J 0015/88 (Taxes de revendication) of 20.7.1989

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1989:J001588.19890720
Date de la décision : 20 Juillet 1989
Numéro de l'affaire : J 0015/88
Numéro de la demande : 87108792.0
Classe de la CIB : C12P 21/00
Langue de la procédure : EN
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : NEORX
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.1.01
Sommaire : 1. Un demandeur a normalement le droit de déduire l'objet de la demande de n'importe quelle partie de la description, des revendications ou des dessins qui ont été déposés initialement. Toute limitation de ce droit par une disposition doit être interprétée étroitement pour pouvoir être considérée comme valable. Il s'ensuit que la règle 31 (2) CBE (abandon de revendications) doit être appliquée prudemment et dans des limites raisonnables.
2. Si une demande telle que déposée comporte ce qui peut être considéré à l'évidence comme des revendications au sens de l'article 84 CBE, a fortiori si celles-ci figurent dans une partie de la demande dont le titre indique qu'elle contient des revendications et si elles renvoient les unes aux autres en tant que revendications, il est raisonnable de supposer aux fins de l'examen de la demande avant la recherche qu'il s'agit effectivement des revendications qui sont voulues par le demandeur et que les éléments figurant dans d'autres parties de la demande ne constituent pas de telles revendications, quels que soient leur forme ou leur fond.
3. C'est seulement dans le cas o" ces autres éléments ont la forme et le fond de revendications et où le demandeur révèle par sa manière de s'exprimer qu'ils doivent aussi être traités comme des revendications qu'une telle supposition ne sera pas raisonnable.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 R 31
European Patent Convention 1973 R 29
Mot-clé : Taxes de revendication - abandon de revendications
Abandon de revendications
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
J 0029/88
J 0025/89
J 0028/89
T 0490/90

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 87 108 792.0 a été déposée au nom d'une compagnie américaine, le 19 juin 1987. Cette demande revendiquait la priorité de deux demandes antérieures déposées aux Etats-Unis.

La demande, telle que déposée, contient une description suivie d'une partie intitulée "Caractéristiques préférées de l'invention" (comprenant 117 "clauses" numérotées) et d'une partie intitulée "Revendications", comportant 13 revendications.

Les taxes de dépôt, de recherche et de désignation ont été payées à la date de dépôt. De plus, en conformité avec la règle 31 (1) CBE, trois taxes de revendication ont été acquittées à cette date.

II. Le 7 août 1987, la section de dépôt a écrit au mandataire du demandeur pour lui indiquer que l'examen qu'elle avait effectué en application de l'article 91 (2) CBE avait révélé que les taxes relatives à 117 "revendications" supplémentaires annexées à la description n'avaient pas encore été acquittées comme l'exige la règle 31 (1) CBE, et que celles de ces revendications pour lesquelles les taxes n'auraient pas été payées dans les délais requis seraient réputés abandonnées, conformément à la règle 31 (3) (maintenant règle 31 (2)) CBE. La section de dépôt estimait en effet que la demande comportait en réalité un lot de 117 revendications supplémentaires annexées à la description, bien que le demandeur les ait qualifiées de "caractéristiques préférées de l'invention".

La section de dépôt a renvoyé à la décision rendue le 6 mars 1987 dans l'affaire J 05/87 (JO OEB 1987, 295), en soulignant qu'il y était dit que les dispositions concernant la forme et le contenu de la description et des revendications (règles 27 et 29 CBE) doivent être dûment respectées pour que le système du brevet européen puisse fonctionner correctement. Selon elle, il convenait par conséquent que le demandeur fasse figurer dans la demande, en tant que revendications, les "clauses" constituant l'objet du litige, pour ménager la possibilité d'en faire la base de l'examen quant au fond.

III. Le mandataire du demandeur a répondu par un télex reçu le 6 octobre 1987 (dûment confirmé par une lettre), dans lequel il demandait que la notification de la section de dépôt en date du 7 août 1987 soit retirée et que les 117 taxes de revendication supplémentaires qu'il avait payées, sous toutes réserves, le 7 octobre 1987, pour ne pas encourir la perte de ses droits soient remboursées.

Il a soutenu que la décision citée J 05/87 n'était pas applicable, au motif que les faits dans la présente espèce et les faits de cette affaire n'étaient pas identiques, en particulier parce que, dans le texte de la présente demande, n'apparaissaient ni le terme "revendications" (dans la partie intitulée "Caractéristiques préférées"), ni la déclaration spécifiant que les caractéristiques préférées étaient "présentées en revêtant la forme de revendications", déclaration que contenait par contre la demande faisant l'objet du litige dans la décision citée.

Le mandataire a également soutenu qu'en tout état de cause, des propositions identiques à celles qui étaient incriminées auraient pu aussi bien être placées, en tant qu'énoncés de l'invention, au début de la description, auquel cas aucune taxe de revendication n'aurait pu être exigée.

