European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2006:T012600.20060720 | ||||||||
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Date de la décision : | 20 Juillet 2006 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0126/00 | ||||||||
Numéro de la demande : | 95400533.6 | ||||||||
Classe de la CIB : | A61K 7/13 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Composition de teinture d'oxydation des fibres kératiniques comprenant un dérivé de paraphénylènediamine et une 6-hydroxy 1,4-benzoxazine | ||||||||
Nom du demandeur : | L'ORÉAL | ||||||||
Nom de l'opposant : | Wella AG Bristol-Myers Squibb Company |
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Chambre : | 3.3.10 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Nouveauté (oui) - combinaison de composés non divulguée dans l'art antérieur Activité inventive (oui): état de la technique le plus proche cité dans le brevet - amélioration inattendue |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La mention de la délivrance du brevet européen nº 684 035 basé sur la demande de brevet européen nº 95400533.6, déposée le 13 mars 1995 et revendiquant la priorité de la demande FR 9406394 en date du 26 mai 1994, a été publiée le 11 septembre 1996.
II. Deux oppositions ont été formées en vue d'obtenir la révocation du brevet en sa totalité.
Les opposantes ont invoqué un manque de nouveauté et d'activité inventive (Article 100(a) CBE) en se basant, entre autres, sur les documents suivants :
(1) DE-C-1 940 085,
(2) DE-A-3 917 304,
(6) US-A-4 840 639,
(7) US-A-4 357 141 et
(9) H. H. Tucker, "The formulation of oxidation hair dyes", American Perfumer and Cosmetics, 83, page 59 (October 1988).
III. Par la décision signifiée par voie postale le 7 décembre 1999, la division d'opposition a révoqué le brevet.
Selon la division d'opposition, la combinaison coupleur-précurseur revendiquée n'était pas divulguée par le document (7), seul document opposé au titre du manque de nouveauté. L'objet des revendications du brevet tel que délivré était donc nouveau. Le problème technique que se proposait de résoudre l'invention par rapport à l'état de la technique le plus proche représenté par le document (1) était d'améliorer les compositions au vu de leur toxicité sans sacrifier les qualités de coloration. Les essais comparatifs soumis par les parties montraient que ce problème technique était résolu en substituant les précurseurs d'oxydation classiques par les précurseurs selon la revendication 1 du brevet litigieux. Toutefois, le caractère non-toxique de ces précurseurs était déjà décrit dans le document (2). Le fait que ce document mentionnait que certaines colorations obtenues avec ces précurseurs n'étaient pas acceptables ne constituait pas un préjudice technique. En effet, la non-toxicité des précurseurs conduisait l'homme du métier à les utiliser pour améliorer les compositions connues du document (1). Par conséquent, l'objet des revendications du brevet litigieux n'impliquait pas d'activité inventive. L'objet de la revendication 1 selon la requête auxiliaire alors pendante devant la division d'opposition n'impliquait pas pour les mêmes raisons d'activité inventive.
IV. Le 28 janvier 2000, la requérante (propriétaire du brevet) a introduit un recours contre cette décision en acquittant le même jour la taxe correspondante. Le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 10 avril 2000. Avec une lettre datée du 19 mai 2006 la requérante a déposé deux jeux de revendications à titre de requête principale et subsidiaire, la requête principale comprenant neuf revendications. La revendication 1 selon la requête principale s'énonce comme suit :
"1. Composition de teinture d'oxydation pour fibres kératiniques, en particulier pour fibres kératiniques humaines telles que les cheveux, du type comprenant dans un milieu approprié pour la teinture, au moins un précurseur de colorant d'oxydation et au moins un coupleur, caractérisée par le fait qu'elle contient, à titre de précurseur de colorant d'oxydation, au moins la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine et/ou au moins l'un des sels d'addition de cette paraphénylènediamine avec un acide,
et à titre de coupleur, au moins une 6-hydroxy 1,4-benzoxazine de formule (II) suivante :
FORMULE/TABLEAU/GRAPHIQUE
dans laquelle les radicaux R1 et R2 désignent, indépendamment l'un de l'autre ou simultanément, un atome d'hydrogène ou un radical alkyle inférieur contenant de 1 à 4 atomes de carbone,
et/ou au moins l'un des sels d'addition de cette benzoxazine avec un acide".
V. Avec une lettre datée du 2 avril 2002 l'intimée 02 (opposante 02) a requis que son opposition soit transférée à la société "The Procter and Gamble Company". Lors de la procédure orale tenue devant la Chambre le 20 juillet 2006 l'intimée 02 a expressément abandonné cette requête.
