European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2002:T041800.20020708 | ||||||||
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Date de la décision : | 08 Juillet 2002 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0418/00 | ||||||||
Numéro de la demande : | 95932056.5 | ||||||||
Classe de la CIB : | B24B 9/14 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé et dispositif pour obvier à la fragilité des arêtes d'un verre de lunettes en matériau rigide, et verre de lunettes correspondant | ||||||||
Nom du demandeur : | ESSILOR INTERNATIONAL Compagnie Générale d'Optique | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.2.03 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive (non) | ||||||||
Exergue : |
- |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le recours vise à faire infirmer la décision datée du 23. août 1999 d'une division d'examen de l'Office européen des brevets, qui a rejeté la demande de brevet européen n° 95 932 056.5 (PCT/FR 95/01235) au motif que le procédé d'arrondissement d'une arête d'un verre de lunettes pour obvier à sa fragilité, objet de la revendication 1 présentée à cette époque, n'impliquait pas d'activité inventive au regard de l'enseignement du document de brevet D1 (EP-A-0 350 216), qui enseignait de réaliser dans ce but un biseautage de l'arête.
II. La demanderesse du brevet, ci-après la requérante, a formé recours et payé la taxe correspondante le 22. octobre 1999. Avec son mémoire exposant les motifs de son recours reçu le 17 décembre 1999, elle a déposé un nouveau jeu de revendications et sollicité la tenue d'une procédure orale au cas où elle n'obtiendrait pas gain de cause.
Par une notification jointe à une invitation à une procédure orale datée du 28 décembre 2000, la chambre a exprimé ses doutes sur l'activité inventive impliquée par le procédé selon la revendication 1 du nouveau jeu de revendications. Au cours des échanges écrits ou entretiens téléphoniques qui ont suivis, la requérante a renoncé à la tenue d'une procédure orale le 27 août 2001 et présenté plusieurs jeux successifs de revendications, dans lesquels il était essentiellement précisé le trajet de l'outil d'ébavurage, tandis que la chambre a mis en question l'activité inventive impliquée par la revendication 1 des nouveaux jeux présentés en citant les deux documents suivants :
D2 : DE-A-2 702 261
D4 : EP-A-0 515 036.
III. La revendication 1 du jeu de revendications, qui a été déposé en dernier lieu le 2 février 2002, s'énonce comme suit :
"Procédé pour obvier à la fragilité de l'une au moins des arêtes (13, 13') d'un verre de lunettes (10) en matériau rigide comprenant une face (11) concave, selon lequel on soumet le verre de lunettes (10) à un outil d'ébavurage (15, 15') présentant une surface de travail cylindrique (30) de révolution, caractérisé en ce que, le verre de lunettes (10) étant entraîné en rotation autour d'un axe (A1), ladite surface de travail cylindrique (30), au cours de son action, pivote par rapport audit verre de lunettes (10) autour d'un axe de pivotement (A2) orthogonal à l'axe (A1) de rotation du verre de lunettes (10) et à l'axe (A4) de la surface de travail cylindrique (30), avec un déplacement de cet axe de pivotement (A2) suivant une trajectoire (T,T') qui, contenue dans un plan passant par l'axe (A1) de rotation du verre de lunettes (10), est globalement oblique par rapport à cet axe (A1) de rotation, afin de substituer à ladite arête (13,13') une surface de liaison globalement arrondie qui se raccorde sensiblement tangentiellement tant à la tranche (12), qu'à la face (11) concave dudit verre de lunettes (10), l'axe (A4) de la surface de travail cylindrique (30) étant, dans une position extrême de l'outil d'ébavurage (15,15'), incliné par rapport à la normale à l'axe (A1) de rotation du verre de lunettes pour réaliser le raccordement tangentiel de ladite surface de liaison à ladite face concave (11)."
IV. La requérante a défendu cette revendication en faisant valoir ce qui suit :
Partant de l'enseignement de D1, l'homme du métier est conduit à utiliser un outil d'ébavurage à surface cylindrique pour réaliser un biseau en amenant la surface de travail de l'outil en rotation en contact avec la tranche du verre, qui est maintenu fixe, et en maintenant ledit outil dans la même position pendant toute l'opération. Le biseau obtenu présente des inconvénients, car il laisse des arêtes qui sont fragiles, notamment avec les verres de lunettes en matières organiques, et provoquent la présence d'éclats de matériaux, dits "flashes", au cours des manipulations suivantes du verre. La présente invention vise à éviter cette fragilité et ces éclats de verre, ainsi que les inconvénients qui s'ensuivent.
