T 1124/00 (Composition topique/L'OREAL) of 16.12.2003

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T112400.20031216
Date de la décision : 16 Décembre 2003
Numéro de l'affaire : T 1124/00
Numéro de la demande : 96401860.0
Classe de la CIB : A61K 7/48
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Composition topique comprenant l'association d'un polymère à squelette non-siliconé à greffons siliconés et d'un polymère à squelette polysiloxanique à greffons non-siliconés
Nom du demandeur : L'OREAL
Nom de l'opposant : Wella AG
Chambre : 3.3.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 113
European Patent Convention 1973 R 67
Mot-clé : Activité inventive - non : combinaison arbitraire
Remboursement de la taxe de recours - non : pas de vice substantiel de procédure
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 773 016 a été délivré le 1er avril 1998 sur la base de la demande européenne n° 96 401 860.0.

La revendication indépendante 1 du jeu de 37 revendications sénonçait :

"1. Composition cosmétique ou dermatologique destinée au traitement des matières kératiniques, caractérisée par le fait qu'elle contient dans un milieu cosmétiquement ou dermatologiquement acceptable au moins : (a) un polymère à squelette organique non-siliconé greffé par un macromère polysiloxane susceptible d'être obtenu par polymérisation radicalaire d'au moins un monomère à insaturation éthylénique et d'au moins un macromère polysiloxane ayant un groupe vinylique terminal ou bien par réaction d'une polyoléfine comprenant des groupes fonctionnalisés et d'un macromère polysiloxane ayant une fonction terminale réactive avec lesdits groupes fonctionnalisés; et (b) au moins un polymère à squelette polysiloxanique greffé par un groupe organique non-siliconé susceptible d'être obtenu par copolymérisation radicalaire entre d'une part (i) au moins un monomère organique anionique non-siliconé présentant une insaturation éthylènique et/ou un monomère organique hydrophobe non-siliconé présentant une insaturation éthylénique et (ii) d'autre part un polysiloxane présentant dans sa chaîne au moins un ou plusieurs groupements fonctionnels capables de venir réagir sur lesdites insaturations éthyléniques desdits monomères non-siliconés."

II. La requérante a fait opposition à la délivrance de ce brevet européen, demandant sa révocation en application de larticle 100a) de la CBE en invoquant labsence de nouveauté et dactivité inventive. D'autres motifs invoqués au cours de la procédure d'opposition n'ont pas été maintenus.

Entre autres, les documents suivants ont été cités au cours des procédures dopposition et de recours :

(1) WO-A-9503776

(4) EP-A-412 704

III. Dans la décision rendue par la Division dopposition le 4. octobre 2000, il a été décidé que rien ne sopposait au maintien du brevet sous la forme telle que délivrée.

La Division dopposition était de lavis que le document (1) n'anticipait pas l'objet du brevet contesté car, s'il décrivait bien un polymère à squelette polysiloxanique à greffons non-siliconés, il ne divulguait pas la combinaison de ce dernier avec un polymère non-siliconé à greffons siliconés.

En outre, elle a considéré, au vu des essais comparatifs du brevet en cause, que l'effet d'amélioration obtenu par cette combinaison rendait l'objet revendiqué inventif puisque l'état de la technique disponible ne contenait aucune indication à ce sujet.

Elle en a donc conclu que lobjet du brevet attaqué ne contrevenait pas aux dispositions des articles 52(1), 54 et 56 CBE.

IV. La requérante a introduit un recours contre cette décision.

V. Une procédure orale devant la chambre de recours sest tenue le 16 décembre 2003.

VI. Au cours de la procédure orale la requérante a expressément confirmé quelle ne contestait plus la nouveauté des revendications du brevet en cause.

la requérante a invoqué uniquement labsence dactivité inventive (article 100a) CBE).

Elle a défendu lopinion que, au vu des essais comparatifs produits avec son mémoire de recours montrant l'absence d'amélioration pour des compositions selon la revendication 1, le problème résolu par le brevet contesté ne pouvait être défini qu'en terme de fourniture d'alternatives.

Selon elle, en l'absence d'effet particulier, les compositions revendiquées découlaient à l'évidence de la combinaison des documents (1) et (4) qui décrivaient respectivement les polymères à squelette polysiloxanique à greffons non-siliconés (polymères de type b) et les polymère non-siliconés à greffons siliconés (polymères de type a).

En conclusion, lobjet de la revendication 1 du brevet contesté ne remplissait donc pas, selon elle, les exigences dactivité inventive de l'article 56 CBE.

Par ailleurs, la requérante a demandé le remboursement de la taxe de recours pour la raison que le droit d'être entendu n'avait pas été respecté par la Division d'opposition car sa décision contenait des motifs auxquels elle ne s'attendait pas (article 113 CBE).

