J 0002/93 (Décision susceptible de recours) of 7.2.1994

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1994:J000293.19940207
Date de la décision : 07 Fevrier 1994
Numéro de l'affaire : J 0002/93
Numéro de la demande : 83810210.1
Classe de la CIB : G04B 37/16
Langue de la procédure : FR
Distribution : A
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Titre de la demande : Montre-bracelet dont le bracelet est attaché au boîtier de montre par une charnière
Nom du demandeur : ETA SA Fabriques d'Ebauches
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.1.01
Sommaire : N'est pas susceptible de recours conformément à l'article 106 CBE une lettre émise à l'en-tête d'une direction générale sous la signature d'un Vice-Président de l'OEB dès lors qu'il apparâit de son contenue qu'elle n'a pas les caractères d'une décision et de sa forme qu'elle n'émane d'aucune des instances énumérées dans l'article 21(1) CBE.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 20
European Patent Convention 1973 Art 21(1)
European Patent Convention 1973 Art 106
European Patent Convention 1973 R 12(2)
European Patent Convention 1973 R 92(2)
Mot-clé : Décision susceptible de recours
Exergue :

-

Décisions citées :
J 0018/84
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0001/97
J 0037/97
J 0018/98
J 0014/00
J 0019/00
J 0009/04
J 0002/05
T 1259/09
T 0831/17

Exposé des faits et conclusions

I. Par décision du 25 novembre 1991, la chambre de recours 3.5.2 a prononcé la révocation du brevet européen n 0 098 239 de la requérante (affaire T 456/90, non publiée au JO OEB).

II. Estimant pouvoir être restaurée dans son droit de voir poursuivre la procédure sur base de revendications modifiées, la requérante a, le 16 janvier 1992, présenté devant les chambres de recours "une requête en restitutio in integrum". A la même date, elle déposa également un "acte de recours" contre la décision susmentionnée.

III. Par sa lettre du 31 juillet 1992, le Président de la chambre de recours 3.5.2, responsable de l'administration de cette chambre, écrivit au mandataire de la requérante qu'aucune suite ne serait donnée à la requête en restauration. Par un courrier ultérieur du 28. septembre 1992, le Vice-Président de la Direction Générale 3 fit savoir au même mandataire que la décision finale de la Chambre de recours 3.5.2 ne pouvait être révisée.

IV. Se référant aux requêtes et aux lettres susmentionnées, le mandataire de la requérante écrivit en date du 27. octobre 1992 à l'Office européen des brevets à l'attention de Madame R. R., Vice-Présidente de la Direction Générale 5, pour exposer que la taxe de recours et la taxe afférente à la requête en restauration avaient été remboursées et que les chambres de recours avaient considéré les requêtes comme non existantes. Il exprima toutefois le souhait de discuter avec la destinataire de sa lettre les différentes possibilités s'ouvrant dans le cadre des compétences de la Division juridique, la requérante s'estimant habilitée à requérir l'inscription au Registre européen des brevets de la date de dépôt de la requête en restauration ainsi que la radiation de la mention selon laquelle la procédure avait été clôturée par la décision T 456/90 du 25 novembre 1991. Dans sa lettre du 4 novembre 1992, la Vice-Présidente de la Direction Générale 5 répondit au mandataire qu'aucune instance de l'Office européen des brevets ne demeurait compétente pour rendre une décision pouvant être comprise comme remettant en question le résultat de la procédure de recours et que, dès lors, la Division juridique ne pouvait intervenir faute de compétence.

En date du 11 novembre 1992, le mandataire de la requérante annonça à ladite Vice-Présidente qu'il déposait les requêtes en question auprès de la Division juridique.

A la même date, le mandataire de la requérante envoya les deux requêtes annoncées à la Division juridique.

Par courrier du 25 novembre 1992, la Vice-Présidente de la Direction Générale 5, se référant à la lettre du 11. novembre 1992 du mandataire, lui rappela sa première réponse du 4 novembre et reexposa, considérant en particulier la première des requêtes susmentionnées, que la Convention sur le brevet européen n'attribuait aucune compétence à une instance quelconque de l'Office européen des brevets pour prendre des décisions ou procéder à des inscriptions après la révocation d'un brevet (par une Chambre de recours) et que dès lors la Division juridique n'était plus compétente pour rendre une décision.