La combinaison de D1 avec D2 est artificielle, car D2 concerne un domaine technique très différent, celui des substrats superconducteurs. De plus, il n'enseigne que d'effectuer l'arrondi de la bordure circonférentielle d'un disque, qui présente des surfaces planes. Ces surfaces ne peuvent être comparées aux surfaces bombées d'un verre de lunettes. Par suite, il n'est pas suggéré dans cet art antérieur d'effectuer une surface de liaison qui se raccorde tangentiellement à une surface concave et, de plus, la réalisation d'une telle surface de liaison ne serait pas possible avec l'outil d'ébavurage de D2, qui est un disque plat. En effet, le basculement ou pivotement de ce disque, tel qu'il est préconisé par D2, aboutirait à un contact de la périphérie du disque avec le bord du verre selon deux lignes de contact, ce qui conduirait à échancrer vers l'intérieur en deux emplacements ce bord du verre si on cherchait à faire pivoter le disque jusqu'à ce qu'il soit tangentiel à la surface concave du verre, ou encore cela pourrait amener le bord périphérique du disque plat d'ébavurage à toucher la face concave du verre. Le résultat serait un verre de lunettes détérioré.
Si on suppose néanmoins que l'homme du métier combine les enseignements de D1 avec ceux de D2 pour ne retenir de D2 que la solution d'un arrondi par basculement d'un outil d'ébavurage, puis ensuite revenir à l'enseignement de D1 pour le choix de l'outil d'ébavurage, il n'arriverait toutefois pas à l'objet de la revendication 1. En effet, les figures 2A et 2B de D2 montrent que, dans ses positions extrêmes de trajectoire, l'outil d'ébavurage forme un angle minimum de 5° avec la surface plane du substrat pour éviter d'entrer en contact avec ce substrat. Avec un tel angle, il n'est pas possible d'effectuer un raccordement tangentiel de la surface de liaison avec la surface concave du verre et, de fait, ce serait une arête qui serait obtenue en fin de procédé, ce que la présente invention cherche à éviter.
L'enseignement de D4 est semblable à celui de D2, la différence essentielle résidant dans l'inversion de la pièce qui suit une trajectoire donnée, à savoir dans le procédé selon D4 c'est le verre lui-même qui se déplace au lieu de la surface d'ébavurage qui reste fixe. Par conséquent, les mêmes arguments qu'avec D2 s'appliquent.
V. La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la délivrance d'un brevet européen sur la base du jeu de revendications fourni le 2 février 2002.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable
2. La revendication 1 est une combinaison de caractéristiques des revendications 1, 4 et 5, déposées à l'origine avec, en outre, le passage de la description d'origine, page 11, lignes 17 à 22, qui se rapporte plus particulièrement à la tangence de la surface de liaison avec la face concave du verre de lunettes. Elle est donc bien supportée par les documents originaux de la demande de brevet (article 123 (2) CBE).
3. Aucun des documents de l'art antérieur cités par le rapport de recherche ne montre l'ensemble des cararactéristiques de cette revendication, si bien que le procédé qu'elle définit est nouveau (articles 52 et 54 CBE).
4. En accord avec la décision de la première instance, le document D1 représente l'art antérieur le plus proche de la présente invention, parce que d'une part il enseigne un procédé pour lisser les arêtes principales légèrement ébréchées d'un verre de lunettes qui vient d'être travaillé de façon à avoir son profil définitif, et d'autre part l'outil d'ébavurage employé pour ce procédé présente, comme celui de la présente invention, une surface cylindrique de révolution. Le procédé selon cet art antérieur consiste à amener la surface de travail cylindrique de l'outil d'ébavurage en contact avec l'arête à traiter, tout en maintenant l'axe de cette surface cylindrique dans une position inclinée déterminée par rapport au bord périphérique du verre, si bien que l'arête est remplacée par une surface biseautée.