VII. Lintimée (titulaire) a contesté les argumentations de la requérante.

A la fin des débats de la procédure orale, l'intimée a produit un jeu de revendications auxiliaire qu'elle a souhaité introduire dans la procédure.

Concernant lactivité inventive, lintimée a soutenu quen partant du document (1), divulgant les polymères (b), comme état de la technique le plus proche, aucun des documents disponibles ne suggérait à lhomme du métier de choisir précisément des polymères de structure (a) tels que décrits dans le document (4) pour les combiner à ces derniers en vue d'obtenir une quelconque amélioration.

En outre, elle a contesté la validité des essais comparatifs produits par la requérante avec son mémoire de recours.

VIII. La requérante demande lannulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen n° 773 016 ainsi que le remboursement de la taxe de recours.

Lintimée demande le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Admissibilité de la requête auxiliaire

Selon l'intimée, la requête auxiliaire présentée à la fin des débats au cours de la procédure orale était censée écarter de la revendication 1 du brevet contesté la famille de polymères objet des essais comparatifs de la requérante, pour le cas où la Chambre devait considérer ces derniers comme pertinents.

La requérante s'est opposée à l'admission de cette requête qui constituait, pour elle, une surprise à ce stade de la procédure et qui la mettait dans l'impossibilité de réagir adéquatement.

Suite à une question de la Chambre quant à la justification du dépôt de cette requête à ce stade alors qu'elle avait connaissance des essais de la requérante depuis février 2001 puisqu'ils avaient été produits avec le mémoire de recours, aucun argument pertinent n'a été avancé par l'intimée.

Dans ces circonstances, la requête auxiliaire n'est pas introduite dans la procédure.

3. Activité inventive

3.1. Le brevet selon la requête principale concerne une composition cosmétique pour le traitement des matières kératiniques comprenant un polymère à squelette organique non- siliconé greffé par des monomères contenant un polysiloxane (polymère a) et un polymère à squelette polysiloxanique greffé par des monomères non-siliconés (polymère b)(page 2, lignes 3 à 6).

Selon la description du brevet attaqué les compositions en question permettent d'obtenir des propriétés coiffantes et une douceur au toucher supérieures à celles obtenus par chaque polymère utilisé seul (page 2, lignes 14 à 19).

En outre, l'exemple comparatif du brevet en cause démontre cette amélioration pour un couple de polymère selon la revendication 1.

Les exemples 37 à 41 du document (1) décrivent des compostions contenant des polymères du type b) utilisés dans le traitement des cheveux et ayant de bonnes propriétés coiffantes et une bonne douceur au toucher (page 63, lignes 2 à 5).

La Chambre considère, en accord avec la décision de la Division d'opposition, que le document (1) représente létat de la technique le plus proche.

Cet avis n'a pas été contesté par les parties.

3.2. Au vu de cet état de la technique lintimée a maintenu qu'au vu des résultats des essais comparatifs du brevet contesté, le problème à résoudre consistait à obtenir des compositions ayant des propriétés améliorées.

La requérante, quant à elle, a soutenu que, même en admettant que les essais comparatifs du brevet en cause puissent être reproduits sur la base des informations contenu dans la description et servir ainsi à démontrer une amélioration pour une certaine combinaison de certains polymères de type a) et de type b), ce problème n'avait pas été résolu pour l'ensemble des compositions revendiquées et que le problème à résoudre par rapport au document (1) consistait donc uniquement à fournir des compositions alternatives.

A cet effet, elle a fait valoir que ses propres essais comparatifs, fournis avec son mémoire de recours, reproduisant les conditions des essais du brevet attaqué avec un autre mélange contenant deux polymères du commerce selon la revendication 1 du brevet, montraient bien qu'une amélioration n'était pas obtenue pour n'importe quelle combinaison de polymères selon la revendication 1.

En réponse à ces considérations, lintimée a soutenu que les essais de la requérante n'étaient pas valables pour deux raisons principalement, à savoir parce que, d'une part, les essais de la requérante contenaient des quantités trop importantes de cyclométhicone ce qui pouvait influencer les résultats et d'autre part, parce que le composé SA-70-5 n'était pas un polymère décrit dans les documents de l'état de la technique versés à la procédure.

La Chambre ne peut cependant pas accepter cette argumentation.

En effet, l'argument concernant l'influence négative du cyclométhicone a été avancé pour la première fois au cours de la procédure orale et les dires de l'intimée n'ont été étayés par aucun autre élément.

En outre, le cyclométhicone est un élément faisant partie des compositions commerciales des polymères SA 70- 5. et VS-70 et la Chambre n'a donc à ce titre aucune raison de douter qu'il s'agisse là d'un milieu "cosmétiquement acceptable" dans le sens de la revendication 1 du brevet attaqué et de ne pas croire, comme l'affirme la requérante en réponse aux objections de l'intimée, que ce composé volatile n'influence pas négativement les effets des polymères.