V. En date du 27 janvier 1993, la requérante a fait recours contre "la décision de la Division juridique de l'Office européen des brevets du 25 novembre 1992" et formulé les requêtes suivantes :

- annuler la décision de la Division juridique de l'OEB du 25 novembre 1992 ;

- dire que la date de réception de la requête en restitution in integrum formée par ETA S.A. le 16. janvier 1992 doit être inscrite au Registre européen des brevets ;

- en conséquence, renvoyer la cause à la Division juridique de l'OEB pour inscription de la date de dépôt de la requête en restitutio in integrum formée par ETA S.A. ;

- ordonner le remboursement à ETA S.A. de la taxe payée par elle lors du dépôt du recours, en vertu de la Règle 67 du règlement d'exécution de la CBE.

Un mémoire de recours fut déposé à la même date et la taxe de recours fut acquittée conjointement.

Quant à la recevabilité, il fut exposé au mémoire de recours que la lettre du 25 novembre 1992 constituait une décision de la Division juridique, son contenu présentant toutes les caractéristiques d'une décision qui par ailleurs émanait de Madame R. R., Vice-Présidente de la Division juridique, habilitée selon la requérante à rendre des décisions au nom de la Division juridique.

VI. En date du 2 mars 1993, la Division juridique, sous la signature de Madame L.D. Ö, Directrice, écrivit au Président de la Chambre juridique dans les termes suivants . "veuillez trouver ci-joint un recours qui a été formé par la société ETA S.A. Fabrique d'Ebauches suite à la lettre du 25 novembre 1992 que Madame R. a adressée à la société susmentionnée. Une révision préjudicielle n'a pas eu lieu".

VII. Par sa communication du 25 juin 1993, le Rapporteur fit savoir au mandataire de la requérante que la lettre du 25. novembre 1992, objet du recours, pourrait être considérée comme n'étant pas une décision de la Division juridique susceptible de recours conformément à l'article 106(1) CBE et que, dès lors, le recours pourrait apparaître comme irrecevable.

VIII. Par télécopie du 25 août 1992, la requérante a présenté les arguments suivants :

- la question de savoir si un document émanant de l'OEB représente une décision ou une notification dépend de son contenu et non de sa forme ;

- sur le plan administratif, la Division juridique est regroupée avec d'autres services dans la Direction Générale 5, dirigée par Madame R. R., Vice-Présidente de l'OEB ; cette dernière est donc le supérieur hiérarchique de Madame L.D. Ö, directrice de la Division juridique. Le fait qu'une personne exerce des fonctions administratives en tant que Vice- Présidente d'une Direction Générale n'exclut pas que cette même personne puisse également être membre d'une instance de cette Direction Générale avec le pouvoir de prendre des décisions ou de participer aux décisions. Madame R. R. étant d'ailleurs juriste, a qualité pour prendre une décision en tant que membre juriste de la Division juridique;

- de l'échange de correspondance, il ressort clairement que la Direction Générale 5 s'est substituée à la Division juridique, statuant en lieu et place de cette dernière sur la demande d'inscription formée par ETA S.A.. Le fait est confirmé par le comportement ultérieur de la Division juridique, puisque celle-ci ne s'est pas autrement prononcée sur la demande du 11 novembre 1992 de ETA S.A. et a traité la lettre du 25 novembre 1992 de la Direction Générale 5 comme étant "l'équivalent d'une propre décision, lui appliquant la procédure de l'article 109 CBE" ;

- considérer le recours comme irrecevable parce qu'il n'est pas dirigé contre une décision émanant à proprement parler de la Division juridique, alors que cette décision lie la Division juridique, serait contraire au principe selon lequel l'administration doit agir de bonne foi, principe généralement admis dans les Etats contractants et reconnus par la jurisprudence constance des Chambres de recours de l'OEB ;

- la Chambre de recours ne saurait cautionner un procédé par lequel l'autorité hiérarchique supérieure (au seul plan administratif) statue à la place de l'autorité inférieure, sans possibilité de recours, parce que seule cette dernière avait la compétence matérielle pour statuer (art. 20 CBE) ;

- la CBE ne réserve nullement à la Direction Générale 5, qui n'est qu'une entité administrative, le droit d'intervenir pour prescrire que dans un cas donné la Division juridique ne peut statuer du tout. Le fait que la Direction Générale 5 ait outrepassé ses droits ne rend pas pour autant ce recours irrecevable car le refus de faire droit aux prétentions de ETA S.A. constitue une décision définitive qui lie la Division juridique.

