T 1095/00 (EPSPS/AVENTIS CROPSCIENCE) of 20.2.2002

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2002:T109500.20020220
Date de la décision : 20 Fevrier 2002
Numéro de l'affaire : T 1095/00
Numéro de la demande : 96925812.8
Classe de la CIB : C12N 15/54
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 30 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : 5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase mutée, gène codant pour cette protéine et plantes transformées contenant ce gène
Nom du demandeur : AVENTIS CROPSCIENCE S.A.
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.04
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 R 67
Mot-clé : Nouveauté - oui
Activité inventive - cas remis à la première instance
Violation de procédure - non
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen N 96 925 812.8 avec le numéro de publication internationale WO-A-97/04 103 (EP-A-0 837 944) ayant pour titre : "5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase mutée, gène codant pour cette protéine et plantes transformées contenant ce gène" a été rejetée par la Division d'examen.

II. Une requête principale et deux requêtes auxiliaires avaient été soumises à la Division d'examen. Les revendications 1, 5, 6 et 7 de la requête principale alors débattues étaient les suivantes :

"1. Séquence d'ADN codant pour une 5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase (EPSPS) mutée, caractérisée en ce que l'EPSPS est une EPSPS de maïs comprenant une première mutation constituée par une substitution Thréonine 102 par l'Isoleucine et une deuxième mutation constituée par une substitution Proline 106 par la Sérine."

"5. 5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase (EPSPS) mutée, caractérisée en ce qu'elle comprend la séquence peptidique représentée par l'identificateur de séquence n 5 (SEQ ID NO 5)."

"6. Gène chimérique comprenant une séquence codante ainsi que des éléments de régulation en position 5' et 3' hétérologues pouvant fonctionner dans les plantes, caractérisé en ce qu'il comprend, comme séquence codante, au moins une séquence d'ADN selon l'une des revendications 1 à 3."

"7. Gène chimérique selon la revendication 6, caractérisé en ce qu'il comprend un promoteur de virus de plante."

III. La Division d'examen a refusé la requête principale entre autres pour manque de nouveauté de l'objet des revendications 1 à 6 et manque d'activité inventive de l'objet de la revendication 7. Les motifs qui l'ont conduite à ce refus l'ont aussi amenée à refuser les deux requêtes auxiliaires.

IV. Pour ce qui est des revendications 1, 5 et 7 de la requête principale, ces motifs peuvent être résumées comme suit :

- Nonobstant le fait que le document (2) (voir ci-dessous) ne décrive pas le gène EPSPS de maïs ni n'indique un document de l'état de la technique dans lequel ce gène serait décrit, il n'en détruit pas moins la nouveauté de l'objet de la revendication 1 car à la page 119 est mentionné un gène EPSPS de maïs portant les codons pour les acides aminés isoleucine (Ile) et serine (Ser) en positions 102 et 106 au lieu des codons pour les acides aminés thréonine (Thr) et proline (Pro). En effet, la personne du métier est capable de reproduire le gène doublement muté mentionné dans le document (2) sur la base de ses propres connaissances générales. Preuve en est que des gènes EPSPS de maïs mutés en différentes positions avaient déjà été isolés à la date de priorité de la demande (voir document (5) ci-dessous).

- La protéine EPSPS de maïs représentée par la séquence SEQ ID NO 5 de la revendication 5 est nécessairement la même que celle obtenue par expression du gène doublement muté dans l'exemple 26 du document (2). La référence en tant que telle à la séquence SEQ ID NO 5 ne peut impartir de nouveauté à la protéine revendiquée puisqu'elle n'en est qu'une caractéristique intrinsèque.

- L'objet de la revendication 7 manque d'activité inventive car le fait d'isoler une molécule chimérique dans laquelle le gène EPSPS connu, doublement muté peut être exprimé à partir d'un promoteur de virus de plante, est une alternative évidente au vu de l'enseignement du document (5).

V. Le requérant s'est pourvu contre cette décision, a acquitté la taxe de recours et déposé un mémoire exposant les motifs de son recours.

