J 0012/80 (Correction d'erreurs) of 26.3.1981

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1981:J001280.19810326
Date de la décision : 26 Mars 1981
Numéro de l'affaire : J 0012/80
Numéro de la demande : 79103186.7
Classe de la CIB : -
Langue de la procédure : DE
Distribution :
Téléchargement et informations
complémentaires :
PDF pas disponible
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : DE | EN | FR
Versions : OJ
Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Hoechst
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.1.01
Sommaire : 1. La correction d'erreurs dans la requête en délivrance d'un brevet européen n'est pas exclue lorsque la requête en rectification est formée immédiatement, alors même que la demande est publiée sans la correction requise et pendant qu'un recours contre le rejet de la requête en correction est en instance de règlement.
2. Lorsqu'un tiers a commencé à exploiter l'invention au cours de la période se situant entre la publication de la demande pas encore rectifiée et la publication de la correction, la décision, en ce qui concerne ses droits, doit être laissée aux tribunaux nationaux compétents; la CBE ne contient pas, pour de tels cas, de disposition expresse pour la protection des tiers analogue à celle prévue par l'article 122 (6) de la CBE.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 R 88
Mot-clé : Correction d'erreurs
Publication d'une demande pendant la procédure de recours
Protection des tiers
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
J 0003/83
J 0004/97
J 0017/99
J 0013/02
J 0014/04
J 0016/08
T 0726/93
T 0972/93
T 0973/93
T 0079/07

Exposé des faits et conclusions

I. Le 29 août 1979, la requérante a déposé une demande de brevet européen en désignant sept Etats contractants, et un Etat non-contractant, l'Espagne. Les taxes de désignation pour huit Etats ont été payées le même jour. La demande revendiquait la priorité d'une demande nationale allemande déposée le 6 septembre 1978.

II. Deux jours plus tard, le 31 août 1979, la requérante a adressé à l'Office européen des brevets par télex, un message, requérant la correction d'une erreur dans le formulaire de requête en délivrance à savoir le remplacement de la désignation de l'Espagne par celle de la Suisse, un Etat contractant; le télex a été dûment confirmé par une lettre.

III. Le 20 septembre 1979, la requérante a fait connaître à l'Office, par écrit, les raisons pour lesquelles, selon elle, la correction requise devait être autorisée. Elle a fait parvenir une déclaration sous la foi du serment d'une secrétaire employée à son bureau des brevets, accompagnée de documents pertinents indiquant que cette dernière avait reçu des instructions pour mentionner la Suisse sur le formulaire de requête en délivrance de brevet européen et qu'une demande nationale devait être déposée en Espagne. Il était soutenu que la secrétaire avait confondu les instructions écrites reçues.

IV. Ces instructions comprenaient, en ce qui concerne les demandes à faire pour l'étranger, un programme dactylographié daté du 27 juin 1979, qui ne mentionnait ni l'Espagne ni la Suisse. D'une note dactylographiée datée du 11 juillet 1979, il résulte toutefois, qu'à la suite d'une discussion avec les inventeurs, il avait été décidé qu'une demande nationale devait être déposée en Espagne, et que la Suisse devait être comprise dans les Etats à désigner dans la demande de brevet européen. Les noms de ces Etats avaient été ajoutés, à l'encre rouge, au programme concernant les demandes pour l'étranger du 27 juin 1979, avec renvoi à la note du 11 juillet 1979.

V. Dans sa déclaration, la secrétaire expose qu'elle se sentait indisposée à l'époque, et attribue son erreur à ce fait. Des photocopies de certificats médicaux jointes à la déclaration établissent qu'elle avait été absente du service, pour raison de santé, du 6 août au 14 septembre 1979.

D'une autre déclaration écrite datée du 12 mars 1981, adressée en réponse à une demande de renseignements de la chambre de recours juridique, il ressort que la secrétaire avait préparé les documents concernant la demande peu avant le début de son absence de son poste et non, comme indiqué dans sa première déclaration, le 27 août 1979.

VI. Le 3 janvier 1980, la section de dépôt de l'Office européen des brevets a rendu la décision attaquée. La requête en rectification était rejetée aux motifs que l'article 79 de la CBE excluait la désignation ultérieure d'Etats, et qu'une correction de la demande, conformément à la règle 88 de la CBE, ne pouvait être accordée, dès l'instant qu'au moment du dépôt de la demande, aucune circonstance n'était connue ou aurait dû l'être, permettant d'admettre une erreur éventuelle.

VII. Par lettre du 3 mars 1980, la requérante a formé un recours contre cette décision. Elle a requis l'annulation de la décision attaquée et l'adjonction de la Suisse aux Etats désignés. La taxe de recours a dûment été payée et le mémoire exposant les motifs du recours du 29 avril 1980, a été déposé en temps utile.