IV. Le 3 mars 1988, la section de dépôt a rendu une décision rejetant la demande de remboursement des taxes de revendication payées pour les 117 "revendications", aux motifs 1) que c'est toujours la teneur du texte et non la forme et le titre d'une partie d'une demande de brevet qui détermine de quelle partie il s'agit en réalité, et 2) qu'il importe d'observer les règles 27 et 29 CBE.

Elle a déclaré qu'un demandeur ne peut à son gré se dispenser de se conformer à ces règles et présenter sa demande d'une manière qui aille à l'encontre des intentions et des dispositions du réglement d'exécution de la CBE, en vue de tourner la règle 31 (1) CBE et l'obligation de payer les taxes de revendication.

Vu que la demande comprend un total de 130 revendications, les 120 taxes de revendication qui ont été payées ne peuvent être remboursées.

V. Le demandeur a introduit un recours et déposé un mémoire exposant les motifs du recours le 27 mai 1988. Il a également dûment acquitté la taxe de recours.

VI. Au cours d'une procédure orale qui a eu lieu le 8 mars 1989, le mandataire du requérant a fait observer qu'il n'existe pas de règle dans la CBE qui établisse clairement ce qui doit être interprété comme étant une revendication, et qu'en vertu de l'article 69 CBE, on peut même affirmer qu'on ne saurait placer des revendications dans la description, celle-ci constituant une autre partie de la demande.

Selon lui, la présente espèce est distincte de l'affaire J 05/87.

Les énoncés de l'invention que la section de dépôt a considérés comme des revendications dans la présente demande ne sont en fait que des énoncés qui auraient pu être placés au début de la description ; l'OEB n'était donc pas fondé à exiger le paiement de taxes de revendication pour ces énoncés.

Contrairement à l'opinion de la section de dépôt, la pratique qui consiste à intégrer dans la description de la demande de brevet européen la teneur de revendications empruntées à une demande américaine ouvrant le droit de priorité n'a absolument pas pour but de se soustraire à l'obligation de payer des taxes de revendication.

En fait, les mandataires agréés près l'OEB doivent faire face au problème suivant : ils reçoivent parfois une demande d'origine américaine si peu de temps avant la date limite du dépôt qu'il leur est difficile d'apporter des modifications importantes au texte avant le dépôt de la demande, et il existe le risque considérable de perdre par mégarde et de manière irrémédiable certains éléments de l'objet de la demande si la teneur des revendications de la demande américaine n'est pas reprise dans la demande déposée. C'est ce qui s'est passé dans la présente espèce. Un mandataire qui dispose d'assez de temps et qui en a la possibilité - ce qui devrait être le cas pour les demandes euro- PCT - s'emploiera à remanier la description de manière à la rendre plus appropriée à un dépôt de demande de brevet européen.

VII. Le mandataire du requérant a demandé l'annulation de la décision attaquée et le remboursement des 117 taxes de revendication.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. La Chambre accepte l'explication fournie par le mandataire du requérant au sujet des motifs de l'inclusion dans la demande des 117 "clauses" ainsi que la déclaration selon laquelle le but visé n'avait pas été de tourner la règle 31 CBE de la manière dont on a pu le prétendre ou d'une autre manière. Cependant la présente affaire ne concerne pas tant les intentions subjectives que celles qui sont déductibles de l'état objectif d'une demande de brevet telle que la reçoit la section de dépôt.

3. Le présent recours soulève des questions qui ont fait l'objet de plusieurs recours en instance devant la Chambre de recours juridique et qui méritent un examen approfondi parce qu'elles sont manifestement la source de difficultés aussi bien pour les demandeurs que pour la section de dépôt et les divisions de la recherche de l'OEB.

4. Comme la Chambre de recours juridique l'a indiqué dans l'affaire J 09/84 (JO OEB 1985, 233), l'obligation d'acquitter les taxes de revendication (règle 31 (1) CBE), loin de constituer une disposition purement fiscale, vise essentiellement à maintenir le nombre de revendications dans des limites raisonnables (cf. règle 29 (5) CBE), en particulier aux fins de la recherche européenne.