VI. Une procédure orale s'est tenue le 20 février 2002 au cours de laquelle le requérant a déposé un nouveau jeu de revendications comme seule requête.

Les revendications 1, 2, 5 et 6 sont libellées comme suit :

"1. 5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase (EPSPS), caractérisée en ce qu'elle comprend la séquence peptidique représentée par l'identificateur de séquence n 5 (SEQ ID NO 5)."

"2. Séquence d'ADN codant pour une 5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase (EPSPS) selon la revendication 1."

"5. Gène chimérique comprenant une séquence codante ainsi que des éléments de régulation en position 5' et 3' hétérologues pouvant fonctionner dans les plantes, caractérisé en ce qu'il comprend, comme séquence codante, au moins une séquence d'ADN selon l'une des revendications 2 à 4."

"6. Gène chimérique selon la revendication 5, caractérisé en ce qu'il comprend un promoteur de virus de plante."

Les revendications 3 et 4 dépendantes de la revendication 2 ont trait à des séquences d'ADN spécifiques codant pour l'EPSPS. Les revendications dépendantes 7 à 9 ont trait à des caractéristiques additionnelles du gène chimérique selon la revendication 5. Les revendications 10 et 11 ont trait respectivement à un vecteur et à une cellule végétale comprenant au moins un gène chimère selon l'une des revendications 5 à 9.

VII. Les documents auxquels il est fait référence dans la présente décision sont les suivants :

(2) : WO 95/06 128,

(5) : EP-A-0 293 358.

VIII. Les arguments du requérant présentés par écrit et au cours de la procédure orale, relatifs à la présente décision peuvent être résumés comme suit :

Article 54 CBE : Nouveauté de la revendication 1 (correspondant à la revendication 5 de la requête principale rejetée par la Division d'examen)

Le raisonnement (point 1.8 de la décision de rejet) selon lequel le document (2) détruirait la nouveauté de l'EPSPS ayant pour séquence la SEQ ID NO 5, parce qu'il divulgue dans l'exemple 26, l'expression d'un gène EPSPS porteur des codons pour les acides aminés Ile et Ser en position 102 et 106 respectivement, n'est pas valide.

En effet, le document (2) ne décrit pas la séquence du gène EPSPS au-delà de l'existence des deux codons sus-nommés. Pour qu'il soit destructeur de nouveauté, il faudrait donc que l'expression du gène EPSPS cloné conduise nécessairement à une protéine ayant pour séquence, la séquence SEQ ID NO 5. Or, il n'y a aucune raison de s'attendre à ce qu'il en soit ainsi. En effet, une comparaison des protéines EPSPS sauvages obtenues indépendamment par expression du cDNA EPSPS cloné par deux fois (document (5), fig. 2 et présente demande, SEQ ID NO 3) montre que ces protéines n'ont pas exactement la même séquence en position 257 et en position 312/313. La possibilité qu'il en soit de même pour la protéine EPSPS obtenue dans le document (2) et la protéine EPSPS revendiquée ne peut être exclue.

On peut donc conclure que la description dans le document (2) de l'expression d'un gène EPSPS dont la séquence n'a pas été établie n'est pas une divulgation claire et non ambiguë de la protéine SEQ ID NO 5. Cette protéine est, par conséquent, nouvelle.

Article 56 CBE : activité inventive

En raison de ses conclusions quant au manque de nouveauté, la Division d'examen n'a pas traité la question de l'activité inventive de l'objet des revendications correspondant en substance aux présentes revendications 1 à 5 . Dés lors, afin de bénéficier du double degré de juridiction, l'affaire devrait être renvoyée devant la Division d'examen pour le traitement de cette question.

Règle 67 CBE : remboursement de la taxe de recours en cas de vice substantiel de procédure

- Le requérant a été privé de son droit fondamental à être entendu. En effet, c'est seulement dans la citation à la procédure orale du 26 novembre 1999 que la Division d'examen a pour la première fois invoqué les connaissances générales de la personne du métier comme étant essentielles à l'évaluation de la nouveauté. De plus, ce n'est qu'à la procédure orale que le document (5) a été identifié comme représentant ces connaissances générales. Et donc, le requérant n'a pas eu assez de temps pour prendre position par rapport à ce document.