VIII. Dans la motivation de son mémoire, la requérante expose que la correction demandée a été requise pendant le délai de priorité prévu par la Convention de Paris. Elle se réfère à l'article 125 de la CBE et soutient que les principes de droit judiciaire généralement admis dans les Etats contractants devraient lui être appliqués. Elle soutient également que, contrairement à l'interprétation de la section de dépôt, la règle 88 de la CBE devrait trouver application. Il y aurait une claire discordance entre le paiement de huit taxes de désignation et la désignation de sept Etats contractants et d'un Etat non-contractant.

IX. Dans un mémoire complémentaire, la requérante renvoie à la décision J 08/80 rendue par la chambre de recours juridique et publiée en septembre 1980.

X. La demande de brevet européen a été publiée le 11 juin 1980. Parmi les Etats désignés ne figuraient ni l'Espagne, ni la Suisse.

Motifs de la décision

1. Le recours satisfait aux conditions des articles 106 à 108, et à celles des règles 1(1) et 64 de la CBE; il est en conséquence recevable.

2. La chambre de recours juridique a estimé, dans le recours n° J 08/80, le 18 juillet 1980, (Journal officiel de l'OEB 1980, page 293), que la règle 88 de la CBE n'exclut pas la correction d'une erreur dans la désignation des Etats dans une demande de brevet européen, même lorsque cette erreur ne s'impose pas à l'évidence.

3. La chambre partage l'opinion de la requérante selon laquelle il existe une contradiction manifeste, dans la demande de brevet, entre les taxes de désignation payées et les Etats désignés. Cependant, il ne peut pas être raisonnablement prétendu que la correction demandée s'imposerait à l'évidence. La question de savoir si la requête peut être admise dépend, par conséquent, de la façon dont la chambre apprécie les faits, notamment les documents présentés par la requérante avec sa lettre du 20 septembre 1979.

4. Des documents présentés, il ressort qu'à l'origine il n'était envisagé de demander la protection d'un brevet pour l'invention en cause ni en Espagne, ni en Suisse. Mais la note du 11 juillet 1979 montre toutefois qu'il avait été décidé qu'une demande nationale devait aussi être déposée en Espagne et que la Suisse devait être ajoutée à la liste des Etats à désigner dans la demande de brevet européen.

5. Ainsi, il est établi qu'avant le dépôt de la demande la requérante avait eu l'intention de désigner la Suisse dans la demande de brevet européen envisagée. Le fait d'avoir omis cette désignation résulte d'une confusion et non d'un changement d'intention de la requérante. La mention de l'Espagne dans la requête en délivrance du brevet qui est complètement dépourvue de sens, conjointement avec le paiement de huit taxes de désignation en fournissent la preuve.

6. Le fait qu'il s'agissait d'une erreur, la nature de cette erreur et la correction qui a été requise sont, par conséquent, manifestes. Il n'y a ni équivoque, ni ambiguïté en ce qui concerne les preuves. Il apparaît que tous les faits pertinents ont bien été présentés à la chambre de recours.

7. Dans le premier recours de ce genre où la chambre a statué (J 08/80), il a été indiqué que dès lors que la requête en rectification avait été introduite immédiatement, il n'était pas nécessaire de se demander si le droit d'obtenir une correction était sujet à certaines limitations naturelles. Dans le présent recours, il n'y a pas le moindre doute que la requête en correction a été déposée immédiatement, en fait dans les deux jours après le dépôt de la demande et avant l'expiration du délai de priorité.

8. La demande ayant été publiée sans la désignation de la Suisse, pendant que le présent recours était en instance de règlement, le risque existe, qui ne peut être évité, qu'un tiers ait commencé à utiliser l'invention en Suisse, se fiant à la non-désignation de cet Etat. Ainsi, dans ce cas, la question de l'intérêt public concernant la sécurité juridique se pose. Toutefois, la requérante n'ayant pas le contrôle de la publication, il serait injuste de la priver du bénéfice de la correction de l'erreur, à laquelle, par ailleurs, elle a en principe droit, à raison de la publication intervenue dans l'intervalle.

9. Il est vrai que la règle 88 de la CBE ne contient aucune disposition formelle concernant la protection des tiers comme celle que l'on peut trouver dans l'article 122 (6) de la CBE permettant de régler des situations semblables survenant lors d'une restitutio in integrum. En l'absence d'une disposition spécifique dans la Convention sur le brevet européen, la solution de tous les problèmes du droit des tiers doit être laissée aux tribunaux nationaux compétents.

10. Pour les motifs exposés ci-dessus la chambre considère que la requête en correction, dans ce cas particulier, est justifiée.

11. La décision attaquée est fondée sur une interprétation erronée de la règle 88 de la CBE et des faits pertinents de la cause et doit donc être annulée.

12. Une requête de remboursement de la taxe de recours basée sur la règle 67 de la CBE n'a pas été présentée et les circonstances ne justifieraient pas un tel remboursement.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit:

1. La décision de la section de dépôt de l'Office européen des brevets du 3 janvier 1980 est annulée.

2. Il est ordonné que la requête en délivrance déposée pour la demande de brevet européen n° 79 103 186.7 sera rectifiée par adjonction de la désignation de la Suisse.

Quick Navigation