VI. Selon la requérante le document (7) ne divulguait pas la combinaison coupleur-précurseur telle que définie dans la revendication 1 de la requête principale. Les compositions revendiquées étaient donc nouvelles. Le document (2), cité comme art antérieur le plus proche dans le brevet litigieux, devait être considéré comme point de départ pour l'évaluation de l'activité inventive puisqu'il évoquait le problème de la toxicité des compositions ainsi que celui de l'intensité de la coloration et de l'obtention de nuances naturelles. Le problème à résoudre par l'invention objet du brevet litigieux était de mettre en oeuvre des compositions de teintures d'oxydation non toxiques, engendrant des nuances naturelles et présentant une intensité de coloration améliorée. L'exemple 1 du brevet litigieux et les résultats d'essais comparatifs soumis devant la division d'opposition montraient que les compositions selon l'invention contenant comme coupleur la 6-hydroxybenzomorpholine permettaient d'obtenir des nuances plus intenses que les compositions selon le document (2) dans lesquelles le coupleur était la résorcine. La valeur L observée dans ces essais traduisait l'intensité de la coloration. Les comparaisons d'intensité se rapportaient à des nuances similaires. Ces résultats étaient surprenants eu égard au fait que selon le document (2), la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine donnait des couleurs moins intenses. En outre, le document (9) mentionnait que les modifications opérées sur les compositions de coloration avaient des effets imprévisibles. Par conséquent, l'objet des revendications du brevet litigieux impliquait une activité inventive.
VII. Selon les intimées 01 (opposante 01) et 02 les compositions revendiquées n'étaient pas nouvelles au vu du document (7). En ce qui concernait l'activité inventive, le document (1) représentait l'état de la technique le plus proche de l'invention. Les essais de l'intimée 01 soumis avec la lettre datée du 11 octobre 2000 montraient que les compositions revendiquées n'apportaient aucun avantage en terme de coloration par rapport aux compositions connues du document (1). En outre, dans les essais comparatifs soumis par la requérante la valeur "L" n'exprimait pas l'intensité de la coloration mais la clarté. D'autre part, l'intensité dépendait de la nuance de la coloration, or les essais comparatifs avaient été réalisés avec des nuances différentes. L'amélioration d'intensité alléguée par la requérante n'était donc pas prouvée. Ainsi le seul problème résolu par l'invention était de diminuer la toxicité des compositions de l'art antérieur. L'homme du métier trouvait cependant dans les documents (2) et (6) une incitation à remplacer la para-toluène diamine utilisée dans les compositions selon le document (1) par une 2-hydroxyalkyl paraphénylènediamine afin de diminuer la toxicité des compositions. Dans ces circonstances, même si de ce remplacement résultait un effet positif sur la coloration, un tel effet ne pouvait être considéré que comme un "bonus" sur lequel aucune activité inventive ne pouvait être fondée. Si l'on considérait les compositions selon le document (2) comme représentant l'état de la technique le plus proche, il était évident pour l'homme du métier de remplacer le résorcinol présent dans ces compositions par un autre coupleur pour obtenir des colorations plus intenses. En effet, le document (9) enseignait que le résorcinol éclaircissait les colorations. Ainsi, sa substitution par un autre coupleur devait nécessairement se traduire par une augmentation de l'intensité de coloration. Par conséquent, les compositions revendiquées n'impliquaient pas d'activité inventive.
VIII. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base de la requête principale ou de la requête auxiliaire, toutes deux déposées avec la lettre datée du 19 mai 2006.
Les intimées demandent l'une et l'autre que le recours soit rejeté.
IX. La Chambre a rendu la décision à la fin de la procédure orale.
Motifs de la décision
Requête principale
1. Modifications
La revendication 1 se distingue de la revendication 1 du brevet tel que délivré uniquement par le fait que le précurseur de coloration d'oxydation à été limité à la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine et ses sels. Cette modification trouve un support à la page 4, ligne 12 de la demande de brevet telle que déposée et limite la protection conférée par le brevet tel que délivré, satisfaisant ainsi aux exigences de l'Article 123(2) et (3) CBE. La dépendance des revendications 3 à 9 a été modifiée pour tenir compte de la suppression des revendications 2 à 5 du brevet tel que délivré.