- Tout au long de la procédure d'examen, le requérant a été confronté à une procédure de type inquisitoire contraire à la notion d'objectivité. La Division d'examen s'est contentée de faire référence au caractère non convaincant des arguments du requérant sans jamais justifier sa position qu'un document ne décrivant pas tous les éléments nécessaires à l'obtention de l'objet revendiqué puisse être opposé au titre de l'article 54 CBE.

Pour ces raisons, il y a eu un vice substantiel de procédure qui justifie le remboursement de la taxe de recours.

IX. Le requérant a conclu à l'annulation de la décision de rejet et au renvoi de l'affaire à la première instance afin de poursuivre la procédure sur la base des revendications 1 à 11 produites à la procédure orale du 20. février 2002. Il demande aussi le remboursement des taxes de recours selon la règle 67 CBE.

Motifs de la décision

Articles 123(2) CBE et 84 CBE : exigences formelles

1. L'objet des revendications 1 à 11 est divulgué dans la demande telle que déposée pages 2, 17 à 23 et revendications 10 à 14. Le terme "mutée" utilisé dans les revendications refusées par la Division d'examen pour caractériser l'enzyme EPSPS a été omis dans les revendications de la présente requête. Ces revendications sont cependant claires puisque la protéine EPSPS y est définie par sa séquence : SEQ ID No 5. Les exigences des articles 123(2) CBE et 84. CBE sont remplies.

Article 54 CBE : nouveauté

2. Aucun des documents joints au dossier ne divulgue une protéine EPSPS ayant la séquence spécifique, SEQ ID NO 5, de la protéine de la revendication 1.

3. La protéine EPSPS revendiquée est celle obtenue par l'expression du cDNA EPSPS comprenant la séquence spécifique SEQ ID NO 4 dont le clonage est décrit dans la demande et qui a été modifié de manière à ce que les acides aminés en position 102 et 106 dans la protéine EPSPS soient respectivement Ile et Ser au lieu de Thr et de Pro (demande telle que déposée, exemple 1.7)B). En comparaison, le document (2) mentionne à la page 119 : "A gene encoding the enzyme EPSPS was cloned from Zea mays. Two mutations were introduced into the amino acid sequence of EPSPS to confer glyphosate resistance, i.e., a substitution of isoleucine for threonine at amino acid position 102 and a substitution of serine for proline at amino acid position 106.". Dans l'exemple 26, ce gène est transféré dans des cultures de cellules de maïs qui deviennent résistantes au glyphosate, dont on peut donc penser qu'elles expriment la protéine EPSPS doublement mutée.

4. Bien que ni la séquence spécifique du gène EPSPS ni celle de la protéine n'y soient décrites, la Division d'examen a conclu que l'enseignement apporté par le document (2) était suffisant pour détruire la nouveauté de la protéine EPSPS spécifique revendiquée. De l'opinion de la Chambre, cette conclusion ne saurait être valide que si les deux conditions suivantes sont remplies :

- Le clonage du gène EPSPS aboutit toujours à l'isolement de la même séquence d'ADN EPSPS dont l'expression recombinante aboutit donc toujours à la même protéine, et

- La personne du métier peut reproduire le gène EPSPS mentionné dans le document (2) sur la base des informations contenues dans ce document et de ses connaissances générales.

5. La Chambre remarque que le clonage du cDNA codant pour l'EPSPS sauvage est décrit dans le document (5) ainsi que dans la présente demande et que les séquences des protéines EPSPS obtenues par expression des cDNAs recombinants sont divulguées respectivement dans la figure 2 et la séquence SEQ ID NO 3 de ces documents. Une comparaison de ces séquences montre qu'elles ne sont pas identiques : l'acide aminé en position 257 dans SEQ ID NO 3 est Ser alors que l'acide aminé correspondant en position 265 dans la figure 2 est Thr. De plus, les acides aminés en position 312/313 dans SEQ ID NO 3 sont Glu (acide glutamique) et Pro alors que les acides aminés correspondants en position 321/322 dans la figure 2 sont Ser et His (histidine). De cette comparaison, on peut donc conclure que deux clonages indépendants du cDNA codant pour une protéine donnée n'aboutit pas forcément à deux cDNAs ayant exactement la même séquence, dont l'expression produirait deux protéines identiques.