5. Dans l'affaire J 05/87 (JO OEB 1987, 295), la Chambre a dû pour la première fois se poser la question de savoir si une annexe complétant la description d'une demande de brevet européen et comportant des revendications empruntées à une demande américaine (au nombre de 33) devait être considérée au même titre que des revendications aux fins de la règle 31 (1) CBE. Dans les circonstances de l'affaire, la Chambre a décidé qu'il s'agissait bien de revendications pour lesquelles des taxes de revendication devaient être acquittées. Le fondement de cette décision, qui a corroboré à l'époque l'avis de la section de dépôt, était double, à savoir 1) que l'annexe en question semblait, tant au point de vue de la forme que du fond, consister uniquement en des revendications au sens de l'article 84 CBE et de la règle 29 CBE, et 2) que cette annexe, qui correspondait point par point aux revendications de la demande américaine ouvrant le droit de priorité, avait été ajoutée pour ménager la possibilité de faire de son contenu la base de l'examen quant au fond. (Dans le mémoire exposant les motifs du recours, le requérant avait de fait lui-même formellement admis le second point et soutenu que ladite annexe contribuait à faciliter la tâche de la division de la recherche).

6. Un demandeur qui refuse de payer les taxes de revendication exigées s'expose à ce que les caractéristiques qui étaient contenues dans une revendication réputée abandonnée en application de la règle 31 (2) CBE (règle numérotée 31 (3) avant la décision du Conseil d'administration en date du 5 juin 1987, JO OEB 1987, 276) et qui ne figurent parallèlement ni dans la description, ni dans les dessins, soient exclues de toute possibilité de réinsertion ultérieure dans la demande et en particulier dans les revendications. Cet aspect, sur lequel le mandataire du requérant a fortement insisté, a également été mis totalement en évidence dans les communautaires de Teschemacher parues dans le Münchner Gemeinschaftskommentar, 7eme fascicule, mai 1985, p. 70, point 138.

7. La possibilité d'un abandon forcé de l'objet de la demande en vertu d'une disposition du réglement d'exécution (règle 31 (2) CBE) introduite dans le but d'assurer l'observation d'une autre disposition de ce même règlement (règle 29 (5) CBE, première phrase) semble être plutôt en contradiction avec les principes normatifs supérieurs (cf. article 164 (2) CBE) qui découlent des articles 52 (1) CBE et 123 (2) CBE pris conjointement. Un demandeur a normalement le droit de déduire l'objet de la demande de n'importe quelle partie de la description, des revendications ou des dessins qui ont été déposés initialement. La Chambre de recours juridique est d'avis que toute limitation de ce droit par une disposition doit être interprétée étroitement pour être considérée comme valable. Il s'ensuit que la règle 31 (2) CBE doit être appliquée prudemment et dans des limites raisonnables.

8. Si une demande telle que déposée comporte ce qui peut être considéré à l'évidence comme des revendications au sens de l'article 84 CBE, a fortiori si celles-ci figurent dans une partie de la demande dont le titre indique qu'elle contient des revendications et si elles renvoient les unes aux autres en tant que revendications, il est raisonnable de supposer aux fins de l'examen de la demande avant la recherche qu'il s'agit effectivement des revendications qui sont voulues par le demandeur et que les éléments figurant dans d'autres parties de la demande ne constituent pas de telles revendications, quels que soient leur forme ou leur fond. C'est seulement dans le cas où ces autres éléments ont la forme et le fond de revendications et où le demandeur révèle par sa manière de s'exprimer qu'ils doivent aussi être traités comme des revendications (et même qu'ils méritent toute l'attention de la division de la recherche) qu'une telle supposition ne sera pas raisonnable ; or, s'il est vrai qu'il en a été ainsi dans l'affaire J 05/87, ce n'est pas le cas dans la présente espèce.

9. Certes, les 117 "clauses" en litige dans la présente espèce sont numérotées et disposées comme des revendications doivent l'être aux fins de la règle 29 CBE et, effectivement, elles semblent définir des éléments de l'invention en indiquant des caractéristiques techniques ; il n'en reste pas moins qu'elles n'ont jamais été évoquées en tant que revendications, qu'il existe ailleurs dans la demande des revendications qui elles et elles seules sont désignées comme telles et que dix-sept "clauses" (numérotées 1, 19, 37, 55 à 64, 76, 94 et 105) ont leur contrepartie dans ces mêmes revendications. Il n'est pas raisonnable de supposer que le requérant ait eu l'intention de faire de ces dix-sept "clauses" des revendications ; elles ne constituent pas davantage une surcharge de travail pour la division de la recherche. Les dix-sept clauses en question n'étant pas des revendications, il ressort d'autant plus à l'évidence que les précisions données dans les 100 autres "clauses" correspondent à un résumé de caractéristiques préférées additionnelles.

10. La règle 31 (2) CBE, deuxième phrase ne s'oppose pas au remboursement du montant de 7 605 DEM payé au titre de taxes de revendication pour les 117 "clauses" ; en effet, les "clauses" dans la demande de brevet européen n° 87 108 792.0 n'étant pas des "revendications donnant lieu au paiement de taxes", les taxes n'avaient pas à être acquittées. Elles ont été exigées à tort et doivent être remboursées.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. Le remboursement des 117 taxes de revendication d'un montant de 7 605 DEM est ordonné.

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