IX. En date du 17 septembre 1993, la requérante s'adressa au Président de l'OEB pour lui demander de prendre position en déposant des observations devant la Chambre juridique. Dans sa lettre du 29 septembre 1993, le Président de l'OEB, se référant à l'article 12bis du Règlement de procédure des Chambres de recours, qui prévoit que sur sa requête motivée la Chambre concernée peut l'inviter à présenter des observations, répondit qu'une telle requête ne lui paraissait pas justifiée en l'espèce.

X. En date du 19 janvier 1994, la requérante déposa une note d'analyse des principes généralement admis dans certains Etats contractants en matière de recours contre l'absence ou le refus de décision.

XI. Une procédure orale fut tenue en date du 7 février 1994. La requérante y formula les requêtes subsidiaires suivantes :

1 - si la Chambre de recours considère qu'il n'y a pas de décision attaquable, dire et prononcer qu'il appartient à la Division juridique de statuer sur la requête du 11 novembre 1992 en inscription au Registre des brevets de la date de dépôt de la requête en restitutio in integrum formée par ETA S.A. Fabrique d'Ebauches ;

2 - saisir la Grande Chambre de recours, conformément à l'article 112, al. 1(a) CBE et lui soumettre les questions suivantes :

a) lorsqu'une autorité hiérarchiquement supérieure à l'organe compétent de l'Office statue en lieu et place de ce dernier, la décision de cette autorité doit-elle être assimilée à une décision de l'organe compétent ?

b) dans quelles conditions le refus ou l'absence de décision d'un organe compétent de première instance de l'Office peut-il être assimilé à une décision susceptible de recours ? c) est-ce qu'une autorité ou un agent de l'Office peut statuer préjudiciellement sur la recevabilité ou l'existence d'une procédure étant du ressort exclusif d'un autre organe de l'office ?

XII La décision qui figure au dispositif ci-après a été prononcée à l'issue de la procédure orale.

Motifs de la décision

1. A titre liminaire, la Chambre relève que, bien qu'elle ait déposé deux requêtes le 11 novembre 1992 devant la Division juridique, la requérante a, dans le présent recours, limité ses demandes à celle concernant l'inscription dans le registre européen des brevets de la date de dépôt d'une requête en restauration de droit.

2.1. L'article 21(1) CBE limite la compétence des chambres de recours à l'examen des recours formés contre les décisions de la section de dépôt, des divisions d'examen, les divisions d'opposition et de la Division juridique, l'article 106(1) CBE venant corollairement disposer que seule les décisions desdites instances sont susceptibles de recours.

Dans le cas présent, les dispositions de l'article 108 s'avérant par ailleurs satisfaites, il convient donc pour statuer sur la recevabilité, de rechercher si l'acte objet du présent recours, à savoir la lettre émise le 25. novembre 1992 à l'en-tête de la "Direction Générale 5, questions juridiques/affaires internationales" sous la signature de Madame R. R., Vice-Présidente de l'Office européen des brevets, constitue une décision émanant de la Division juridique.

2.2. En regard de son contenu, il n'apparaît pas que la lettre du 25 novembre 1992, objet du recours, soit une décision rendue sur la requête adressée à la Division juridique tendant à l'inscription dans le Registre européen des brevets de la date de dépôt de la requête en restauration. Cette lettre constitue en fait la suite d'une correspondance échangée entre le mandataire de la requérante et la Vice-Présidente de la Direction Générale 5, et en particulier une réponse à la lettre du 11. novembre 1992 du mandataire, annonçant le dépôt de la requête susmentionnée. Dans sa lettre du 25. novembre 1992, la Vice-Présidente de la Direction Générale 5 ne fait d'ailleurs que reprendre le point de vue déjà exprimé dans sa lettre du 4 novembre 1992.

2.3. En ce qui concerne son origine, la requérante a admis dans son mémoire de recours qu'il était non seulement nécessaire que l'acte fût une décision, mais qu'il convenait encore qu'il émanât d'une autorité compétente. En l'espèce, conformément à l'article 20 CBE, la Division juridique est la seule instance compétente pour toute décision relative aux mentions à porter au Registre européen des brevets, à savoir celles énumérées à la règle 92(1) CBE et celles prescrites par le Président de l'Office européen des brevets sur le fondement de la règle 92(2). Parmi ces dernières, la mention relative à la requête en cause est expressément visée par la Décision du Président de l'OEB du 22 janvier 1986 (JO OEB 1986, 61). Ainsi, c'est précisément à cause du différend entre la requérante et l'OEB qui apparaît dans la correspondance qu'ils ont échangée (cf. supra, point IV) que la décision relative à l'inscription sollicitée ne pouvait être prise que par la Division juridique (cf. J 18/84, JO OEB 87, 214, motifs 2.4 et 2.5).

