce document était une divulgation fortuite qui n'aurait jamais été prise en considération par l'homme du métier lors de la réalisation de la présente invention.

V. la requérante a requis la réformation de la décision de rejet et la délivrance d'un brevet sur la base de la requête déposée à la procédure orale.

VI. La décision de la Chambre a été prononcée à la fin de la procédure orale.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Étendue du recours

Le seul motif de rejet étant l'absence de nouveauté du réactif (pour la synthèse de dérivés organiques oxysulfurés ou fluorés) revendiqué, l'étendue du recours est limitée à l'examen de la nouveauté de la revendication indépendante 22 de la requête devant la Chambre (cf. point IV ci-dessus) et des revendications dépendantes 23 à 38 qui définissent des modes de réalisation préférés de la revendication 22.

3. Admissibilité du disclaimer

3.1. Dans le cas présent, il s'agit d'examiner si le disclaimer introduit dans la revendication 22 est admissible au regard des dispositions établies par la décision de la Grande Chambre de Recours (cf. G 1/03, JO OEB 2004, 413).

3.2. La revendication 22 comprend une caractéristique négative ou disclaimer qui a pour objet d'exclure de la définition générale un réactif consistant en un mélange de trifluroacétate de potassium et de 1,3,5-trinitrobenzene dans le DMF ou le DMSO. Il n'est pas contesté que cette caractéristique ne trouve pas de support dans la demande de brevet telle que déposée mais qu'elle trouve son origine dans la divulgation constituée par le document (2) qui fait partie de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE. Cependant, une telle conclusion ne soulève aucune objection en regard des dispositions de l'article 123(2) EPC (loc. cit., dispositif, point I).

3.3. La Chambre considère que la revendication contenant un tel disclaimer répond aux exigences de clarté et de concision prévues à l'article 84 CBE (loc. cit., dispositif, point II.4).

3.4. Le disclaimer a été introduit pour rétablir la nouveauté vis-à-vis de la divulgation du document (2) qui fait partie de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE. La Grande Chambre de Recours, dans la décision citée ci-dessus, a établi qu'un disclaimer pouvait être admis pour rétablir la nouveauté en délimitant une revendication par rapport à une divulgation fortuite relevant de l'article 54(2) CBE. Une antériorisation est fortuite dès lors qu'elle est si étrangère à l'invention revendiquée et si éloignée d'elle que l'homme du métier ne l'aurait jamais prise en considération lors de la réalisation de l'invention (loc. cit., dispositif, point II.1, deuxième alinéa).

3.5. Il s'agit donc de décider si le document (2) peut être considéré comme une divulgation fortuite. Pour cela, il est nécessaire de considérer l'objet de la revendication 22 dans le contexte de l'invention telle que décrite dans la demande.

3.5.1. La présente demande concerne un procédé de préparation d'acides fluoroalcane sulfiniques et sulfoniques (cf. page 1, lignes 1 à 3 de la demande de brevet telle que déposée). Le réactif défini à la revendication 22 permet la mise en oeuvre d'un tel procédé (cf. page 3, lignes 18 à 32 de la demande de brevet telle que déposée).

3.5.2. Le document (2) décrit un mélange de trifluoroacétate de potassium, de diméthyl sulfoxyde (DMSO) ou diméthylformamide (DMF) et de trinitrobenzene (TNB) dans une réaction conduisant à la capture de CF3K sous forme de complexe de Meisenheimer à 150°C suivie d'une réaction d'oxydation selon le schéma suivant :

FORMULE

3.5.3. La Chambre partage l'opinion exprimé par la requérante que le complexe de Meisenheimer 2 et le 1-trifluorométhyl- 2,4,6-trinitrobenzene en résultant n'ont rien à voir avec les composés que vise à préparer le procédé selon la présente invention. En outre, le mécanisme réactionnel est également très différent puisque le document (2) décrit l'addition sur un composé aromatique d'un anion CF3-.

la Chambre en conclut que l'on se trouve bien dans le cas d'une antériorité fortuite, c'est-à-dire que d'un point de vue technique la divulgation du document (2) est à ce point étrangère et éloignée que l'homme du métier ne l'aurait jamais prise en considération lors de la réalisation de l'invention revendiquée.