La Chambre note également que ladite revendication est une revendication ayant une formulation "ouverte" qui n'exclut donc pas a priori l'addition d'autres composés aux polymères de type a) et b).

De plus, la Chambre observe que tous les essais de la requérante sont réalisés dans les mêmes conditions de sorte que des comparaisons à l'intérieur des ces dits essais restent a priori significatives.

En ce qui concerne le second argument, la Chambre considère que toutes combinaisons de polymères de type a) et b) tombant sous le coup de la revendication 1 du brevet attaqué sont adéquates pour démontrer que la revendication couvre des modes de réalisation qui ne résolvent pas le problème tel que défini dans la description du brevet attaqué (page 2, lignes 16 à 19).

Il s'ensuit que la requérante n'était nullement limitée par les documents versés au dossier pour le choix de ses polymères.

En conséquence, le problème à résoudre par rapport au document (1) consistait donc également à fournir des compositions alternatives.

3.3. La question qui se pose à présent est donc de savoir si cette solution qui consiste à additionner aux polymères décrits dans le document (1) des polymères de type a) (à savoir des polymères à squelette organique non-siliconé greffé par des monomères contenant un polysiloxane) découlait à lévidence de létat de la technique disponible pour lhomme du métier.

Létat de la technique selon le document (1), qui préconise que les polymères de type b) peuvent être utilisés en combinaison avec des polymères anioniques, non-ioniques, amphotériques et polysiloxaniques conventionnels, ne fait aucune mention directe de ce type de polymères (page 47, lignes 3 à 8).

Il ressort toutefois bien de ce document (page 5, ligne 16 à 26), tout comme du brevet contesté lui-même (page 2, lignes 7 à 10), que les polymères de type a) sont des polymères bien connus dans l'état de la technique (cf. entre autres, document (4), revendication 1).

De l'avis de l'intimée, l'évidence de la combinaison des polymères du document (1) et (4) procèderait d'une analyse ex post facto puiqu'en l'absence de l'enseignement du brevet en cause il n'était pas évident de sélectionner précisément les polymères tels que décrits, par exemple, dans le document (4) plutôt que n'importe quels autres polymères.

Si la Chambre est d'accord avec un tel raisonnement dans le cadre d'une invention de sélection conduisant à un effet particulier, elle ne peut suivre l'intimée dans cette approche pour le cas présent où toutes les combinaisons de polymères revendiquées ne résolvent pas le problème de la demande et pour lesquelles le choix effectué devient donc un choix arbitraire non-inventif (cf. point 4.2).

En conséquence de ce qui précède et en labsence dautres arguments de la part de lintimée, comme par exemple l'existence d'un préjudice technique véritable, la Chambre conclut que lhomme du métier qui se serait proposé de résoudre le problème tel que défini dans lavant-dernier paragraphe du point 4.2, aurait pu ajouter des polymères de structures a) dans les compositions selon le document (1) selon le document (4) sans faire preuve d'activité inventive.

Lobjet de la revendication 1 du jeu de revendications de la requête principale ne satisfait donc pas aux exigences de larticle 56 de la CBE.

Dans ces circonstances, il ny a pas lieu de considérer les autres revendications.

4. Remboursement de la taxe de recours (Règle 67 CBE)

La requérante a fait valoir que la Division d'opposition a considéré pour la première fois dans sa décision que la méthode qu'elle a utilisée pour ses essais comparatifs n'était pas valable de sorte qu'elle n'a pas eu l'occasion de produire d'autres essais avec une autre méthode, ce qui contrevenait à son droit d'être entendu (article 113(1) CBE).

A ce sujet, la Chambre note que, tel que cela ressort de la décision de la Division d'opposition, ce n'est qu'au cours de la procédure orale que la méthode utilisée par la requérante dans ses essais a été contestée par la titulaire (page 5, paragraphe 2, 2ème phrase).

Il s'ensuit que la Division d'opposition n'avait pas d'élément au préalable pour, éventuellement, ne pas accepter la méthode de la requérante et le lui notifier avant la tenue de la procédure orale.

En outre, rien dans la décision et aucun élément de la part de la requérante ne portent à croire qu'elle n'ait pas eu l'occasion de s'exprimer à ce sujet au cours de cette procédure orale.

Rien n'indique également que la requérante ait sollicité la possibilité de produire des essais avec une autre méthode au cours de la procédure orale et que cette possibilité lui ait été refusée.

Par conséquent, la Chambre considère que la requérante n'a pas démontré que le droit d'être entendu ne lui avait pas été accordé et qu'il n'y a, par conséquent, pas d'élément pour conclure à un vice substantiel de procédure.

La requête en remboursement de la taxe de procédure est de ce fait rejetée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision de la Division dopposition est annulée.

2. Le brevet est révoqué.

3. La demande de remboursement de la taxe de recours est rejetée.

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