2. Nouveauté
Les compositions revendiquées requièrent la combinaison de la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine et d'une 6-hydroxy 1,4-benzoxazine de formule (II).
Les intimées ont invoqué un défaut de nouveauté en se fondant uniquement sur le document (7) qui décrit des compositions pour la coloration par oxydation des cheveux contenant notamment un précurseur et un coupleur. Le document (7) mentionne parmi un nombre important de précurseurs possibles la mono-(beta-hydroxyéthyl) paraphénylène diamine (colonne 4, lignes 65 et 66) et parmi de nombreux coupleurs, la 6-hydroxy benzomorpholine (colonne 6, lignes 3 et 4). Toutefois, la combinaison de ces deux composés au sein d'une même composition n'est pas divulguée dans le document (7). Afin d'aboutir à la combinaison revendiquée il faut choisir parmi les précurseurs envisagés par le document (7) un précurseur particulier et le combiner avec un coupleur spécifique qu'il faut également sélectionner parmi de nombreux composés. Par conséquent, le document (7) ne divulgue pas de façon directe et non équivoque les compositions revendiquées.
Les compositions revendiquées sont donc nouvelles (Article 54 CBE).
3. Activité inventive
Selon la jurisprudence constante des Chambres de Recours de l'OEB, l'activité inventive s'apprécie de façon objective en utilisant l'approche problème-solution. Cette approche consiste à identifier d'abord l'état de la technique le plus proche, puis partant de cet état de la technique à identifier le problème technique que l'invention se propose de résoudre, à examiner ensuite si ce problème a bien été résolu par la solution revendiquée, sinon, à reformuler un problème technique moins ambitieux et, enfin, à examiner si la solution revendiquée s'imposait à l'évidence à l'homme du métier au vu de l'état de la technique pertinent.
Correctement appliquée, l'approche problème-solution permet de se placer dans la situation dans laquelle l'inventeur était réputé se trouver à la date de l'invention et évite ainsi de procéder à une analyse rétrospective de l'activité inventive en connaissance de l'invention, ce qui serait inadmissible.
3.1 Le brevet litigieux concerne des compositions non-toxiques de teinture d'oxydation des fibres kératiniques. Alors que la requérante a soumis que le document (2), dont l'équivalent européen est cité dans la spécification du brevet litigieux, représentait l'état de la technique le plus proche de l'invention, les intimées ont invoqué à cet égard le document (1).
3.1.1 Lorsque le brevet litigieux mentionne un document particulier comme représentant l'état de la technique le plus proche et le point de départ de l'invention et que le problème technique à résoudre a été formulé dans le brevet litigieux au vu de cet état de la technique, l'activité inventive doit s'évaluer à partir de ce document à moins qu'un autre document plus proche de l'invention se révèle être techniquement plus pertinent (T 800/91, point 6 des Raisons pour la Décision, non publié au JO OEB).
Dans l'introduction du brevet litigieux, le point de départ de l'invention et le problème technique à résoudre sont définis par rapport à deux documents dont l'un est l'équivalent européen du document (2) (page 2, lignes 15 à 17). Le document (2) aborde comme le brevet litigieux le problème de la toxicité des compositions (page 2, lignes 36 et 37) ainsi que celui de l'intensité de la coloration (page 2, lignes 63 et 64). En ce qui concerne la composition colorante, le document (2) préconise le même précurseur que le brevet litigieux, à savoir la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine (revendication 1, exemples 1 à 4).
Le document (1) cité par les intimées, ne se propose de résoudre ni le problème de l'intensité de la coloration, ni celui de la toxicité des compositions. Dans ce contexte, l'intimée 01 a fait valoir un passage du document (1) mentionnant la compatibilité des coupleurs avec la peau et les cheveux (colonne 8, lignes 3 à 7) et en a conclu que ce document abordait également le problème de la toxicité des compositions. Cependant, le passage cité concerne la seule compatibilité des coupleurs et ne donne aucun enseignement sur la compatibilité de la composition colorante dans sa totalité alors que cette dernière comprend nécessairement en plus du coupleur, au moins un précurseur. En outre, la compatibilité des colorants avec la peau et les cheveux est une propriété différente de la toxicité des composition pour laquelle interviennent d'autres considérations physiologiques (voir document (2), page 2, lignes 35 et 36 ; page 2, ligne 65 à page 3, ligne 3). Par conséquent le document (2) est au regard des problèmes techniques abordés plus proche de l'objet du brevet litigieux que le document (1).