Par ailleurs, ainsi qu'exposé supra, il est clair que la lettre du 25 novembre 1992 émane de la Direction Générale 5 (Questions juridiques/Affaires internationales) et qu'elle a été signée par Madame R. R., en sa qualité de Vice-Présidente de ladite Direction Générale.

Certes la Vice-Présidente de la Direction Générale 5, juriste de formation, apparaît comme supérieur hiérarchique de la Directrice de la Division juridique, ceci résulte des dispositions conjuguées de l'article 20 et la règle 12(2) CBE. Il convient toutefois de relever que ce dernier texte limite le lien entre la Direction Générale 5 et la Division juridique au simple "plan administratif" et donc qu'il ne concerne pas l'exercice des compétences que la CBE attribue spécifiquement à la Division juridique. Ainsi qu'il résulte des pièces du dossier, cette distinction n'a pas échappé à la requérante. Il suffit de se référer à cet égard au courrier adressé par son mandataire (cf. ses lettres du 27. octobre et du 11 novembre 1992) à Madame R. R., en sa qualité de Vice-Présidente de la Direction Générale 5, alors que la requête du 11 novembre 1992 avait bien été adressée à la Division juridique.

3. Le comportement ultérieur de la Division juridique ne peut nullement être considéré comme une confirmation de ce que la Vice-Président s'était ès qualités substituée à ladite Division. En effet, le fait que cette dernière ne se soit pas prononcée sur la requête du 11 novembre 1992 d'une part, ni le contenu de sa lettre du 2 mars 1993 de l'autre, ne peuvent être interprétés dans ce sens.

Sans doute la Division juridique n'avait-elle pas encore pris de décision au moment du recours mais elle peut parfaitement avoir décidé de surseoir à statuer aussi longtemps qu'il n'avait pas été statué sur le présent recours. Force est d'ailleurs de constater que la requérante n'a nullement interrogé la Division juridique sur ses intentions.

D'autre part, il ne peut être déduit de la lettre du 2. mars 1993 de la Division juridique qu'elle aurait traité la lettre du 25 novembre 1992 de la Direction Générale 5 comme équivalent une de ses propres décisions. En effet, dans cette lettre, la Division juridique ne se réfère pas à une décision mais uniquement à la lettre du 25. novembre 1992, objet du présent recours. Quant à la phrase "une décision préjudicielle n'a pas eu lieu", la Division juridique semble plutôt y indiquer que, ne s'agissant pas d'un document émis par elle, il lui suffisait de constater qu'une décision préjudicielle n'avait pas été prise. De plus, même si la Division juridique avait alors accordé à la lettre du 25. novembre 1992 la portée que la requérante lui donne, cette simple considération serait insuffisante pour donner à cette lettre les caractères d'une décision de la Division juridique.

4. Il résulte de ce qui précède que la lettre du 25. novembre 1992 ne peut être considérée comme une décision, qu'elle n'émane pas de la Division juridique et qu'elle n'est donc pas susceptible de recours conformément à l'article 106 CBE. Dès lors, le recours doit être rejeté comme irrecevable.

Quant à la requête en remboursement de la taxe de recours, celle-ci doit être rejetée parce qu'il n'est pas fait droit au recours.

Par ailleurs, dès qu'un recours est déclaré irrecevable, il n'y a plus matière à statuer sur des requêtes telles que celles qui ont été présentées subsidiairement par la requérante. De plus, concernant plus particulièrement la deuxième question subsidiaire, il résulte des motifs et considérations qui précèdent qu'une réponse aux questions proposées ne présenterait aucun intérêt pour la solution du présent recours. La Chambre ne peut que constater que, en l'état, la requête du 11 novembre 1992 concernant l'inscription dans le registre européen des brevets de la date d'une requête en restitutio in integrum est toujours pendante devant la Division juridique.

DISPOSITIF

Par ces motifs, la Chambre

1. déclare le recours irrecevable ;

2. dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les requêtes subsidiaires ;

3. constate que la requête du 11 novembre 1992 est toujours pendante devant la Division juridique ;

4. rejette la requête en remboursement de la taxe de recours.

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