J 0019/89 (Legal practitioner) of 2.8.1990

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1990:J001989.19900802
Date de la décision : 02 Août 1990
Numéro de l'affaire : J 0019/89
Numéro de la demande : -
Classe de la CIB : -
Langue de la procédure : DE
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : non publié
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.1.01
Sommaire : Un conseil en brevets selon le droit national ne peut - quels que soient ses qualifications professionnelles et ses pouvoirs de représentation au niveau national dans le domaine des brevets - être considéré comme "legal practitioner" (avocat) au sens de l'article 134 (7) CBE, ni par conséquent être agréé comme mandataire près l'Office européen des brevets.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 134(7)
European Patent Convention 1973 Art 163
Mot-clé : Représentation devant l'Office européen des brevets
Legal practitioner - conseil en brevets allemand
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
J 0027/95
J 0014/21

Exposé des faits et conclusions

I. Le 29 mars 1988, le requérant a demandé à l'Office européen des brevets (OEB) de constater qu'il était habilité en vertu de l'article 134 (7) CBE à exercer la profession de mandataire près l'OEB. Cette requête a été rejetée le 27 avril 1989 par décision de la division juridique de l'OEB visée à l'article 20 CBE. Dans un recours en date du 19 juin 1989, le requérant a demandé que cette décision soit annulée et qu'il soit fait droit à la requête qu'il avait présentée en vue de faire constater qu'il était habilité à exercer la profession de mandataire près l'OEB.

II. Pour motiver sa requête, le requérant a développé essentiellement les deux argumentations suivantes :

Selon lui, pris à la lettre, l'article 134(7) CBE permet déjà à tout "Rechtsanwalt", "legal practitioner" ou "avocat" agréé dans un Etat contractant d'exercer la profession de mandataire près l'OEB. Le requérant traduit l'expression "legal practitioner" par "Rechtspraktiker" (praticien du droit) et affirme être en ce sens Rechtspraktiker agréé en République fédérale d'Allemagne. Il est en effet conseil en brevets allemand agréé, et également à la fois Dr. Ing. (ingénieur titulaire d'un doctorat) et docteur en droit, et il a passé avec succès le "erste juristische Staatsexamen"*.

Au cas où un pouvoir de représentation ne pourrait lui être reconnu pour cette simple application littérale de l'article 134 (7) CBE, il conviendrait de le lui accorder par assimilation des conseils en brevets allemands agréés aux avocats allemands agréés, car sinon il y aurait violation du principe d'égalité, d'autant que la plupart des avocats n'ont absolument aucune formation en matière de brevets.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable au sens de l'article 106 (1) CBE, 1re phrase, car il est dirigé contre une décision de la division juridique de l'OEB. La division juridique était compétente pour effectuer la constatation en question, en vertu de l'article 20 (1) CBE et de la décision prise le 10 mars 1989 par le Président de l'OEB en application de la règle 9 (2) CBE (JO OEB 1989, 177).

2. Le requérant ne peut revendiquer l'accès à la profession de mandataire près l'OEB qu'en se faisant inscrire sur la "liste des mandataires agréés" visée à l'article 134 (2) CBE, ce qui revient à dire qu'il doit avoir satisfait aux épreuves de l'examen européen de qualification.

3. Une lecture plus attentive de l'article 134 CBE, considéré en liaison avec les dispositions transitoires de l'article 163 CBE, permet de constater que pour les professions de conseil juridique autres que celles d'avocat, l'accès à la profession de mandataire n'est possible que par le jeu de ces dispositions transitoires et - à l'expiration de la période transitoire - par inscription sur la liste des mandataires agréés conformément aux dispositions de l'article 134 (2) CBE. En ce qui concerne les professions de conseil juridique en matière de brevets, il existait et il existe encore dans les Etats contractants de grandes différences pour ce qui est de la qualification et des conditions d'admission à la profession, et notamment pour ce qui est de la distinction établie à l'article 163 (3) CBE entre les personnes qui ont une "qualification professionnelle spéciale" dans le domaine du droit national et celles qui n'en ont pas. Pendant la période transitoire, conformément aux dispositions de l'article 163 CBE, tous les membres des diverses professions de conseil juridique en matière de brevets d'invention peuvent assurément être inscrits sur la liste des mandataires agréés visée à l'article 134 (2) CBE. Après expiration de la période transitoire, cette voie est fermée aux conseils juridiques autres que les avocats, et ce quelle que soit leur qualification.