Selon l'intimée 02 les compositions décrites dans le document (1) étaient plus proches des compositions revendiquées que celles du document (2). Toutefois, le document (1) décrit un coupleur selon le brevet litigieux, à savoir la 7-hydroxybenzomorpholine (revendication 2 ; colonne 2, ligne 29 ; exemples B à E), mais ne fait pas allusion, contrairement au document (2), à la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine, seul précurseur envisagé par les revendications litigieuses. La plus grande pertinence du document (1), basée sur les structures des composants mis en jeu n'est donc pas établie. En outre, selon la jurisprudence constante des Chambres de Recours, un document ne saurait être considéré comme constituant l'état de la technique le plus proche d'une invention du seul fait de la similitude des substances entrant dans la composition (voir par exemple T 273/92, point 3 des Raisons pour la Décision, non publié au JO OEB).
Par conséquent, le document (1) représente un état de la technique plus éloigné de l'invention que le document (2). Dans ces circonstances, ce document (2) dont l'équivalent est cité comme point de départ pour l'invention dans le brevet litigieux, constitue l'état de la technique sur lequel doit se fonder l'analyse de l'activité inventive.
3.1.2 Le document (2) divulgue des compositions pour la coloration des cheveux comprenant à titre de précurseur la 2-(2,5-diaminophenyl)ethanol ou un de ses sels (autre terminologie pour la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine définie dans le brevet litigieux) et comme coupleur la résorcine (exemples 1 à 3). Selon le document (2), les compositions comprenant la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine offrent l'avantage de ne pas être mutagènes (page 3, ligne 9 et 10 ; tableau 1, dernière colonne), mais présentent l'inconvénient de produire des colorations avec une intensité affaiblie (page 2, lignes 63 et 64).
3.2 Ainsi, le problème technique à résoudre par l'invention objet du brevet litigieux est de proposer des compositions non toxiques pour la teinture des matières kératiniques qui engendrent une amélioration de l'intensité de la coloration (brevet litigieux, page 2, lignes 15 à 22).
3.3 La solution proposée par le brevet litigieux à ce problème est la composition de teinture par oxydation selon la revendication 1 de la requête principale, caractérisée par la présence à titre de coupleur d'au moins une 6-hydroxy 1,4-benzoxazine de formule (II).
3.4 Selon l'exemple 1 du brevet litigieux la coloration des cheveux teintés avec une composition selon la revendication 1 est caractérisée par une valeur d'intensité "L" de 43,19. Les mêmes cheveux traités avec une composition dans laquelle le coupleur selon l'invention à été remplacé par la résorcine préconisée par le document (2) présentent une valeur d'intensité de 47,40. Lorsqu'on réalise les mêmes essais sur des cheveux permanentés on observe une valeur de 32,82 avec une composition selon l'invention, et une valeur de 38,78 avec une composition à la résorcine (exemple 1, page 5 et 6). Dans le système d'évaluation utilisé pour ces essais, plus la valeur "L" est basse plus la nuance est intense (brevet litigieux page 6, ligne 24). Les essais effectués avec les compositions contenant la résorcine reflètent adéquatement l'état de la technique le plus proche selon le document (2) puisqu'ils ne diffèrent des essais selon l'invention que par la nature du coupleur, seule caractéristique distinguant les compositions revendiquées de celles selon le document (2). Par conséquent, les essais décrits dans le brevet litigieux démontrent bien une amélioration de l'intensité de la nuance liée à l'utilisation des compositions revendiquées.
Selon l'intimée (01) la valeur "L" reflète la clarté ("Helligkeit") et non l'intensité de la coloration. Cet argument n'est pas en contradiction avec les résultats des essais comparatifs. En effet, l'intensité représente le contraire de la clarté. En d'autres termes plus une coloration est intense, moins elle est claire. C'est pour cette raison qu'une diminution de la valeur "L" reflète une augmentation de l'intensité (brevet litigieux, page 6, lignes 9 et 24 ; "Anlage 2" soumis par l'intimée 01 avec la lettre datée du 18 octobre 2000).