5. La réalisation d'un biseau conduit à la formation de deux arêtes, qui certes sont moins aigües que l'arête originale, mais créent néanmoins des zones fragiles du verre, sources de formation de "flashes", c'est-à-dire de petits éclats de matériau qui nuisent à l'esthétique du verre et, surtout, polluent les bains de traitement postérieurs. Par suite, la présente invention vise à obvier à la fragilité de ce genre d'arêtes, notamment de celles situées sur la tranche du verre de lunettes du côté de sa face concave.
Selon la revendication 1 de la demande de brevet en cause, la solution consiste à former une surface de liaison arrondie entre la face concave et la tranche du verre au moyen de l'outil d'ébavurage, cette surface de liaison se raccordant sensiblement tangentiellement à la tranche et à la surface concave. Pour ce faire, l'outil pivote autour d'un axe orthogonal à l'axe de rotation du verre et il est en même temps déplacé, son axe de pivotement suivant une trajectoire rectiligne oblique par rapport à l'axe de rotation du verre.
6. Bien que le document D2 se réfère plus spécialement, à titre d'exemple, à la rectification du bord périphérique d'un disque semiconducteur au silicium, son titre et ses revendications concernent de façon plus générale le meulage des bords d'une pièce en matière fragile et à la page 22 de sa description les lentilles de contact et autres dispositifs optiques sont aussi cités à titre d'exemple. Ce document concerne donc un domaine général, celui des machines de meulage, polissage, notamment pour les bords de pièces en matière fragile, tel que du verre, de la céramique, etc.. Il couvre donc le domaine particulier de la présente invention et il y a donc lieu d'attendre de l'homme du métier qu'il prenne en considération l'état de la technique dans ce domaine plus général. Ce document, bien qu'il soit classé dans le domaine électrique, a été cité dans le rapport de recherche, indiquant de ce fait qu'il était aussi classifié dans le domaine général ci-dessus. La requérante a d'ailleurs incorporé ce document comme exemple de l'art antérieur connu dans la description de la présente demande de brevet.
7. Les disques silicium utilisées dans l'industrie électronique sont en général obtenues selon le document D2 par découpe d'un cylindre de silicium en tranches d'environ 1mm. Cette découpe laisse des bords tranchants qu'il convient d'éliminer. Le problème à la base du document D2 est donc très similaire à celui de la présente invention.
Comme solution pour ce problème de rectification du bord périphérique d'une plaque circulaire en matière friable, ce document enseigne de faire tourner cette plaque autour de son axe et d'en approcher un disque abrasif flexible, qui peut pivoter autour d'un axe contenu dans son propre plan et orthogonal à l'axe de rotation de la plaque à rectifier. Cet axe de pivotement du disque abrasif est, en outre, situé à l'extrémité d'un bras de chariot, qui est déplacé vers la plaque à rectifier tout en s'élevant grâce à un plan incliné, si bien que l'axe de pivotement du disque abrasif suit une trajectoire "qui, contenue dans un plan passant par l'axe de rotation de la plaque à rectifier, est globalement oblique par rapport à cet axe de rotation". Le disque abrasif est maintenu en une position fixe de départ, sensiblement parallèle (angle de 5°, voir plus bas) aux surfaces planes de la plaque à usiner au moyen d'un ressort. Une fois au contact de la face inférieure du bord de la plaque à rectifier en un point de sa surface abrasive éloignée de son axe de pivotement, le disque, grâce à cet appui et au mouvement continu de déplacement oblique de cet axe, pivote progressivement sur un arc de 170° autour de son pivot, à l'encontre de l'action du ressort; de ce fait, il pivote pour ainsi dire autour du bord périphérique de la plaque à usiner, si bien que ce bord est entièrement arrondi avec un raccord sensiblement tangentiel avec chacune des faces planes de la plaque, comme le montre la figure 4 de ce document. Au début du processus et à la fin, le disque abrasif fait un angle d'environ 5° avec chacune de ces faces planes respectivement de la pièce rectifiée (figures 2A et 2B de D2).
8. Dans le cas présent, l'homme du métier part de D1 qui enseigne déjà de remplacer une arête par un biseau, mais il se trouve néanmoins encore confronté à de nouvelles arêtes qui demeurent gênantes, même si elles sont plus émoussées que celle déjà remplacée. Pour cet homme du métier, il est évident que la solution la plus naturelle pour éviter de telles arêtes est d'arrondir au mieux la surface concernée du bord de verre. D1 lui-même, en colonne 4, lignes 20 à 24, suggère une telle méthode, en indiquant que les bords plus ou moins ébréchés, issus du taillage du verre, devaient être poncés. L'homme du métier est donc amené à rechercher un procédé pour arrondir le bord périphérique d'une plaque.