La Grande Chambre dans sa décision (loc. cit., point 2.2.1 des motifs) avait pris comme exemple la situation typique où l'invention revendiquée porte sur un groupe nombreux de composés chimiques présentant certaines propriétés avantageuses pour une utilisation précise, mais où il s'avère que l'un des composés compris dans ce groupe est connu pour une utilisation entièrement différente, de sorte que les propriétés connues de ce composé sont sans intérêt pour la nouvelle utilisation.

La Chambre estime que la situation de la revendication 22 correspond parfaitement à celle évoquée à titre d'exemple par la Grande Chambre. En effet, le réactif consistant en un mélange de trifluroacétate de potassium et de 1,3,5-trinitrobenzene dans le DMF ou le DMSO décrit dans le document (2) est utilisé pour la formation du complexe de Meisenheimer et subséquemment de 1-trifluorométhyl-2,4,6-trinitrobenzene. Une telle utilisation est entièrement différente de celle visant à préparer des acides fluoroalcane sulfiniques et sulfoniques au moyen du réactif défini à la revendication 22.

3.5.4. Il en résulte que la divulgation du document (2) est fortuite et que le contenu qui y est divulgué peut être exclu de l'objet de la revendication 22.

3.5.5. Par ailleurs, la Chambre estime que l'exclusion de la revendication 22 d'un réactif consistant en un mélange de trifluroacétate de potassium et de 1,3,5-trinitrobenzene dans le DMF ou le DMSO permet de retrancher ni plus ni moins que ce qui est nécessaire pour rétablir la nouveauté de la revendication 22 vis-à-vis du document (2) (loc. cit., dispositif, point II.2).

3.6. La Chambre conclut donc que le disclaimer présent dans la revendication 22 est admissible selon les critères établis par la Grande Chambre de Recours (loc. cit.).

4. Article 123(2) CBE - Modifications

4.1. Par rapport à la revendication 1 telle que déposée à l'origine, la revendication 22 a été limitée à un réactif comprenant un acide fluorocarboxylique de formule Ea-CF2-COOH, au moins partiellement salifié par un cation choisi parmi les cations de métaux alcalins de rang supérieur à celui du sodium et les ammoniums ou phosphonium quaternaires. Une telle modification est supportée par la demande telle que déposée (cf. page 10, lignes 11 à 23). La revendication 22 a été élargie à un réactif comprenant un solvant aprotique. Une telle modification est également supportée par la demande telle que déposée (cf. page 7, lignes 10 à 14).

L'objet des revendications 23, 24, 26, 27, 29 à 34 et 36 à 38 est identique à l'objet des revendications 2, 3, 5, 6, 7 à 12 et 13 à 15 telles que déposées à l'origine.

L'objet de la revendication 25 est supporté par la revendication 4 et la description telles que déposées à l'origine (cf. page 4, lignes 21 à 34). L'objet de la revendication 28 est supporté par la description telle que déposée à l'origine (cf. page 6, lignes 15 à 25). L'objet de la revendication 35 est supporté par la description telle que déposée à l'origine (cf. page 10, lignes 27 à 30).

4.2. La Chambre est donc satisfaite que les modifications concernant les revendications 22 à 38 ne contreviennent pas aux dispositions prévues par l'article 123(2) CBE.

5. Article 54(1), (2) CBE - Nouveauté

5.1. Le disclaimer rend la revendication 22 nouvelle vis-à-vis de la divulgation constituée par le document (2) (cf. point 3 ci-dessus).

5.2. Les revendications dépendantes 23 à 38 qui représentent des mises en ouvre particulières de la revendication 22 sont pour les mêmes raisons également nouvelles.

6. Article 111(1) CBE - Renvoi à la première instance

6.1. La Chambre constate que l'objection d'absence de nouveauté qui a motivé le rejet de la demande de brevet a été surmontée par le dépôt de la présente requête pour autant qu'elle concerne les revendications 22 à 38.

6.2. Comme la première instance n'a pas pris de décision en ce qui concerne l'activité inventive, l'affaire est renvoyée à la première instance sur la base des revendications 1 à 40 déposées à titre de requête unique lors de la procédure orale devant la Chambre pour poursuite de la procédure.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. la décision dont appel est mise à néant.

2. L'affaire est renvoyée à la première instance pour prosécution de cause.

Quick Navigation