Les essais décrits dans le brevet litigieux ont été confirmés par la "note technique I" en date du 6 juillet 1999, soumise par la requérante lors de la procédure devant l'instance du premier degré. Cette note technique concerne les mêmes essais que l'exemple 1 du brevet litigieux mais précise, par les valeurs "a" et "b", les nuances de coloration pour lesquelles les intensités "L" ont été mesurées. Cette précision permet de constater que les différences d'intensité (de 43,19 à 47,40 et de 32,82 à 38,78) ont été observées pour des gammes de nuances de coloration similaires, les valeurs de "a" et "b" restant très proches dans les essais selon l'invention et dans ceux selon l'art antérieur (a:3,09/3,42 ; b:16,98/15,10). Pour ces raisons, la Chambre ne peut accepter l'objection des intimées tendant à dénuer de pertinence les différences d'intensité au vu du fait qu'elles auraient été mesurées pour des nuances de coloration différentes.
Ainsi, au vu des résultats des essais comparatifs présentés par la requérante, la Chambre considère que le problème technique tel que défini ci-dessus (point 3.2) a bien été résolu par les compositions faisant l'objet de la revendication 1.
Cette conclusion ne peut être remise en question par les résultats des essais comparatifs soumis par l'intimée 01 avec la lettre en date du 11 octobre 2000 puisque ces derniers ne concernent pas des compositions selon l'art antérieur le plus proche, à savoir le document (2).
3.5 Par conséquent, la seule question en suspens est de savoir si la solution proposée par le brevet litigieux pour résoudre le problème posé découlait de façon évidente de l'état de la technique disponible, en d'autres termes s'il était évident pour l'homme du métier d'utiliser comme coupleur une 6-hydroxy 1,4-benzoxazine de formule (II) pour améliorer l'intensité des colorations obtenues avec des compositions non toxiques.
3.5.1 Le document (2) mentionne que l'on observe lors de l'utilisation de la 2-beta-hydroxyéthyl paraphénylènediamine comme précurseur de colorant d'oxydation une intensité de coloration affaiblie mais ne suggère aucune solution à ce problème. En outre, le document (2) ne fait aucune allusion aux coupleurs définis par la formule (II) du brevet litigieux.
Par conséquent, l'enseignement du document (2) ne peut, à lui seul, conduire l'homme du métier de façon évidente aux compositions revendiquées.
3.5.2 Le document (6), pas plus que le document (2), ne mentionne les coupleurs de formule (II) selon la revendication 1 du brevet litigieux et ne peut donc, de ce seul fait, suggérer la solution au problème technique résolu par l'invention.
3.5.3 Le document (1) n'aborde pas le problème de l'intensité de la coloration. L'homme du métier ne peut donc en tirer aucun enseignement pour résoudre le problème à la base du brevet contesté, à savoir d'améliorer l'intensité de coloration de compositions non toxiques. Pour cette raison la combinaison du précurseur selon le document (2) et du coupleur selon le document (1), combinaison sur laquelle se fondent les intimées pour contester la présence d'une activité inventive, ne peut être que le résultat d'une analyse ex post facto de l'art antérieur, c'est à dire une analyse qui n'est pas admissible puisque faite en toute connaissance de l'invention.
3.5.4 Selon le document (9) une augmentation de la quantité de résorcinol dans une composition de coloration contenant la para-phénylène diamine provoque un éclaircissement des colorations (deuxième page du document, colonne de droite, troisième paragraphe). L'intimée 02 a déduit de ce passage qu'il serait évident pour l'homme du métier de remplacer la résorcine des compositions selon le document (2) par un autre coupleur pour améliorer l'intensité de la coloration et aboutir ainsi aux compositions selon le brevet litigieux. Cette ligne d'argumentation n'est cependant pas étayée par l'enseignement du document (9) qui préconise une modification de la concentration du résorcinol sans mentionner son remplacement ou l'addition d'un autre coupleur. Par conséquent, le document (9) ne suggère pas la solution revendiquée qui consiste justement à utiliser un autre coupleur que le résorcinol, à savoir une benzoxazine de formule (II).
3.6 L'objet de la revendication 1 selon la requête principale, et pour les mêmes raisons celui des revendications dépendantes 2 à 6, implique donc une activité inventive (Article 56 CBE).
4. Les revendications indépendantes 7, 8 et 9 concernent respectivement un procédé mettant en oeuvre la composition selon la revendication 1, un dispositif à plusieurs compartiments ou "kit" renfermant la composition selon la revendication 1 et l'utilisation de la composition selon la revendication 1. L'objet de ces revendications est donc également nouveau et implique de même une activité inventive.
5. Dans ces circonstances il n'y a pas lieu d'examiner la requête subsidiaire.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet sur le fondement des revendications 1 à 9 de la requête principale déposée avec la lettre datée du 19 mai 2006, ainsi que d'une description demeurant à adapter.