9. Or, comme vu ci-dessus, le document D2 enseigne à l'homme du métier une solution pour satisfaire ce but, et ce pour un but très similaire à celui de la présente invention. Le spécialiste est donc amené à s'intéresser au contenu de ce document.
10. D2 lui enseigne que la forme arrondie d'un bord périphérique est obtenue en prévoyant un double mouvement de l'outil d'ébavurage, à savoir un mouvement de pivotement autour d'un axe orthogonal à l'axe de rotation de la pièce à travailler et un déplacement de l'axe de pivotement suivant une pente inclinée oblique par rapport à cet axe tout en passant par son plan. La transposition de cet enseignement à l'outil d'ébavurage à surface de travail cylindrique connu de D1, qui déjà comportait un axe de pivotement identique et en plus se déplacait rectilignement, mais selon une autre direction, ne présente pas de difficultés techniques particulières.
Selon la requérante, cette transposition ne permettrait pas d'obtenir un raccord tangentiel de la surface de liaison à la surface concave, du fait que D2 enseigne de maintenir un angle minimum de 5 avec chacune des faces de la plaque à travailler pour éviter que des parties de l'outil d'ébavurage autres que la partie déjà en contact touchent une face de la plaque. Cet argument ne semble pas être pertinent dans le cas de la présente invention, puisque selon la revendication 1 le raccord tangentiel concerne la surface concave du verre et que, selon la description de la demande de brevet en cause, page 11, lignes 9 à 16, il suffit que la surface cylindrique de l'outil d'ébavurage soit perpendiculaire à l'axe de rotation du verre pour obtenir ce raccord tangentiel. Par suite, un axe incliné de l'outil cylindrique abrasif vers l'intérieur de la concavité du verre tel que montré sur la figure A jointe aux arguments de la requérante en date du 31 janvier 2002, n'est pas absolument nécessaire ; la dernière caractéristique de la revendication 1 n'est donc pas essentielle selon la description même de la demande de brevet. Supposant qu'elle le soit, la concavité même de la face du verre permet - même en cas de l'inclinaison de l'outil telle que revendiquée - d'éviter un contact entre le verre et l'outil d'ébavurage. L'homme du métier, recherchant la tangence revendiquée, n'est donc pas obligé de respecter les 5° minimum, uniquement recommandé par D2 pour un profil donné, et il peut choisir une inclinaison plus prononcée de l'outil d'ébavurage, tant que le contact indésiré entre l'extrémité de l'outil et la surface concave du verre est évité.
11. La requérante a aussi fait valoir que le procédé de mise en arrondi selon D2 faisait appel à un disque d'ébavurage, et non pas à un cylindre, que l'emploi d'un disque d'ébavurage posait des problèmes lorsque la surface de la pièce circulaire à rectifier est concave et que, par suite, la combinaison ci-dessus des enseignements de D1 et D2 amenait l'homme du métier à faire un aller-retour entre ces deux documents, en choisissant seulement les mouvements d'outil connus en soi de D2, mais par contre l'outil d'ébavurage connu de D1.
L'homme du métier, qui part de D1, n'a pas de raison de changer d'outil d'ébavurage. Ce qu'il recherche, face au problème posé par la méthode selon D1, ce n'est pas un nouveu procédé de polissage, mais un nouveau procédé qui aboutisse à la formation d'un arrondi, c'est-à-dire d'un nouveau profil, différent du biseau selon D1. Ce qui est donc en cause, c'est essentiellement la trajectoire de l'outil d'ébavurage. Que ce soit l'outil cylindrique selon D1 ou le disque abrasif selon D2, ils agissent tous deux par contact ponctuel avec la surface à poncer. On ne peut donc parler d'un aller-retour entre les deux documents D1 et D2.
12. Pour toutes ces raisons, la combinaison des enseignements de D1 et D2 conduit à l'objet de la revendication 1 de la demande de brevet en cause. Cet objet n'implique donc pas d'activité inventive (articles 52 et 56 CBE). Les revendications 2 à 17 se réfèrent toutes de façon directe ou indirecte à cette revendication 1. La seule requête de la requérante, qui est basée sur ce jeu de revendications, doit donc être rejetée.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.