4. Les dispositions de l'article 134 (7) CBE applicables aux avocats - que le requérant invoque en sa faveur - constituent en revanche une dérogation. En dépit des différences dans les dénominations et dans le cursus suivi, la profession d'avocat s'est développée de manière sensiblement identique dans les Etats contractants, en raison de l'existence d'une histoire et d'une culture juridiques européennes communes. L'avocat est - pour reprendre les termes utilisés dans la loi allemande portant statut des avocats (deutsche Rechtsanwaltsordnung - BRAO) - purement et simplement "organe de la justice" (art. 1er) et en tout état de cause "mandataire dans toutes les affaires juridiques" (art. 3). Le requérant ne revendique pas d'ailleurs pour lui-même la qualité d'avocat.

5. Pour ce qui concerne la République fédérale d'Allemagne, l'article 134 (7) CBE vise uniquement la profession définie par la loi allemande comme étant celle de "Rechtsanwalt", même si outre la qualité de "Rechtsanwalt", "legal practitioner" ou "avocat", il est également exigé que l'avocat (Rechtsanwalt) puisse "agir en qualité de mandataire en matière de brevets d'invention" dans l'Etat concerné. Si l'on se réfère au cas de l'avocat allemand, cette dernière exigence a son utilité. La législation allemande permettrait fort bien, par le jeu de article 3 (2) BRAO, d'opérer entre conseil en brevets et avocat une répartition des tâches qui conduirait à interdire à l'avocat d'agir en qualité de mandataire dans les procédures de dépôt de demandes et d'examen des demandes devant l'Office allemand des brevets. Dans d'autres Etats contractants, la législation nationale permettrait également une telle répartition. Il était donc nécessaire de prévoir la disposition figurant dans le deuxième membre de phrase de la première phrase de l'article 134 (7) CBE, puisque la législation nationale peut dans une certaine mesure interdire même à l'avocat d'agir en qualité de mandataire dans le domaine des brevets. Cette disposition vise à empêcher qu'un "Rechtsanwalt", "legal practitioner" ou "avocat" ne puisse plus facilement agir en qualité de mandataire devant l'OEB qu'il n'est habilité à le faire devant l'office national des brevets.

L'article 134 (7) CBE constitue donc une dérogation visant uniquement la profession d'avocat sous les appellations diverses qui lui ont été données dans chacun des Etats contractants. Il n'est pas admissible de transposer dans le système juridique allemand l'expression "legal practitioner" utilisée dans le système juridique anglo-saxon en la traduisant par "Rechtspraktiker" (praticien du droit), et d'en conclure qu'il peut exister un droit de représentation en dehors de la profession d'avocat. Selon l'interprétation authentique qui en a été donnée lors de la Conférence diplomatique de Munich, l'expression "legal practitioner" englobe en Grande-Bretagne les professions de "solicitor" et de "barrister" (procès-verbaux M/PR/I, point 805). Pour trouver des professions comparables dans d'autres Etats contractants, il faut chercher des équivalents sous les rubriques "Rechtsanwalt" - "solicitor/barrister" - "avocat", en prenant pour seul critère le pouvoir de représentation général exercé auprès des tribunaux de l'Etat concerné par les membres de la profession en question. L'article 134 (7) CBE ne peut donc pas viser le conseil en brevets allemand, d'autant que cette profession est prise en compte dans les dispositions transitoires de l'article 163 CBE. Admettre la signification que le requérant veut donner à une expression figurant dans le texte anglais de l'article 134 (7) CBE serait remettre en question pour les conseils en brevets et pour tous les mandataires (autres que les avocats) qui exercent des activités dans le domaine des brevets nationaux les principes énoncés aux articles 134 (1) à (6) et 163 CBE. Un conseil en brevets selon le droit national ne peut donc - quels que soient sa qualification professionnelle et ses pouvoirs de représentation au niveau national dans le domaine des brevets - être considéré comme "legal practitioner" (avocat) au sens de l'article 134 (7) CBE, ni, par conséquent, être agréé comme mandataire près l'Office européen des brevets.

6. L'interprétation qui vient d'être donnée par la Chambre ne va pas non plus à l'encontre du principe d'égalité. Il n'est pas nécessaire d'examiner ici comment il convient précisément d'entendre ce principe, et quelles conséquences juridiques doit entraîner son application dans le cadre de la Convention sur le brevet européen. Les avocats et les membres des professions comparables à celle de l'avocat dans les Etats contractants sont habilités par l'article 134 (7) CBE à agir en qualité de mandataires près l'OEB - non pas en considération de la personne de l'avocat pris individuellement, mais en considération de l'institution qu'est la profession d'avocat en tant que telle. Aux termes de la loi allemande, l'avocat est un organe de la justice, doté en tout état de cause d'un pouvoir de représentation général. Ceci vaut également par analogie dans les autres Etats contractants. Il ne peut donc être considéré que l'article 134 (7) CBE viole le principe d'égalité entre avocats et conseils en brevets. Même au niveau national, il existe entre ces deux professions des différences du point de vue de leurs pouvoirs de représentation en matière de brevets.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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