6. Pour cette raison, la divulgation dans le document (2) de l'expression d'un gène EPSPS non caractérisé (excepté pour les codons codant les acides aminés en position 102 et 106) ne peut être considérée comme une divulgation claire et non ambiguë de la protéine EPSPS spécifique caractérisée par SEQ ID NO 5.

7. La première des conditions pour que l'enseignement du document (2) soit dommageable pour la nouveauté de l'objet de la revendication 1 n'est pas respectée. Il n'est donc pas nécessaire de déterminer si la seconde l'est pour conclure que l'objet de la revendication 1 est nouveau.

8. Les revendications 2 à 11 étant directement ou indirectement dépendantes de la revendication 1, elles sont aussi nouvelles. Les exigences de l'article 54 CBE sont remplies.

Article 56 CBE : activité inventive

9. La Division d'examen a rejeté la revendication 7 alors débattue (correspondant à la présente revendication 6) pour manque d'activité inventive. La raison en était que l'introduction à des fins d'expression efficace d'un promoteur de virus de plante en amont de l'ADN EPSPS connu du document (2) était trivial au vu de l'enseignement du document (5) qui préconisait déjà un tel système d'expression (page 5, lignes 19 à 25).

10. L'ADN codant pour la protéine EPSPS spécifique SEQ ID NO 5 n'étant en fait pas connu (voir points 2 à 6 ci-dessus), ce raisonnement ne s'applique pas. Par ailleurs, la question de l'activité inventive de l'EPSPS SEQ ID NO 5 ou du DNA correspondant n'a jamais été abordée par la Division d'examen. Pour assurer au requérant l'opportunité du double degré de juridiction, l'affaire est donc renvoyée en première instance conformément à sa requête.

Règle 67 CBE : remboursement de la taxe de recours

11. Cette règle stipule que :

"Le remboursement de la taxe de recours est ordonné ... lorsqu'il est fait droit au recours par la Chambre de recours, si le remboursement est équitable en raison d'un vice substantiel de procédure"...

12. Le requérant estime avoir été privé de son droit d'être entendu parce que le document (5) a été identifié pour la première fois à la procédure orale comme représentatif des connaissances générales de la personne du métier et que, donc, il n'avait pu prendre position par rapport à ce document. Par ailleurs, il estime que la pro cédure d'examen a été menée de manière inquis itoire plutôt qu'objective.

13. La Chambre remarque que la Division d'examen avait déjà mentionné les connaissances générales de la personne du métier comme étant un élément essentiel pour l'appréciation de la nouveauté dans la communication du 26. novembre 1999 (page 3). Quant à la décision de manque de nouveauté, elle a été prise en tenant compte d'ouvrages généraux de biotechnologie et de l'état de la technique relatif au gène EPSPS de maïs en son ensemble, le document (5) étant mentionné comme un parmi d'autres des documents représentatifs de cet état de la technique. Quelque soit le bien-fondé de cette approche, il n'en reste pas moins que le document (5) était l'un des documents cités dans le rapport de recherche. Son utilisation ne peut avoir pris le requérant par surprise.

14. Quant à la difficulté de communication avec la Division d'examen, qui semble avoir été ressentie, elle ne constitue pas une violation substantielle de procédure selon l'interprétation donnée à ce terme par la jurisprudence (voir la Jurisprudence des chambres de recours de l'Office européen des brevets, 3ième édition, 1998, Partie VII D, 15.4.1).

15. Pour ces raisons, la requête de remboursement de la taxe de recours est refusée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de poursuivre la procédure sur la base des revendications 1 à 11 produites à la procédure orale du 20. février 2002.

3. La requête en remboursement de la taxe de recours est rejetée.

Quick Navigation